Le rapport d`audit sur les grandes Le rapport d`audit sur les grandes

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Le rapport d`audit sur les grandes Le rapport d`audit sur les grandes
infos
avril 2003 numéro 76
la lettre
externe
Le rapport d’audit sur les grandes
infrastructures de transport
L’
ferme volonté de se positionner au cœur même du débat.
Pour alimenter la réflexion sur le projet Seine-Nord
Europe, ils apporteront toutes les réponses aux
problématiques soulevées et rappelleront sa pertinence.
Dans ce même esprit, Voies navigables de France et les
partenaires du transport fluvial de marchandises ont la
Aussi, cette lettre se fera lieu d’expression et de
témoignages sur la liaison fluviale à grand gabarit SeineNord Europe.
François BORDRY, Président de VNF
audit sur les infrastructures de transport,
commandé par le Gouvernement au Conseil
général des Ponts et Chaussées et à l’Inspection
générale des Finances, a ouvert un débat. En cela, il
répond à l’un de ses objectifs : contribuer à éclairer les
choix qui devront être effectués par les autorités politiques.
Point de vue de Maurice BERNADET,
Professeur à l'Université Lumière - Lyon 2, membre du Laboratoire d'Economie des Transports
La parution du rapport de la mission
chargée d’auditer les grands projets
d’infrastructures de transport a suscité
de nombreux remous. Au-delà de la
contestation ponctuelle de l’avis des
experts sur tel ou tel projet particulier,
la critique a mis en cause la compétence et l’objectivité des experts, en faisant
valoir que les conclusions du rapport
étaient globalement favorables au mode
routier et défavorables aux modes
« alternatifs ».
Pourtant, ces conclusions sont la conséquence logique du cahier des charges
dans le cadre duquel ces experts ont travaillé, et de l’approche qu’ils ont retenue,
celle du calcul économique. Les objectifs fixés par la lettre de mission aux
experts étaient clairs : il s’agissait de
faire le point sur les projets et d’évaluer
« leur intérêt socio-économique » dans
un contexte de rareté du financement
public. Le calcul économique répond
parfaitement à cet objectif puisqu’il
sommaire
Trois questions au président
pour Seine-Nord Europe page 3
fluvial de conteneurs en
du Comité des Armateurs
Rénovation de l’écluse
2002 page 4
Fluviaux page 3
d’Alfortville page 4
Soutien aux transports
Mobilisation des chargeurs
Progression du trafic
propres page 4
Oise, écluse d’Andrésy. © VNF, P. Lemaître
voies navigables
permet de prendre en compte l’ensemble
des coûts et des avantages, monétaires
et non-monétaires, dans une évaluation
unique, pour l’ensemble des acteurs
concernés, de mesurer la rentabilité de
l’investissement pour la collectivité et
de classer les projets selon ce critère.
Le calcul économique constitue un outil
d’aide à la décision irremplaçable. Mais
cela ne signifie pas que les résultats
auxquels il conduit soient indiscutables,
d’une part parce que sa mise en œuvre
est difficile, et d’autre part parce que la
décision publique peut (doit) prendre en
compte des considérations qui ne sont
pas intégrées dans la mesure de la
rentabilité socio-économique. Le cas du
canal Seine-Nord Europe illustre
parfaitement ces limites internes et
externes au calcul économique.
Des limites internes
Ces limites sont nombreuses, mais nous
voudrions en souligner plus particulièrement trois.
La rentabilité d’une infrastructure de
transport repose, avant tout, sur les trafics que cette infrastructure supportera.
Or, les prévisions de trafic sont particulièrement difficiles à établir pour une
infrastructure dont la vocation unique
est le transport de marchandises, et plus
que pour tout autre mode, pour le mode
fluvial. Les chiffres cités dans le rapport
des experts sont donc entachés d’une
forte incertitude, ce que ces experts
reconnaissent d’ailleurs volontiers. Mais
il est vrai qu’ils sont assez éloignés de
ceux qui permettraient de dégager une
rentabilité raisonnable.
Le calcul de la rentabilité prend en
compte le coût des effets environnementaux c’est-à-dire, dans le cas d’un
mode relativement peu polluant, le gain
qui résulte de l’usage de ce mode par
rapport à un autre dont les nuisances
sont plus importantes. Des valeurs tutéConvoi poussé sur la Seine. © VNF, P. Lemaître
avril 2003
numéro 76
la lettre externe de VNF
2
Port de Rouen. © SCAT.
laires ont été fixées, qui expriment un
compromis entre les estimations contradictoires de ceux qui attachent une
grande importance à l’environnement et
de ceux qui y sont moins sensibles. Il ne
fait pas de doute que notre société, de
plus en plus consciente des problèmes
que posent notamment les gaz à effet de
serre, sera conduite à augmenter, comme
elle l’a déjà fait, ces valeurs. Or celles
qui ont été retenues dans l’évaluation
de la rentabilité du canal Seine-Nord
Europe ne sont pas les dernières qui ont
été adoptées. Elles sont donc inférieures
aux valeurs actuellement admises et a
fortiori inférieures aux valeurs de
demain, avec, circonstance aggravante,
l’application à ces valeurs d’un taux
d’actualisation élevé.
