Perspectives Economiques et Financières
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Perspectives Economiques et Financières N° 86 - 3 mai 2007 SYNTHESE SCENARIO ECONOMIQUE La croissance mondiale présente à la fois des signes de modération réelle et d'effervescence financière. Les liquidités ne risquent pas d'être brutalement asséchées ; le ralentissement en cours sera temporaire. Les cours des matières premières et du fret restent tendus. La croissance reprendra en cours d'année, d'abord générale, puis de plus en plus sélective à mesure que renaîtront les tensions. Aux Etats-Unis, la croissance du premier trimestre n'a été que de 1,3 % en rythme annualisé, encore pénalisée par le logement. L'investissement a stagné mais la consommation est restée soutenue. L'activité a quitté la zone de surchauffe, permettant un début de désinflation. Les commandes à l'industrie se redressent mais la confiance des consommateurs fléchit. En Europe, la croissance est régulièrement revue en hausse depuis l'automne dernier, tirée par l'Allemagne. La France et le Benelux vont aussi en bénéficier. Le moral est particulièrement élevé dans l'industrie et gagne les consommateurs. La hausse des taux d'intérêt finira cependant par fragiliser les pays méditerranéens, fortement endettés. Le Japon confronté au ralentissement mondial, n'est soutenu que par une politique monétaire très accommodante, ce qui prolonge des sorties de capitaux de plus en plus préjudiciables à l'équilibre mondial. Les pays émergents conservent de bonnes perspectives pour 2007 et 2008 mais l'Asie reste suspendue aux modalités d'atterrissage de la Chine. BFT PREVISIONS FINANCIERES Les banques centrales des grands pays développés constatent la baisse de l'aversion pour le risque et réitèrent leurs avertissements. La remontée du pétrole a plus de chance d'être répercutée dans les prix dans des économies proches de leur potentiel de production. Le taux des fonds fédéraux monterait à 5,50 % en décembre et y resterait en mars 2008. Le taux directeur de la BCE s'établirait à 4,25 % à fin décembre et atteindrait 4,50 % en mars 2008. Celui de la Banque d'Angleterre serait relevé à 5,75 % d'ici à décembre et resterait à ce niveau en mars 2008. Les taux obligataires se sont détendus aux Etats-Unis mais dépassent leurs pics antérieurs en zone euro. Les rendements des T-notes 10 ans se situeraient à 5,25 % en décembre et 5,50 % en mars 2008 et ceux de l'OAT-10 ans à 4,50 % et 4,65 %, respectivement. Les marchés des changes ont momentanément délaissé le dollar. L'euro vaudrait 1,30 dollar et 0,68 livre en décembre, puis 1,30 et 0,69 livre en mars 2008. Le dollar vaudrait 116 yens à ces deux échéances. La correction des marchés d'actions, début mars, a été totalement gommée grâce aux bons résultats trimestriels et aux fusions acquisitions. Une rechute temporaire est attendue, hors Japon, en fin d'année. 11 avenue d’Iéna - BP 2013 - 75761 Paris Cedex 16 01 40 69 90 90 Fax 01 47 20 05 20 - Internet : www.bft.fr Rédacteurs : Philippe SIGOGNE, Stéfan NARBUTAS, Hugues DOUMENC, Khiem LE ENVIRONNEMENT ECONOMIQUE Vue d’ensemble La situation économique mondiale présente à la fois des signes de modération réelle et d'effervescence financière. D'un côté, l'activité américaine a nettement ralenti, la croissance japonaise marque une pause et de nombreux pays asiatiques et latino-américains n'affichent plus le même dynamisme qu'il y a un an. De l'autre, les marchés, un moment déstabilisés par la montée des défauts de paiement liés à l'immobilier américain et par les craintes de tarissement des sorties de capitaux japonais, se sont rapidement ressaisis. Le resserrement des politiques monétaires n'a pas encore atteint un stade contraignant l'offre de crédit. Même si les banques font davantage attention à la solvabilité des emprunteurs potentiels, et peuvent à ce titre être plus sélectives dans la distribution des prêts aux particuliers, elles restent prêtes à satisfaire les demandes des entreprises dont la situation financière s'est considérablement assainie depuis cinq ans. En conséquence, les moyens financiers mis à la disposition de l'économie mondiale restent abondants et ne courent pas le risque d'être brusquement asséchés. C'est là une énorme différence par rapport à la situation qui prévalait à l'approche de l'an 2000 : on peut aujourd'hui diagnostiquer un ralentissement typique de milieu de cycle, comme il s'en produit en moyenne tous les dix ans, mais celuici ne peut revêtir qu'un caractère temporaire. La production industrielle, qui reste le meilleur indicateur