Le Monde Argent et Placement

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Le Monde Argent et Placement
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Mardi 1er décembre 2015
| ARGENT & PLACEMENTS |
Je dois récupérer 10000 euros
investis dans un fonds commun
de placement dans l’innovation.
Vais­je payer des pénalités?»
les fonds communs de placement dans l’innovation (FCPI) sont des
fonds destinés à investir dans le capital de PME en vue de réaliser une
plus­value à terme. La souscription de parts de FCPI ouvre droit à une
réduction de l’impôt sur le revenu ou de l’impôt de solidarité sur la
fortune (ISF). En contrepartie, le souscripteur s’engage à conserver ses
parts pendant au moins cinq ans. Le non­respect de cet engagement
vous oblige à rembourser le fisc de la réduction d’impôt obtenue. Des
exceptions sont néanmoins prévues en cas de licenciement, d’invali­
dité ou de décès. Les conditions pour récupérer votre mise dépendent
du règlement du fonds dans lequel vous avez investi: la plupart inter­
disent les sorties anticipées et, lorsqu’elles sont prévues, il faut respec­
ter un calendrier précis et les sommes sont plafonnées. p
Malgré sa baisse de rendement,
le fonds en euros de l’assu­
rance­vie ne semble pas une
si mauvaise option si je
ne souhaite pas prendre
de risque…
Vous avez raison, si vous ne vou­
lez prendre aucun risque, le
fonds en euros reste actuelle­
ment le meilleur actif. Mais at­
tention, la baisse du rendement
va se poursuivre et, d’ici deux
ans, son taux net pourrait très
bien être inférieur à l’inflation.
C’est pourquoi nous conseillons
généralement de diriger une par­
tie de la somme placée sur ce
fonds en euros vers des supports
dits patrimoniaux. Ces derniers
investissent sur les marchés fi­
nanciers et ne sont donc pas ga­
rantis, mais ils limitent au maxi­
mum le risque et permettent
d’espérer des gains compris entre
3% et 6% en moyenne par an.
Quelle est la démarche pour
changer le bénéficiaire de
mon contrat d’assurance­vie ?
Si vous n’aviez pas indiqué à
cette personne qu’elle en était
bénéficiaire, c’est très simple.
Vous pouvez modifier la clause
directement dans la police d’as­
surance, par papier libre ou par
voie testamentaire. En théorie,
vous n’êtes même pas obligé
d’informer la compagnie d’assu­
rances, mais cela est vivement
conseillé, car l’assureur non
informé qui aura versé de bonne
foi les fonds à une personne qu’il
pensait être le bénéficiaire ne
serait pas tenu pour responsable.
L’opération se complique si l’an­
cien bénéficiaire avait accepté de
recevoir le contrat (il suffit d’un
simple courrier pour faire office
d’acceptation). Dans ce cas, vous
ne pourrez pas modifier la clause
sans son consentement.
Ma mère, qui souffre de
la maladie d’Alzheimer, vit
chez moi. Le coût des aides
à domicile s’élève à plus du
double de son allocation
personnalisée d’autonomie
(APA). Comme elle n’est pas
imposable, ne devrais­je pas
payer à sa place et déduire
cette somme de mes revenus ?
Pour rattacher une personne à
votre foyer fiscal, il faut qu’elle
vive sous votre toit et soit titu­
laire d’une carte d’invalidité (avec
incapacité d’au moins 80 %), que
ce soit votre mère ou non. Si c’est
votre cas, il faut remplir le ca­
dre C de la déclaration n°2042
(personnes invalides à charge vi­
vant sous votre toit). Vous béné­
ficierez alors, au titre du quotient
familial, d’une part entière sup­
plémentaire (ou 1,5 part s’il s’agit
de la 3e personne à charge), mais
vous devrez rajouter ses revenus
aux vôtres (sauf l’APA qui est exo­
nérée). L’autre solution consiste
à ne pas rattacher votre mère à
votre foyer fiscal, mais à déclarer
les frais d’aide à domicile enga­
gés par vous­même dans la li­
mite de 20000 euros annuels.
Vous bénéficierez d’un crédit
d’impôt de 50 % de ces dépenses.
Vous pourrez aussi déduire une
pension alimentaire dans la
limite de 3403 euros (sans avoir à
fournir de justificatifs) et les
autres dépenses à leur montant
réel (il faudra être à même de les
justifier).
FORUM
En 2015, les travaux de
jardinage resteront­ils
déductibles à 50 % ?
Le projet de loi de finances pour
2016 qui sera adopté en décem­
bre et s’appliquera pour les reve­
nus de l’année 2015 ne prévoit
pas de supprimer la réduction
d’impôt (ou le crédit d’impôt,
selon que vous êtes en activité
ou non) qui est accordée si vous
avez recours aux services d’un
tiers pour vos travaux de jardi­
nage. L’avantage fiscal resterait
donc égal à 50 % du montant des
dépenses réalisées, retenues
dans une limite de 12000 euros
majorée de 1500 euros par en­
fant à charge et par membre du
foyer fiscal âgé de plus de 65ans,
sans toutefois pouvoir excéder
15000 euros.
