travail de fin d`études
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travail de fin d`études
Institut de Formation en Soins Infirmiers Centre Hospitalier Intercommunal des Alpes du Sud - Gap Université de la Méditerranée 2, Rue Bayard - 05000 GAP UE 3.4 Initiation à la démarche de recherche UE 5.6 Analyse de la qualité et traitement des données scientifiques et professionnelles TRAVAIL DE FIN D’ÉTUDES « Le Cadre, un espace de soin » Année 2015 Mme Monique FAURE Cadre de Santé Formateur Mr MILLET François Promotion 2012 – 2015 Session 1 Note aux lecteurs : « Il s’agit d’un travail personnel et il ne peut faire l’objet d’une publication en tout ou partie sans l’accord de son auteur » 2 Remerciements : à Madame Monique FAURE, Cadre de Santé Formateur à l’IFSI de Gap, à Monsieur Dominique FRIARD, Infirmier Psychiatrique aux soignants et structures de soins ayant participés, à Mme Christelle MAZZELLA, Docteur en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives au Docteur Pierre MILLET, Psychiatre, à mon épouse Anne-Marie et mes enfants Emma et Jules pour leur soutien. 3 TABLE DES MATIERES INTRODUCTION!.........................................................................................................6 DE LA SITUATION D’APPEL A LA QUESTION DE DEPART!...................................7 Description de la situation d’appel"............................................................................7 Analyse, questionnement".........................................................................................9 Recherches préliminaires".........................................................................................9 D’un point de vue légal, comment une activité devient-elle un soin ?"......................9 En quoi Sport, Activité Physique et médiation corporelle sont-ils différents ?"........11 De l’usage d’une pré-enquête"................................................................................11 Choix et construction de l’outil"................................................................................12 Choix des lieux et des populations".........................................................................12 Modalités de réalisations"........................................................................................13 Synthèse des données recueillies"..........................................................................13 Problématique et question de départ"......................................................................18 CADRE CONCEPTUEL!.............................................................................................20 La Médiation"...........................................................................................................20 La médiation au fil du temps"...................................................................................21 La médiation est un processus"...............................................................................23 Le Cadre".................................................................................................................23 Holding, portance, contenance"...............................................................................24 Handling, maintien, soutien"....................................................................................24 Le Corps".................................................................................................................24 Corps et psychose"..................................................................................................25 La limite du corps : la peau".....................................................................................26 Hypothèse"..............................................................................................................27 ENQUETE DE TERRAIN!...........................................................................................28 Présentation du dispositif et des modalités d’enquête"...........................................28 Choix et construction de l’outil d’enquête"...............................................................28 Choix des lieux et des populations".........................................................................29 Modalités de réalisations"........................................................................................29 4 Traitement des données recueillies"........................................................................30 Analyse des données recueillies"............................................................................30 Interprétation factuelle"............................................................................................40 Diagnostic des informations analysées"..................................................................41 Synthèse, limites et apports"...................................................................................42 CONCLUSION!...........................................................................................................43 BIBLIOGRAPHIE!.......................................................................................................44 