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N° 9 - OCTOBRE 2006
É D I TO R I A L
A S S O C IATI O N A ÉR O NAUTI Q U E
&
A STR O NAUTI Q U E
ITAR – EAR*
Bien avant le 11 septembre 2001 existait, dans
le cadre de l’Office of Munitions Control, une
réglementation américaine pour les exportations
de matériels de guerre, de biens et de technologies
à double usage, visant à empêcher la fuite des technologies de pointe vers des pays ennemis ou à risque. Cette
réglementation était appliquée avec plus ou moins de
souplesse selon les cas et les intérêts politiques ou économiques des pays, à commencer par ceux des EtatsUnis eux-mêmes.
Après les attentats, c’est non seulement une application stricte de ces règles qui a été imposée mais leur
renforcement, résultant en une contrainte énorme pour
les industriels et les fournisseurs. A l’évidence, cette
réglementation est devenue une priorité pour la France
et pour de nombreux pays luttant contre la prolifération
d’armes et le transfert de technologies à des Etats ennemis, terroristes ou sous embargo. Dans ce contexte il est
clair que, pour des raisons de sécurité nationale et de
domination économique, les Etats-Unis cherchent à préserver leurs avantages technologiques par un arsenal de
réglementations pour contrôler au mieux leurs échanges
d’informations et de biens sensibles.
Si les grands industriels ont pu s’organiser en créant
des services spécialisés au sein de leurs unités d’import-export d’équipements, il n’en est malheureusement
pas de même pour les petites entreprises, confrontées
du jour au lendemain à d’énormes problèmes qu’elles
ont du mal à résoudre. La complexité des procédures, la
lenteur des obtentions de licences ont eu des conséquences économiques souvent désastreuses ou ont
découragé leur volonté d’exportation.
Une politique « ITAR-Free » totale, s’affranchissant de
l’utilisation de composants et savoir-faire US, serait
irréaliste et coûteuse et grèverait la compétitivité de nos
produits, sans pour autant éliminer la nécessité du
contrôle à l’exportation des technologies sensibles.
Aider les entreprises du secteur aéronautique et spatial
C’est pourquoi, dans le cadre de la Commission internationale de l’AAAF il nous a paru nécessaire d’aider les
entreprises du secteur aéronautique et spatial n’ayant
pas la structure ou les moyens de faire face à ces
nouvelles procédures ou insuffisamment armées pour
DANS CE NUMÉRO : LA VIE DES GROUPES RÉGIONAUX
NOUVELLE DE… SMART 1
10
DE
F R AN C E
adopter la bonne marche à suivre auprès des
autorités américaines. Un sondage préliminaire
auprès des entreprises nous a conforté dans
l’idée de mener une action de sensibilisation et
d’information.
Le séminaire ITAR-EAR**
C’est ainsi que la commission internationale de l’AAAF
s’est rapprochée du GIFAS pour préciser les besoins
des industriels et organiser une journée d’information, le
19 septembre dernier, qui a réuni plus de deux cents
participants de tous les milieux industriels : PME/PMI et
grands groupes.
Cette opération n’était évidemment pas anti-américaine,
bien au contraire. Elle visait à aider à respecter strictement les règles ITAR-EAR car nous partageons les
mêmes soucis : protéger les hautes technologies, éviter
que leur usage ne soit détourné. N’oublions pas que les
sociétés US exportatrices sont soumises aux mêmes
contraintes avec les mêmes risques de sanctions.
Les débats ont permis d’éclairer bon nombre d’interrogations. La moindre n’étant pas la contradiction qui peut
exister pour un industriel, entre l’application de cette
réglementation américaine et les règles françaises et
européennes imposées dans certains appels d’offre.
Ces travaux seront poursuivis au sein des instances du
GIFAS afin d’essayer de dégager des pistes d’action
pour le futur.
Conclusion
La réussite de ce séminaire a montré tout l’intérêt d’une
coopération plus étroite entre les commissions internationales du GIFAS et de l’AAAF pour mieux communiquer avec le milieu industriel aéronautique et spatial. Je
souhaite que les conseils d’administration du GIFAS et
de l’AAAF apportent leur support à la poursuite de cette
fructueuse coopération sur d’autres sujets aussi concrets. Enfin mille merci à mes collègues de l’AAAF et
plus particulièrement à Pierre BESCOND qui ont su
pallier mon indisponibilité en phase finale du projet pour
assurer le succès de ce séminaire.
Claude GOUMY,
AAAF, COMMISSION INTERNATIONALE
* International Traffic in Arms Regulations - Export Administration Regulations
** Les principaux résultats de cette journée sont présentés dans l’article de Pierre
BESCOND et Louis LAIDET publié dans ce même numéro de La Lettre.
2-5
• LA VIE DES COMMISSIONS TECHNIQUES
• LES HISTOIRES DE L’HISTOIRE
11-15
•
6-7
•
L A V I E D E D E S G RO U P E S R É G I O N AU X
Bordeaux – Sud Ouest
L’ASTROPHILATÉLIE AU 33ÈME CONGRÈS DU GROUPEMENT PHILATÉLIQUE D’AQUITAINE
il est détaché auprès de l'équipe projet
ATV (Automated Transfer Vehicle) à
l’Etablissement EADS Astrium des
Mureaux.
Le groupe régional Bordeaux-Sud Ouest
a participé au congrès du groupement
philatélique d’Aquitaine ayant pour
thème « l’astrophilatélie », organisé les
23 et 24 septembre derniers, conjointement par les associations philatéliques
des Comités d'Entreprise d’Astrium
EADS /AQ et Snecma Propulsion solide
du Haillan au carré des Jalles de SaintMédard-en-Jalles.
Luc DELMON, membre du groupe
régional, secrétaire du CE d’Astrium
EADS/AQ et président de l'Association
philatélique « La Marianne », Alain
LANTIN membre du bureau et Evelyne
KRUMMENAKER secrétaire du CE
Snecma propulsion solide et présidente
de la section philatélique de Snecma PS
étaient les organisateurs de cette manifestation.
Le groupe régional AAAF a, pour sa
part réalisé des panneaux montrant l'évolution de l'industrie spatiale en
Aquitaine de 1958 à nos jours et organisé l'exposition de maquettes prêtées
par l'établissement d’Astrium EADS
/AQ : lanceurs Diamant A, Ariane 4 et
Ariane 5, Soyouz, ATV, ARD, satellite
Astérix.
■ Jean-François CLERVOY et Yann
GUILLOU, président du GR AAAF Bordeaux
Sud-Ouest, devant la maquette de l'ATV
Parmi les nombreuses anecdotes de sa
conférence, une concerne spécialement l’astrophilatélie. À bord de la
station Mir, il s’est adonné à une expérience d’oblitération spatiale avec les
cosmonautes soviétiques en signant
des paquets d’enveloppes à oblitérer
avec le tampon unique. À la fin de la
conférence Luc DELMON, prélevant
dans sa collection personnelle lui a
offert une enveloppe de lettre postale
spatiale exceptionnelle. Cette envelop-
■ une lettre postale
spatiale
pe faisait partie d’un lot particulier qui a
quitté la station internationale dans les
bagages du module largué en octobre
1998 et récupéré par un navire de la
marine nationale. Elle fut alors oblitérée
à bord du navire, la poste n'ayant
pas… encore de bureau dans le ciel !
L'exposition philatélique a obtenu un
franc succès auprès de visiteurs avertis
et passionnés. La présence d'un spationaute français et de l'exposition organisée par le groupe régional AAAF y ont
grandement contribué. L’évènement a
été abondamment commenté dans les
colonnes de l'édition locale du journal
Sud-Ouest.
N° 9 - OCTOBRE 2006
■ L’exposition des maquettes
2
Matthieu VISSA et Claude MOTEL,
membres du bureau, ont assuré une
permanence pour répondre aux questions des visiteurs sur le « spatial ».
Le spationaute Jean-François CLERVOY, tête d'affiche du congrès a tenu
une conférence le samedi matin 24 septembre. Après trois missions dans
l’espace :
• STS-66 en novembre 1994 : mission
expériences scientifiques, mise en
place et récupération du satellite
allemand SPAS ;
• STS-84 en mai 1997 : mission
d'amarrage et de ravitaillement de la
navette spatiale à la station Mir, d’une
durée de 9 jours ;
• STS-103 en décembre 1999 : 3ème
mission d’entretien du télescope
spatial HUBBLE.
Gérard PERINELLE
Cannes – Côte d’azur
UNE CONFÉRENCE DE BERNARD COLLAUDIN ET THIERRY BANOS, ALCATEL ALENIA SPACE – CANNES
A CANNES, LE 19 SEPTEMBRE 2006
grammes renommés tels que ISO
(astronomie infrarouge) et HUYGENS
(la sonde européenne s’est posée avec
succès en janvier 2005 à la surface de
Titan, la plus grosse Lune de Saturne).
■ Bernard COLLAUDIN
■ Thierry BANOS
Le programme de développement Herschel-Planck
Dans cette position L2 particulière, le
maintien des satellites sur leur position
orbitale sera facilité, ainsi que l’observation de l’univers qui se fera dans la
direction opposée au soleil sans risque
que le champ d’observation soit perturbé par la présence de la Terre. Les
générateurs solaires, solidaires du
corps des satellites, sont orientés pour
être toujours illuminés par le soleil ; ils
constituent ainsi un écran solaire favorisant le refroidissement de l’instrumentation scientifique, cryostat, télescopes
et instruments dédiés.
PLANCK
Le satellite Planck, haut de 4,2 m et de
diamètre 4,2 m pèse 2 tonnes au lancement. Il a pour mission de « remonter
le temps » vers la genèse de notre univers telle qu’elle peut être reconstituée
en examinant très finement le rayonnement de fond cosmologique issu du
L A L ETTRE AAAF
Les satellites Herschel et Planck du
programme scientifique de l’Agence
Spatiale Européenne sont destinés à
des missions d’astronomie et d’astrophysique à la découverte de l’univers froid et lointain. Porteurs de
noms de savants illustres1,2 ils
permettront d’approfondir nombre
de connaissances grâce à des instruments complexes faisant appel à
des technologies sophistiquées. Le
programme de développement
Herschel-Planck dont la maîtrise
d’œuvre industrielle avait été obtenue en compétition par Alcatel Alenia
Space Cannes s’achèvera début
2008 par la mise en orbite des satellites depuis la base de Kourou avec
un lanceur Ariane 5 ECA configuré
pour un lancement double. Chacun
des satellites poursuivra une mission
spécifique, mais leur développement
a été réuni en un seul programme de
réalisation, car leur plate-forme est
pour l’essentiel bâtie sur une configuration identique, ce qui a permis
une économie de production. Ce
programme double est, par son
ampleur et son coût, le plus important jamais réalisé en Europe dans le
domaine spatial scientifique.
