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Réanimation 15 (2006) 198–204
http://france.elsevier.com/direct/REAURG/
Mise au point
Antibiothérapie sélectionnante. De la théorie à la pratique
Selecting antibiotic therapy. From theory to practice
D. Skurnik, A. Andremont *
Laboratoire de bactériologie, hôpital Bichat (APHP) et EA 6934, université Paris-VII, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France
Résumé
L’émergence de bactéries pathogènes résistantes aux traitements antibiotiques est parfois le résultat d’une sélection directe au niveau d’un
foyer infectieux constitué, mais le plus souvent elle est le résultat d’un mécanisme en deux temps qui associe d’abord la sélection de bactéries
commensales résistantes puis le transfert horizontal de résistance entre diverses espèces bactériennes dont certaines peuvent être pathogènes.
Trois exemples pratiques de telles émergences sont décrits, aboutissant à : 1) la survenue d’une infection urinaire à E.scherichia coli résistante
aux fluoroquinolones ; 2) une péritonite postopératoire à Enterobacter résistant aux céphalosporines de troisième génération ; et 3) à des cas
d’infections à klebsielles résistantes aux carbapénèmes ou à Staphylococcus aureus résistant aux glycopeptides. Les moyens actuels et futurs de
s’opposer à de tels phénomènes en pratique quotidienne sont rappelés.
© 2006 Société de Réanimation de Langue Française. Publié par Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Abstract
The emergence of pathogenic bacteria resistant to antimicrobial agents is sometimes the result of a direct selection process within a welldefined infectious site. Most often, such emergence is the result of a two-steps mechanism which associate first the selection of resistant commensal bacteria and, second, the horizontal transfer of resistance between bacterial species, including pathogenic ones. Three practical examples
of such emergence are described including: 1) the occurrence of a urinary tract infection resistant to fluoroquinolones; 2) a case of post-surgery
peritonitis caused by a strain of Enterobacter sp. resistant to third generation cephalosporins; and 3) cases of infection due to Klebsiella sp.
resistant to carbapenems, or to Staphylococcus aureus resistant to glycopeptides. The current and future means to prevent such events in clinical
practice are listed.
© 2006 Société de Réanimation de Langue Française. Publié par Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots clés : Antibiotiques ; Résistance
Keywords: Antibiotic; Resistance
1. Introduction
L’émergence et le développement de la résistance aux antibiotiques sont la réponse évolutive du monde bactérien à l’utilisation croissante des antibiotiques par l’Homme, au cours de
* Auteur
correspondant.
Adresse e-mail : [email protected] (A. Andremont).
la deuxième moitié du siècle dernier. Cette réponse avait été
prévue de façon prémonitoire dès 1945 par Sir A. Fleming
lui-même dans un article du New York Times [1].
Depuis lors, des phénomènes de résistances bactériennes
sont apparus de façon régulière après la mise sur le marché
d’un nouvel antibiotique. Toutefois il est frappant de constater
que le délai d’émergence de la résistance est très variable d’une
famille d’antibiotiques à l’autre et qu’à l’intérieur d’une même
famille ce délai varie considérablement en fonction des espèces
1624-0693/$ - see front matter © 2006 Société de Réanimation de Langue Française. Publié par Elsevier SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.reaurg.2006.03.002
D. Skurnik, A. Andremont / Réanimation 15 (2006) 198–204
pathogènes cibles. Par exemple, la résistance clinique des staphylocoques à la pénicilline est apparue dans l’année qui a
suivi le début de l’utilisation du produit, alors qu’il a fallu plus
de 20 ans pour qu’elle soit notée chez les pneumocoques, et 40
chez les méningocoques. Les raisons qui sous-tendent ces variations sont très incomplètement élucidées mais sont probablement en rapport avec le fait que d’une part, la résistance bactérienne est un phénomène complexe, polymorphe, touchant
selon les cas un antibiotique, une famille d’antibiotiques (résistance croisée) ou plusieurs familles d’antibiotiques (résistance
associée) et que d’autre part, l’émergence de la résistance chez
un pathogène donné est souvent le résultat d’une chaîne d’événements de sélection.
Ainsi, le risque lié à une antibiothérapie sélectionnante est
l’apparition de souches pathogènes résistantes aux antibiotiques.