SITOGRAPHIE!...........................................................................................................46 ANNEXES!.................................................................................................................47 Entretiens exploratoires"..........................................................................................48 Retranscription entretien IDE Psychiatrique 1"....................................................48 Retranscription entretien IDE Psychiatrique 2"....................................................58 Demande d’autorisation d’enquête auprès des institutions"....................................65 Autorisations des institutions"..................................................................................66 Entretiens d’enquête et textes"................................................................................68 Retranscription entretien IDE Psychiatrique 3"....................................................68 Texte 1: Le temps d’un match de tennis".............................................................73 Texte 2: Stéphanie"..............................................................................................82 Texte 3: L’eau et les soins"...................................................................................85 5 INTRODUCTION Longtemps investi dans le sport de haut-niveau comme entraîneur de natation, je me suis orienté vers la profession d’infirmier. Le choix s’est révélé comme une évidence à la suite d’une aventure humaine lors de l’accompagnement de personnes handicapées à qui j’ouvrais la piscine une heure par semaine pour nager. Je ne savais pas alors que ma démarche prenait le sens d’un soin puisque je répondais à un besoin de personnes en souffrances : se mouvoir dans l’eau pour renouer avec un corps altéré par la maladie ou les accidents corporels me faisait oublier le mot "natation". C’est donc tout le sens de ce travail qui a muri au fil des trois années de formation en soins infirmiers. D’éducateur sportif à soignant il n’y a qu’un pas et c’est de ça dont il est question : pourquoi une activité sportive ou physique, car il faut les distinguées, deviendraient-elles un soin ? Qu’est-ce qui fait soin dans une médiation ? A travers une situation vécue en stage dans le domaine de la psychiatrie, je questionnerai des professionnels pour mettre les mots sur cette notion de "médiation thérapeutique". En convoquant des auteurs et des praticiens (des infirmiers spécialisés et experts de ce mode de pratique) nous tenterons de mettre en évidence ce qui se joue lors des médiations corporelles et comment leur visée devient thérapeutique. La pré-enquête exploratoire incarnera cette conceptualisation avant de se rendre sur le terrain pour apprécier les expériences vécues par des professionnels. 6 1. DE LA SITUATION D’APPEL A LA QUESTION DE DEPART 1.1. Description de la situation d’appel Alors étudiant en deuxième année, je réalise un stage professionnel dans une unité d’hospitalisation complète d’un centre de psychiatrie infanto-juvénile. Le service offre des soins spécialisés aux jeunes âgés de 10 à 18 ans présentant des troubles du comportement, des troubles alimentaires, un syndrome dépressif, des troubles psychotiques. Le suivi est réalisé par une équipe composée de médecins psychiatres, psychologues, assistantes sociales, infirmiers, aides-soignants, une éducatrice spécialisée, une psychomotricienne, un art-thérapeute, un musicothérapeute ... Le travail de l’équipe de soins s’articule avec différents partenaires que sont l’Education Nationale (EN), les Instituts Thérapeutiques Educatifs et Pédagogiques (ITEP), le Conseil Général (CG), les Maisons d’Enfants à Caractère Sanitaire et Social (MECSS), les Hôpitaux Généraux (HG), le Centre Hospitalier Psychiatrique (CHS), le Juge des Enfants (JE), l’Hôpital De Jour enfants et adolescents (HDJ). L’équipe soignante dans laquelle je suis bien intégré, m’autorise une grande capacité d’initiatives et se tient à l’écoute de mes questionnements. Les réunions cliniques et les transmissions rythment le quotidien, ce qui donne une multitude d’opportunités pour évoquer les différents besoins des patients. C’est aussi un espace formidable pour partager et proposer aux différents soignants des objectifs de soin que nous aurions perçu au cours du temps passé avec les patients. Par un bel après-midi, l’un des deux infirmiers propose de réaliser une activité "football " sur le terrain de sport à proximité avec la totalité des patients. Le groupe est constitué de trois filles de dix-sept ans environ et de quatre garçons dont la tranche d’âge allait de 10 ans à 18 ans. Comme exposé précédemment, ces jeunes patients hospitalisés étaient atteints de pathologies à type de troubles du comportement, troubles psychotiques et syndromes dépressifs. L’activité "football" était portée par un infirmier, l’autre ne tenait pas aux activités physiques pour des raisons personnelles. J’accompagne tout le groupe et participe activement à ce moment d’activité sportive. 