des fluctuations conjoncturelles, a ralenti au cours des trois derniers trimestres. Son glissement annuel est ainsi revenu de près de 5 % en août dernier vers 3,5 % en mars 2007 pour les pays développés, et de près de 11 % vers 8,5 % pour les émergents. Selon l'indicateur avancé calculé par l'OCDE, il devrait revenir vers 2 % dans cette zone, ce qui implique une quasi-stabilité de l'activité d'ici à l'été. La production des pays émergents serait en juin-juillet supérieure d'environ 3 % à celle de janvier-février. Le ralentissement observé jusqu'à présent n'a eu qu'un impact limité sur les cours des matières premières et notamment des métaux industriels : ceux-ci n'ont en effet baissé que temporairement de novembre à février, en partie sous l'effet du Nouvel An chinois, puis ont comblé leur retard en mars. La pause constatée en avril est trop récente pour annoncer avec certitude une nouvelle phase de repli ; la structure actuelle de la demande ne s'y prête peut-être pas, le tassement asiatique provenant plus de la phase finale de baisse du cycle électronique que des activités traditionnelles plus consommatrices de produits de base. Le retour des cours du pétrole au-dessus de 65 dollars le baril ne peut par ailleurs être intégralement imputé aux tensions avec l'Iran. L'envolée des tarifs de fret maritime, qui retrouvent leurs plus hauts de 2004, ne va pas non plus dans le sens d'une atténuation prévisible des tensions. Dans un monde où la croissance va reprendre et rester soutenue en 2008 à 4,9 %, soit autant qu'en 2007, et seulement un demi-point en deçà de 2006, si l'on s'appuie sur les prévisions du FMI publiées en avril, la question de sa répartition va devenir primordiale. Lorsque l'activité dépasse son potentiel de moyen terme, la compétition pour les ressources réelles et financières s'avive au détriment des économies les moins efficaces et les plus endettées. L'affaire du carry trade en est la principale illustration : le réveil du Japon ne manquera pas de ramener les Etats-Unis à plus de sobriété en matière d'endettement extérieur. A l'échelle européenne, le retour de l'Allemagne annonce la fin de l'argent facile pour des pays comme l'Espagne. BFT Les Etats-Unis La croissance américaine a de nouveau ralenti au premier trimestre 2007, le Pib ne progressant que de 1,3 % en rythme annualisé. La consommation privée des ménages contribue pour 0,7 point à une évolution trimestrielle qui n'atteint au total que 0,3 point. A l'opposé, le logement l'ampute encore de 0,2 point. Les dépenses publiques ont peu augmenté et les dépenses des entreprises ont pratiquement stagné, un moindre stockage faisant plus que compenser une hausse de l'investissement limitée à 0,5 %. Enfin, le commerce extérieur a corrigé en baisse une part de sa forte contribution positive du quatrième trimestre 2006 ; les exportations ont un peu reculé alors que les importations ont annulé leur baisse de fin 2006. Sur un an, la hausse du Pib n'est plus que de 2,1 % et l'activité est enfin sortie de sa zone de surchauffe. Indicateur composite et croissance USA 12 10 indicateur avancé (g.an) 6 Pib (g.an, éch.dte) 5 8 4 6 4 3 2 2 0 -2 1 -4 -6 janv-98 0 janv-99 janv-00 janv-01 janv-02 janv-03 janv-04 janv-05 janv-06 La production industrielle a très légèrement fléchi en mars, du fait d'une baisse des services collectifs liée au climat doux, mais la production manufacturière a un peu augmenté et dépasse son pic d'août 2006. La production automobile s'est stabilisée et celle de biens de consommation non durables est en hausse de 4 % sur un an. La stagnation de l'équipement industriel contraste avec la bonne tenue de l'informatique et des communications. Les acheteurs manufacturiers confirment cette modération de l'activité et envisagent un volume de commandes un peu plus soutenu tout en étant à nouveau prudents sur l'investissement à venir. Les commandes de biens durables se sont de fait redressées en mars, hors transports, mais demeurent à 3 % en deçà de leur pic de juillet 2006. Les stocks progressent moins ; rapportés aux livraisons, ils restent inférieurs à leur tendance. Les acheteurs non manufacturiers sont moins optimistes qu'en début d'année. Le ralentissement économique commence à peser sur le moral des consommateurs. L'appréciation de la situation récente mesurée par le Conference Board va continuer de se dégrader, entraînant momentanément à la baisse les perspectives de revenus et d'emploi. Déjà, la hausse des effectifs n'atteint plus que 150 000 par mois contre 250 000, il y a un an. Les salariés sont un peu moins nombreux à