L`Express - Cinéma l`Horloge Meximieux
Transcription
L`Express - Cinéma l`Horloge Meximieux
06/12 MARS 13 Hebdomadaire Paris OJD : 436702 29 RUE DE CHATEAUDUN 75308 PARIS CEDEX 9 - 01 75 55 10 00 Surface approx. (cm²) : 464 N° de page : 98 Page 1/1 ARTS ET SPECTACLES CINEMA Le fin No de l'Histoire Le nouveau film de Pablo Larrain, dernier d'une trilogie autour de la dictature chilienne, revient sur la campagne qui mena Augusto Pinochet vers la sortie. Le réalisateur en termine ainsi avec un sentiment de culpabilité. Explications. L a dictature chilienne, instaurée par Augusto Pinochet et sa junte militaire le ii septembre 1973, s'est finie il y a vingt-cinq ans, mais les séquelles demeurent. Le réalisateur Pablo Larrain, 36 ans, auteur de No, en est une preuve vivante. « Je raconte des histoires, je ne suis pas historien », prévient-il. De cette période trouble et violente il ne garde que des souvenirs imprécis et quèlques sensations, lin malaise, aussi. Comme un sentiment de culpabilité non avoué. Alors il expie. Et si, dans No, il raconte la victoire de l'opposition en 1988 lors d'un référendum organisé par un Pinochet en mal de reconnaissance internationale, ce n'est pas pour applaudir à tout-va. Pablo Larrain y décrit par le menu la campagne menée par un fils de pub joué par Gael Garcia Bernal. Un regard politique, grinçant, décalé CAUSTIQUE Plongée (voir les pages Guide de L'Express dans le Chili de 1988, Styles'). avec Gael Garcia Le choix de ce personnage principal, dont les motivations ont plus à voir avec le goût de la compétition qu'avec celui de la démocratie, n'est pas étonnant. Pablo Larrain, fils d'un avocat devenu, depuis 1994, un homme politique influent, reconnaît n'avoir « jamais été exposé à la moindre violence ni connu la pauvreté ». « Durant la dictature, et même après, j'ai vécu dans le confort. » La confidence semble gênée aux entournures. « Mes parents, de droite, ont voté oui au référendum, ajoute-t-il. Pour Pinochet, donc. Comme des millions d'autres Chiliens. Car pensez bien une chose : pendant quinze ans, les Chiliens n'avaient aucune infor« Moi, je ne légitime rien. Je critique et je rappelle », confie le réalisateur Pablo Larrain. mation et l'économie NO 4544255300509/GAB/ACR/2 était au beau fixe. Apprendre la vérité fut terrible. » En 2007, après avoir fondé sa société de production avec l'aide de son père, justement, Pablo Larrain décide de régler quèlques comptes avec l'histoire de son pays et se lance dans une trilogie. Tony Manero, d'abord, suit le périple assassin d'un quinquagénaire que la police, trop occupée à arrêter les opposants politiques, laisse tranquille. Santiago 73, post mortem, ensuite, dans lequel l'employé d'une morgue dissèque les corps des victimes de la junte militaire, dont celui de Salvador Allende, président « suicidé » le jour du putsch. Enfin, No, vrai-faux documentaire où les images d'archives se mêlent à celles tournées par le cinéaste dans une pseudo-esthétique d'époque. « Au spectateur de décrypter ce qui relève de la fiction et de la réalité, lance Pablo Larrain. Mon but est de créer une illusion. » Et, auprès d'une partie du public chilien, un malaise. Bernal, dans « La plupart des Chiliens le rôle d'un pubard veulent idéaliser le passé » charge de la campagne Quand le film sort à Santiago, anti-Pinochet, lors en août 2012, l'accueil critique est du référendum. mitigé. « Les mauvais articles sont liés à notre état d'esprit, analyse Pablo Larrain. La plupart des ChiPinochet, liens veulent idéaliser le passé en et après légitimant les faits désagréables u septembre 1973 que je relate. Moi, je ne légitime Coup d'état du général rien. Je critique et je rappelle. » Augusto Pinochet. Pour la dernière fois. Car, après 19 août 1976 Naissance No, Larrain promet de changer de de Pablo Larrain, sujet. « On pourrait réaliser des à Santiago (Chili). milliers de films autour de cette 5 octobre 1988 période. Mais trop de mystères Référendum sur la prolongation resteront sans réponse. Voilà trois du mandat de Pinochet. films que j'essaie de décrire cette 55,9% contre. "vérité invisible", et je ne com10 décembre 2006 prends toujours pas pourquoi il y Mort d'Augusto Pinochet. a eu toutes ces horreurs. » Une 2007 Tony Manero, incompréhension qui, paradoxade Pablo Larrain. lement, donne route sa profon2010 Santiago 73, deur à No. • CHRISTOPHE CARRIÈRE post mortem, du même Larrain. No, de Pablo Larrain. En salles. Eléments de recherche : NO : film de Pablo Larrain, sortie en salles le 06/03/13, passages significatifs