De très nombreux industriels (150
sous-contrats) et environ 40 laboratoires scientifiques ont été mis à contribution pour réaliser l’instrumentation
scientifique. Pour le site industriel spatial de Cannes, le programme
Herschel-Planck a pris la suite de pro-
DES CONDITIONS D’OBSERVATION
TRÈS PARTICULIÈRES
La nature peu énergétique des rayonnements que vont analyser ces satellites,
rayonnements en infrarouge lointain et
rayonnements électromagnétiques de
longueurs d’onde sub-millimétriques,
nécessite de produire des températures
proches du zéro absolu (0°Kelvin =
273,16°Celsius) avec des systèmes
dits cryogéniques afin de refroidir les
instruments et leur donner ainsi la sensibilité nécessaire. De telles observations
sont difficiles voire impossibles depuis
les observatoires au sol en raison de
l’opacité de l’atmosphère à ces rayonnements. En outre et pour pouvoir
observer 24h sur 24, les satellites seront
placés à 1,5 millions de km de distance
de la Terre autour d’un point baptisé L2
(Point de Lagrange 2), à l’opposé de la
direction du soleil par rapport à la Terre,
là où les forces d’attraction du Soleil et
de la Terre s’égalisent.
HERSCHEL
Le satellite Herschel, un géant haut de
7,5 m et de diamètre 4,5 m pèse
3,3 tonnes au lancement. Il embarque
un imposant cryostat à Hélium liquide
(2400 litres) qui enserre le plan focal
d’un télescope et les parties sensibles
de trois instruments à l’intérieur d’un
espace froid à 4° K. La lente ébullition
contrôlée de l’Hélium liquide embarqué
permettra de soutenir cette température cryogénique pendant les 3 ans et
demi que durera la mission.
Les observations faites à l’aide du télescope, dont le miroir principal a un
diamètre de 3,5 m, et des instruments
PACS3, SPIRE4 et HIFI5, apporteront
de nombreuses informations nouvelles
sur la matière froide interstellaire et la
formation des galaxies, les plus anciennes (nées après le Big Bang) ; cellesci, les plus distantes, ne rayonnant plus
que dans le domaine de l’infrarouge. La
composition de notre univers peuplé de
galaxies, d’étoiles et de matière interstellaire froide pourra ainsi être mieux
connue de même que l’âge, la formation et l’évolution de ces éléments
dans l’espace-temps. Le satellite
Herschel sera stabilisé sur ses trois
axes afin d’orienter avec une grande
précision (avec une stabilité de l’ordre
d’une seconde d’arc) son télescope
vers des régions de l’univers présélectionnées par les chercheurs, à l’intérieur et en dehors de notre galaxie.
L A V I E D E D E S G RO U P E S R É G I O N AU X
LES MISSIONS SCIENTIFIQUES HERSCHEL ET PLANCK
■ Orbites d’observation des satellites Herschel et Planck autour de L2
3
L A V I E D E D E S G RO U P E S R É G I O N AU X
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4
Le satellite Planck est intégré par
Alcatel Alenia Space à Cannes, le
satellite Herschel est intégré en
Allemagne par le partenaire Astrium
GmbH. Les plates-formes communes
(modules dits de service) sont produites à Turin par un autre des
Etablissements de Alcatel Alenia
Space.
Conclusion
■ Le modèle de vol du satellite Herschel en
essai à l’Estec
Big Bang après environ 350 000 ans.
Ce rayonnement très homogène,
généré il y a plus de 13 milliards d’années, est présent dans tout l’univers et
sa température équivalente n’est que
de 2,7°K en raison même de l’expansion de l’univers. Pour obtenir des
informations sur l’hétérogénéité de ce
rayonnement il faut pouvoir examiner
des variations infimes de température,
entre le millième et le millionième de
degré, à des températures proches du
zéro absolu. Pour ce faire, la tête de
détection des récepteurs d’ondes
électromagnétiques (ondes radio en
hyperfréquences entre 30 et 900
milliards de Hertz ou GHz) doit être
portée à une température de 0,1°
Kelvin. Un tel exploit technologique est
réalisé par une conception thermique
associant satellite et instruments et
réalisant une cascade de refroidissements. Le premier saut est obtenu en
faisant rayonner passivement le corps
du satellite vers l’espace froid pour
obtenir le premier palier à 50°K
(- 223°C). Puis le relais est pris activement par deux étages successifs de
machines thermodynamiques abaissant la partie instrumentale respectivement à 20°K puis 4°K. Enfin, un savant
système de dilution à température
cryogénique entre des isotopes de
l’Hélium permet d’atteindre la température de froid ultime à 0,1°K.
Les subtiles anomalies du rayonnement observé, en température et en
polarisation, permettront-elles de percer des mystères sur les éléments et
■ Le satellite Planck en chambre acoustique
à Cannes
Par un exposé brillant et largement
documenté, les deux conférenciers,
respectivement responsables de
superviser les développements des
instruments scientifiques HerschelPlanck et la réalisation du satellite
Planck, ont avec simplicité plongé l’auditoire dans l’extrême technicité de ces
nouveaux développements spatiaux et
fait partager leur vif intérêt pour les
domaines scientifiques que ces développements vont servir et enrichir.
Jean-Jacques DECHEZELLES
■ Le module de service Herschel-Planck
les énergies qui président à l’évolution
de l’univers, telle est positivement
l’espérance des concepteurs de la
mission Planck. Les instruments complémentaires HFI6 et LFI7 sont chargés de cette quête prestigieuse. Le
satellite Planck est stabilisé en autorotation lente à 1 tour par minute en
sorte que la combinaison de son mouvement propre et de son parcours
orbital permette de balayer tout l’espace en une année. La mission Planck
est prévue pour une durée nominale
d’observation de 18 mois.
Illustrations : ESA, Alcatel Alenia Space
et Astrium
Pour en savoir plus :
http://www.esa.int/esaSC/120390_index_0
_m.html
http://www.esa.int/esaCP/SEMT1YW4QW
D_France_0.html
http://planck.esa.int/sciencee/www/area/index.cfm?fareaid=17
■ Les satellites Herschel et Planck sur fond de rayonnement IR fossile
1. William Herschel (1738-1822), Astronome, découvreur de la Planète Uranus et du rayonnement thermique infrarouge
2. Max Planck (1858-1947), Physicien, inventeur de la théorie des quanta, base de la physique moderne
3. PACS, pour Photoconductor Array Camera and Spectrometer.
4. SPIRE, pour Spectral and Photometric Imaging Receiver
5. HIFI, pour Heterodyne Instrument for Far Infrared
6. HFI, pour High Frequency Instrument
7. LFI, pour Low Frequency Instrument
Marseille – Provence
CONFÉRENCE DE FRANCIS COMBES, EUROCOPTER
Le 23 juin 2006, Francis COMBES, directeur du programme
EC175 à Eurocopter a présenté au groupe régional de MarseilleProvence le programme de développement du nouvel hélicoptère EC175 réalisé en coopération avec la Chine. L’appareil fait
l’objet de spécifications communes aux deux constructeurs qui
se répartissent globalement à égalité l’ensemble des activités.
l’accord de licence de production du « Dauphin/Z9 », poursuivi en 1992 par le partenariat à 24 % pour la part Chinoise
dans le programme EC120. Pour l’EC175, c’est d’un partage 50/50 qu’il s’agit. Du sud au nord de la Chine, cinq
grands centres industriels participeront au programme :
Changsha, Jingfde Zen, Harbin, Xian et Pékin...
Dans un premier temps, Francis COMBES a présenté la
gamme des hélicoptères produits par Eurocopter. A côté de
l’essor des ventes des appareils légers de moins de 3 tonnes,
il a souligné le succès rencontré d’une part par les appareils
de masse décollable comprise entre 3 et 5 tonnes soit 760
appareils livrés en 25 ans, et d’autre part celui des appareils
de masse décollable comprise entre 8 et 11 tonnes avec 620
appareils livrés en 25 ans. L’exposé met en évidence qu’il n’y
a eu aucune tentative jusqu’à ce jour par Eurocopter de développer une machine dans le créneau des 5 à 8 tonnes.
Une coopération clairement définie
Le créneau des 5-8 tonnes
– Trois raisons militent maintenant pour le développement
d’un appareil de cette catégorie :
– le marché des hélicoptères de moyen tonnage s’est récemment développé à la suite de la création de l’AW 139 par
Agusta-Westland ;
– l’absence de produit Eurocopter, dans ce domaine de
masse décollable ;
– la volonté clairement exprimée de la Chine de développer
en coopération un appareil de cette classe.
Une entreprise stratégique pour la France
et la Chine
– Le programme de développement de l’EC 175 en coopération avec la Chine représente une entreprise stratégique
pour les deux pays. Il bénéficie, dès l’origine de quelques
atouts majeurs :
– le partenaire chinois d’Eurocopter, AVIC, a déjà coopéré
avec Eurocopter dans le développement de l’EC120 et
accepte pour ce nouveau développement de partager le
coût des investissements et les risques du développement ;
– EADS est globalement intéressé à promouvoir une coopération avec la Chine et en général avec l’Asie où de nombreuses autres affaires sont en discussion ;
– le gouvernement français approuve cette démarche de
coopération franco-chinoise et offre une avance remboursable de 100 millions d’Euros permettant le lancement du
programme ;
– ce programme EC175 représente en outre pour EADS un
projet pilote de coopération avec l’Asie où de très importantes affaires commerciales sont actuellement à l’étude.
Les principes de base de la coopération de cet appareil civil
sont dès à présent clairement définis avec un programme
divisé en 4 phases : définition, développement, industrialisation et commercialisation. Le contrat définit l’ensemble des
principes de coopération et détaille toutes les phases du programme à développer. Des chapitres complémentaires porteront sur les optionnels et les phases d’industrialisation, de
production et de support après vente. Chaque partenaire
financera 50 % du coût des travaux à effectuer selon une
répartition des charges au titre de leur investissement et de la
prise en charge des risques.
L’appareil développé fera partie intégrante des familles de
produits développés par Eurocopter ainsi que de ceux développés par la Chine.
Deux chaînes d’assemblage sont prévues dans chacun des
pays et assureront la production et la livraison des hélicoptères à leurs clients respectifs.
Un engagement contractuel de non compétition a été signé
par les deux partenaires et concerne une catégorie de masse
décollable. Chaque partenaire s’adresse à sa propre autorité
de certification et sollicite un certificat de navigabilité en
respectant un délai d’une année entre la certification européenne EASA et celle de la Chine. La propriété industrielle et
le « know how » acquis par chaque coopérant ne doivent pas
être communiqués en dehors du cercle des coopérants, ni ne
feront l’objet de présentations techniques écrites ou verbales.