quitter volontairement leur emploi pour en rechercher un autre ; la hausse des gains horaires est revenue de 4,3 % l'an en décembre à 4 % en mars 2007, alors que la hausse des prix à la consommation est remontée à 2,8 %. Les intentions d'achats de logement sont au plus bas depuis 1993, alors que les défauts se multiplient sur les compartiments à taux variable. La consommation pourrait bien reculer au cours du deuxième trimestre, son glissement annuel revenant vers les 2 % l'an. Page 2 Perspectives économiques et financières janv-07 3 mai 2007 ENVIRONNEMENT ECONOMIQUE L’Europe L'Union économique et monétaire a vu sa croissance 2007 constamment revue en hausse à partir de l'automne dernier. Evaluée au départ à 1,8 % par le consensus des économistes, elle est passée à 2 % en fin d'année et atteint à présent 2,4 %. L'Allemagne a connu les révisions les plus fortes, passant de 1,1 % à 2,1 % ; l'Italie a été relevée de 1,2 % à 1,8 % et l'Espagne conserve la tête des grands pays en passant de 2,9 % à 3,5 %. Ni la France ni les Pays-Bas ni la Belgique n'ont bénéficié de cette embellie, mais, par entraînement mutuel, leurs perspectives seront à leur tour rehaussées, d'autant que l'Allemagne pourrait faire encore mieux, les prévisions officielles tablant à présent sur 2,3 %. L'aisance financière globale permettra cette progression simultanée tant que les craintes d'inflation n'auront pas conduit la BCE à pratiquer une politique monétaire réellement restrictive. Ultérieurement, la croissance des uns se fera au détriment de celle des autres, les pays aux comptes les plus déséquilibrés éprouvant de plus en plus de difficultés à attirer les capitaux. L'Allemagne, grâce aux restructurations engagées depuis l'an 2000, l'emportera ainsi sur les pays méditerranéens, Italie, Espagne, Grèce et Portugal. Depuis 1998, veille de la création de l'euro, leurs taux de change effectifs se sont appréciés en moyenne de 10 % par rapport à l'ensemble de l'UEM, alors que celui de l'Allemagne se dépréciait de 13 % ; les déficits courants cumulés de l'Espagne, de la Grèce et du Portugal ont atteint entre 40 % et 75 % des Pib respectifs, stimulés par des taux d'intérêt réels négatifs en moyenne de 2002 à 2005. Au cours des huit dernières années, la productivité totale des facteurs, combinant travail et capital, a pratiquement stagné en Espagne alors qu'elle progressait de 7,5 % en Allemagne, soit le triple de l'Italie. Sur tous ces critères, la France se situe systématiquement dans la moyenne européenne, ce qui la met relativement à l'abri des reflux de capitaux. Le sentiment économique en zone euro n'a que marginalement fléchi en avril, restant ainsi proche du pic observé en 1998. Il est surtout soutenu par l'industrie, où la confiance a encore progressé, se situant au plus haut des vingt dernières années. Les carnets de commandes sont jugés particulièrement garnis et les stocks très faibles. Les taux d'utilisation des capacités de production ont encore augmenté à 84,8 %, atteignant un record historique en Espagne. Les perspectives à l'exportation se tassent pour les biens intermédiaires et de consommation mais s'élèvent pour les biens d'équipement, dans la lignée des commandes étrangères reçues par l'Allemagne jusqu'en février. La production industrielle, en hausse de 4,1 % sur un an en février, pourra donc encore se renforcer. Le moral des consommateurs se maintient à bon niveau, porté par la confiance des employeurs. La crainte du chômage continue de baisser alors que le taux de chômage est revenu à 7,3 % en mars, le plus faible niveau depuis mars 1982. Cependant, les perspectives financières personnelles ne progressent pas, non plus que les intentions d'achat de biens durables. En février, les ventes au détail ont été à peine supérieures à celles de janvier, elles-mêmes en net retrait de décembre du fait de la TVA allemande ; elles n'auront que modérément augmenté en mars. La consommation des ménages aura pratiquement stagné au premier trimestre, compte tenu d'un recul de 3,5 % des immatriculations automobiles. La croissance sera donc seulement soutenue par les entreprises et reviendra vers un rythme proche de 2,5 % l'an d'ici l'été. 3 mai 2007 Le Japon L'économie japonaise subit d'autant plus nettement le ralentissement mondial que la demande intérieure n'est pas prête à prendre le relais. Les entreprises continuent de mener des politiques salariales austères qui brident la consommation ; elles tirent parti du vieillissement de la population, qui substitue de manière accélérée des juniors à faible rémunération à des seniors