7 L’un des garçons, dix-huit ans, qui était entré dans une phase dépressive s’éloigne avec l’infirmière qui n’était pas tentée par l’activité. Il ne participera donc pas au jeu de football avec les autres. Les deux plus jeunes de dix et onze ans, deux garçons, jouent avec nous … alors que nous nous dépensons sans compter, le reste du groupe se tient à l’écart. Une situation qui me perturbe, moi l’ancien entraîneur de jeunes sportifs qui poussait quotidiennement mes athlètes au dépassement. En fin d’après-midi alors que seuls les deux joueurs avaient épuisé leur énergie, je propose aux volontaires, une activité en piscine puisque l’établissement dispose d’un petit bassin aquatique. Hormis les filles qui ne souhaitaient pas se mettre en maillot de bain, les footballeurs et le garçon resté à discuter sur la zone de touche saisissent l’occasion qui leur est offerte. Nous nous dirigeons à la petite piscine du rez-de-chaussée après avoir repris des forces autour d’un bon goûter. Ce temps de pause a permis aux soignants de faire le point de ce moment passé pour retranscrire par écrit les perceptions et les mots (ou maux) qui sont nés durant le temps d’activité (la clinique). Arrivés à la piscine, comme tous les enfants, les garçons se jettent à l’eau et prennent avec énergie ce moment. Fort de mon expérience professionnelle de quinze années dans l’enseignement et l’entrainement à la natation, je m’investis pleinement dans ce moment. Loin de l’idée de faire nager, je leur propose surtout d’entrer en contact avec l’eau et d’y chercher du plaisir, de faire corps avec elle. Les contacts physiques se font au grès de petits gestes de maintien pour aider à trouver l’équilibre horizontal ou simplement rassurer. L’heure passe et chacun termine détendu, les corps se laissent porter, une sensation de pause bienfaitrice est palpable. Nous ressortons de ce moment aquatique totalement satisfaits : les jeunes sont calmes et montrent un certain bien-être, et moi je trouve un sens positif à mon action. Cependant je regrette de ne pas avoir été dans l’eau avec eux pour partager in situ ce moment et ainsi casser la posture d’éducateur sportif figé au bord du bassin. 8 1.2. Analyse, questionnement L’activité « football » était pour moi un échec pour plusieurs raisons : la première parce que l’infirmière et un patient n’ont pas partagé l’activité avec le groupe, la seconde vient du peu d’adhésion du groupe et de mon incompréhension du fait que l’infirmier instigateur de l’activité n’insiste pas auprès des jeunes pour participer. Enfin, la troisième est que je n’ai pas compris ce qui faisait soin dans ce moment et j’y trouvais plus une volonté de "meubler" le temps de l’après-midi. Le contraste était d’autant plus saisissant que le vécu de la séance en piscine était différent : une modification de l’état des jeunes entre l’avant et l’après semblait apparaitre. Mon ressenti d’avoir eu une action de soin était présent alors que pendant la séance de « football » je ne me suis senti qu’animateur d’une journée de « sport ». C’est sur ce qui me semble être un écart que je m’interroge. Qu’elle est la place du soin dans ces deux moments ? Quel est mon rôle ? Pourquoi un infirmier, dont l’expertise professionnelle reconnue par ses pairs, peut-il proposer une activité comme celle-ci ? Quelle est son sens ? Quel est l’objectif d’une prise en charge comme celle-ci ? Peut-on proposer une activité sans y réfléchir et sans qu’elle soit indiquée pour le patient ? Est-ce l’activité proposée qui n’a pas trouvé écho chez les patients ? Le fait qu’un sport codifié soit proposé par rapport à une activité physique modifie-t-il le soin ? Est-ce l’eau qui fait soin ? Dans la séquence football, y-avait-il du soin ou de l’éducatif ? Est-ce mon expérience professionnelle d’éducateur sportif des activités de la natation qui a donné du sens à cette séance en piscine ? Est-ce parce-que c’est moi qui propose que j’y trouve un sens ? C’est donc le fond de ces deux activités physiques proposées dans le parcours de soin du patient qui me pose question. 1.3. Recherches préliminaires 1.3.1.D’un point de vue légal, comment une activité devient-elle un soin ? Une activité devient un soin si elle est organisée dans un contexte de soins. C’est le 9 législateur qui, par le décret de compétences n° 2004-802 du 29 juillet 20041 relatif aux dispositions réglementaires du code de la santé publique régissant l’activité professionnelle de l’infirmier, confit au rôle propre infirmier les activités à visées sociothérapeutiques, c’est-à-dire la réadaptation sociale du patient, son retour à l’autonomie dans son environnement. Du rôle prescrit, il en va de l’aspect psychothérapique (action de modification du psychisme). Extrait : Titre Ier : profession d’infirmier ou d’infirmière Chapitre Ier : Exercice de la profession Section 1 : Actes professionnels « Dans le cadre de son rôle propre, l’infirmier ou l’infirmière accomplit les actes ou dispense les soins (…) visant à identifier les risques et à assurer le confort et la sécurité de la personne et de son environnement et comprenant son information et celle de son entourage. (…) » Article R. 4311-6 Dans le domaine de la santé mentale, outre les actes et soins mentionnés à l’article R. 4311-5, l’infirmier ou l’infirmière accomplit