La façon la plus simple pour « fabriquer » une bactérie pathogène résistante est de la sélectionner directement au sein
d’un foyer infectieux constitué de bactéries pathogènes sensibles. Cependant, la pression de sélection d’un antibiotique au
sein d’un foyer infectieux est exercée sur une masse bactérienne souvent relativement limitée en nombre ; donc, la probabilité de sélectionner un mutant résistant est en règle assez
faible. C’est la raison pour laquelle le phénomène, bien que
régulièrement observé, n’est responsable que d’un nombre assez limité d’échecs thérapeutiques. Il existe en revanche, une
voie d’émergence de pathogènes résistants qui, bien que plus
complexe, est en fait bien plus souvent en cause. Cette voie est
constituée de deux temps successifs. D’abord, sélection de bactéries résistantes au sein des flores commensales non ou peu
pathogènes, puis transfert horizontal de la résistance à des bactéries beaucoup plus pathogènes. La fréquence de cette voie
d’émergence est due à ce qu’au niveau des flores commensales, particulièrement au niveau de la flore commensale intestinale (mais aussi pharyngée ou cutanée), la masse bactérienne
est beaucoup plus importante (1000 à 1 000 000 de fois) qu’au
niveau des foyers infectieux. En outre, les flores commensales
sont faites de multiples espèces bactériennes (plusieurs centaines) et donc la probabilité de sélectionner des bactéries résistantes (par mutation ou surtout possédant des gènes de résistance) est très élevée. Ainsi, au sein de ces écosystèmes,
pratiquement après toute antibiothérapie, on observe l’émergence de bactéries résistantes qui peuvent être de plusieurs types :
● mutants résistants, c’est-à-dire bactéries directement issues
de la souche initiale mais dont un changement ponctuel
dans une paire de base au niveau de l’ADN codant pour la
cible de l’antibiotique a induit chez celle-ci une modification qui rend l’action de l’antibiotique moins (ou plus du
tout) efficace ;
● bactéries naturellement résistantes, c’est-à-dire bactéries
dont tous les représentants au sein de l’espèce sont résistants
dans la nature à tel ou tel antibiotique, indépendamment de
la présence de celui-ci ;
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● ou bactéries possédant une résistance acquise à l’antibiothérapie utilisée, c’est-à-dire bactéries dont les représentants
naturels sont sensibles à l’antibiotique mais qui ont acquis,
à partir d’une autre espèce bactérienne, proche phylogénétiquement le plus souvent, un gène qui leur confère une particularité spécifique, celle de ne plus être sensible à l’action
de l’antibiotique.
Dans un certain nombre de cas ces bactéries commensales
vont directement causer une infection qui sera alors dite « opportuniste ». Dans d’autres cas le transfert horizontal de gènes
de résistance se fera à une espèce pathogène, soit directement
chez le patient primitivement colonisé, soit le plus souvent
chez un autre, après que ces bactéries commensales résistantes
sélectionnées aient disséminé le long d’une chaîne d’hôtes plus
ou moins longue.
Les quelques exemples ci-dessous décrivent ces phénomènes à partir de situations cliniques concrètes.
2. Exemple no 1 : sélection d’un mutant résistant
Cet exemple sera illustré par une infection urinaire causée
par une souche d’Escherichia coli résistante aux fluoroquinolones.
La fréquence de mutation est une propriété naturelle des
bactéries et la fréquence de mutation aux antibiotiques dépend
de la nature de chaque antibiotique. On sait par exemple que la
fréquence de mutation à la rifampicine [2] ou aux quinolones
[3] est assez élevée, de l’ordre de 10−7 à 10−8.
Les quinolones et les fluoroquinolones pénètrent dans le cytoplasme bactérien par diffusion passive et sont rapidement
bactéricides. Leurs cibles sont des topo-isomérases (l’ADN gyrase et la topo-isomérase IV), qui sont des enzymes impliquées
dans la régulation du surenroulement de l’ADN sur lui-même.
La résistance aux fluoroquinolones est presque exclusivement
chromosomique. Le plus souvent elle est due à la présence de
mutations dans la région codant pour l’ADN gyrase et la topoisomérase IV. Ces mutations se font principalement dans une
zone bien limitée appelée QRDR (quinolones resistance determination region). Schématiquement, la résistance aux quinolones puis aux fluoroquinolones de générations successives est
un processus qui se déroule par accumulation de mutations
les unes après les autres.