Pacsés depuis décembre 2014,
nous vivons dans des appar­
tements différents du fait
de mon nouveau travail.
Comment cela se traduit­il au
niveau des impôts ?
Les partenaires de pacs font en
principe l’objet d’une imposition
commune, sauf si, dans la con­
vention de votre pacs, vous avez
retenu le régime de la séparation
de biens et que vous résidez sé­
parément. En cas d’imposition
commune, vous pourrez déduire
de vos revenus les frais de double
résidence, c’est­à­dire les dépen­
ses supplémentaires de loge­
ment (loyers), de nourriture et de
voyage. Cependant, pour obtenir
signé
cette déduction, il faut que
cette situation soit contrainte et
ne résulte pas d’un choix pour
convenance personnelle.
Mon fils, qui perçoit le RSA,
vit chez moi. Cette année,
il a déclaré ses revenus séparé­
ment. Peut­on revenir sur cette
décision et l’inclure dans ma
déclaration ?
Vous pouvez uniquement in­
clure votre fils dans votre décla­
ration s’il a moins de 21 ans ou
s’il a moins de 25 ans et est en
poursuite d’études, ou s’il est
infirme. Vous bénéficierez alors
d’une demi­part ou d’une part
supplémentaire, selon le nom­
bre d’enfants à charge. Attention,
avant toute décision, vérifiez
bien que le rattachement de
votre fils à votre foyer fiscal ne
viendra pas réduire ses droits au
RSA. Si ces conditions ne sont
pas remplies, vous pouvez tout
de même déduire de vos revenus
une somme de 3 403 euros
correspondant aux dépenses
de nourriture et d’hébergement.
Dans tous les cas, il est possible
de rectifier les déclarations des
revenus, en adressant un cour­
rier au centre des impôts et en
corrigeant votre déclaration le
cas échéant. p
frédéric cazenave, avec
la société cyrus conseil
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Plus de réponses à la rubrique « Fo­
rum »
cagnat
Dommages
collatéraux
droit fiscal
Philippe Bruneau
Président du Cercle des fiscalistes
U
n amendement, soutenu par
Jean­Marc Ayrault et adopté
par l’Assemblée nationale le
12 novembre, propose de rem­
placer une partie de la prime d’activité,
appelée elle­même à se substituer à la
prime pour l’emploi et au RSA activité, par
une baisse équivalente de la contribution
sociale généralisée (CSG) sur les salaires
allant jusqu’à 1,34 smic. En pratique, la
CSG, qui frappe à hauteur de 7,5 % la ré­
munération d’un salarié gagnant le smic,
tomberait à 0,75 %. Rappelons tout
d’abord que le taux de la CSG a été aug­
menté de 5,1 % entre 1997 et 1998. A l’épo­
que, les salariés ont été en contrepartie
soulagés d’une cotisation de Sécurité so­
ciale, ce dont n’ont pas bénéficié les retrai­
tés et les épargnants. Cela explique que la
CSG est déductible du revenu imposable,
à hauteur de 5,1 points, comme l’était la
cotisation de Sécurité sociale.
On peut alors légitimement se deman­
der s’il est normal que l’assurance­santé
devienne gratuite pour une catégorie ci­
blée d’assurés sociaux en activité, alors
que l’effort contributif serait inchangé sur
les retraites, les allocations de chômage et
les produits d’épargne perçus par les titu­
laires de revenus équivalents. Cela res­
semble fort à une rupture du principe de
l’égalité devant l’impôt. Le Conseil consti­
tutionnel appréciera.
La baisse de la CSG aurait en outre des
effets indésirables. Ses bénéficiaires ver­
raient augmenter leur base d’impôt sur le
revenu de 5,1 % du salaire brut, ce qui leur
reprendrait donc au moins 14 % de l’avan­
tage. Et ce n’est pas tout. Comme le révèle
le douloureux exemple récent des retrai­
tés, leur revenu fiscal de référence subirait
une hausse venant mécaniquement dé­
grader leurs droits à l’exonération ou au
plafonnement des impôts locaux. Les ef­
fets de l’amendement Ayrault montrent
à quel point toute nouvelle mesure doit
être pesée au trébuchet afin d’éviter les
externalités négatives. p
Ledonnondéclaré,uncadeauempoisonné
| «Oublier»dedéclarerunedonationaucentredesimpôtsn’estpasunboncalcul,
carelleadeforteschancesd’êtrerévéléelorsdurèglementd’unesuccession
famille
N
oël approche et vous envisa­
gez de donner un coup de
pouce financier à vos en­
fants ou petits­enfants ? Le
plus simple : faire un présent d’usage
(somme d’argent, bijou, montre ou
même voiture). Ce cadeau échappe aux
droits de donation, n’a pas à être déclaré
à l’administration fiscale et ne sera pas
pris en compte dans la succession
comme peut l’être une donation. Il doit
toutefois être réalisé à l’occasion d’un
événement particulier (fête religieuse,
anniversaire, mariage…) si vous ne vou­
lez pas prendre le risque qu’il soit requa­
lifié en donation. Pour ne pas être con­
testé par le fisc, sa valeur doit rester mo­
dique par rapport à votre patrimoine.