Calendrier
Le calendrier prévisionnel du programme EC175 s’établit
comme suit :
– 2006 : mise en place du contrat et des comités permanents ;
– 2009 : premier vol du premier prototype ;
– 2010 : vols de développement et de certification ;
– 2011 : certification EASA.
Après six mois de fonctionnement du bureau d’étude commun à Marignane, on peut considérer que le programme a
beaucoup progressé. Des impératifs industriels et commerciaux obligent les constructeurs à respecter une totale
discrétion dans ce domaine.
L’auditoire a posé de très nombreuses questions, témoignage
du très haut intérêt que le Groupe Régional AAAF porte à ce
programme.
Fernand D’AMBRA
L A L ETTRE AAAF
Un accord, fruit d’une coopération de longue
date
– Le contrat de coopération franco-chinois a été signé en présence des deux premiers ministres le 5 décembre 2005.
Cet accord a été suivi par une visite à Marignane du
Premier ministre de la république populaire de Chine le
6 décembre.
Ce programme constitue le prolongement naturel d’une
coopération de longue date remontant aux années 80 avec
L A V I E D E D E S G RO U P E S R É G I O N AU X
LE PROGRAMME D’HÉLICOPTÈRE FRANCO-CHINOIS EC175
5
LA VIE DES COMMISSIONS TECHNIQUES
N° 9 - OCTOBRE 2006
6
Une journée de sensibilisation ITAR-EAR
organisée le 19 septembre 2006 à Paris :
« MAÎTRISER LES RÉGLEMENTATIONS AMÉRICAINES : UN FACTEUR CLÉ DE VOTRE
COMPÉTITIVITÉ INTERNATIONALE »
PAR
PIERRE BESCOND ET LOUIS LAIDET
■ Pierre BESCOND
auprès de l’industrie. Cette enquête
effectuée auprès de plus de 2000 personnes représentant 869 entreprises a
permis d’obtenir un certain état des
lieux et a suscité des attentes et des
demandes auxquelles le séminaire qui a
été organisé le 19 septembre dernier à
Paris voulait répondre.
Ce séminaire a rassemblé près de 250
personnes appartenant à 90 sociétés
ou organisations professionnelles.
L’enquête et ses résultats
■ Louis LAIDET
ITAR-EAR :
une nouvelle réglementation contraignante
Depuis le 11 septembre 2001 les
Etats-Unis ont renforcé le contrôle des
exportations de matériels de guerre et
de biens ou technologies à usage dual,
civil et militaire. Ce contrôle, entre les
Etats-Unis et le reste du monde, s’exerce à l’aide de règles et de licences
accordées à l’exportateur initial américain. Celles-ci doivent naturellement
être respectées et appliquées par l’importateur étranger pour être en mesure
de livrer son client et ne pas entraver la
réexportation du produit final. En effet,
l’obtention des licences est conditionnée à la fourniture de certaines informations, telles que l’Etat vers lequel est
exporté le bien, le destinataire et l’usage final qui en est fait ou encore la
nature du produit final.
Dans le cadre de ses activités, la Commission internationale de l’AAAF avait
identifié dès la fin 2005 la nécessité
d’aider la communauté industrielle
aéronautique et spatiale à comprendre
ces mécanismes réglementaires de
plus en plus contraignants imposés par
l’administration américaine, devenus
de fait une véritable entrave à la compétitivité internationale.
Pour évaluer le besoin de cette communauté et mesurer son degré de connaissance de ces réglementations et de
leurs contraintes, nous avons procédé
dans un premier temps à une enquête
Dans un premier temps Pierre
BESCOND a présenté les résultats de
l’enquête menée par le groupe de travail de novembre 2005 à juin 2006,
visant à identifier les besoins de la
communauté aéronautique et spatiale
au regard de la nouvelle réglementation
américaine :
Nombre de prospects :
Nombre de retours :
Sociétés concernées :
Sociétés non concernées :
869
96
58
38
Cinq questions ont été posées :
❶ « Dans vos activités, êtes vous
concernés par cette réglementation
ITAR/EAR ? »
Ponctuellement 34/96
35,42%
Régulièrement
18/96
18,75%
Intensément
6/96
6,25%
Jamais
38/96
39,58%
❷ « Quelles sont les difficultés
majeures rencontrées ? »
• Niveau de connaissance
19/58
32,76%
• Compréhension de la réglementation
28/58
48,27%
• Mise en œuvre/Applications
26/58
44,83%
➌ « Avez-vous une organisation spécifique pour cette problématique ? »
Oui
18/58
31,03%
En cours
4/58
6,90%
Non
36/58
62,07%
➍ « Souhaiteriez vous une assistance éventuelle ? »
Oui
36/58
62,07%
Non
10/58
17,24%
(mais 6/10 pour une info générale)
Pas de réponse12/58
20,69%
➎ « Avez-vous des suggestions à
faire ? »
• Améliorer les délais d’obtention
• Participer à un séminaire
• Pouvoir disposer d’un expert que
l’on pourrait consulter pour des cas
difficiles
• Avoir une personne qui puisse suivre
les demandes de licences auprès
des autorités américaines.
L’organisation de l’administration américaine
Le
Commander
Peter-Nicholas
LENGYEL, représentant de l’ambassade des Etats-Unis et directeur des
affaires navales au service de l’attaché
d’armement a ensuite présenté, de
façon très précise, l’organisation de
l’administration américaine en y replaçant chacune des agences impliquées
dans le processus de demande d’autorisation. En effet, de nombreux services
interviennent tant au sein du département d’Etat, que dans celui de la
Défense ou du Commerce. A l’US
Department of State, il n’y a que quinze
personnes pour traiter les 60.000
demandes de licences qui transitent
chaque année, ce qui explique la lenteur de la procédure. Il a insisté sur la
nécessité d’être très précis dans la
rédaction de ces demandes (« applications ») : il faut en particulier détailler
les niveaux d’utilisation future des pièces achetées, autrement dit leur traçabilité, et bien expliquer les urgences et
les contraintes (les « milestones »).
Attention aux mots « sensibles », ceux
qu’il vaut mieux éviter car pouvant prêter à confusion lors de l’analyse des
dossiers par les services américains.
Les agences américaines qui jouent un
rôle dans l’application de cette réglementation sont les agences principales
concernées par le contrôle économique :
Le Ministre des Affaires Étrangères :
– Political Military Affairs ;
– Regional Bureaus and Country
Desks ;
– Democracy, Human Rights & Labor ;
– Non-Proliferation & Arms Control ;
– Legal Advisor ;
– Intelligence and Research.
■
José da COSTA a replacé les contraintes ITAR–EAR dans le cadre des
risques de développement et de production au sein d’une entreprise. En
fait ces risques touchent tous les
aspects de l’entreprise : stratégiques,
opérationnels, financiers ; ils peuvent
aller jusqu’à influer sur la réputation de
la société.
Michel DEAS de THALES a bien expliqué le distinguo entre ITAR et EAR et
les différentes règles appliquées en
fonction de la catégorie des produits
importés.
Laurent de la BURGADE a résumé les
principales contraintes imposées par
ces réglementations et la nécessité
d’avoir, au sein de l’entreprise, une
véritable responsabilité collective (une
« contagion » de responsabilité) pour
gérer ces dossiers et ne pas confier
cette question à une seule personne
sur laquelle tout repose : c’est une
affaire qui concerne tout le monde, du
développeur au commercial. Au
moment du développement des produits performants destinés à l’export,
tout ingénieur doit avoir en tête ce
souci de respect des règles ITAR/EAR.
Pour Yves KOCHER, de EADS/
SODERN, si un document était à créer
ce serait un guide ITAR des conditions
auxquelles est soumis un contrat à l’export, permettant de remplir efficacement les demandes de licences et d’en
faire le suivi.
L’après midi a été consacrée à la présentation de deux cas concrets qui
furent l’objet de débats animés et très
instructifs pour les participants, présentés par Pierre BORIE de Alcatel Alenia
Space, et par Serge MASCHIETTO et
Jean-Pierre BUROLLEAU.
Les débats qui ont suivi les exposés et
les exercices de l’après midi ont permis
d’apporter des précisions sur l’interprétation des règles. En effet chaque
industriel a sa propre expérience, sa
propre interprétation des règles, parfois sujettes à controverse. Comme
par exemple dans le cas d’une société
française qui aurait été rachetée par un
fond de pension américain : est elle
soumise à ITAR ?
Un questionnaire d’évaluation du séminaire a été soumis aux participants. Y
répondre permettait de recevoir le CD
de l’ensemble des présentations. Un
premier dépouillement des 168 réponses collectées montre que ce séminaire a été perçu comme étant très pertinent (60% très satisfaits, 35% satisfaits) qu’il répondait concrètement aux
questions qui se posent (37% très
satisfaits, 48 % satisfaits) et qu’il aiderait à la gestion des règles ITAR-EAR
(53% très satisfaits, 41% satisfaits).
Il n’en reste pas moins que les participants souhaitent que ce séminaire ait
des suites puisque à la dernière question « Dans la perspective de travaux
ultérieurs… souhaiteriez vous participer à :
– des séminaires : 60% ont répondu
oui
– des groupes de travail : 35% ont
répondu oui
– des rencontres d’experts étrangers :
33% ont répondu oui
Conclusion
En conclusion, cette action doit donc
être poursuivie. Depuis le début de la
mise en application stricte de ces
règles les procédures se sont un peu
simplifiées et les industriels ont appris
à les connaître et à s’organiser en
conséquence. Il reste cependant beaucoup à faire pour les maîtriser pour ne
plus être pénalisé.
Comme nous l’a indiqué Guy RUPIED,
Secrétaire Général du GIFAS dans le
discours d’introduction, le GIFAS étudiera avec ses partenaires industriels
et d’autres organismes professionnels
la façon dont des nouvelles actions de
sensibilisation et d’information pourraient être menées dans le futur.
La commission internationale de
l’AAAF, à l’initiative de Claude
GOUMY et avec la participation de ses
membres, est particulièrement satisfaite de la réussite de cette action
conjointe où l’AAAF, société savante,
s’est particulièrement bien positionnée
en menant une réflexion pour aider le
GIFAS, organisation professionnelle, à
bien identifier une nouvelle priorité
d’action au profit de ses membres
industriels.
Pierre BESCOND, Louis LAIDET
Commission internationale de l’AAAF
LE RÔLE DU MINISTÈRE DES
AFFAIRES ÉTRANGÈRES
l’Office of Defense Trade Controls Compliance est
l’organisation principale par laquelle le ministre
exécute ses responsabilités pour la Security
Assistance (SA) ;
■ ce bureau traite les enregistrements de plus de
4 500 industries et exportateurs du matériel de la
défense ;
■ chaque année il coordonne la révision de 60 000
demandes de licences d’exportation ;
■ en plus, il participe aux investigations criminelles
des violations de l’AECA et de l’ITAR ;
■ finalement, il gère les sanctions pour les violations de la loi.