Si on prend l’exemple d’une infection urinaire à E. coli résistant à la ciprofloxacine chez une femme jeune, on peut imaginer que les étapes suivantes se sont déroulées :
● au départ, le tube digestif de la patiente est colonisé par des
E. coli sensibles aux quinolones. Survient une infection urinaire traitée par l’acide nalidixique (ou une autre quinolone
de première génération). Le traitement stérilise l’urine et
guérit la patiente sans sélectionner de mutants résistants
dans l’urine où les bactéries sont relativement peu nombreuses. En revanche, dans un certain nombre de cas, les patientes vont être colonisées dans leur tube digestif par une po-
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pulation d’E. coli possédant une première mutation au sein
du QRDR. La sélection de tels mutants est plus fréquente
dans le tube digestif que dans l’urine car les bactéries y sont
beaucoup plus nombreuses. Cette première mutation confère
la résistance aux quinolones, comme l’acide nalidixique
mais ni aux fluoroquinolones anciennes (ofloxacine ou péfloxacine) ni aux plus récentes (ciprofloxacine) ;
● en cas de récidive, c’est cette population intestinale, porteuse d’un premier niveau de résistance, qui risque de causer
l’infection. En cas de traitement par une fluoroquinolone
type ofloxacine ou péfloxacine, le traitement sera là encore
efficace sur l’infection urinaire, mais la population intestinale va subir une nouvelle pression de sélection qui va parfois sélectionner des souches avec deux mutations au sein
du QRDR ; et donc résistantes aux anciennes fluoroquinolones, mais toujours sensibles à la ciprofloxacine ;
● enfin, en cas d’une nouvelle rechute, traitée cette fois par
exemple par ciprofloxacine, le même cycle peut se reproduire et aboutir à la colonisation intestinale par des bactéries
porteuses de trois mutations et résistantes aux fluoroquinolones.
À côté d’un tel scénario en trois temps, un traitement prolongé par une fluoroquinolone peut permettre de sélectionner,
chez un petit nombre de patients, plusieurs niveaux de mutations en un seul temps, tant la quantité des bactéries commensales du tube digestif est importante.
3. Exemple no 2 : sélection d’une bactérie naturellement
résistante
Cette fois, c’est une infection intra-abdominale à Enterobacter cloacae résistant aux céphalosporines de troisième génération qui servira d’exemple.
Dans le monde bactérien, il existe des résistances naturelles,
dites chromosomiques, à certains antibiotiques. Ainsi, toute
une partie de la famille des entérobactéries, les entérobactéries
du groupe 3 (qui incluent notamment E. cloacae, E. aerogenes,
Morganelle morganii), possède le gène AmpC codant pour une
céphalosporinase, au niveau de leur chromosome (classe I de
Richmond [4]). La production naturelle de cette céphalosporinase confère à ces bactéries à l’état sauvage une résistance aux
céphalosporines de première génération, voire de deuxième génération, et une résistance aux pénicillines A non récupérée par
les inhibiteurs de bêtalactamases (clavulanate ou tazobactam).
Toutefois, de telles souches restent sensibles en apparence aux
céphalosporines de troisième génération qui sont peu hydrolysées lorsque la production de cette céphalosporinase reste à bas
niveau. Des mutations se produisant dans le système de régulation de la production de la céphalosporinase peuvent toutefois aboutir à une augmentation de production conférant une
résistance permanente (dite « constitutive ») aux céphalosporines de troisième génération. Dans d’autres cas l’hyperproduction n’est que transitoire, induite par certaines molécules
comme les inhibiteurs de bêtalactamases qui ont ici, en pra-
tique, un effet inverse de celui observé sur les bêtalactamases
de classe A (type TEM ou SHV par exemple). Le phénotype de
résistance aux céphalosporines de troisième génération est
alors dit « inductible ».
Les entérobactéries du groupe 3 ne sont pas des commensales fréquentes du tube digestif. En revanche, elles sont souvent
présentes chez des sujets qui ont reçu un traitement antibiotique préalable, par exemple par aminopénicilline.
