Discours aux retraités 2016 Chers jeunes retraités, Ce n
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Discours aux retraités 2016 Chers jeunes retraités, Ce n
Discours aux retraités 2016 Chers jeunes retraités, Ce n’est pas pour vous flatter que je vous appelle ainsi. Vous êtes réellement jeunes, car vous êtes à l’aube du crépuscule, vous êtes des beaux bébés burinés par l’expérience, vous êtes en phase de grossesse de la vieillesse. Tout ça pour dire que le temps, désormais, compte triple pour vous. D’où le terme « troisième âge ». Du point de vue statistique, vu notre espérance de vie en Suisse, qui est la plus élevée au monde, c’est toute une enfance et une adolescence qu’il vous reste, en moyenne, à consommer. C’est pourquoi je trouve que «retraités» n’est pas l’appellation idoine. Libérés serait mieux. Encore que… Selon mon expérience, les personnes de mon entourage n’ont jamais été aussi occupées durant leur vie professionnelle que depuis qu’elles sont à la retraite. On doit leur écrire des mois à l’avance pour passer prendre un café, car elles ont des agendas de ministres. Entre les petits-enfants, les voyages de classe ou en solo, les musées, les emplettes au Point Vert ou chez Hornbach, les vernissages d’exposition des copines peintres et les enterrements de ceux qui sont retraités depuis deux décennies … c’est la folie! Et surtout, cela prouve qu’on ne devrait jamais définir les gens selon leur situation professionnelle. Nous nous sommes, surtout ici en Suisse, enchaînés à notre travail. Or, même si nous avons l’impression de vivre pour le travail, c’est plutôt le travail qui nous fait vivre. Autrement dit, nous arrivons à un moment donné — et c’est votre cas — à ce seuil où ce n’est plus à nous de faire tourner la famille, l’entreprise et la société, mais à la société de nous rendre un peu de notre sueur. Ce n’est que justice! Im Schweisse eures Angesichts habt ihr nun ein Berufsleben lang euer Brot und das Brot eurer Angehörigen verdient. Nun ist die Zeit gekommen, um den Pflug eurer beruflichen Tätigkeit auf dem letzten Drittel eures Lebensfeldes stehen und rosten zu lassen. Dann werden keine Kürbisse, Kartoffeln oder Mais darauf wachsen, sondern Unkraut. Und das ist gut so, denn Unkraut verdirbt nicht. Und was nicht verdirbt ist unsterblich! Das bedeutet nichts anderes als dass euch irgendwann das ewige Leben blüht. Und ewig währt ja bekanntlich am Längsten. Auch wenn die Ewigkeit einem sehr lang vorkommen kann, besonders gegen Ende zu. Je vous envie donc un peu, moi qu’on veut sans cesse mettre à la retraite prématurément. Spätestens im nächsten Frühling sollen Herbst und Winter für mich schon vor dem Sommer kommen. Dann bin ich Rentner wie ihr und hoffe, im nächsten Winter irgendeinen Politiker über die Vorzüge des Alters, das Jungbleiben im Kopf und die Zeitlosigkeit der Herbstzeitlosen referieren zu hören. Bla bla bla! Aber noch ist es nicht soweit. Man weiss ja nie, es passieren manchmal Unfälle und man wird wider Erwarten zu einer weiteren Legislatur verdonnert. Ah, si mes détracteurs savaient combien j’ai entassé de livres à lire et de DVD à regarder, combien j’ai de projets de romans et de poèmes encore à écrire, ils ne seraient plus si pressés de m’octroyer du temps libre pour me punir et me faire souffrir. Je risquerais de m’y plaire et d’y trouver mon bonheur! Voilà pourquoi votre nouveau statut est enviable. Bien sûr, vous serez sollicités plus que jamais, bien sûr, votre agenda va se remplir plus vite que prévu. Mais vous aurez toujours la main sur la barre. Et vous pourrez toujours dire «hola!», et mettre le cap sur une destination inconnue: et cette destination, c’est vous-mêmes! Je ne peux donc, chers retraités, que vous souhaiter une traversée sûre et sereine vers cette destination exotique que vous n’avez peut-être encore jamais explorée: vous, vos besoins, vos goûts et vos envies! Vous l’avez vraiment méritée! Die Zeit ist wirklich gekommen, um zu euch selber zu finden. Dazu braucht ihr euch nur gehen zu lassen, dazu braucht ihr nur etwas Zeit zu verlieren, obwohl ihr die Zeit gar nicht verlieren könnt, weil sie euch nicht gehört. Was aber nicht verloren werden kann, das kann auch nicht aufgehäuft werden. Es gibt, trotz aller menschlichen Bemühungen, nach dem Motto „time is money“ die Zeit in Geld zu verwandeln kein Zeitkapital, das man für später aufsparen oder das einem gestohlen sein kann. Es gibt nur das Sein. Intransitiv. Sein. Nicht etwas sein. Nicht etwas sein wollen, weil man mal was gewesen ist. Einfach nur sein. Ohne Wenn und Aber. Wenn euch das gelingt, dann seid ihr dort wo der Raum endlos ist und die Zeit keine Grenzen hat: im Unendlichen. Das Unendliche ist nicht morgen, das Unendliche war nicht gestern, es ist hier und jetzt in eurer Seele gegenwärtig und verbindet alles, was einst war mit dem, was einst sein wird. Voilà, après cette minute philosophico-œcuménique, je vais terminer cette petite élucubration par un petit poème que j’ai écrit ces derniers temps au sujet de l’existence et de notre horloge biologique : Une vie Être une image en devenir Dormant tout au fond de la pierre Surgir face à son avenir Avant d’être entouré de lierre S’extraire comme d’un calice Sous la main ferme du sculpteur, Savoir la force créatrice Agissant depuis l’intérieur Et puis, avec le temps qui passe, Se fissurer et se défaire, Ne pas se voir dans une impasse Comme celui qui désespère Devenir un château de sable Glisser dans l’eau, tout en douceur, Se fondre dans l’azur affable Sans en éprouver de rancœur Dans un mouvement immuable Et malgré un destin pervers Revenir grain par grain au sable, Et goutte après goutte à la mer. Oskar Freysinger Conseiller d’Etat