■
LE RÔLE DU MINISTÈRE
DE LA DÉFENSE AMÉRICAINE
le Defense Security Cooperation Agency (DSCA)
est l’organisation principale par laquelle le ministère exécute ses responsabilités pour la SA ;
■ le Defense Technology Security Administration
(DTSA) est responsable de la protection et de la
sauvegarde de la supériorité technologique des
forces américaines et du savoir-faire industriel ;
■ les départements militaires et les autres agences
dirigent des programmes spécifiques y compris la
livraison des matériels et services aux preneurs.
■
QU’EST CE QUE LA SECURITY
ASSISTANCE ?
Faisant partie de la Security Cooperation, la
Security Assistance (SA) gère un grand nombre de
programmes, autorisés par la loi, par lesquels le
ministère de la défense et les industries de défense fournissent des services et du matériel aux
autres pays pour assurer leur défense et les aider
à dissuader leurs ennemis ;
■ services et matériels peuvent être transférés par
des ventes, subventions, prêts, ou contrats.
■
QUI DIRIGE LA SECURITY
ASSISTANCE ?
la SA est d’une manière générale sous la surveillance du Congrès qui établit les lois et autorise les programmes d’export dont il prévoit le
financement ;
■ la plupart des responsabilités sont données au
ministère des affaires étrangères et au ministère
de la défense des Etats-Unis ;
■ le ministère des affaires étrangères donne à la SA
une direction continue et générale ;
■ le ministère de la défense exécute les programmes par lesquels le matériel peut être transféré
d’un gouvernement à l’autre.
■
L A L ETTRE AAAF
Ces exercices ont permis de toucher
du doigt les difficultés rencontrées et
de proposer des solutions pour les
résoudre ou les contourner :
– être le plus clair possible dans le formulaire adressé au fournisseur ;
– utiliser un consultant américain, enregistré au Département d’Etat pour
suivre l’avancement des dossiers au
DoS et consulter par Internet le cheminement de la demande ;
– savoir que les règles ITAR s’appliquent parfois dans des situations
auxquelles on ne s’attend pas, ou
auxquelles on ne pense pas, telles
que l’exportation temporaire d’un
matériel sensible dans le cadre d’une
exposition dans un pays étranger ;
– ne pas oublier que sont soumis à
ITAR : les concepts, les conférences
sur des sujets sensibles, les transports, l’utilisation de techniciens
américains.
LA VIE DES COMMISSIONS TECHNIQUES
Le Ministre de la Défense :
– Defense Technology Security
Administration (DTSA) ;
– Military Services (Army, Navy, Air
Force & JCS) ;
– National Security Agency ;
– Defense Intelligence Agency.
■
7
L E S É V É N E M E N TS À V E N I R
CALENDRIER
DATE
DES
LIEU
M A N I F E S TAT I O N S
MANIFESTATION
2006
Les Samedis de l’Histoire
16 déc.
(tél : 08 72 18 61 14 ; courriel : [email protected])
Musée de l’Air et de l’Espace
Le Bourget
Bordeaux Sud-Ouest
14 nov.
(Tél/Fax : 05 56 70 68 11 ; courriel : [email protected])
BORDEAUX
Cannes - Côte d'Azur
De Ruggieri à Le Prieur : les premiers pas vers l'espace
(1806-1916) par Jean-Jacques SERRA (AAAF)
et Hervé MOULIN (AAAF-IFHE)
Réunion des présidents des groupes régionaux AAAF
(tél : 04 92 19 48 08 ; courriel : [email protected])
21 nov.
CANNES LA BOCCA
Auditorium du Spacecamp-Alcatel
La conception Assistée par Ordinateur.
Le logiciel CATIA, par Gilles RICARD et Olivier HERLIN,
Dassault Système Toulouse
29 nov.
CUERS-PIERREFEU (83)
Visite de l'Atelier Industriel Aéronautique
de Cuers-Pierrefeu
12 déc.
CANNES LA BOCCA
Auditorium du Spacecamp-Alcatel
« Du spatial aux travaux publics : les maquettes virtuelles »,
par Eric LEBEGUE, CSTB, Sphia Antipolis
Centre
(courriel : [email protected])
28 nov.
ORLÉANS
Centre Sciences d’Orléans,
Muséum d’Orléans
Normandie
28 nov.
à 17h00
Propulsion spatiale par plasma, une conférence
de Michel DUDECK, Stéphane MAZOUFFRE
et André BOUCHOULE, CNRS - Orléans
(courriel : [email protected])
ROUEN
ESIGELEC
Propulsion spatiale électrique. Programmes en cours
et perspectives, par Olivier DUCHEMIN,
Snecma - Division Moteurs Spéciaux.
Toulouse Midi-Pyrénées
(tél. : 05 56 16 47 44 ; courriel : [email protected])
15 nov.
TOULOUSE
AIRBUS FRANCE
A380 : les essais et moyens d'essais en vol,
par Philippe FERRETTI, Airbus France
13 déc.
TOULOUSE
IAS
Emile Dewoitine, fondateur des Usines Toulousaines
d'Airbus, par Francis RENARD, AAAF
à 18h00
Comité Jeunes
24 nov.
Paris – Ile-de-France
28 nov.
« Bientôt ingénieur » par G. Laruelle suivie
d'une présentation du Comité Jeunes.
BIARRITZ
ESTIA
(tél : 01 56 64 12 30 – courriel : [email protected])
PARIS
PAVILLON DAUPHINE
Remise des Prix AAAF 2005
2007
N° 9 - OCTOBRE 2006
Paris – Ile-de-France
8
21-25 mars
(tél : 01 56 64 12 30 – courriel : [email protected])
Musée de l’Air et de l’Espace
Le Bourget
« La semaine des jeunes » organisée conjointement
par le Comité Jeunes de l'AAAF, le Musée de l'air
et l'Aéroclub de France, pendant laquelle, étudiants,
enseignants et professionnels échangeront
leur motivation et leur expérience.
COLLOQUES NATIONAUX ET INTERNATIONAUX
LIEU
ORGANISATEUR
PARIS
Minis. de la Rech.
AAAF
ITCT 2006 : "Vers des Ingénieries et des
[email protected]
Technologies Communes aux Transports
www.itct.colloque-aaaf.com terrestres, maritimes, aériens et spatiaux »
9h-17h30
TOULOUSE
Centre de Toulouse
Onera
[email protected]
Journée d’études Fedespace : « Gestion
globale des différents modes de transport –
l’apport des techniques spatiales »
30 nov.-1er déc
TOULOUSE
ANAE/AAAF/Acad. Tech.
[email protected]
Colloque International
Le transport aérien face au défi énergétique
BRUXELLES
Belgique
EUCASS
www.eucass.eu
2nd European Conference for Aerospace
Sciences
BERLIN
Allemagne
CEAS
www.ceas2007.org
First CEAS European Air & Space Conference
2006
20-23 nov.
22 nov.
2007
1-6 juillet
10-13 sept.
MANIFESTATION
POUR UN ANNUAIRE AAAF 2007 PLUS FIABLE :
METTONS À JOUR NOS PROPRES INFOS !
Chers adhérents,
L’annuaire 2006 va paraître, il comporte quelques
imprécisions. Avec votre aide, et en participant à sa
mise à jour, l’Annuaire 2007 sera plus fiable.
Suite à des regroupements, de nombreuses sociétés
ont changé de raison sociale et parfois d’adresse. Si :
1. votre société a fait l’objet de modifications ;
2. vous-même avez été touché par ces changements ;
3. votre lieu de travail a changé ;
4. vos responsabilités ont été modifiées…Si par
ailleurs :
5. vous avez changé d’adresse personnelle ou mél, ou
de numéro de téléphone ;
6. vous désirez rajouter, modifier ou supprimer une
rubrique vous concernant.
Enfin, pour toute modification que vous voudriez apporter aux informations figurant sur l’Annuaire 2006, nous
vous remercions de consacrer quelques minutes à remplir le plus complètement possible le questionnaire cijoint et de nous le renvoyer dans les délais les plus
brefs aux adresses indiquées ci-dessous.
Vous n’avez rien à retourner si les renseignements
figurant sur l’annuaire 2006 sont corrects.
Nom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
L E S É V É N E M E N TS À V E N I R
DATE
Prénom : . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Coordonnées personnelles : . . . . . . . . . . . . . . . . . .
.......................................
(Uniquement si changement par rapport à l’annuaire 2006)
Nom et adresse de la Société qui vous emploie ainsi
que l’adresse de son Siège Social avec le numéro du
standard téléphonique :
.......................................
AAAF
Gestion des Membres
.......................................
6 rue Galilée – 75016 PARIS
Mél : [email protected]
Adresse de votre lieu de travail et n° de téléphone du
standard ainsi que vos coordonnées professionnelles
complètes (tél, fax, mél, etc.)
L A L ETTRE AAAF
Tél : 01 56 64 12 30 – Fax : 01 56 64 12 31
9
N O U V E L L E S . . . D E S M A RT- 1
Smart-1 propulsé par Snecma autour
de la Lune
PAR JEAN-PIERRE YRIBARREN, CHEF PROGRAMME PLASMIQUE, SNECMA MOTEURS
■ Jean-Pierre YRIBARREN
Le 3 septembre, en touchant le sol lunaire la sonde Smart1 de l’ESA, propulsée par le moteur plasmique PPS® 1350
de Snecma (poussée de 8 grammes), a achevé avec succès
sa mission.
Lancée en septembre 2003 par une Ariane 5, il aura fallu
plus d’un an à cette sonde pour passer d’une orbite terrestre à l’orbite lunaire. Le succès de sa mission provient pour
une grande part de la performance de son système de propulsion réalisé par Snecma. Il incluait le moteur PPS® 1350
qui avait été développé en coopération avec son partenaire
russe OKB Fakel avec le soutien du CNES. Cette mission
de l’ESA correspondait à la première utilisation en orbite de
ce moteur.
Econome, il a permis un gain de masse important pour ce
petit satellite qui devait aussi embarquer une série d’instruments destinés à l’observation de la Lune. Ce moteur n’a
consommé que 80 kg de xénon durant 5 000 heures de
fonctionnement pour permettre à Smart 1 de parcourir 330
orbites autour de la Terre puis 1200 autour de la Lune soit
100 millions de kilomètres
au total. Sa consommation
réduite a d’ailleurs permis
de prolonger de 6 mois la
mission d’observation de la
Lune !
■ Satellite Smart-1
■ Smart-1 PPS au banc d'essai
faible que celle d’un moteur chimique, la très faible consommation de ce type de moteur offre un avantage important en
particulier pour les gros satellites géostationnaires qui doivent embarquer de la propulsion pour une durée de vie de
15 ans en orbite. Dans ce cas, les gains de masse peuvent
se chiffrer à plusieurs centaines de kilogrammes.