Chez de tels patients, un traitement par un inhibiteur de bêtalactamase peut aboutir à l’augmentation des capacités d’hydrolyse de ces enzymes, élargissant leurs spectres aux céphalosporines de troisième génération. Les seules bêtalactamines à
ne pas être hydrolysées seront alors les carbapénèmes (imipénème, ertapénème). Dans d’autres cas, ce seront des mutants
hyperproducteurs constitutifs qui seront sélectionnés, mais le
résultat sera identique. Ces deux séquences d’événements expliquent très probablement les différences retrouvées, aussi
bien dans la nature des espèces (E. coli vs E. cloacae, ou Citrobacter freundii, ou M. morganii etc.) que dans leurs phénotypes de résistances (multisensibles vs résistants aux céphalosporines de troisième génération), entre d’un côté les infections
intra-abdominales communautaires, qui surviennent le plus
souvent chez des patients vierges de toute antibiothérapie, et
de l’autre côté les infections intra-abdominales postopératoires
[5] qui surviennent chez des patients qui ont toujours reçu une
antibiothérapie préalable, ne serait-ce que comme prophylaxie
peropératoire.
4. Exemple no 3 : sélection d’espèces porteuses
de résistances acquises
Les exemples concernent Klebsiella pneumoniae résistante à
l’imipénème, et Staphylococcus aureus résistant à la vancomycine.
Parallèlement à la résistance naturelle aux antibiotiques, on
observe une dissémination mondiale de la résistance, voire de
la multirésistance aux antibiotiques via la dissémination horizontale des gènes codant pour ce type de fonction. Cette dissémination de la multirésistance et cette diffusion des gènes de
résistance sont liées à l’existence d’éléments génétiques mobiles entre bactéries d’une même espèce ou d’espèces différentes,
ainsi qu’à l’existence de structures génétiques permettant de
cumuler de nombreux gènes de résistance au sein d’une même
souche. En effet, dans la grande majorité des cas, l’origine de
la résistance bactérienne est l’acquisition d’un mécanisme de
résistance par transfert horizontal de matériel génétique [6,7],
le plus souvent probablement par transformation ou par conjugaison [8], à partir d’autres bactéries déjà résistantes. En cas de
transformation, le matériel génétique transféré correspond à un
fragment de gène encodant pour la cible de l’antibiotique
considéré : c’est le cas par exemple de la diminution de sensibilité des pneumocoques aux pénicillines par acquisition de
fragments de gènes provenant d’espèces proches de streptocoques pharyngés [9].
En cas de conjugaison, le fragment transféré peut correspondre au transfert d’éléments génétiques plus complexes pouvant
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conférer en bloc la résistance à plusieurs familles d’antibiotiques grâce :
● aux plasmides ;
● aux transposons ;
● et aux intégrons
dont les ingénieries ont été successivement élucidées.
Ainsi, lors d’une épidémie récente de souches de
K. pneumoniae multirésistantes en région parisienne [10], les
souches étaient résistantes à l’ensemble des bêtalactamines, y
compris les carbapénèmes, ainsi qu’à la quasi-totalité des antibiotiques des autres familles. La caractérisation moléculaire de
ces souches a montré que la résistance aux bêtalactamines, aux
aminosides, aux sulfamides et au triméthoprime était encodée
par plusieurs gène cassettes situés au sein d’un intégron de
classe 1, lui-même porté par un plasmide.
Le détail de la génétique de ce type d’organisation est le
suivant. Les plasmides sont de petits fragments d’ADN double
brin, circulaires et cytoplasmiques, capables de réplication autonome. Leur transmission naturelle d’une bactérie à l’autre
s’effectue habituellement par conjugaison. Ils ont été découverts au Japon à la fin des années 1950 à la suite de la constatation de l’existence simultanée dans les selles de malades,
de souches d’E. coli et de Shigella dysenteriae corésistantes à
la streptomycine, au chloramphénicol, à la tétracycline et aux
sulfamides [11–13]. Ces souches ne pouvaient être des mutants car la probabilité de cosélectionner des quadruples mutants est de l’ordre de 10−24 alors que la population d’entérobactéries n’excède pas 1011 dans le tube digestif de l’homme.
La présence chez ces souches d’un élément génétique supplémentaire appelé « Resistance Transfert Factor » puis « plasmide » a permis d’en expliquer l’apparition. Les plasmides ont
donc été associés à la dissémination de la résistance aux antibiotiques dès leur découverte.
Les transposons sont eux des fragments d’ADN qui peuvent être mobilisés d’un site à un autre sur un même brin
d’ADN ou sur un autre brin. Ce sont habituellement les transposons eux-mêmes qui encodent leurs protéines de transposition (transposase et intégrase). On décrit trois principaux types
de transposons dont :
● les séquences d’insertions (SI) ;
● les transposons non composites ;
● et les transposons composites.