En effet le taux d’actualisation adopté
en France est de 8 %, ce qui a pour
conséquence de laminer les avantages
(y compris environnementaux) liés à la
mise en service du canal qui sont à
échéance éloignée, ainsi que la valeur
résiduelle d’une infrastructure qui est
pourtant « durable ». Plus généralement, un taux d’actualisation élevé
défavorise les projets dont le retour
sur investissement n’est pas rapide, ce
qui est à l’évidence le cas d’une voie
fluviale.
Les thèmes que nous venons d’évoquer
renvoient à des débats complexes, et,
évidemment, ces arguments – et d’autres
que nous n’avons pu présenter –
devraient être justifiés et nuancés ; mais
ce n’est pas possible dans le cadre d’un
bref article.
Des limites externes
En l’état actuel de notre savoir-faire,
certains effets d’un investissement
d’infrastructure ne peuvent être pris en
compte.
On peut citer par exemple les conséquences en matière d’aménagement du
territoire (effets résultant de la mise en
relation des bassins de la Seine et du
réseau des voies d’eau qui débouchent
sur les ports de la mer du Nord ; effets sur
la dynamique des territoires concernés).
En fait, la logique du calcul économique
conduit naturellement à accorder la plus
forte rentabilité socio-économique aux
projets qui contribuent à la désaturation
des infrastructures existantes et à la
desserte des zones congestionnées. Or,
les pouvoirs publics peuvent vouloir
viser d’autres objectifs et notamment
celui d’un maillage mieux réparti sur l’ensemble du territoire.
Plus généralement, le calcul économique conduit à considérer que les
infrastructures les plus rentables sont
celles qui sont susceptibles d’attirer un
trafic important. Dès lors que nos concitoyens privilégient le mode routier, tant
pour le transport de personnes que pour le
transport de marchandises, la rentabilité
des infrastructures routières et autoroutières est, sauf cas particulier, plus
élevée que celle des infrastructures des
autres modes.
Mais une politique des transports, si
elle ne peut oublier que les investissements en infrastructure ont un coût et
négliger la rentabilité des sommes
investies, ne peut pas se laisser dicter
les décisions à prendre par cette seule
considération. Le développement des
infrastructures autoroutières est l’un
des facteurs explicatifs de la croissance
de la part de marché du mode routier.
On ne peut donc à la fois souhaiter un
rééquilibrage de la répartition modale
ou plus modestement vouloir arrêter la
perte de parts de marché des modes ferroviaire et fluvial, et continuer à ne
construire que des autoroutes. La cohérence implique de faire d’autres choix,
tout en sachant qu’un rééquilibrage de
la répartition modale, parce qu’elle
contredit les orientations spontanées du
marché, est difficile et a un coût, que le
calcul économique permet d’estimer.
Maurice BERNARDET
Quelle approche financière
proposez-vous ?
Si, comme le souligne les rédacteurs de
l’audit, le principal obstacle à la réalisation de Seine-Nord Europe est d’ordre
financier, il nous faut imaginer des
solutions innovantes. Ainsi, les armateurs fluviaux ont fait savoir à Gilles de
ROBIEN, ministre de l’Equipement et
des Transports, qu’ils soutenaient la
mise en place de dispositifs de prélèvement sur le mode routier pour financer
les investissements lourds du mode
fluvial.
Ce mécanisme financier est clairement
fondé sur le principe que les infrastruc-
tures fluviales doivent être particulièrement soutenues car elles permettent
un mode de transport économique,
sécuritaire et environnemental qui
profite à plusieurs générations.
Il permettra de surcroît des systèmes
d’adossement pour la souscription
d’emprunts de très long terme facilitant
des financements privés et confortant la
nécessaire participation publique (Etat,
collectivités, Europe).
Enfin, les transporteurs fluviaux, principaux utilisateurs de la liaison, sont
naturellement disposés à apporter une
contribution financière sous la forme
d’un péage supplémentaire afin d’assurer
a minima le coût d’exploitation.
Comment jugez-vous
l’évolution récente
des activités fluviales ?
Plusieurs éléments m’autorisent à une
forte satisfaction. Tout d’abord, le
transport fluvial a connu une croissance
de 3,3 % en 2002 malgré une conjoncture générale peu porteuse et la forte
hausse du carburant (+ 35 % en 8 mois).
