Mise à pied conservatoire la maladie ne doit pas

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Mise à pied conservatoire la maladie ne doit pas
Fédération Commerces & Services UNSA
Mise à pied conservatoire la maladie ne doit pas
retarder l’entretien préalable
Lorsqu’un salarié protégé est mis à pied à titre conservatoire, l’employeur doit au plus vite
mettre en marche la procédure de licenciement. L’arrêt maladie du salarié ne peut retarder
l’entretien préalable que si sa tenue est impossible ou si le salarié l’a demandé.
CE, 29 juin 2016, n° 381766
Le résumé de l’affaire
Un salarié conseiller prud’homal mis à pied pour faute lourde est placé en arrêt de travail pour
maladie. Sa date d’entretien préalable au licenciement est alors repoussée à la fin de l’arrêt,
soit dix-huit jours après le début de la mise à pied. Huit jours après l’entretien, l’employeur
adresse la demande d’autorisation de licenciement à l’inspecteur du travail. Trop tard selon le
Conseil d’État.
La solution des juges
Les délais [fixés par le Code du travail] dans lesquels la demande d’autorisation de
licenciement d’un salarié mis à pied doit être présentée, ne sont pas prescrits à peine de nullité
de la procédure de licenciement ; toutefois, eu égard à la gravité de la mesure de mise à pied,
l’employeur est tenu, à peine d’irrégularité de sa demande, de respecter un délai aussi court
que possible pour la présenter ; à ce titre, la circonstance que l’employeur a décidé, en raison
d’un arrêt de maladie du salarié survenu au cours de la période de mise à pied, de repousser la
date de l’entretien préalable au licenciement et, par suite, celle à laquelle il adresse sa
demande d’autorisation de licenciement à l’administration, n’est de nature à justifier un délai de
présentation de sa demande excédant le délai requis [par le Code du travail] que si la maladie a
rendu impossible la tenue de l’entretien préalable dans ces délais, ou que le report a été
demandé par le salarié lui-même.
La mise à pied ne doit pas durer
La mise à pied conservatoire est une mesure provisoire prononcée dans l’attente d’une
sanction. Le salarié ne perçoit plus de salaire, ni n’exécute son travail. C’est donc une mesure
exceptionnelle qui ne doit pas durer. Si c’est le cas, elle peut être requalifiée en mise à pied
disciplinaire et rendre sans cause réelle et sérieuse le licenciement qui suit [Cass. soc., 30 oct.
2013, n° 12-22.962], ou selon les circonstances, justifier une résiliation judiciaire du contrat de
travail [Cass. soc., 29 juin 1999, n° 97-41.818].
À NOTER
Les mandats représentatifs ne sont pas suspendus pendant une mise à pied, qu’elle soit
prononcée à titre conservatoire ou disciplinaire
[Cass. crim., 11 sept. 2007, n° 06-82.410]
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Afin que la mise à pied ne se prolonge pas excessivement, des délais spécifiques encadrent le
licenciement des salariés protégés. Deux procédures sont à distinguer (voir schéma p. 6).
Lorsque la consultation du comité d’entreprise n’est pas requise, l’employeur doit
nécessairement notifier et motiver la mise à pied auprès de l’inspecteur du travail dans les 48
heures. Aucun délai n’est ensuite imposé à l’employeur pour saisir l’inspecteur du travail de
l’autorisation de licencier. Cette procédure s’applique notamment aux délégués syndicaux, aux
représentants de section syndicale, aux salariés mandatés, aux conseillers prud’homaux et aux
salariés inscrits sur la liste des conseillers du salarié.
Au contraire, lorsque la consultation du comité d’entreprise est obligatoire, l’employeur n’a pas
à notifier la mise à pied à l’inspecteur du travail, mais il dispose de 10 jours pour organiser la
réunion du comité d’entreprise, puis ensuite de 48 heures pour saisir l’inspection du travail de la
demande de licenciement. En l’absence de comité d’entreprise, il doit solliciter l’inspection du
travail dans les huit jours. Cette procédure s’applique notamment aux membres du comité
d’entreprise, du CHSCT et aux délégués du personnel.