« L’administration fiscale ne fixe pas de
seuil, mais les juges apprécient au cas
par cas », explique Sylvain Guillaud­Ba­
taille, notaire à Paris.
Sans trop de formalités, il est aussi
possible de donner une certaine
somme d’argent. Si vous avez moins de
80 ans et que votre enfant (petit­enfant
ou même arrière­petit­enfant) est ma­
jeur, vous pouvez ainsi lui verser jusqu’à
31 865 euros sans avoir le moindre im­
pôt à acquitter et ce tous les quinze ans.
Il suffit de déposer une déclaration spé­
cifique (n° 2731), en double exemplaire,
au service des impôts dans un délai
d’un mois.
Une autre option pour donner de la
main à la main consiste à réaliser un
don manuel. Un notaire n’est pas obli­
gatoire, mais vous avez tout intérêt,
comme pour le don de sommes d’ar­
gent, à le déclarer au centre des impôts,
cette fois via un autre formulaire
(n° 2734 ou n° 2735 selon le montant).
Certes, une fois déclaré, le don devient
taxable. Mais uniquement s’il excède le
montant de l’abattement applicable se­
lon le lien de parenté entre donateur et
donataire. Or, celui­ci est élevé : un pa­
rent peut, tous les quinze ans, donner
jusqu’à 100 000 euros à son enfant sans
que celui­ci ait de droits à payer (au­delà,
les sommes sont taxées à un taux pro­
gressif de 5 % à 45 %, selon leur mon­
tant). Surtout, la déclaration date la
transmission de manière incontestable
et permet donc de faire débuter le délai
de quinze ans au terme duquel l’abatte­
ment se reconstitue.
« A défaut, ce délai de quinze ans ne
court pas et les droits de succession se­
ront plus lourds au décès du donateur,
puisque le montant du don manuel s’im­
putera sur l’abattement global de
100 000 euros », précise Nathalie Couzi­
gou­Suhas, notaire à Paris. Le donataire
paiera donc lors de la succession ce qu’il
aura économisé en taxes au moment de
Un parent peut,
tous les quinze ans,
donner jusqu’à
100 000 euros
sans que son enfant
ait de droits à payer
la donation. Car un don manuel a de
fortes chances d’être révélé lors du rè­
glement d’une succession (voire à l’oc­
casion d’un contrôle fiscal). Dans ce cas,
les droits de mutation sont réclamés
sur la valeur du bien au moment de la
découverte de la transmission, et non à
la date à laquelle elle a eu lieu.
Un don manuel présente aussi un ris­
que sur le plan civil en cas de conflit en­
tre les enfants lors du décès d’un des
deux parents. En effet, cette donation
équivaut à une avance sur la part d’hé­
ritage, qui sera alors revalorisée. « Par
exemple, une personne donne une
somme identique à ses deux enfants. Le
premier s’en sert pour acheter un bien
immobilier et le second la dépense. A
l’ouverture de la succession, si le bien
immobilier a pris de la valeur, celui qui a
investi devra dédommager celui qui a
dépensé l’argent en partageant sa plus­
value », explique Nathalie Couzigou­
Suhas. Ambiance garantie…
La donation­partage permet d’éviter
ce problème. Elle est réalisée chez un
notaire et associe tous vos héritiers. Elle
permet de figer définitivement la valeur
des biens au jour de la donation et d’em­
pêcher une éventuelle action d’un en­
fant contre ses frères et sœurs. Atten­
tion : dans le cadre d’une donation­par­
tage, il est nécessaire d’attribuer des
biens distincts à chaque bénéficiaire.
« A défaut, cela sera considéré comme
une donation simple », précise Nathalie
Couzigou­Suhas. p
pauline janicot
Lexique
Présent d’usage Ce cadeau réalisé
lors d’un événement précis échappe
à tout formalisme et aux droits de
donation.
Don manuel Il s’agit de la remise
d’un bien donné à la personne de son
choix, sans passer par un notaire. Ce
don ne peut porter que sur des biens
susceptibles d’être matériellement
transmis, comme de l’argent (chèque,
espèce, virement), une voiture, des
bijoux, des meubles…
Donation notariée Cet acte, réalisé
chez un notaire, est obligatoire lors
d’un don portant sur un bien immobi­
lier ou lors d’une donation­partage. Son
coût est plus élevé qu’un don manuel
(rédaction de l’acte, frais de publicité
foncière pour un bien immobilier…),
mais il permet plus de sécurité. Les frais
varient selon le montant donné entre
0,495 % et 2,4 %, pour le don de som­
mes d’argent ou de titres cotés, et entre
1,03125 % et 5 % pour les autres biens.

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