Les constructeurs de satellites de télécommunication commencent d’ailleurs à s’intéresser à cette technologie et la
réussite de la mission SMART-1 ne pourra que leur donner
confiance. C’est donc pour ce type d’application que Snecma
concentre aujourd’hui ses efforts. Alors que le moteur de
Smart1 a fonctionné durant 5000 heures, il est nécessaire
pour ces gros satellites, de démontrer au sol que le PPS1350
a une capacité de fonctionnement deux fois plus longue.
Cette démonstration actuellement en cours chez Snecma se
termine actuellement et au même moment démarre la production des quatre premiers PPS1350 destinés à la nouvelle
plate-forme européenne de télécommunications Alphabus
dont le premier lancement est prévu pour 2009.
Un moteur plasmique qu’on appelle aussi moteur à effet
Hall, utilise l’énergie électrique venant des panneaux solaires pour ioniser du xénon et c’est l’éjection des particules
ionisées à très grande vitesse (plus de 15 km/seconde), qui
provoque la poussée. Même si cette poussée est bien plus
Jean-Pierre YRIBARREN
N° 9 - OCTOBRE 2006
PROPULSION SPATIALE PAR PLASMA
10
La sonde européenne SMART-1 a percuté la Lune le 3 septembre 2006 à 7h41 (heure de Paris) après un périple de plus de 3 années et après avoir parcouru plus de
100 millions de km. Ce succès a mis en évidence les potentialités incontestables de la propulsion spatiale par plasma en termes de fiabilité et de performances. Si celleci n’est pas nouvelle, plus de 200 propulseurs à effet Hall ont été testés en vol en Russie depuis les années 60, aucun propulseur de ce type n’a encore été utilisé aux
USA, à l’exception de SPT100 d’origine russe. L’Europe qui s’est engagée dans cette voie depuis le début des années 90 n’a lancé que quatre sondes équipées de propulseurs à plasma: Stentor le 11 décembre 2002 (vol Ariane-5 157) et SMART-1 le 27 septembre 2003 (vol Ariane-5 162) avec des PPS1350 de Snecma, Inmarsat10
et Intelsat4, ces deux derniers satellites étant équipés de SPT russes. Jusqu’à aujourd’hui, ces propulseurs étaient uniquement utilisés pour le maintien à poste des satellites de télécommunication placés en orbite géostationnaire, mais comme vient de le démontrer la mission SMART-1, l’utilisation de la propulsion par plasma pour des
missions interplanétaires est maintenant possible (projet russe Phobos avec des SPT140, par exemple).
Depuis 10 ans, un effort soutenu est déployé en France pour étudier et développer les propulseurs à plasma: mise au point de nouvelles générations de propulseurs par
Snecma, création d’un Groupement de Recherche CNRS / CNES / Snecma / Universités regroupant 12 laboratoires et construction du moyen d’essai national PIVOINE au
laboratoire d’Aérothermique du CNRS à Orléans.
La propulsion spatiale par plasma sera présentée au cours d’une conférence, organisée par le GR AAAF Centre, qui se tiendra au Muséum d’Orléans le 28 novembre 2006.
Michel DUDECK, Stéphane MAZOUFFRE, André BOUCHOULE, CNRS Orléans.
Les Histoires d’Airbus
PAR GEORGES VILLE
La mise en service de l’A300B donne une nouvelle dimension à l’aventure Airbus : d’une origine essentiellement politique, elle prend de plus en plus une dimension industrielle. Airbus Industrie doit
affermir sa crédibilité tant sur le plan interne de la coopération que vis-à-vis du transport aérien
fortement perturbé de 1974 à 1977par la crise économique.
■ Geoges Ville
1974
1975 à 1977
POLITIQUE
02 avril : décès de Georges Pompidou
06 mai : démission de Willy Brandt
19-mai : élection de Valéry Giscard D’Estaing
08 août : démission de Richard Nixon
15 juin 1977 : décès du Général Franco
ECONOMIE
pétrole : hausse du baril multiplié par 6 depuis 1970
économie : inflation de 12% et récession mondiale
change : $ voisin de 4,8 FF
pétrole : stabilisation du baril à 20 $
TRANSPORT
AERIEN
trafic : croissance réduite à + 5%
flotte : 800 avions non utilisés
carnet total1 : 400 (1200 en 1967)
livraisons2 : 350 (740 en 1968)
trafic : 5% (1975), 10% (76) et 10% (77)
AIRBUS
15 mars : certification de l’A300
mai : mise en service par AF
sept. : commande Korean
oct. : annulation commande Iberia
carnet : 16 (4% mondial)
livraisons : 4 (0 en 68)
carnet : 24 (1975), 12 (76) et 13 (77 soit 3% mondial)
livraisons : 8 (1975), 13 (76) et 15 (77)
BOEING
carnet : 190 (45% mondial)
livraisons : 189 (376 en 68)
carnet : 135 (1975), 165 (76) et 275 (77 soit 67% mondial)
livraisons : 170 (1975), 139 (76) et 120 (77)
McDONNELL
DOUGLAS
03 mars : Accident D’un DC-10 à Ermenonville (374 Morts)
carnet : 120 (28% mondial)
livraisons : 95 (305 en 68)
carnet : 60 (1975), 45 (76) et 90 (77 soit 21% mondial)
livraisons : 85 (1975), 69 (76) et 36 (77)
LOCKHEED
carnet : 50 (12% mondial)
livraisons : 41 (0 en 68)
carnet : 29 (1975), 27 (76) et 21 (77 soit 5% mondial)
livraisons : 25 (1975), 16 (76) et 11 (77)
AVIONNEURS
EUROPEENS
12 février : certification du Mercure mis en service par Air Inter
janvier 76 : mise en service du Concorde
avril 77 : fusion de HSA et BAC dans BAe
change : $ entre 4 et 4,5 FF
carnet total : 300 (1975), 280 (76) et 400 (77)
livraisons : 320 (1975), 270 (76) et 210 (77)
L E S h i s to i re s d e L ’ H I STO I R E
4EME EPISODE : LA JEUNESSE D’AIRBUS : 1974 - 1977
1. Le carnet exprime le nombre total d’avions commandés non livrés en fin d’année et le pourcentage indiqué pour chaque constructeur
entre parenthèses la part qu’il représente en % du carnet mondial.
2. Les livraisons correspondent au nombre d’avions livrés chaque année.
PROPULSION SPATIALE ÉLECTRIQUE: PROGRAMMES EN COURS ET PERSPECTIVES
le groupe Normandie de l'AAAF organise une conférence, ouverte à tous, sur la propulsion spatiale électrique
dans l'amphithéâtre Charliat de l'ESIGELEC à Rouen (Technopole du Madrillet).
Olivier DUCHEMIN de Snecma, groupe SAFRAN, présentera les principes, les programmes en cours
ainsi que les perspectives de ce nouveau mode de propulsion.
L A L ETTRE AAAF
Le 28 novembre 2006, à 17h,
11
N° 9 - OCTOBRE 2006
L E S h i s to i re s d e L ’ H I STO I R E
LA CRISE DE 1974 : AVANT-GARDE
DE LA MONDIALISATION
12
La crise économique apparue dès 1973 se prolonge jusqu’en 1977 ; sans renier le rôle de catalyseur de la guerre du
Kippour sur son déclenchement, cette situation s’insère
aussi dans la suite des cycles (d’une durée voisine de dix
années) affectant l’économie américaine depuis un demisiècle sous la forme d’une succession de crises et de reprises. Ce qui est nouveau est la propagation de la crise à l’ensemble du monde capitaliste et ceci en prolongement du
développement des échanges internationaux ; en Europe
cette dépression entraîne une brutale apparition du chômage
alors que celui-ci semblait jugulé depuis la fin de la guerre.
Les conséquences sur les activités liées au transport aérien
sont lourdes avec un taux de croissance du trafic annuel chutant à 5% en 1974 et 1975 avant d’amorcer une remontée à
10% en 1976 et 1977 puis 15% en 1978 en accompagnement de la reprise.
Le comportement passé des opérateurs ayant surestimé leur
besoin conduit à une flotte surdimensionnée et à un plafonnement des livraisons aux alentours de 250 avions jusqu’en
1978, soit en réduction des deux tiers par rapport au sommet atteint en 1968.
La situation industrielle et financière des constructeurs américains en est lourdement affectée ce qui a pour effet de
retarder le lancement du produit concurrent de l’A300 :
lorsque les ressources de Boeing lui permettront de le faire
en 1978, il sera tard.
LA CRISE MET EN PERIL AIRBUS
La pérennité d’Airbus est doublement mise en cause sur le
plan commercial en prolongement des difficultés du transport
aérien et sur le plan industriel par les doutes des États et des
industries impliqués sur l’avenir de la coopération.
LA FRAGILITÉ COMMERCIALE
DU NOUVEL INTERVENANT
Dans un premier temps, la mise en service de l’avion en mai
1974 accroît la confiance et amène à la fin de l’année 1975,
19 commandes s’ajoutant aux 13 cumulées à la date de mise
en service (ce fut un bon cru en comparaison aux 22 commandes 747, aux 7 DC10 et aux 4 L1011):
• au cours de l’été 1974, Air Siam, compagnie thaïlandaise
souscrit une location à court terme pour un B2 livrable en
septembre 1974 (bilan : 0 voir ENCART N° 1) ;
• en septembre 1974, Korean Airlines commande 6 avions
B4 (bilan : + 6)
• en octobre 1974, Iberia annule sa commande d’Airbus par
application de la clause « sauvage » du contrat ATLAS
(bilan : - 4) ;
• le 11 février 1975, le charter allemand Germanair commande 2 B4 (bilan : + 2) ;
• le 24 avril 1975, Indian Airlines signe un contrat pour 3 B2
(bilan : +3) ;
• le 4 septembre 1975, South African Airways commande 4
B2 (bilan : + 4) ;
• le 16 octobre 1975, le charter belge TEA, loue l’avion 2 de
développement et commande un B4 (bilan : + 2) ;
• le 14 novembre 1975, Air France complète sa flotte par
une commande de 3 B4 (bilan : + 3) ;
• le 24 décembre 1975, Air Inter passe une première commande de 3 B2 (bilan : + 3).
1
AIR SIAM : COMMENT UN MAUVAIS CONTRAT
DEVIENT UNE EFFICACE PUBLICITÉ.
La compagnie ne payant pas ses loyers, l’avion est repris au bout de quelques mois
pour être finalement livré à Air Inter un an plus tard :
« Cette opération fut critiquée par les partenaires : on peut les comprendre car, Air
Siam étant une compagnie de faible notoriété, ils devaient supporter dans le contexte du GIE les risques financiers de l’opération. Les événements leur donnèrent
raison avec la reprise de l’avion pour défaut de paiement et pourtant ce fut un
extraordinaire investissement commercial.