aux salaires gonflés par l'ancienneté. L'Etat poursuit la restauration des équilibres budgétaires en réduisant, année après année, les avantages fiscaux accordés durant la crise. Faute de stabilisateur automatique, il n'est donc pas surprenant de voir, d'une part l'activité fluctuer amplement, d'autre part la déflation persister. La politique monétaire demeure ainsi le seul élément de soutien à l'économie, avec les inconvénients que l'on sait : sorties de capitaux excessives et pression à la baisse du yen. La secousse provoquée en février par la modeste hausse de taux décidée par la Banque du Japon indique bien quelle instabilité a pris corps et la brutalité éventuelle qu'impliquerait pour les monnaies une véritable reprise économique de l'archipel. Pib et indice d’activité au Japon 110 indice d'activité 590 Pib (éch.dte) 570 550 105 530 100 510 490 95 470 janv-98 janv-99 janv-00 janv-01 janv-02 janv-03 janv-04 janv-05 janv-06 janv-07 La production industrielle s'est stabilisée de janvier à mars après avoir reculé de 2,3 % au tournant de l'année. La construction de machines et celle de matériels de transport ont perdu environ 5 % et l'équipement électrique près de 10 %. Sur un an, la production industrielle ne progresse plus que de 2,8 % et pourrait se situer en retrait de l'an passé d'ici à l'été, selon l'indicateur avancé de l'OCDE. Les commandes totales de machines oscillent sans tendance depuis plus d'un an ; hors bateaux, elles se sont redressées en janvierfévrier après une correction en baisse à l'automne 2006. Cette amélioration récente provient d'un rebond exceptionnel de la part des administrations puis d'un réveil à l'exportation qui demande à être confirmé. Les livraisons à l'étranger n'ont que peu rebondi en mars après la trêve chinoise et ne marquent pratiquement pas de progrès depuis la mi-2006. La confiance des entreprises n'est encore que marginalement affectée par ce passage à vide. Tout au plus note-t-on une baisse de moral limitée des PME et des particuliers depuis un an. Le taux de chômage reste à son point bas de 4,0 % mais les effectifs de travailleurs permanents ne croissent plus que de 0,6 % l'an contre 1,2 % à la rentrée 2006, suivant ainsi la réduction du ratio offres / demandes d'emploi entamée en juillet dernier. La stabilité des ventes au détail et la rechute des immatriculations contribueront à freiner l'activité, ramenant le Pib en deçà de son potentiel. Page 3 Perspectives économiques et financières BFT ENVIRONNEMENT ECONOMIQUE Les pays émergents Les politiques monétaires Les pays émergents bénéficient encore de perspectives favorables pour 2007 et à peine moindres pour 2008. Tout au plus note-t-on de minimes révisions en baisse en Asie, imputables à une relative prudence concernant la Chine et l'Inde. L'aversion pour le risque, qui avait fait plonger les bourses à fin février, a été totalement effacée : les indices actions des émergents atteignent de nouveaux records en Asie et surtout en Amérique latine mais semblent moins dynamiques en Europe de l'Est. Les spreads de crédit, un moment élargis, renouent avec des niveaux historiquement bas. Production industrielle m/m-12, % 15 10 5 0 -5 ind. avancé OCDE -10 développés émergents janv-98 janv-99 janv-00 janv-01 janv-02 janv-03 janv-04 janv-05 janv-06 janv-07 En Asie, la pause occasionnée par le nouvel an chinois laisse place à un rebond, encore difficile à apprécier. En Chine, l'activité a été forte en mars, et la demande est jugée trop vigoureuse par les autorités. L'accélération de la monnaie et du crédit et le passage de l'inflation au-dessus de 3 % l'an a conduit à un nouveau relèvement des taux d'intérêt, fin mars. L'Inde a fait de même, avec une inflation dépassant les 6 %. En Malaisie et à Singapour, les politiques de change vont dans le sens d'une appréciation modérée. En Amérique latine, la tendance à l'appréciation des monnaies vis-à-vis du dollar se poursuit, en Argentine via une inflation que le gouvernement tente de masquer, faute de la maîtriser, et au Brésil via des entrées de capitaux attirés par une forte rémunération, le réveil de la demande et une révision en hausse de la croissance. Au Chili, la production industrielle, portée par le cuivre, progresse davantage que chez ses voisins. En Europe de l'Est, le sentiment économique est au plus haut d'une décennie dans la plupart des pays à l'exception de la Hongrie. Il est élevé en Tchéquie et exceptionnel en Pologne. Depuis 2002, la production industrielle progresse dans ces trois pays de, respectivement 7,5 % l'an, 8,5 % et plus de 9 %, contre 8,5 % en Turquie et près de 6 % en Russie. BFT Les banques centrales des grands pays développés constatent que les turbulences financières de fin février n'ont en définitive pas altéré en profondeur l'appétit des marchés ; cela les incite à réitérer leurs avertissements de prudence. La capacité des entreprises à répercuter les hausses de coûts dans les prix s'est renforcée, ce qui rend plus critiques les remontées de cours du pétrole et des autres matières premières. La Réserve fédérale prévoit que la croissance américaine s'installera en 2007 et 2008 en deçà de son rythme tendanciel ; la Banque d'Angleterre estime que la croissance britannique va rester proche de sa moyenne de long terme ; la BCE envisage, sans le dire expressément, que la croissance de l'UEM va dépasser son potentiel. Dans tous les cas, la vigilance à l'égard de l'inflation reste la règle, celle-ci étant soit proche soit audessus de l'objectif visé. Aux Etats-Unis, le comité de politique monétaire réuni le 21 mars avait maintenu le taux des fonds fédéraux à 5,25 %. Selon les minutes publiées le 11 avril, le risque de résistance de l'inflation reste le principal souci de la Fed mais la hausse des taux ne pouvait plus être citée comme la seule éventualité, compte tenu des incertitudes sur la croissance. Celles-ci proviendraient plus du comportement des investisseurs, jugé peu dynamique, que de celui des consommateurs. Le marché du travail qualifié reste relativement tendu. Les taux des fonds fédéraux seraient portés à 5,50 % à fin décembre et resteraient à ce niveau à fin mars 2008. La BCE observe que la croissance est conforme à ses prévisions et maintient son diagnostic : la politique monétaire reste accommodante, les taux sont modérés, la croissance de la monnaie et du crédit est vigoureuse et la liquidité ample. Il faudra donc agir fermement et à temps pour garantir la stabilité des prix à moyen terme. L'accent est mis sur les risques salariaux qui découleraient de la poursuite de la progression de l'emploi. A plus long terme, J.C. Trichet reconnaît que les menaces d'instabilité financière sont réelles et doivent être suivies de près. Dans l'immédiat, il ne souhaite pas modifier les attentes des marchés d'ici à l'été. Le taux de refinancement serait relevé à 4,25 % d'ici à fin décembre et atteindrait 4,50 % à fin mars 2008. La Banque d'Angleterre a décidé, le 5 avril, de maintenir le niveau de 5,25 % fixé en janvier, avec deux voix pour une hausse. La consommation pourrait mollir par moindre accès au crédit et modération de l'emploi. En revanche, l'investissement progresse plus, bénéficiant d'une forte rentabilité. L'indice CPI des prix à la consommation, diffusé le 17 avril, a franchi la limite supérieure des 3 % pour mars, déclenchant la procédure de justification à l'égard du ministre des finances. Le taux directeur serait relevé à 5,75 % d'ici à fin décembre et resterait à ce niveau en mars 2008. Page 4 Perspectives économiques et financières 3 mai 2007 LES MARCHES FINANCIERS Les taux d’intérêt FACTEURS DE HAUSSE FACTEURS DE BAISSE ZONE EURO ETATS-UNIS JAPON Î La baisse du chômage va redonner un pouvoir de négociation aux salariés. Î Le marché du travail qualifié reste tendu. Î La Banque du Japon retrouve une certaine attractivité. Î Les OPA et les dépenses d’équipement poussent les entreprises à s’endetter. Î Les marchés ignorent les Î La demande reprendra en fin risques de remontée des taux d’année. des fonds fédéraux à fin 2007 et au-delà. Î La BCE considère que le pic des taux d’intervention n’est pas encore atteint. Î L’investissement repartira au second semestre. Î Les taux seront entraînés par un regain de tensions aux Etats-Unis. Î L’inflation va rester modérée Î La crise de l’immobilier incite jusqu’à l’automne. les autorités monétaires à maintenir la liquidité. Î La Banque du Japon ne relèvera ses taux que très progressivement. Î La surévaluation de l’euro pousse aux gains de productivité. Î Le ralentissement de la consommation va peser sur les anticipations de taux. Î Les prix varieront peu en 2007. Î Les taux longs américains limitent la hausse des taux européens. Î Les capitaux étrangers vont continuer à affluer. Î La recherche de rendement continuera à peser sur les taux longs. Prévisions de taux EURO Court terme 3 mois interbancaire BFT Marché* ETATS-UNIS BFT 4,01 30-avr-2007 Marché* JAPON BFT 5,36 Marché* 0,67 déc 2007 4,35 4,35 5,60 5,05 0,95 0,91 mars 2008 4,55 4,36 5,63 4,87 1,20 1,01 Long terme Emprunt d’Etat 10 ans 4,25 30-avr-2007 4,68 1,63 déc 2007 4,50 4,29 5,25 4,70 2,00 1,74 mars 2008 4,65 4,29 5,50 