les actes et soins suivants : 1° Entretien d’accueil du patient et de son entourage 2° Activités à visée sociothérapeutique individuelle ou de groupe 3° Surveillance des personnes en chambre d’isolement 4° Surveillance et évaluation des engagements thérapeutiques qui associent le médecin, l’infirmier ou l’infirmière et le patient. Article R. 4311-7 L’infirmier ou l’infirmière est habilité à pratiquer les actes suivants soit en application d’une prescription médicale (…), soit en application d’un protocole (…) : (…) 42° Entretien individuel et utilisation au sein d’une équipe pluridisciplinaire de techniques de médiation à visée thérapeutique ou psychothérapique ; 43° Mise en œuvre des engagements thérapeutiques qui associent le médecin, l’infirmier ou l’infirmière et le patient, et des protocoles d’isolement. 1 Disponible sur http://legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000787339 [en ligne] 10 1.3.2.En quoi Sport, Activité Physique et médiation corporelle sont-ils différents ? Il est important de rappeler la définition de quelques notions que sont « le sport », « l’activité physique » et « médiation corporelle ». J’avais émis, en introduisant mon travail, une distinction entre les deux premiers termes car il me semblait alors que leur différence pouvait avoir un lien direct avec le soin. Cependant, l’évolution de mon travail m’éloigne de cette remarque pour reprendre le terme plus « soignant » de « médiation corporelle ». Même s’il met en action le mouvement des corps comme le fait une activité physique (ou activité corporelle), le sport (MARZANNO-PARISOLI, 2007) est soumis à des contraintes normatives car fédéré, institutionnalisé et légiféré dans sa structure de pratique (DURET et BODIN, 2003). Libéré de ce cadre strict il redevient activité physique ou activité corporelle. Ainsi, le sport peut-être thérapeutique si la visée du soin est la médiation par les règles du sport dans le cadre d’une pathologie vectrice d’altération du rapport aux règles et aux codes (sociothérapie). La médiation corporelle est, quant à elle, la mise en jeu du corps pour une réappropriation de la corporéité, donc l’accès au corps. MAUSS (1985) avait renommé ce concept par « techniques du corps » en raison du raccourci trop simpliste de la séparation du corps et de l’esprit. 1.3.3.De l’usage d’une pré-enquête Pour étayer ma réflexion et construire l’outil de recherche, il est nécessaire de tester en amont et sur le terrain, auprès de professionnels aguerris, ce qui suscite en moi un questionnement et vérifier auprès d’eux l’intérêt professionnel de ces interrogations. 11 1.3.3.1.Choix et construction de l’outil Je décide de réaliser un entretien semi-directif avec des infirmiers psychiatriques ayant tous une expertise dans le domaine de la mise en œuvre de médiations corporelles à visée thérapeutique. Le mode semi-directif devrait permettre de ne pas induire le professionnel dans ce que je pense entendre mais de ce que lui veut me dire. Ainsi, j’ai posé quatre questions pour cerner ce qui fait soin dans une médiation : • Question 1 : dans quel but proposez-vous une activité physique ? • Question 2 : comment orientez-vous votre choix d’activité ? • Question 3 : quel est l’élément qui est essentiel pour que l’activité fasse soin ? • Question 4 : que devient ce moment lorsqu’il se termine ? Ces questions ont été soumises à Dominique FRIARD 2, infirmier psychiatrique ayant publié dans des revues spécialisées et reconnu pour son expertise dans le domaine des soins infirmiers psychiatriques. Celui-ci pense qu’elles sont pertinentes et cernent bien ma problématique, à savoir ce qui fait soin dans la médiation. Il faut cependant préciser que le travail réalisé ici n’est qu’une enquête exploratoire, puisque les questions utilisées n’ont pas été validées scientifiquement (processus long et complexe qui est un travail de recherche en lui-même). 1.3.3.2.Choix des lieux et des populations Le choix des infirmiers s’oriente sur le site de la situation de départ (séance de football et piscine), l’hôpital psychiatrique infanto-juvénile. Deux infirmiers ont ainsi participé aux entretiens semi-directifs, notamment celui qui avait proposé l’activité football (que nous appellerons IDE 1). Avec le recul et les connaissances acquises, je pense qu’il sera intéressant de reprendre à distance ce moment avec son principal instigateur. Le second infirmier (IDE 2) a une longue expérience en psychiatrie, et a vécu un projet de médiation corporelle sur une douzaine d’années par les arts 2 Dominique FRIARD est infirmier de secteur psychiatrique. Titulaire d'une Maîtrise de Santé Mentale, d'un DEA de Droit Médical et doctorant en Psychologie, enseignant en démarche de soins, il a été rédacteur en chef adjoint de la revue " Soins psychiatriques ". Il a rejoint l'équipe de rédaction de la revue Santé Mentale® en 2001 et est vice-président de l'association SERPSY. 12 martiaux. Ces deux infirmiers ont chacun une expertise reconnue par leurs pairs et ont accepté de se prêter au jeu de l’interview. Leur ouverture au dialogue et leurs critiques constructives sur la pratique professionnelle en feront un moment d’apprentissage supplémentaire pour moi l’étudiant. 