En effet, Les compagnies asiatiques, se posèrent la question : comment Air Siam une
compagnie peu crédible a-t-elle pu assurer un service aussi fiable ? La seule
réponse raisonnable ne pouvait être trouvée que dans les qualités du produit : cette
opération fut ainsi une efficace vitrine pour l’A300B en exploitation dans la région
et même si l’expérience coûta un certain prix elle constitua un efficace investissement promotionnel. »
En revanche, 1976 marque l’entrée d’Airbus dans une phase
périlleuse appelée « la traversée du désert » ; avec une seule
commande en dix-huit mois, il ne reste que 12 avions à livrer
fin 76, à comparer aux 28 en production.
Les actions commerciales ne font pas défaut mais la situation du marché et les dénigrements de Boeing n’encouragent guère les clients potentiels à s’engager auprès
d’Airbus ; rappelons deux négociations encourageantes, de
conclusions contraires et se révélant prometteuses pour l’avenir :
• Singapore Airlines (SIA), nouvelle compagnie créée en
1972 et spécialisée dans le long courrier (équipée exclusivement de 747) envisage d’étendre son réseau au moyencourrier en s’équipant d’avions de grande capacité de spécifications voisines de l’A300B4. En dépit de ses atouts,
SIA ne retient pas Airbus et se prononce en faveur du 727.
La persévérance d’Airbus et les qualités de l’A300 seront
reconnues deux années plus tard avec une commande de
6 A300 (avec un prix de vente majoré de 10% !).
• La deuxième concerne une tentative pour entrer sur le marché américain, clé de la réussite commerciale : en septembre 1976, la compagnie Western Airlines manifeste un
vif intérêt pour le produit en vue de remplacer ses vieux
Boeing 720 et 707. Les discussions pour une commande
de 4 appareils avancent vite et font espérer une décision
2
DE L’IMPORTANCE DES COMPORTEMENTS
POLITIQUES SUR LES NÉGOCIATIONS
COMMERCIALES
Quels événements ont-ils pu conduire à ce revirement de la compagnie Western ? La
connaissance insuffisante du processus de décision aux États-Unis a été un facteur
déterminant (la leçon sera retenue lors de la tentative suivante avec Eastern Airlines)
mais d’autres considérations propres à la mentalité américaine sont aussi intervenues tel le slogan « buy America » et une sensibilité exacerbée à toutes les réalisations d’origine française :
« A cette occasion, on a évoqué une prise de position de l’administration américaine
et du lobby israélite à l’encontre de la France en raison de l’affaire Abou Daoud. Ce
terroriste palestinien, soupçonné d’être l’organisateur de l’attentat contre l’équipe
israélienne lors des jeux olympiques de 1972 à Munich, est arrêté le 7 janvier 1977
à Paris ; sa libération par les autorités françaises quatre jours plus tard, contestée
en Israël et aux Etats-Unis, a certainement jouée dans la décision du conseil de
Western. »
Les pressions politiques sur les décisions commerciales s’exercèrent tout au long
de l’histoire Airbus. « Il en a été ainsi au cours de l’été 76 : à l’occasion d’une chasse en Centrafrique, les déclarations du président Valéry Giscard d’ESTAING contre la
politique d’apartheid de l’Afrique du Sud faillirent remettre en cause le choix de la
compagnie en faveur d’Airbus et il fallu tout l’entregent de Franz Josef STRAUSS
auprès des Sud Africains pour calmer la situation. »
3
LA LOCATION À EASTERN AIRLINES,
PREMIER ACCÈS AU MARCHÉ AMÉRICAIN :
Cet accord, annoncé le 2 mai 1977, est la reconnaissance des qualités du produit
A300B par rapport à ses concurrents américains L-1011 et DC-10 ; le premier avion
est livré le 24 août et mis en service le 18 novembre 1977 ;
La location à Eastern Airlines a pour origine la rencontre de deux entreprises présentant des handicaps complémentaires : d’un côté Eastern souhaite se séparer de
ses L-1011 sans en avoir les moyens financiers, et de l’autre Airbus a le bon produit
mais éprouve de grandes difficultés à placer ses avions. Cette conjugaison d’intérêts
est un point de départ favorable mais encore insuffisant pour conclure : il faut aussi
des hommes et leurs qualités pour mettre en musique une partition aussi complexe ;
dans ce domaine, la rectitude scientifique des présentations de Roger BÉTEILLE inspire une grande confiance au rigoureux Frank BORMAN (président d’Eastern et ancien
astronaute) et l’exubérante convivialité de Bernard LATHIÈRE apporte l’effervescence
chaleureuse nécessaire à l’aboutissement des négociations.
LE REJET DE LA COOPÉRATION
PAR SES COMMANDITAIRES
Dès1975, les partenaires récusent la légitimité de la maîtrise d’œuvre Airbus et éprouvent l’impression de se voir
devancer par leur enfant engrangeant ses premiers succès
alors que leurs propres programmes (Concorde, VFW614)
stagnent. La crise commerciale va servir de prétexte pour
montrer que ce sont eux les vrais patrons ; par chance, les
velléités d’arrêt envisagées par les partenaires et les gouvernements ne peuvent aboutir en raison de la robustesse
juridique de la coopération : ne sachant pas sortir de l'accord intergouvernemental ni fermer le GIE, aucune des parties n’était disposée à se déclarer de peur d’avoir à en supporter les conséquences.
Parmi les dispositions prises par les partenaires, la plus
dommageable pour l’avenir est la réduction de cadence (à
un avion par mois au lieu de deux) imposée au début de
1977 par l’industrie allemande (alors que les premiers frémissements du marché annoncent la prochaine reprise !) ;
cette position unilatérale contraint l’ensemble du système à
entériner la suspension des approvisionnements. Du fait de
l’hystérésis de la production, cette décision pénalisera la
pénétration lors de la reprise : en effet malgré une abrogation de la décision 6 mois plus tard, il fallut deux années
pour revenir à la cadence 2 et quatre années pour récupérer le retard (alors que la crise se profile à l’horizon).
Les réflexions sur l’avion de 150 places et la promotion
d’une coopération avec l’industrie américaine vont déstabiliser pendant deux années (de 1975 à 1977) la coopération
Airbus. Ces tentatives, d’origine française sous la pression
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Les milieux américains n’apprécient guère l’arrivée d’Airbus
dans leur marché et utilisent tous les moyens pour entraver
la mise en service de l’A300 :
– l’US International Trade Commission ouvre ainsi une
enquête sur la régularité de la location par rapport à la
législation américaine ; ce procès d’intention se clôture
rapidement par un constat de parfaite régularité du
contrat au regard des règles de la concurrence ;
– une interdiction d’atterrissage de l’Airbus A300B à l’aéroport de New York La Guardia, promulguée au motif que
les charges au sol de l’avion dépassent la résistance des
taxiways (la restriction ne s’applique pas aux DC10 et
L-1011 pourtant plus lourds !), ne sera levée qu’une
année plus tard le 4 décembre 1978 ;
– les médias fustigent le produit européen : un journal de
Floride fait sa manchette avec le titre « Airbus donne des
boutons » en expliquant que sur Airbus les hôtesses
d’Eastern sont victimes de mystérieuses éruptions d’eczémas ; heureusement, un médecin d’Air France diligenté
par Airbus découvre rapidement l’origine du syndrome :
une réaction allergique à la peinture du gilet de sauvetage
Eastern.
Le lancement d’un bimoteur de 150 places équipé du moteur CFM56 développé en
coopération par la SNECMA et General Electric est une préoccupation en France ;
cette nouvelle propulsion apporte des avantages considérables en consommation et
en bruit par rapport aux produits existants mais il reste à en convaincre le marché
et à en définir l’avion porteur.
Espérant reproduire l’efficace entente SNECMA-General Electric, le gouvernement
français pousse les avionneurs français vers une coopération avec un constructeur
américain. Les deux avionneurs constituent ainsi les alliances « Dassault-Douglas »
et « Aérospatiale-Boeing » .
Le gouvernement français tranche en faveur du projet Mercure 200 et de l’alliance
Dassault-Douglas à laquelle Aérospatiale est priée d’adhérer. Un accord signé entre
MDC, l’État français, Dassault et Aérospatiale est approuvé le 27 juillet 1976 en comité
interministériel présidé par Jacques CHIRAC. Les exigences du constructeur américain
vont rapidement dissiper les illusions des parties françaises sur une telle coopération
transatlantique et les discussions s’arrêteront en mars 1977 à la demande de MDC.
Le gouvernement français, encore peu confiant dans l’avenir d’Airbus, pousse
Aérospatiale et ses partenaires à poursuivre les discussions avec Boeing ; les travaux se prolongent ainsi plusieurs mois sur un projet concurrent de l’A300 appelé
BB10. Dieu merci, Boeing décide d’arrêter au début de l’année 1977 (sous la pression des syndicats opposés à toute collaboration avec l’Europe).
Pendant cet intermède franco-américain, le reste de l’Europe poursuit ses travaux sur
l’avion de 150 places dans le cadre de deux alliances excluant les partenaires français
: les industriels s’aperçoivent très vite qu’ils n’ont ni les moyens ni les ressources pour
disperser leurs efforts et le retour d’Aérospatiale au printemps 1977 va leur permettre
de se retrouver dans une structure unifiée appelée Eurojet. Le rapport que JET (Joint
European Transport) présente en juillet 1977 confirme l’importance du marché potentiel de l’avion de 150 places et recommande la présence d’Airbus Industrie dans la
réflexion européenne : Airbus Industrie reprend ainsi sa place dans la concertation
européenne mais il se passera beaucoup de temps avant le lancement de l’A320.
L A L ETTRE AAAF
L’exploitation de l’A300 aux Etats-Unis s’avère toutefois
concluante et Eastern confirme son intérêt dès 1978 par
une commande de 23 appareils (suivie de 9 autres les
années suivantes) ; malheureusement les difficultés financières de la compagnie amènent sa faillite en 1986 et ceci
va coûter très cher au système Airbus : l’ouverture du marché américain en valait toutefois la peine !
L’AVION DE 150 PLACES : UNE CACOPHONIE
EUROPÉENNE EN PRÉLUDE
AU DÉVELOPPEMENT DE L’A320
L E S h i s to i re s d e L ’ H I STO I R E
positive pour Airbus : pourtant la position annoncée par le
conseil d’administration de Western le 25 janvier 1977 est
en faveur de Boeing ce qui entraîne une grande déception
chez Airbus et ses partenaires (voir ENCART N° 2).