Tout comme les plasmides, les transposons jouent un rôle
fondamental dans la dissémination de la résistance aux antibiotiques.
Découverts en 1968 à partir de l’opéron gal d’E. coli les SI
sont les transposons les plus simples et les plus courts. Ils varient de 700 et 5700 bp et sont flanqués de deux séquences
inversées répétées (IR) plus ou moins parfaites, indispensables
à la transposition.
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Les autres transposons, non composites ou composites, sont
plus complexes que les SI. Ils ont été découverts après la mise
en évidence en 1971 d’un transposon porteur de résistance à
l’ampicilline chez Pseudomona aeruginosa [14].
Les transposons non composites contiennent, outre des IR,
d’autres éléments, principalement un site de recombinaison et
des gènes tels que ceux de résolvases, de transposases ou des
gènes de résistance. Les transposons composites semblent,
eux, être construits par l’insertion aléatoire de SI de part et
d’autre de n’importe quel gène, ou groupe de gènes. Il en résulte une véritable « capture » momentanée de ces gènes et
leur possible mobilisation vers un autre génome. Si les gènes
ainsi mobilisés sont des gènes de résistance, on conçoit l’importance des transposons composites dans la dissémination de
la résistance aux antibiotiques.
Toutefois, même les transposons composites ne comportent
en règle qu’un ou deux gènes de résistance (ex : Tn9, Tn10,
Tn903 Tn1546) et rarement plus trois (ex. : Tn5) [15]. D’autres éléments génétiques, plus complexes, peuvent être en
cause lorsque le nombre de résistance est plus important.
L’analyse comparative de la séquence des transposons véhiculant la résistance à de multiples antibiotiques, a révélé qu’ils
présentaient souvent la même structure et ne différaient qu’au
niveau des gènes de résistance qu’ils arboraient [16,17]. Dans
la plupart des cas, les gènes de résistance étaient associés au
sein d’un nouveau type d’élément génétique, pouvant contenir
plusieurs gènes de résistance et avec des caractéristiques pouvant encore mieux expliquer la dissémination de la résistance
aux antibiotiques [18]. Ces structures, ainsi capables d’intégrer
successivement de nombreuses cassettes de résistance, ont été
appelées « intégrons ».
De découverte relativement récente [19], les intégrons ont
eu plusieurs définitions. Actuellement, celle de Hall et Collins
[20] est adoptée par tous : « Un intégron est une unité génétique qui inclut un site spécifique de recombinaison, capable
de capturer et mobiliser des gènes contenus dans des éléments
mobiles appelés gènes cassettes et un promoteur pour l’expression des gènes cassettes. Il agit comme un système naturel de
clonage et comme un vecteur d’expression ».
Le composant indispensable d’un intégron est un gène intI
codant une recombinase spécifique de site appartenant à la
famille des intégrases. Les autres composants essentiels sont,
un site adjacent atti qui est reconnu par l’intégrase et qui sert
de site récepteur pour les gènes cassettes, et un promoteur
orienté à la suite qui permet l’expression des gènes cassettes.
On divise l’intégron en trois fragments : un fragment 5′ et
un fragment 3′ constants qui flanquent une région variable
composée des gènes cassettes, ces gènes cassettes étant presque exclusivement des gènes codant pour la résistance aux
antibiotiques.
Les intégrons ne sont pas automobilisables mais sont souvent associés à des transposons et/ou à des plasmides conjugatifs qui peuvent ainsi servir de véhicule pour la transmission
inter- et intraspécifique de matériel génétique. Tn21 et Tn7
sont les deux principaux exemples d’associations de transposons et d’intégrons. Trois classes d’intégrons, les intégrons de
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classes 1, 2 et 3 regroupent la grande majorité des intégrons
décrits, les intégrons de classe 1 étant eux-même très majoritaires. Même en l’absence d’hospitalisation récente ou de prise
récente d’antibiotiques, environ 15 % des E. coli de la flore
intestinale dominante de sujets sains possèdent aujourd’hui
des intégrons contenant des cassettes de résistance [21].
Ainsi, toute antibiothérapie peut dans un premier temps sélectionner les souches commensales porteuses d’intégrons.