1.3.3.3.Modalités de réalisations Après avoir pris rendez-vous au préalable, nous nous rencontrons en dehors des heures de travail pour ne pas être dérangé, et permettre de s’ouvrir le temps nécessaire à la discussion. Les interviews sont enregistrées avec leur accord. La retranscription des entretiens (Cf. annexes) est faite manuellement et reste fidèle à la réalité. Sont retirés les onomatopées et autres tics de langages pour permettre une meilleure lecture de l’entretien. 1.3.3.4.Synthèse des données recueillies La retranscription des entretiens permet d’en réaliser une analyse fidèle aux propos des deux infirmiers interviewés. Une première analyse, de type quantitative, est réalisée pour mettre en avant par des mots clés, les différents concepts employés dans le langage des deux professionnels. Le nombre d’occurrences des mots-clés donnera quantitativement les idées de la discussion. Ces mots sont catégorisés selon le registre auquel ils font appel (Conceptuel, Professionnel, Corporel, Relationnel ou Spatial) pour ensuite être catégorisés selon les fonctions et/ou capacités du sujet humain définies par MERKLING3 (2010): « capacités affectives », « capacités cognitives pour s’ajuster à ses sollicitations internes et externes » et « capacités d’interaction avec l’environnement ». La seconde analyse, portera sur la qualité des contenus de l’entretien. Plus subjective, elle synthétisera les idées principales en évitant les interprétations. L’évolution des réponses, par l’intérêt qu’elles suscitent, seront révélatrices de la qualité de l’entretien. 3 MERKLING, Jacky. "Activités thérapeutiques à médiation, rôle infirmier et soin en santé mentale", Issy-lesMoulineaux : Elsevier-Masson, 2010, 256 pages, p.3-4. 13 L’analyse quantitative par comptage des occurrences des mots-clés sera présentée par un tableur (Excel®). Une représentation graphique donnera une vision synthétique de la répartition des occurrences par catégorisation. Une interprétation des résultats détaillera l’analyse. Concernant l’analyse qualitative des entretiens, elle sera orientée par le recensement des grandes thématiques communes abordées par les deux professionnelles. Ainsi, seront extraites en plus des réponses aux questions principales, les nouvelles orientations que les professionnels auront prises au décours de ces mêmes questions. Ainsi, l’enquête exploratoire ou pré-enquête est un outil indispensable pour valider la question de départ de la recherche et surtout orienter les idées et réflexions émergentes dans le travail de conceptualisation qui poursuivra pour en dégager l’hypothèse finale. 14 • Analyse quantitative par occurrences des mots clés : fonctions du sujet humain capacités affectives capacités cognitives pour s'ajuster à des sollicitations INT/EXT capacités d'interactions avec l’environnement capacités de gestion des informations registre Conceptuel mots et synonymes employés occurrences émotion, sens, sensation, conceptuel, symbolique, pulsion soignant, collègue, médecin, psychothérapeute, infirmier, infirmière Professio soin, thérapeutique clinique, symptôme, pathologie, souffrance, trouble nnel compétence, savoir, résultat, évaluation, capacité indication, prescription individu, patient, personne Corps corporel, activité, actif, physique cadre, institution, surface, espace, lieu, organisation Espace événement, moment, temps ensemble, collectif, équipe, partage, échange Relation médiation, médiatisé mouvement, mouvoir, déplacement, déplier Corps 45 45 37 33 24 12 111 84 40 38 33 25 24 absorbées Nombre d’occurrences 551 Tableau 1 : catégorisation des occurrences La catégorisation des occurrences (Tableau 1) permet de mettre en évidence l’orientation principale des réponses : les capacités d’interaction avec l’environnement du sujet humain sont majoritairement évoquées dans les réponses (60%) (Figure 1). Les capacités cognitives qui servent à s’ajuster lors des sollicitations internes et externes viennent en second (28%) alors que les capacités affectives (8%) et celles de la gestion des informations absorbées (4%) sont moins présentes dans le discours des deux infirmiers psychiatriques. Il semble à la lecture de ces résultats que l’usage de la médiation par une activité physique soit mise en œuvre pour solliciter majoritairement l’individu dans son rapport à l’environnement et son adaptation à celui-ci. La part affective et la gestion des informations absorbées par celui-ci semblent moins recherchées par les infirmiers dans cette situation. 