En l’espace de 5 ans, il aura donc progressé de 22 %, alors que le fret routier
aura crû de 16,7 % et le fer chuté de
4,9 %.
De plus, les ports fluviaux multimodaux
font preuve d’un dynamisme toujours
plus profond, comme les ports maritimes dans l’accueil et le traitement des
activités fluviales. Les efforts des entreprises pour diversifier leurs marchés ont
été payants si j’en crois la croissance de
20 % des produits manufacturés en
2002.
Enfin, je voudrais particulièrement
saluer la fiabilisation et la modernisation progressive du réseau par VNF,
avec le soutien de l’Etat et des collectivités territoriales. Le lien entre infrastructures modernes et
croissance des trafics
est une évidence. D’où
l’importance de renforcer le maillage au grand
gabarit de nos bassins
de navigation et leur
raccordement au réseau
fluvial européen ! Seule
condition : une politique
volontariste comme en
Allemagne…
© VNF, P. Cheuva
3
avril 2003
Quels sont les enjeux du projet
Seine-Nord Europe ?
Pour les armateurs comme pour toute la
profession fluviale et un certain nombre
d’élus, ce projet est emblématique
d’une politique de développement
durable qui doit être réellement portée
par la volonté des pouvoirs publics.
Alors que l’audit rendu récemment au
Gouvernement préconise un report
important de sa réalisation pour des
contraintes budgétaires, le choix est
aujourd’hui on ne peut plus simple : il
s’agit soit de construire rapidement un
réseau de transport alternatif à la route,
soit d’y renoncer et en faire supporter
les conséquences à la collectivité.
J’ajoute que l’audit ne tient pas
suffisamment compte de l’essor du trafic
fluvial actuel (ni de ses importantes
perspectives liées à l’ouverture européenne) et occulte les investissements
massifs dans une flotte moderne qui en
découleraient.
La responsabilité à assumer est donc
éminemment politique. Je crains vraiment que l’ajournement de Seine-Nord
Europe soit compris par beaucoup
comme son abandon définitif. Mais, je
reste optimiste car j’espère que le
Gouvernement va rapidement réaffirmer la position prise par le Président de
la République au Comité Provoideau à
l’occasion des échéances électorales de
mai 2002 : « le mode fluvial constitue
une alternative crédible et de grande
qualité sur lequel peuvent et doivent
s’appuyer les politiques publiques »,
soulignant que Seine-Nord Europe était
un projet prioritaire.
Réagissant aux conclusions
de l’audit sur les infrastructures,
les chargeurs ont pris fermement
position en faveur de l’intermodalité et en particulier de la
réalisation du projet Seine-Nord
Europe à l’horizon 2020.
Par la voie de l’Association des
utilisateurs de transport de fret
(AUTF), qui représente les
entreprises industrielles,
commerciales et agricoles
françaises, ils rappellent que
l’intermodalité répond « aux
besoins des milieux économiques »
et craignent que le report des
projets d’infrastructures
complémentaires à la route n’isole
la France « sur le plan logistique
et donc sur le plan économique ».
En conséquence, ils expriment
le souhait que Seine-Nord Europe
soit confirmé comme projet
prioritaire.
Concrètement, les préoccupations
des chargeurs ont trait au fait que le
corridor Nord (routier et ferroviaire),
déjà l’un des plus empruntés de
France, ne pourra pas absorber
toute l’augmentation des trafics.
Sans Seine-Nord Europe, ce sera
tout simplement l’engorgement !
Selon leurs prévisions, ce seront pas
moins de 23 millions de tonnes
de marchandises qui pourront
basculer sur le futur canal à grand
gabarit, notamment des céréales, du
sable, du charbon, des engrais, des
produits métallurgiques et des
conteneurs.
Plus que jamais, l’AUTF appelle
donc à une « politique tournée
vers l’avenir » qui fasse toute
sa place au fluvial. Comme
l’ensemble des modes
complémentaires à la route, celui-ci
doit « bénéficier d’un réseau
en infrastructures structuré
et à dimension européenne ».
Un atout supplémentaire pour le
transport fluvial que les chargeurs
reconnaissent déjà économique,
performant, fiable, sûr et
respectueux de l’environnement.
numéro 76
Président du Comité des Armateurs Fluviaux (CAF)
qui rassemble les compagnies de navigation.
MOBILISATION DES
CHARGEURS POUR
SEINE-NORD EUROPE
la lettre externe de VNF
Tr o i s q u e s t i o n s à
Jean-François DALAISE
Rénovation de l’écluse
d’Alfortville
Carnet
VNF
Jean-Louis JEROME remplace
André BAYLE au poste de
directeur interrégional, chef du
Service de la navigation
de Strasbourg.
CNT
© VNF, P. Lemaître
Par décret en date du 5 mars dernier,
Alain GILLES a été nommé
Président du Conseil national
des transports.