Heureusement, l’année 1977 apporte le retour de la croissance économique ; la reprise du trafic se traduit pour
Airbus par l’annonce de 16 commandes supplémentaires :
• en avril 77, commande de 4 B4 par la compagnie Thaï
Airways International ;
• en mai 77, commande de 2 B4 par SAS, « ancienne marraine » de Thaï ;
• en mai 77, location de 4 B4 à la compagnie Eastern
Airlines (voir ENCART N° 3) ;
• à la fin 77, nouvelles commandes de 2 B4 par Air France,
de 2 B2 par Air Inter, de 2 B4 par Germanair et de 4 B4
par Lufthansa (soulignant ainsi leur satisfaction pour le
produit)
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L E S h i s to i re s d e L ’ H I STO I R E
N° 9 - OCTOBRE 2006
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de l’administration et de l’industrie, poussent les partenaires
industriels à rechercher de nouvelles formes d’association
avec MDC d’abord puis avec Boeing. Heureusement pour
l’avenir d’Airbus, les suspensions des discussions à la
demande de MDC suivi de Boeing mettent un terme à ces
alliances contre-nature : ce refus constitue une erreur stratégique car ils avaient en main tous les moyens pour circonvenir leur futur adversaire (voir ENCART N° 4).
LA CRISE RENFORCE AIRBUS
Bien que la crise rencontrée soit durement ressentie par
Airbus, elle représente une grande chance pour la coopération européenne en lui donnant le temps nécessaire pour
convaincre de sa crédibilité et pour renforcer son organisation : Airbus sera prêt le jour de la reprise avec un produit
reconnu.
L’OBTENTION DE LA CRÉDIBILITÉ
Malgré le bon positionnement de son produit et la réussite
de son développement, Airbus Industrie a de nombreux
handicaps avant d’être accepté par le marché :
– la filiation d’Airbus aux avionneurs européens ne constitue
pas un label : en dépit de leur compétence technique,
ceux-ci ont en effet la fâcheuse réputation de ne pas être
à l’écoute du marché et des clients (définition, évolution
du produit et suivi en service) ;
– une coopération laissant planer des doutes sur son efficacité et sa pérennité.
– la structure juridique du GIE est incompréhensible pour la
plupart : clients, fournisseurs et concurrents ; Boeing ne
se prive pas de l’exploiter en traitant Airbus de « consortium politique irresponsable ».
Airbus Industrie est dans l’obligation de démontrer la vacuité
de ces imputations : la crise du transport aérien va lui donner
le temps nécessaire pour mener à bien cette opération.
Le premier objectif est de convaincre les clients de l’efficacité du produit en opération. Au-delà des premières expériences en service par les compagnies européennes, de
nombreuses démonstrations et présentations vont être
menées dans l’ensemble du monde. Deux régions sont particulièrement prospectées, l’Extrême Orient et les EtatsUnis et celles-ci deviendront à la fin des années 70 le ferment du redémarrage commercial d’Airbus une fois la crise
passée.
En Extrême Orient, plusieurs expérimentations vont souligner l’adaptation du produit à un marché régional en pleine
expansion ; le premier banc d’essai est constitué par la
courte mais probante exploitation au dernier trimestre 1974
de l’avion n°8 par Air Siam ; les mises en service des B4 de
KAL en septembre 1975 et des B2 d’IAL en novembre
1976 complètent efficacement cette promotion.
En Amérique du Nord, la première démonstration de l’A300
est apportée par Air France au cours de l’hivers 1975-76
avec l’exploitation de son premier B4 sur une liaison entre
New York et les Antilles ; l’expérience Eastern avec ses quatre premiers B4 en opération à partir du 18 novembre 1977
donne une dimension plus large à l’expérimentation de l’avion sur le marché américain.
La médiocre réputation des constructeurs européens dans
leurs relations avec leurs clients doit être redressée ; Airbus
va déployer tout un ensemble d’actions visant à démontrer
que les leçons des expériences passées sont prises en
considération dans le suivi des avions en exploitation :
• service après-vente, une priorité pour répondre aux exigences opérationnelles des utilisateurs ;
• formation en vol et au sol des personnels des compagnies
par une filiale Aéroformation ;
• suivi des incidents en service.
Le développement des produits reste au centre des préoccupations d’Airbus et deux réalisations soulignent cette
ouverture malgré l’atonie des activités :
• le développement d’une deuxième motorisation en coopération avec Pratt & Whitney est décidé au printemps 1977 en
accompagnement de la commande d’A300B4 par SAS ;
• la configuration FFCC (Forward Facing Crew Cockpit)
est conçue et mise au point pour rendre possible le pilotage de l’A300B4 par deux pilotes alors que traditionnellement l’équipage est constitué de deux pilotes et d’un
mécanicien navigant (voir ENCART N° 5).
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AIRBUS, PIONNIER CONTESTÉ EN FRANCE
DE L’ÉQUIPAGE À 2
L’adaptation du cockpit pour présenter face à l’équipage l’ensemble de l’instrumentation et des boutons de commande est rendue possible grâce à l’utilisation des
premières techniques numériques. La version A300 incorporant ce nouveau concept
est vendue en 1979 puis exploitée à partir de janvier 1982 par la compagnie indonésienne Garuda. Cette avancée technologique est une première dans l’exploitation
des avions de ligne ; elle sera reprise pour tous les futurs produits Airbus à partir de
l’A310 et Boeing sera obligé de suivre en modifiant dans ce sens ses nouveaux produits. Dès l’origine, cette évolution s’accompagne d’une polémique avec les associations de pilotes de ligne : celle-ci se calmera dans l’ensemble du monde sauf du côté
français où les syndicats de pilotes continuèrent à s’opposer à une telle évolution :
il fallut attendre pour clore ce conflit en 1988, la mise en service de l’A320 associée à l’énergique intervention du ministre des Transports Charles FITERMAN.
Aux Etats-Unis, saisi du problème dès son entrée en fonction en janvier 1981, le président Ronald Reagan nomme une commission d’experts et la charge de lui remettre
un avis ; après une visite à Toulouse pour ausculter le cockpit Airbus, celle-ci rend
le 2 juillet de la même année un verdict tout à fait favorable au nouveau concept de
pilotage à deux.
Il reste aussi à faire comprendre aux interlocuteurs d’Airbus
Industrie le fonctionnement de la coopération dans le
contexte juridique du GIE ; par sa singularité, l’organisation
industrielle prête le flanc à l’incompréhension. Une brochure pédagogique préparée à cet effet, rassure les clients sur
l’importance apportée par la caution conjointe et solidaire
des partenaires dans la structure du GIE.
LA CONSOLIDATION DE LA COOPÉRATION
INDUSTRIELLE
Le développement des activités du groupement entraîne
une augmentation de ses moyens : les effectifs passent ainsi
de 200 en 1974 à plus de 600 à la fin de 1977 et l’organisation se peaufine avec une équipe de direction complétée
au cours des années 74 et 75 :
• Bernard LATHIÈRE est nommé Administrateur Gérant en
remplacement d’Henri ZIEGLER ;
• Roger BÉTEILLE, désigné administrateur gérant adjoint et
directeur général assure la gestion opérationnelle d’Airbus
Industrie ;
• Jean ROEDER prend la direction technique ;
• Bernard ZIEGLER assure la direction des essais en vol
• Félix KRACHT est maintenu à la direction de production ;
• Dan KROOK est détaché par Fokker comme directeur
commercial ;
• George WARDE (ancien vice-président d’American
Airlines) est nommé directeur du support aux clients ;
• Georges VILLE prend la direction financière (voir
ENCART N° 6).
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LA DIRECTION FINANCIÈRE DU GIE : UNE NOUVELLE MISSION AU SERVICE D’AIRBUS
Les règles contractuelles internes à la
coopération industrielle avaient été laissées de côté au cours du développement : cette question n’était pas prioritaire et la réponse pas évidente, même
si la question était d’importance car de
son issue dépendait pour une grande
part l’efficacité industrielle. Avec la première livraison à Air France en 1974,
Airbus Industrie se trouve confronté au
reversement aux partenaires de la
recette en l’absence de toute procédure agréée ce qui va provoquer un crise
majeure entre partenaires et Airbus
(voir ENCART N° 7).
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MES PREMIERS PAS CHEZ
AIRBUS ET LE PARTAGE DE
LA RECETTE D’AIR FRANCE
Dès leur approbation, les accords sont
mis en application : ô surprise, la pratique s’avère d’une grande simplicité
dans la gestion de la coopération.
Comme nous le constaterons, cette
organisation de la coopération ne sera
jamais un handicap de compétitivité
par rapport à Boeing ; au contraire, en
distinguant les activités opérationnelles
et les responsabilités de commercialisation et de direction générale, la
structure constituera même un atout
majeur en matière d’efficacité et de
réactivité.
APRES LA CRISE LA
CONFIANCE RETROUVEE
Avec la reprise du marché en 1977,
Airbus Industrie peut regarder avec
confiance un avenir offrant des perspectives plus favorables ; la coopération a réussi à traverser la crise sans
renier ses principes, son produit est
reconnu et son système industriel est
en ordre de marche. Par leur courage
et leur persévérance, les hommes
d’Airbus sont au centre d’une telle
conjoncture et l’on ne répètera jamais
assez le rôle d’entraîneur joué par
l’équipe de direction d’Airbus Industrie
à cette époque. Cette première période d’émancipation d’Airbus se termine
sous des auspices plus favorables
avec toutefois un seul regret : la décision de baisse de la cadence de production dont on va rapidement mesurer
les conséquences.
... à suivre, dans un prochain
numéro de LA LETTRE :
Les histoires d'Airbus,
5ème épisode. 1978-1984.
L A L ETTRE AAAF
Pour ma première décision après mon arrivée
comme directeur financier d’Airbus Industrie, je suis
confronté au problème : que faire des 62 millions
des francs correspondant à la livraison du premier
avion à Air France ? Après un examen des financements supportés par chaque partenaire, il apparaît
qu’Aérospatiale supporte un découvert plus élevé,
aussi je lui transfère à titre provisoire la totalité de
la recette. Malgré l’aval de tous les responsables
financiers à cette proposition, les réactions des deux
partenaires vont conduire au blocage de tout échange financier interne pendant plusieurs années :
– en premier, Rolf SIEBERT, gérant de Deutsche
Airbus s’élève contre cette manœuvre « déloyale »
et stoppe tout financement d’Airbus Industrie ;
– André GINTRAND, directeur financier d’Aérospatiale, s’aligne sur la position de Deutsche
Airbus ;
– en réplique, je décide de ne plus transférer aucune recette tant qu’un accord n’aura été établi entre
Airbus Industrie et ses partenaires ;
Le conflit se traduit ainsi par la suspension de tout
transfert financier et cette situation se prolongera
jusqu’à l’agrément des principes contractuels en
1976. Cette crise sera bénéfique car elle produira
une pression suffisamment forte pour mobiliser les
responsables concernés à un niveau suffisant pour
engager leur entreprise dans la négociation.