4,71 2,20 1,78 * taux à terme implicites (forward) Page 5 3 mai 2007 Perspectives économiques et financières BFT LES MARCHES FINANCIERS Les marchés d’actions La correction de début mars a été totalement effacée ces dernières semaines par le ton plus conciliant adopté par la Fed et par une actualité particulièrement fournie en fusions acquisitions. Wall Street a atteint de nouveaux records, avec une saison de résultats trimestriels plutôt encourageante, ce qui a bénéficié à l'ensemble des grands marchés boursiers, à l'exception du Japon qui souffre d'un contexte local encore peu favorable à la reprise de la consommation. Cette progression des indices européens s'est réalisée malgré le renforcement de l'euro face au dollar (comme au yen) et la progression des cours du pétrole. Ils ont été soutenus par des statistiques économiques et des publications d'entreprises rassurantes, mais surtout par une nouvelle accélération des mouvements de concentration qui ont touché des secteurs très variés, dont la banque récemment. Aux Etats-Unis, le S&P500 et le Nasdaq Composite progressent respectivement (au 23 avril) de 4,4 % et 4,5 % depuis le début de l'année. Les small-caps poursuivent leur surperformance relative, comme l'indique le Russell 2000 (+5,1 %). Les Indice DOW JONES INDUSTRIALS depuis décembre 1997 en base 100 Dans la mesure où la hausse des taux courts américains, que nous prévoyons dans notre scénario macroéconomique, ne se concrétiserait que vers la fin de l'année, la bonne tenue du marché américain devrait se poursuivre encore quelques mois. Cependant, la perspective de cette relance de l'activité outreAtlantique et des risques inflationnistes qu'elle entraînera peut provoquer (aux alentours du dernier trimestre) un repli d'autant plus marqué de Wall Street que la tendance actuelle du consensus privilégie nettement une baisse des taux américains plutôt qu'une hausse. Nous maintenons de ce fait inchangés nos objectifs d'indices boursiers à l'horizon de fin décembre : 11700 pour le Dow Jones et 1340 pour le S&P 500. Après cette phase de correction, liée à la remontée des taux outre-Atlantique (courts et longs), le marché américain devrait reprendre progressivement le chemin de la hausse début 2008. Il sera porté par les perspectives encore encourageantes de résultats des entreprises, malgré les ponctions salariales, et qui permettront d'alimenter la croissance des investissements. Ce rebond serait de l'ordre de 3 %, hors dividendes, avec comme objectifs à fin mars : 12000 pour le Dow Jones et 1380 pour le S&P 500. 170,00 Indice NIKKEI 225 depuis décembre 1997 en base 100 160,00 150,00 160,00 140,00 140,00 130,00 120,00 120,00 110,00 100,00 100,00 80,00 90,00 déc-97 avr-99 août-00 déc-01 avr-03 août-04 déc-05 avr-07 60,00 premières publications de résultats pour le premier trimestre sont plutôt encourageantes, notamment celles des grandes sociétés pharmaceutiques (à l'exception de Pfizer) et de la plupart des banques qui ressortent au-dessus des attentes. Les nombreuses annonces d'opérations de rapprochements (Google/Doubleclick, US Steel/Lone Star, Bank of America/LaSalle, Astra Zeneca/ Med Immune, KKR/First Data) et de LBO (Sally Mae, Chrysler, Bausch & Lomb) contribuent également à soutenir les marchés. Altria envisage le spin-off de sa filiale Philip Morris International. Merck gagne deux class action lawsuits, au sujet de son médicament Vioxx, dans les états du New Jersey et du Texas. Ces deux victoires réduiront de manière significative les risques financiers (28 000 procès Vioxx en attente) qui pèsent sur Merck. La crise du subprime lending conduit DR Horton, le premier constructeur de maisons individuelles, à licencier 27 % de son personnel. En termes sectoriels et selon les indices GICS, les services publics (+13,4 %), les produits de base (+11,5 %), la santé (+8 %), les télécoms (+7,3 %), l'énergie (+6,7 %) et les biens de consommation durables (+5,2 %) affichent les meilleures performances depuis le début de l'année. A l'inverse, les valeurs de la finance (+0,4 %), des biens de consommation cycliques (+2,7 %), de la technologie (+2,7 %) et de l'industrie (+3,9 %) sous-performent. BFT 40,00 déc-97 avr-99 août-00 déc-01 avr-03 août-04 déc-05 Au Japon, les indices Nikkei et Topix progressent respectivement (au 23 avril) de 1,3 % et 1,5 % depuis le début de l'année 2007. Sur les 30 derniers jours, les bourses japonaises ont fait du surplace et sous-performent de ce fait les autres grands marchés. Le secteur du M&A est cependant resté très animé. Goldman Sachs prend des participations dans