15 répar,,on#des#fonc,ons#du#sujet#humain# (occurences)relevées)après)pré0enquête)) 4%# 8%# 28%# 60%# capacités#affec,ves# capacités#cogni,ves#pour#s'ajuster#à#ses#sollicita,ons#INT/EXT# capacités#d'interac,ons#avec#environnement# capacités#de#ges,on#des#informa,ons#absorbées# Figure 1 : représentation graphique de la répartition des occurrences obtenues suite à la pré-enquête, d’après la catégorisation de MERKLIN (2010). On notera que le mot "corps" revient dans chacune des catégorisations. En effet le corps fait référence à la fois à la notion de récepteur des sensations, à l’aspect de corps physique, de corps technique (outil) et de corps (corpus) professionnel. Je choisi de ne pas traiter maintenant de ces notions puisqu’elles seront développées ultérieurement lors de la partie de conceptualisation des idées et réflexions extraites de la pré-enquête. • Analyse qualitative: Si le terme "activité physique" est précisé et remplacé par "soin à médiation" pour l’un des deux infirmiers (IDE 1), l’ensemble des deux interviews se complètent et restent en accords l’un avec l’autre. Je propose donc un tour d’horizon des éléments de réponse qui semblent important au fil des entretiens. Cette concaténation des données reste fidèle à leurs auteurs (IDE1 et IDE2). ✦ Définition et contextualisation du terme « activité physique » Le mot « activité » selon IDE 1 appartient au registre de l’éducation et suggère que l’on attende le résultat d’un progrès mesurable et linéaire. Il propose que le patient 16 puisse être « actif » ou « passif » et c’est « la façon d’être ensemble » qui oriente le soignant dans ses choix. Le mot physique est précisé dans le sens qu’un individu n’est pas que physique. Il est aussi émotionnel et cognitif (conceptuel). ✦ Le but du soin à médiation corporelle : créer du mouvement Le but du soin à médiation corporelle pour IDE 1 est la mise en mouvement des aspects émotionnel, cognitif et physique du patient. Le soignant se place comme accompagnant « faisant avec » plutôt qu’en accompagnateur « faisant faire ». Le patient est en situation de « produire » ou de « ne pas produire » quelque chose. Ainsi, l’approche par le corps permet d’être dans l’action et le mouvement : réaliser du mouvement corporel, émotionnel et cognitif. Le soin à médiation pour IDE 2 est l’ouverture d’un espace de symbolisation lorsque celui de la parole ne suffit plus. Il a pour objet de « faire le lien avec le symptôme, la raison de sa présence » et de « faire autre chose que de l’intellectualisation ». La mise en mouvement du corps offre la possibilité de « se réapproprier les sensations corporelles porteuses de la pulsion de vie » ✦ Comment : la définition d’un cadre Le soignant dans son rôle propre infirmier doit être, pour IDE 1, garant du cadre, c’est-à-dire qu’il représente l’institution et qu’il est responsable de l’activité proposée (du soin médiatisé). Le patient, pour IDE 2, doit se sentir « pris en compte » et « pris en main » pour pouvoir « exporter quelque chose ». Le soignant doit s’impliquer lui aussi dans l’activité. ★ Choix de l’activité : indication à la médiation Pour que le soignant s’oriente vers un objet de médiation plutôt qu’un autre, il semble qui faille pour IDE 1 que cela face écho en lui comme chez le patient : « cela doit nous mettre en mouvement intérieurement », « nous devons être impliqué et concerné », « cela doit lui correspondre ». Même si l’initiative vient des soignants, 17 « l’indication vient souvent du patient lui-même par un langage infra-verbal ». Cette indication est le fruit d’un travail d’équipe qui peut naître de l’intuition et de l’analyse d’un soignant et qui partage cette réflexion en collégialité à l’occasion des réunions cliniques. C’est l’élément le plus important qui ressort des deux interviews: « un échange clinique sur ce qui s’est passé avant l’événement » pour savoir comment vient s’ancrer le soin à médiation dans le parcours de vie du patient et pourquoi il serait une bonne indication pour lui. La nécessité de débattre régulièrement du cas en équipe permet de faire le choix de la médiation. « Lorsque les éléments du discours renvoient au corps » il apparait indiqué pour IDE 2, de proposer au patient un soin à médiation corporelle. Cette médiation doit laisser la place aux « Interactions transférentielles entre le patient et le soignant lors de l’activité : implication commune ». ✦ Après l’activité : que devient l’événement ? Comme il y a un avant, il y a un après. La médiation se prolonge par une réunion clinique en équipe dans laquelle la mémoire du soignant est utilisée comme un outil déterminant : exercice de verbalisation et d’analyse du soin. L’évaluation des effets passe par l’observation des critères suivants : mémoire du corps, corps source de plaisir, activité comme surface de projection, « Si le patient s’approprie l’espace qui lui est offert alors on est dans du thérapeutique », restauration narcissique, s’ouvrir de nouvelles possibilités… (IDE 1 et 2) ✦ Durée de vie d’une activité : date de péremption ? Lorsque l’habitude s’installe, il n’y a plus d’espace pour que le patient puisse produire. « Le risque d’une programmation c’est d’ôter la qualité interrelationnelle entre le patient et le soignant » ainsi, il faut questionner régulièrement la médiation (IDE 1). 