Les enjeux de la négociation sont
considérables en matière d’impacts
financiers et d’incitation à la compétitivité, et de longues et complexes négociations seront nécessaires pour trouver les bons compromis. Dans les discussions, les partenaires ont tendance
à privilégier leurs positions au détriment de l’intérêt général, alors qu’Airbus Industrie s’attache à refuser toute
solution allant à l’encontre de l’efficacité globale. Les accords contractuels
sont définitivement approuvés par les
présidents des partenaires et d’Airbus
le 6 mars 1978.
Rappelons ci-dessous les particularités
de cette structure contractuelle :
• un système de gestion distinguant les
deux rôles des partenaires : « industriel » pour la fourniture de leur part
de travail et « actionnaire » pour leurs
positions de membres du GIE ;
• une utilisation de dollar américain
étendue à toute la gestion financière
du système : facturation des fournitures, tenue des comptes courants et
comptabilité du GIE ;
• des cessions des parts de travail des
partenaires comptabilisées sous la
forme de forfaits équilibrés et incitatifs : cette méthode délicate à mettre
en oeuvre (négociation des forfaits)
est le moteur essentiel des améliorations de productivité industrielle obtenues dans le système.
L E S h i s to i re s d e L ’ H I STO I R E
Ma nomination a surpris : en effet je n’étais pas reconnu pour mon expérience financière et beaucoup ne comprenaient pas pourquoi j’allais « gâcher ma carrière » dans une aventure sans avenir. Au fond de moi, je l’attendais ce poste, même si ma formation ne plaidait pas en ma faveur ; j’étais sûr que mes antécédents dans le programme m’avaient préparé pour relever le challenge de la compétitivité primordial pour Airbus.
La coopération Airbus opérait dans une situation particulière avec une clientèle privée non disposée à supporter les handicaps accompagnant une telle organisation ; la situation
aurait été différente pour un programme militaire où le client État pouvait prendre à sa charge les surcoûts d’une coopération.
J’étais persuadé qu’une des clés de la réussite se trouvait dans une organisation de gestion taillée sur mesure avec pour seul objectif l’efficacité ; pour la construire, il fallait faire
preuve d’imagination, (qualité peu répandue à l’époque dans la communauté financière) et sur ce plan, je me sentais d’attaque à relever le défi.
Plusieurs opportunités se sont conjuguées pour me permettre de satisfaire cette aspiration :
– le poste était disponible depuis plusieurs mois et les candidatures ne se bousculaient pas ;
– j’avais depuis plusieurs mois fait part à Roger BÉTEILLE de mon souhait de poursuivre ma route dans ce domaine sous sa direction chez Airbus Industrie ;
– une autre candidature était envisagée, celle de Jean PEYRELEVADE mais ce dernier n’y donna pas suite en préférant orienter sa carrière dans la banque.
Si ce dernier avait postulé, je pense qu’il aurait été retenu en raison de sa plus grande notoriété dans le monde financier ; tant pour Airbus que pour les deux candidats, je suis
convaincu aujourd’hui qu’il en a été mieux avec la solution arrêtée : Jean PEYRELEVADE, pur financier, avait sa place dans le monde bancaire (sa brillante carrière l’a démontré)
et de mon côté j’avais un esprit bien fait pour la gestion industrielle ce dont avait besoin Airbus à l’époque.
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SOUVENIR DE MICHEL BIGNIER
Avec Michel BIGNIER disparaît l’un de ceux qui pouvaient légitimement se considérer comme un des pères de l’activité spatiale
de la France.
Certes, il n’aurait jamais lui-même revendiqué ce titre mais, comme avait coutume de le dire le général AUBINIERE, il était au CNES avant le CNES. Ce fut lui qui en écrivit les
textes fondateurs et surtout qui les négocia, avec ce mélange inimitable de fermeté et de souplesse qui caractérisait son action. C’était une tâche difficile parce que peu de ceux
qui allaient devenir les partenaires du CNES étaient favorables à l’intrusion de ce nouveau venu.
Michel BIGNIER était sorti de l’X (promotion 1947) dans le corps des Ingénieurs de l’Air et, bien qu’il ait fait la plus grande partie de sa carrière dans des organismes civils,
il était resté très fidèle à cette origine. Il compléta sa formation d’abord à Sup Aéro puis, après avoir rejoint le Centre d’Essais en Vol (CEV) que dirigeait Maurice BONTE, il suivit les cours de Sup Télécom. C’est muni de cette double formation aéronautique et électronique qu’après quelques années passées au CEV, il rejoint en 1957, le Centre Interarmées
d’Essais d’Engins Spéciaux de Colomb-Béchar. Le CIESS, que dirigeait le général AUBINIERE, est le creuset où ont été formés un grand nombre des futurs cadres du CNES et où
ils ont rencontré les industriels qui allaient construire l’industrie spatiale. C’est de là aussi qu’a été importée, dans le spatial naissant, la doctrine du « faire faire » propre à l’armée
de l’air, par opposition à la pratique des arsenaux qui prévalait ailleurs.
De retour de Colomb-Béchar, en 1960, Michel BIGNIER se retrouve sous la coupe d’AUBINIERE qui a remplacé BONTE dans les fonctions de directeur technique et industriel.
AUBINIERE le fait appeler et lui dit (je cite les mots de la bouche même de Bignier) : « ‘‘Le général de Gaulle va faire le CNES et on va me nommer directeur général. Etes-vous
prêt à venir avec moi ? ’’ J’ai tout de suite dit oui ». Il se trouve alors placé auprès du professeur AUGER, de septembre 1960 à mars 1962, dans la toute petite équipe chargée
de mettre en place le CNES. Il y assure le secrétariat du Comité des recherches spatiales qui était en quelque sorte le précurseur du CNES et surtout il s’emploie à établir le texte
de la loi qui en permit la création.
Avec celle-ci, en 1962, il est nommé directeur des affaires internationales, poste qu’il occupera, avec des attributions élargies à l’ensemble des relations extérieures et à la politique industrielle, jusqu’à ce qu’il prenne la succession d’AUBINIERE à la direction générale en 1972.
Il n’y a guère de domaines de l’activité du CNES sur lequel il n’ait exercé son influence à sa manière discrète et modeste, car il était de ceux qui préfèrent agir à paraître. Je n’en
prendrai pour exemple que le rôle déterminant qu’il a joué dans la gestation du programme Symphonie. Symphonie qui fut, rappelons-le, le premier satellite de télécommunications
construit en Europe et qui apportera, avec la maîtrise de la stabilisation trois-axes, une éclatante démonstration de la capacité industrielle européenne. Le CNES, à l’époque, hésitait beaucoup à quitter le domaine de la science pour s’engager dans celui, plus aventuré, des applications de l’espace. Michel BIGNIER et moi-même partagions l’opinion
qu’il fallait franchir ce pas et que les télécommunications étaient pour l’espace une terre promise. Elaborer un projet – ce fut initialement SAROS – n’était pas le plus difficile.
S’assurer le soutien des responsables des télécommunications, généralement hostiles au spatial et assez mal disposés à l’endroit du CNES, était une tâche plus délicate. Nous
avions l’un et l’autre des relations amicales dans ce milieu, mais je dois reconnaître que c’est le génie de la convivialité de Michel BIGNIER qui, en ces circonstances, fit merveille et qui permit au général AUBINIERE et au président COULOMB de soumettre au gouvernement une proposition consensuelle. Le gouvernement dit : Oui, mais faites le de
moitié avec les Allemands. Restait à obtenir l’agrément de ces derniers et c’est une tâche dans laquelle, naturellement, Michel BIGNIER excella, comme il excella dans la gestion des quelques tensions qui, inévitablement, marquèrent le cours de ce grand projet. Le succès technique de Symphonie, son effet d’entraînement sur les ambitions européennes,
le rôle capital qu’il joua dans la reconnaissance, par les Européens, de la nécessité d’une capacité de lancement autonome, tout cela doit énormément à la personnalité de Michel
BIGNIER.
Sa démission du CNES, en 1976, à la suite d’un conflit avec les syndicats et avec le président permit, à ceux qui ne le savaient pas, de mesurer que, malgré son refus des conflits
inutiles, il y avait des choses avec lesquelles il ne transigeait pas. Entré dans l’équipe de direction de l’ESA - où nous nous sommes retrouvés - il y fut d’abord chargé de remettre sur rail le programme Spacelab, ce dont il s’acquitta brillamment. Puis ses responsabilités furent étendues au programme Ariane et aux expériences sur la microgravité. Dans
ce milieu humain assez difficile, parce que s’y confrontent les rivalités nationales et l’indispensable solidarité européenne, il trouva à employer ses immenses qualités de gestionnaire et de conciliateur.
Il faudrait, pour être complet parler de son rôle dans le domaine de l’assurance spatiale et dans les activités associatives marqué par les présidences de l’AAAF et de l’ANAE –
dont il fut avec Hubert CURIEN et André TURCAT - l’un des fondateurs, et par la création de l’Institut français d’histoire de l’espace. Mais je dois, pour conclure, essayer de dire
qui était l’homme que j’ai connu. Michel BIGNIER était, on le sait, un joyeux compagnon dont la présence suffisait à égayer une soirée et à répandre une ambiance amicale.
Il était un admirable conteur plein de malice et d’invention. Mais il était surtout un homme droit ; son goût de la conciliation s’effaçait toujours derrière le refus de la complaisance
et de la compromission. Et nous savions tous aussi, malgré sa grande discrétion, combien comptait pour lui le solide cercle familial qui l’entourait.
Michel BIGNIER était mon ami et je m’honore de cette amitié. Nous avons fait ensemble une longue route sans nuage. C’est peu de dire que je l’estimais profondément ;
j’avais pour lui de l’affection et surtout, il était de ceux dont j’étais soucieux de mériter l’estime.
André LEBEAU – ANAE, AAAF
N° 9 - OCTOBRE 2006
LA LETTRE AAAF
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Éditeur : Association Aéronautique et Astronautique de France,
AAAF – 6, rue Galilée, 75016 Paris – Tél : 01 56 64 12 30 • Fax : 01 56 64 12 31 – [email protected] • www.aaaf.asso.fr
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Comité de rédaction : Michel de la BURGADE, Philippe JUNG, Jean TENSI
Rédaction : Tél : 01 46 73 37 80 ; Fax : 01 46 73 41 72 ; E-mail : [email protected]
Ont notamment collaboré à ce numéro : Pierre BESCOND, Claude GOUMY, Louis LAIDET, André LEBEAU, Jean-Pierre YRIBARREN.
Crédits Photos : Alcatel Alenia Space, Luc DELMON, ESA, Snecma Moteurs.
Conception : Khoa DANG-TRAN, S. BOUGNON
Réalisation : Sophie BOUGNON
Imprimerie : AGI SYSTEM’S
Dépôt légal : 1er trimestre 2004
ISSN 1767-0675 / Droits de reproduction, texte et illustrations réservés pour tous pays