Dans un deuxième temps, des bactéries potentiellement pathogènes pourront acquérir ces intégrons, et être la cause d’infections qui seront alors dues à une souche multirésistante car
portant un intégron avec plusieurs gènes cassettes de résistance.
C’est cette séquence d’évènements qui est probablement la
cause des infections à K. pneumoniae « toto- ou panrésistantes » citées ci-dessus.
Un autre exemple de transfert horizontal de gènes de résistance est celui du cas de la surinfection d’une plaie de pied
diabétique, par une souche de S. aureus résistante à la vancomycine, décrite récemment chez un patient du Michigan [22].
Les souches de S. aureus résistantes à la méthicilline
(SARM), sont corésistantes à toutes les bêtalactamines et, très
souvent la résistance à de nombreux autres antibiotiques tels
les fluoroquinolones [23]. Ces souches sont un problème de
santé publique majeur [24] et les infections qui leur sont dues
imposent le plus souvent un traitement par les glycopeptides.
Jusqu’à récemment les SARM y étaient toujours sensibles,
mais deux facteurs faisaient craindre l’apparition de souches
de S. aureus résistantes aux glycopeptides (VRSA pour vancomycin-resistant S. aureus).
D’une part, on connaissait la présence chez certains Enterococcus, essentiellement faecium, du gène vanA (VRE) qui
encode pour la résistance à la vancomycine. Or, le gène vanA
est porté par un plasmide [25], et on savait que le transfert de
résistance plasmidique était possible entre Enterococcus et
S. aureus [26] (notamment la résistance à l’érythromycine
par le plasmide pAMβ1 [27]). D’autre part, le transfert de vanA chez d’autres espèces qu’Enterococcus avait déjà été réalisé in vitro [28].
C’est dans ce contexte génétique qu’est survenue l’augmentation de la pression de sélection induite par la large utilisation
des glycopeptides aux États-Unis [29], aussi bien par voie générale (traitement des infections à SARM) que per os (traitement des diarrhées postantibiotiques à Clostridium difficile).
Dès lors, il n’a pas été très étonnant d’isoler en 2002, dans
une plaie plantaire chez un patient diabétique, multitraité par
antibiotiques, porteur d’un SARM au niveau nasal, et d’un
VRE au niveau d’un cathéter de dialyse, une souche de
S. aureus porteuse du transposon Tn1546 contenant le gène
vanA et conférant à la souche un haut niveau de résistance
aux glycopeptides. Ce transposon était lui-même inséré au sein
d’un plasmide porteur de plusieurs autres gènes de résistance :
triméthoprime (dfr), aminosides (aacA-aphD) et bêtalactamines (blaZ). L’hypothèse la plus probable reste pour l’instant
que l’émergence de ce VRSA soit la conséquence du transfert
du gène vanA du VRE au SARM, secondairement à une forte
pression de sélection antibiotique [30].
Dans ce cas particulier, comme dans les deux autres seuls
cas similaires rapportés à ce jour dans la littérature [31,32], la
souche n’était apparemment pas « épidémique » et des cas
secondaires n’ont pas été observés. Mais ces patients sont démonstratifs de la fragilité de la barrière qui nous permet aujourd’hui de conserver aux antibiotiques leur potentiel thérapeutique.
5. Les derniers avatars du pouvoir sélectionnant
de l’antibiothérapie : la résistance plasmidique
aux quinolones et les enzymes multiclasses
Il existe actuellement une très forte augmentation de la
consommation des fluoroquinolones. Celle-ci est bien documentée aux États-Unis [33,34], mais elle existe probablement
aussi dans de très nombreux autres pays. Hasard ou effet direct
du pouvoir sélectionnant de cette antibiothérapie, deux nouveaux gènes de résistances, représentant deux nouveaux mécanismes de résistance aux quinolones, ont été très récemment
retrouvés. Tous deux étaient présents au sein d’intégrons, et
donc éminemment mobilisables et transférables, contrairement
aux mécanismes précédents de résistance aux fluoroquinolones qui étaient principalement dus à des mutations chromosomiques et non transférables.
Le premier de ces gènes de résistance est dénommé qnr.
Celui-ci encode la protéine Qnr dont la fonction principale
consiste à s’opposer à la fixation des quinolones sur leurs cibles en recouvrant l’ADN gyrase [35] et la topo-isomérase IV
[36]. Ce gène qnr est un gène cassette porté par un intégron. Il
constitue donc un mécanisme transférable de résistance aux
quinolones, ce qui n’avait jamais été décrit jusqu’alors.