1.4. Problématique et question de départ Il apparait donc que dans l’organisation d’une activité à médiation, il y ait au départ une indication (ce qu’il convient de faire) qui est validée en équipe, par une analyse 18 clinique des besoins du patient. Le choix du médiateur peut-être proposé par le soignant comme par le patient lui-même. Au-delà de ces principes généraux, il semble vibrer en filigrane, que la relation interpersonnelle qui existe entre le patient et le soignant, soit un élément déterminant pour qu’il y ait soin et donc que l’activité soit thérapeutique. L’implication mutuelle présentée comme un lien honnête et partagé par les deux parties, permet au cadre de soin, tenu par le soignant, d’ouvrir un espace dans lequel va se projeter le patient et provoquer en quelque sorte sa renaissance par la réappropriation de sa corporéité (nous sommes ici dans le cadre d’un soin à médiation corporelle). Ainsi, en quoi l’activité physique fait-elle soin dans la prise charge d’un patient en psychiatrie ? Pour répondre à cette question je m’attacherai à définir les différents concepts en lien avec cette question : La médiation dans le soin, ce qu’elle est, comment et pourquoi est-elle utilisée ? Le cadre de soin, au-delà du cadre institutionnel, quel-est cet espace où tant de choses semblent se jouer ? Enfin, puisque nous parlons de médiation corporelle à visée thérapeutique, qu’est-ce-que le corps ? La réflexion étayée par ces différents concepts, nous pourrons ainsi comprendre le fond de la finalité thérapeutique d’une telle médiation et nous ouvrir à d’autres hypothèses. 19 2. CADRE CONCEPTUEL A ce moment de la recherche, il est nécessaire de rassembler les idées qui émanent des entretiens ainsi que de mon intuition qui émerge au décours de mon analyse. Je vais donc rassembler les notions qui proviennent du discours professionnel dans les concepts de médiation, cadre et corps en convoquant les auteurs des champs de la psychiatrie psychanalytique, de la sociologie, de la philosophie et des sciences infirmières. 2.1. La Médiation Pour LANGENFELD (2011) 4 c’est parce que la communication est altérée que la médiation intervient. Dans le tout premier modèle de la communication de SHANNON et WEAVER (1949)5 , il existe un message qui est codé par un émetteur et décodé par un récepteur, lui-même donnant un retour (feed-back) à l’émetteur. Ainsi, ils suggèrent la possibilité d’une altération du message d’origine. Si cette conception trop « mécaniciste » a été largement approfondie par LASSWELL (1948)6 en y développant les processus d’influence et de persuasion, l’appartenance au groupe influençant le feed-back ou les fonctions principales de la communication, la médiation intervient donc pour résoudre un problème d’altération dans l’échange. Dans le cadre des difficultés relationnelles d’un individu envers lui-même, envers les autres et son environnement, la médiation est une stratégie qui permet de pallier à cette difficulté et de retrouver un équilibre. In Soins relationnels et Soins palliatifs de LANGENFELD, S. (Dir.). Issy-les-Moulineaux : Elsevier-Masson. 2011. N°16. 224 p. (Collection : les essentiels en IFSI) p.4 -9. 4 SHANNON, C., E., & WEAVER, W. The mathematical theory of communication. Urbana, USA : University of Illinois Press. 1949. 5 6 LASSWELL, H., D. The structure and function of communication in society. In L. Bryson ed. The communication of ideas. New York: Harper & Bros. 1948. 20 2.1.1.La médiation au fil du temps TORRENTE (2004) 7 c’est intéressé à la médiation au fil du temps. Il a constaté que dès le 18ème siècle, pour Philippe PINEL (Médecin aliéniste français, 1745-1826), l’observation de l’amélioration de l’état des patients pauvres devant travailler pour survivre en comparaison à la stagnation des patients riches qui ne travaillent pas, a orienté sa préconisation de l’exercice physique et occupationnel dans l’approche de la maladie mentale et condamna les pratiques d’enchaînement. Michel FOUCAULT8 , philosophe français (1926 - 1984), rejoint cette idée, et va plus loin en écrivant, dans Histoire de la folie à l’âge classique, (1972) que pendant l’activité, les groupes marginaux sont moins dangereux que s’ils étaient enfermés inactifs. L’activité les rend utiles, première étape de la socialisation. Selon TORRENTE (2004), le 19ème siècle a vu évoluer cette notion de médiation, notamment à travers les travaux d’Adolphe MEYER (psychiatre français, 1868 - 1946) qui indique que le travail doit servir à la réadaptation de l’individu dans son environnement ; et à Paul SIVADON (psychiatre français 1907 – 1992) de préciser que l’aspect thérapeutique du travail n’est valable que si l’activité est maîtrisée et définie par des spécialistes. C’est en 1967, que François TOSQUELLES (psychiatre catalan, 1912 -1994), initiateur de la transformation des hôpitaux psychiatriques et promoteur de la psychothérapie institutionnelle, développe la prise en charge du patient sous un aspect bio-psychosocial. L’activité devient médiatrice de la relation à l’autre et donc thérapeutique et doit être choisi en fonction des besoins véritables. C’est donc du travail qu’est né la médiation qui ensuite a pris le chemin de l’ergothérapie comme spécialité professionnelle et comme outil de soin par les infirmiers et les psychothérapeutes. Néanmoins, les médiations thérapeutiques, selon la théorie psychanalytique, auraient pris naissance essentiellement dans l’utilisation de l’art et de la musique et ce depuis très longtemps puisque déjà dans la bible (récit de l’apaisement du roi Saül par la cithare de David pour vaincre les mauvais esprits) et dans la peinture de TORRENTE, J. Le psychiatre et le travailleur. Rueil-Malmaison : éditions DOIN. 2004. 