INE
Anne-Marie JORRITSMA,
ancienne ministre des transport
des Pays-Bas, a été élue présidente
de Inland Navigation Europe,
la Fédération européenne
pour le transport en eaux intérieures,
en remplacement de Hilde
BOLLEN (Flandre-Belgique).
D’un caractère exceptionnel, le site sera par
ailleurs mis en valeur
(création d’espaces verts,
aménagement d’une
promenade publique,
installation de signalétique et de mobilier
urbain…) et verra la construction d’une
passe à poissons. Ces projets sont appelés
à recevoir le soutien financier de la région
Ile-de-France, du département du Val-deMarne et de l’Agence de l’eau SeineNormandie.
Grâce à l’achèvement de la rénovation de
l’écluse d’Alfortville, le programme de
modernisation des ouvrages de Port-àl’Anglais entre dans sa phase finale.
Lancés en juin 2001, les travaux ont
d’abord concerné le barrage, qui joue un
rôle essentiel dans le maintien des plans
d’eau nécessaires à la navigation (20 000
bateaux de marchandises en 2002) et à
l’alimentation en eau potable de 2,5 millions de Franciliens. Ils s’achèveront en
novembre 2003 avec la rénovation de
l’écluse de Vitry-sur-Seine. D'un coût
total de plus de 10 millions d'euros, le programme est financé dans le cadre des
contrats de plan Etat-région.
du trafic fluvial de conteneurs en 2002
En 2002, sur l’ensemble du réseau de
voies navigables, le trafic de conteneurs
progresse de 14,8 % en EVP-km et de
3,7 % en EVP pour un volume total de
220 625 EVP (équivalent vingt pieds). En
cinq ans, il a été multiplié par deux en
volume, marquant ainsi l’intérêt des chargeurs pour le mode fluvial.
Représentant plus de la moitié des trafics,
le bassin du Rhin continue sa croissance
(+ 10 %). Mais c’est sur le bassin du
Rhône que la progression est la plus spectaculaire : on y enregistre un doublement
de l’activité grâce à l’implantation de la
Strasbourg. © VNF, P. Cheuva
Compagnie Rhône-Saône Conteneurs qui
affiche pour la première fois un exercice
plein (21 837 EVP).
En forte contraction (– 25 %), le bassin du
Nord subit l’abandon provisoire du marché de transport de déchets ménagers
entre Lille et Blaringhem, que ne compense pas l’évolution significative du trafic
international au Port de Lille (+ 22,7 %).
Quant au bassin de la Seine, la baisse de
2,5 % enregistrée par Logiseine s’explique
par le recul de la liaison Rouen-Le Havre
contrairement aux relations GennevilliersLe Havre et surtout Gennevilliers-Rouen.
Soutien aux transports propres
Sur la Lys. © VNF, P. Cheuva
avril 2003
numéro 76
la lettre externe de VNF
4 Progression
Entièrement rénovée, l'écluse à grand
gabarit d’Alfortville sur la Seine (180 m)
sera remise en service le 28 avril prochain.
D’une durée d’un an, les travaux ont principalement consisté à remplacer les anciennes portes par d’autres moins lourdes
et à changer les organes de manœuvre.
Conséquence : une réduction d’un tiers du
temps d’éclusage qui est ramené à 10 mn !
175 rue LudovicBoutleux
boîte postale 820
62408 Béthune
cedex
téléphone
03 21 63 24 24
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Le 5 mars dernier, la Commission européenne a autorisé la France à mettre en
place un régime d'aides pour encourager les
moyens de transports propres, c’est-à-dire
peu émetteurs de gaz à effet de serre. Ainsi,
jusqu'à la fin de l'année 2007, l'agence de
l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) pourra octroyer des aides à
hauteur de plus de 20 millions d'euros par
an, notamment pour promouvoir la réalisa-
tion d'économies d'énergie dans le secteur
du transport fluvial. Ces mesures proposées
par la France suivent les orientations du
Livre Vert (« Vers une stratégie européenne
de sécurité d'approvisionnement énergétique ») et du Livre Blanc (« La Politique
européenne des transports : l'heure des
choix ») qui préconisent l'utilisation de
modes de transport plus efficaces du point
de vue énergétique et plus propres pour
lutter contre notre dépendance énergétique
et honorer les engagements environnementaux européens.
Voies navigables infos
Directeur de la publication
Réalisation Penez Edition Lille
la lettre externe de VNF
Christian JAMET rédactrice
imprimerie SA Léonce Deprez
est éditée par Voies navigables
en chef Marie-Madeleine
ISSN 1268-4716 numéro de
de France.
GALISSON rédacteur en chef
commission paritaire 3113 ADEP
adjoint Antoine QUIDU.