L’étude de ce gène qnr a également permis la découverte de
l’aac6′-Ibcr [37] le deuxième des gènes de résistance aux quinolones. Celui-ci confère aux bactéries qui le portent des propriétés encore plus extraordinaires.
Lors de l’étude du transfert de la résistance aux quinolones
via qnr, chez certaines souches de Klebsiella isolées en Chine,
le niveau de la résistance aux quinolones de ces souches était
trouvé variable en fonction de l’environnement génétique qui
était transféré avec qnr. qnr étant situé au sein d’un intégron,
le transfert de qnr pouvait se faire soit seul, soit en bloc avec
d’autres cassettes, notamment celle contenant le gène aac6′-Ib,
qui encode pour un certain type de résistance aux aminosides.
Or, le niveau de résistance aux quinolones des souches recevant qnr et aac6′Ib était plus élevé que celui des souches recevant qnr seul. L’exploration de ce phénomène a permis de
mettre en évidence que le gène aac6′-Ib en cause était particulier, et qu’il possédait en fait deux mutations par rapport à la
forme sauvage. Ces mutations lui conféraient un spectre d’activité extrêmement surprenant car aboutissant à l’inactivation
non seulement des aminosides mais aussi des quinolones par
un mécanisme biochimique identique (une phosphorylation) !
Deux dogmes de la résistance tombaient ainsi d’un coup :
D. Skurnik, A. Andremont / Réanimation 15 (2006) 198–204
● une seule enzyme pouvait avoir comme substrats deux familles d’antibiotiques ;
● et ces familles pouvaient être aussi éloignées chimiquement
et conceptuellement que peuvent l’être les aminosides (antibiotiques naturels) et les fluoroquinolones (antibiotiques
de synthèse)…
6. Conclusion
On voit dans ces exemples que le « bricolage » génétique
naturel ne connaît pas de bornes dans le domaine de la résistance des bactéries aux antibiotiques. En fait, il ne s’agit là que
de la mise en œuvre des mêmes mécanismes que ceux qui ont
permis aux bactéries de s’adapter à leurs changements continuels d’environnement depuis qu’elles sont apparues sur la
terre, il y a environ trois milliards et demi d’années. La différence qui nous fascine, et peut-être, nous menace, est que dans
le cas de l’antibiothérapie l’ensemble de ces mécanismes moléculaires d’adaptation a été mobilisé sur une parcelle infime de
temps, à peine un demi-siècle, sous l’influence de l’utilisation
massive, plusieurs centaines de milliers de tonnes par an, et
souvent irraisonnée des antibiotiques par l’Homme. La prise
en compte du pouvoir sélectionnant des antibiotiques dans la
pratique quotidienne semble bien être la seule voie qui nous
permettra de conserver à ces médicaments exceptionnels leur
haut pouvoir thérapeutique.
Actuellement, cette prise en compte est fondée essentiellement sur la réduction de la consommation des antibiotiques
aux seuls patients qui en ont réellement besoin et à la limitation
de la durée des traitements au strict nécessaire quand ceux-ci
sont prescrits. Des travaux sont en cours pour évaluer l’impact
de l’ajustement, en jouant sur les posologies et les rythmes
d’administration, des paramètres PK–PD sur l’émergence de
la résistance [38,39]. Cette approche rappelle en fait que des
travaux, maintenant anciens, avaient montré que des molécules
à spectres d’activité très proches, comme le céfotaxime et la
ceftriaxone [40,41] avaient un pouvoir sélectionnant différent
lié à leur différente élimination biliaire.
Récemment, d’autres équipes [42,43] ont cherché à limiter
les quantités résiduelles de bêtalactamines au niveau de l’écosystème intestinal par administration de bêtalactamases vectorisées jusqu’au côlon. Il est trop tôt pour savoir si ces diverses
approches constitueront ou non des progrès décisifs mais, elles
ouvrent des voies nouvelles pour une pratique plus responsabilisée de l’antibiothérapie et pour de réelles innovations thérapeutiques.
Références
[1]
[2]
[3]
Fleming A. The New York Times 1945;26:21.
Morlock GP, Plikaytis BB, Crawford JT. Characterization of spontaneous, in vitro-selected, rifampin-resistant mutants of Mycobacterium
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