À NOTER
En cas de cumul de mandats, l’employeur doit respecter les deux procédures : à la fois informer
l’inspecteur du travail 48 heures après la mise à pied et respecter les délais de convocation du
comité d’entreprise et de sollicitation de l’autorisation de licenciement.
Le Conseil d’État juge que l’absence de respect de ces délais n’entraîne pas la nullité du
licenciement, à condition toutefois que l’employeur ait sollicité l’inspecteur du travail dans un
délai aussi court que possible [CE, 23 août 2006, n° 278221]. Dans notre affaire, il s’était écoulé
25 jours entre le début de la mise à pied conservatoire et la demande d’autorisation de
licenciement. Cette durée a été jugée excessive par le Conseil d’État. L’arrêt maladie du salarié
ne justifiait pas ce retard.
REMARQUE
Dans notre affaire, le Conseil d’État applique au conseiller prud’homal la procédure prévue pour
les salariés protégés pour lesquels la consultation du comité d’entreprise est requise (voir
schéma p. 6), il s’agit, a priori, d’une erreur qui, toutefois, ne modifie pas la solution des juges
sur l’impact sur la procédure de licenciement d’un arrêt de travail pour maladie pendant une
mise à pied.
La maladie ne prolonge qu’exceptionnellement la procédure de licenciement
L’absence du salarié due à un arrêt de travail pour maladie n’arrête, ni ne suspend, la
procédure de licenciement [Cass. soc., 9 oct. 2001, n° 99-41.217 ; Cass. soc., 27 févr. 2013,
n° 11-27.130]. C’est le cas que le salarié soit protégé ou non et qu’il y ait ou non une mise à
pied conservatoire.
En l’occurrence, l’employeur avait estimé que l’arrêt maladie survenu pendant la mise à pied
conservatoire empêchait la tenue de l’entretien préalable au licenciement. Il a donc repoussé
l’entretien préalable à la fin de l’arrêt de travail, soit 18 jours après le début de la mesure. À tort.
Un arrêt maladie ne suspendant pas la procédure de licenciement, elle ne pouvait pas justifier
la prolongation de la mise à pied.
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Le Conseil d’État a donc jugé que la présentation tardive de l’autorisation de licencier devant
l’inspection du travail n’était aucunement justifiée. Il a toutefois nuancé sa position en indiquant
qu’un arrêt maladie peut justifier un retard dans la procédure de licenciement dans deux cas :
– la maladie a rendu impossible la tenue de l’entretien préalable dans les délais ;
– le report a été demandé dans les délais.
En l’occurrence, le salarié avait, au contraire, demandé à ce que l’entretien ne soit pas
repoussé et, a priori, la maladie ne rendait pas impossible sa tenue.
À NOTER
La Cour de cassation adopte la même position pour les salariés qui ne bénéficient pas du statut
protecteur. Elle estime qu’un arrêt maladie ne reporte pas la date d’un entretien préalable au
licenciement, à moins que le salarié ne l’ait demandé expressément ou que sa présence
s’avère impossible [Cass. soc., 23 janv. 2013, n° 11-22.724].
La présentation tardive de la demande de licenciement a rendu irrégulière la procédure au
terme de laquelle l’administration a autorisé le licenciement. L’autorisation administrative était
donc nulle, ce qui permet au salarié de solliciter sa réintégration dans son emploi ou un emploi
équivalent. Il dispose de deux mois pour former sa demande de réintégration [C. trav., art.
L. 2422-1 ; Cass. soc., 30 nov. 2004, n° 01-44.739].
À NOTER
Le salarié dont l’autorisation de licenciement a été annulée a droit à une indemnité
correspondant au préjudice subi entre son licenciement et sa réintégration effective ou, s’il n’a
pas demandé sa réintégration, entre le licenciement et la fin du délai de deux mois dont il
disposait pour le faire [C. trav., art. L. 2422-4 ; Cass. soc., 12 oct. 2005, n° 03-45.533].
Lorsqu’il ne demande pas sa réintégration, il a également droit aux indemnités de licenciement
de droit commun s’il en remplit les conditions (indemnité légale ou conventionnelle de
licenciement, indemnités de congés payés, etc.) [Cass. soc., 30 avr. 2002, n° 99-44.995].
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