Usen et Aruze. OMC Card et Tokyo Star Bank sont en vente. Hoya, Nidec et Sumitomo Trust ont lancé des OPA respectivement sur Pentax, Japan Servo et Life Housing Loan Co. Yamazaki Baking entre dans le capital de Fujija. Le fonds de private equity Dalton s'attaque à Fujitec et Nippon Fine Chemical. Les autorités envisagent de fusionner le Tokyo Stock Exchange avec le Tokyo Commodity Exchange et le Tokyo Grain Exchange. La restructuration de JAL se poursuit avec la vente de ses hôtels à Morgan Stanley. Rakuten veut augmenter sa participation dans Tokyo Broadcasting. Le ministère des finances projette de réduire les barrières existantes entre les courtiers et les banques d'affaires. Cela pourrait conduire à des fusions dans ce secteur. De nouvelles régulations devraient entrer en vigueur en mai. Page 6 Perspectives économiques et financières avr-07 3 mai 2007 LES MARCHES FINANCIERS Les indices boursiers Cotations le 31-déc-2006 DOW JONES Prévisions 30-avr-2007 déc-2007 mars-2008 12 463,15 13 120,94 11 700 12 000 1 418,30 1 494,07 1 340 1 380 17 225,83 17 400,41 18 000 18 750 5 541,76 5 932,38 5 350 5 600 D.J. EUROSTOXX 395,63 425,97 385 405 D.J. STOXX 365,26 386,40 355 375 S&P 500 NIKKEI 225 CAC 40 Elles faciliteront les OPA hostiles en permettant à une filiale japonaise d'utiliser les actions de la société mère, comme support, pour lancer une OPA. Par ailleurs, Nissan licencie 1500 de ses salariés. Il s'agit du premier plan de licenciement chez Nissan en huit ans. alimentation (+8,1 %) enregistrent les meilleures progressions. A l'inverse, l'énergie (+0,4 %), les télécoms (+1,8 %), la technologie (+2,8 %), la santé (+3,3 %), l'assurance (+4,6 %), les services publics (+4,7 %) et les services financiers (+4,8 %) affichent les moins bonnes performances. Nous prévoyons toujours pour le Japon une sortie de la déflation à l'automne, qui se manifesterait par une légère remontée des taux et qui se traduirait par une hausse de la bourse japonaise d'autant plus justifiée que celle-ci est très sensible à la reprise du cycle et notamment à la demande en investissements dans l'électronique. Nous maintenons donc notre objectif d'un Nikkei à 18000 à la fin de l'année et nous prévoyons une hausse à 18750 (+4 %, hors dividendes) à l'horizon de fin mars 2008. La valorisation actuelle des entreprises européennes reste à des niveaux encore raisonnables (davantage cependant en termes de P/E que de P/Actifs nets, qui sont à des plus hauts historiques en liaison avec la rentabilité très élevée des fonds propres atteints). L'optimisme des marchés sera également soutenu par des publications de résultats encore satisfaisantes au premier semestre, comme le laisse présager la persistance des révisions à la hausse des bénéfices et les nombreuses opérations de rapprochements envisagées. Mais le durcissement attendu de la politique monétaire et la baisse de Wall Street devraient faire reculer les marchés européens comme prévu précédemment, avec comme objectif : 5350 pour le CAC 40, 385 pour le DJ EuroStoxx, 355 pour le DJ Stoxx et 6050 pour le FTSE. En Europe, l'indice DJ Stoxx (au 23 avril) est en forte hausse depuis le début de l'année (+6,5 %), toujours soutenu par les opérations de rachats et malgré l'affaiblissement persistant du dollar. Royal Bank of Scotland se propose de surenchérir sur l'offre faite par Barclays pour ABN Amro et les rumeurs de rapprochements entre grandes banques européennes se sont multipliées comme celle de Société Générale avec le groupe italien Unicredit. Enel et Acciona ont réussi à prendre le contrôle d'Endesa au détriment d'Eon, tandis que le devenir de Telecom Italia s'embourbe dans les méandres de la politique italienne (AT&T, qui s'était associé à America Movil, ayant jeté l'éponge). Fastweb et Neuf Cegetel vont fusionner respectivement avec Club Internet et Swisscom. Les avancées les plus fortes concernent la Finlande (+12 %), l'Allemagne (+11,2 %), le Portugal (+8,5 %), la Hollande (+8,1 %) et la France (+6,8 %). Le Royaume-Uni (+4,1 %), l'Italie (+4,2 %), la Belgique (+5,1 %) et l'Espagne (+5,9 %) sont les plus en retrait, cette dernière place étant particulièrement sensible à un risque d'éclatement de la bulle immobilière après la forte progression des valeurs liées à ce secteur (comme Immocaral, Acciona ou Sacyr). Selon les indices DJ Stoxx, les small caps surperforment encore globalement les large caps (+8,5 % vs +6,1 %) et en termes sectoriels, l'automobile (+21 %), la distribution (+15,6 %), les matériaux de construction (+14,1 %), la chimie (+12,4 %), les biens d'équipements (+12,2 %), les matières premières (+12 %), les produits de soins et cosmétiques (+8,9 %), le tourisme/loisirs (+8,6 %) et les boissons/ 3 mai 2007 L'affaiblissement de l'euro par rapport au dollar (et au yen) que devrait provoquer la perspective d'une hausse des taux US en fin d'année devrait par contre permettre aux indices boursiers européens de rebondir davantage au premier trimestre 2008 : 5600 pour le CAC 40, 405 pour le DJ EuroStoxx, 375 pour le DJ Stoxx et 6350 pour le FTSE. Indice CAC 40 depuis décembre 1997 en base 100 250,00 230,00 210,00 190,00 170,00 150,00 130,00 110,00 90,00 70,00 déc-97 avr-99 août-00 déc-01 avr-03 août-04 déc-05 Page 7 Perspectives économiques et financières avr-07 BFT LES MARCHES FINANCIERS Les obligations et les devises Les rendements obligataires américains et européens se sont tendus jusqu'à la mi-avril, entraînés par le reflux de l'aversion au risque, puis ont subi une correction à la baisse, variable selon les régions. Aux Etats-Unis, le reflux a été plus marqué, ramenant les taux vers leur niveau de fin mars, soit dans la moyenne du semestre écoulé ; en zone euro, ils n'ont que faiblement reculé et dépassent nettement leurs sommets de juin 2006 et février 2007. L'écart avec les taux américains s'est donc encore contracté, revenant vers 50 points de base. Les nouvelles économiques en provenance des Etats-Unis ne donnent pas de tendance claire : l'immobilier reste fragile mais son impact sur la consommation tarde à venir alors que les commandes à l'industrie vont mieux. En revanche, les indicateurs réels et monétaires en zone euro confortent les marchés dans leurs attentes de hausse des taux. Aux Etats-Unis, le rendement des T-notes est revenu de 4,75 %, le 6 avril, à 4,65 %, début mai. L'aller-retour de février-mars a provoqué une déformation de la courbe des taux illustrant les modifications de point de vue des marchés : ceux-ci ont d'abord été renforcés dans leurs attentes de baisse des taux courts, ce qui a surtout fait chuter le rendement des titres à 2 ans ; le rendement des titres à 5 ans a suivi dans une moindre mesure et se situe à présent en deçà des échéances extrêmes de la courbe. Cette situation cessera en cas de reprise de l'activité non anticipée. Dans l'UEM, les taux de rendement à 10 ans ont repris plus de 30 points de base depuis la mi-mars ; le Bund et l'OAT avoisinent respectivement 4,20 % et 4,25 %. A la différence des Etats-Unis, le rendement des titres à 2 ans a moins fluctué que ceux des échéances plus longues : les marchés ont considéré que la zone euro risquait moins d'être affectée par les turbulences financières et que la BCE maintiendrait son cap de resserrement monétaire. Tout au plus a-t-on pu penser un moment que l'appréciation de l'euro pourrait étaler quelque peu le calendrier des hausses de taux directeurs. La courbe s’en trouve quasi plate Nos prévisions de rendements restent à la hausse sur tous les marchés. Ceux des T-notes atteindraient 5,25 % en décembre et 5,50 % en mars 2008. Les taux sur l'OAT-10 ans seraient respectivement à 4,50 % et 4,65 % et les taux britanniques à 5,20 % et 5,35 %. Le marché des changes a continué de fluctuer en phase avec le degré d'attrait pour les carry trades. La rechute du yen, de 116 à 120 pour un dollar, s'est accompagnée d'une réappréciation de nombreuses monnaies à haut rendement jusqu'à la mi-avril. Le real brésilien, les dollars canadien et australien, la livre, la roupie indienne, le ringgit malais et le won coréen ont été les plus concernés. Pour la plupart d'entre elles, une correction à la baisse est intervenue dans la deuxième quinzaine du mois. Le yuan chinois poursuit sa hausse mais à rythme ralenti tandis que le dollar taïwanais se déprécie. Des forces de retour à la tendance jouent aussi dans plusieurs cas : le dollar canadien et la couronne suédoise effacent une période de sous-évaluation, le baht thaïlandais commence à se déprécier. L'euro s'est renforcé à l'égard du dollar, du yen et du franc suisse, affichant des niveaux records depuis sa création. Nous attendons une baisse modérée de l'euro en fin d'année. Celui-ci vaudrait 1,30 dollar et 0,68 livre en décembre, puis 1,30 et 0,69 livre en mars 2008. Le dollar vaudrait 116 yens à ces deux échéances. Les taux de change * Cotations EUR / USD USD / YEN EUR / £ 29-déc-2006 1,32 119,07 0,67 30-avr-2007 1,36 119,38 0,68 BFT Prévisions BFT Marché* BFT déc-2007 1,30 1,37 116 116 0,68 0,69 mars-2008 1,30 1,37 116 115 0,69 0,69 Marché* Marché* taux à terme implicites (forward) BFT Page 8 Perspectives économiques et financières 3 mai 2007