172 p. (Collection thématiques en santé mentale). 7 8 FOUCAULT, M. Histoire de la folie à l’âge classique. Paris : Gallimard, 1972, 687 p. (collection TEL) 21 la Renaissance (selon Giovanni Battista Armenini – peintre italien du XVIème siècle – écrivant que l’œuvre de Raphaël intitulée « les loges » (1519) pouvait guérir la mélancolie), un pouvoir curatif était attribué à ces médiateurs. A ce jour le nombre de médiations à visées thérapeutiques est croissant dans la psychiatrie et le choix du médiateur se complexifie car son indication doit mettre en jeu l’objet médiateur comme « matière à symbolisation », « lieu d’articulation des transferts et contre-transfert » et « la sensori-motricité » qui pour cette dernière permet le positionnement et l’interprétation du thérapeute (BRUN et al. 2013)9. 9 BRUN, A. ; CHOUVIER, B. ; ROUSSILLON, R. Manuel des médiations thérapeutiques. Paris ; Dunod. 2013. 404 p., p.95 - 97 22 2.1.2.La médiation est un processus René KAËS (2012)10 (psychanalyste français) propose « six constantes de la médiation » (reprisent par CHOUVIER et al. 2012) qui en font un processus et nom un objet isolé. La médiation crée du lien, renvoie à l’origine du sujet, s’inscrit dans des limites internes et externes de l’individu, elle est un espace de symbolisation, génère une temporalité et autorise de s’y investir sans s’y perdre. Ainsi, la médiation propose au patient une distance pour éviter l’insécurité que l’instant, l’immédiat, lui impose. La pluralité de formes des médiateurs qui peuvent être utilisées, favorise le mouvement créatif et donc ouvre de nouvelles perspectives de communication et de praxie pour le patient. 2.2. Le Cadre Dans le langage courant, le cadre se restreint souvent au cadre institutionnel, c’està-dire à la sectorisation psychiatrique, aux murs et enceintes hospitalières ainsi qu’au mode d’hospitalisation du patient. Pour le médecin psychiatre et psychanalyste Paul-Claude RACAMIER (2002)11 dans son ouvrage L’esprit des soins - le cadre, la nécessité d’un cadre pour qu’il y ait soin passe par les notions « d’entourage » et « de processus » et qu’il ne peut pas exister dans le « vide ou l’abstrait » ; la force de contenance est donc le fondement du cadre. Il reprendra à Donald WINNICOTT (1950) (psychiatre et psychanalyste anglais) les grandes fonctions de la mère envers son enfant tout en restant prudent sur la symbolisation faite par cet exemple : le Holding (portance), le Handling (maintenance). Nous lui retiendrons les dimensions « régulatrices » du cadre car il délimite et définit l’aire du soin qui est « génératrice » par sa fonction de façonnage et de réception des projections du patient, ainsi que sa mise en réalité psychique. 10 CHOUVIER, B. et al. Les processus psychiques de la médiation. Paris : Dunod, 2012, 286p. p.11 - 13 11 RACAMIER, P.-C. L’esprit des soins – le cadre. Les éditions du collège - CPGF. 2002. 124 p. 23 Le cadre se veut ainsi être « vivant » : « Cet esprit, c’est avant tout de l’intérêt pour la vie psychique allié à une attention pragmatique sans faille ; de la clairvoyance alliée à la méthode ; du courage pour regarder dans la psyché des patients ainsi que dans la sienne propre ; un souci de recherche allié au goût pour le plaisir du travail en commun. » RACAMIER, P.-C. (2002) L’esprit des soins – le cadre p.46 2.2.1.Holding, portance, contenance Selon AUBARD et al. (2007) 12 , la vocation du cadre est de contenir, de sécuriser le patient. Sa finalité le caractérise et il est partagé par chacun. 2.2.2.Handling, maintien, soutien Il doit être constant car il doit supporter les projections venues de toutes parts (psychose, crise aigüe, institution,…). 2.3. Le Corps Dans le dictionnaire humaniste infirmier de PAILLARD (2013)13 , et dans le dictionnaire culturel en langue française (REY, 2005), il apparait que de « corpus » en latin, le corps désigne selon le dictionnaire culturel en langue française (REY, 2005)14, un ensemble d’éléments matériels, de personnes ou de choses. C’est également dans le champ de la médecine un élément anatomique étudiable séparément alors qu’en anthropologie il est un organisme humain, une réalité observable. D’après ANDRIEU et al. (2008), philosophiquement, Jean-Luc NANCY (1992) aurait approfondit le concept de corpus en reprenant Spinoza, Descartes, Kant et Hegel. La définition entreprise serait la suivante : « il s’agit d’un assemblage incertain, dont 12 AUBARD, I. ; DIGONNET, E. ; LEYRELOUP, A.-M. Ateliers en psychiatrie, médiations thérapeutiques. Issy-les-Moulineaux : Elsevier Masson. 2007. 150 p. 13 PAILLARD, C. Dictionnaire humaniste infirmier. Noisy-le-Grand : SETES. 2013. 356 p. 14 REY, A. (Dir.). Dictionnaire culturel en langue française. Paris : Le Robert. 2005. Vol. I. 2355 p. 24 l’unité reste indéterminée » 15 ce qui n’indique pas une opposition entre le dehors et le dedans mais un assemblage du dedans au dehors. Pour Maria MICHELA MARZANO-PARISOLI (2002) dans son ouvrage Penser le corps16 , chacun aborde sa corporéité de façon différente et « l’Homme se reconnait lui-même comme un être sensible qui désire, qui aime et éprouve de la douleur et du plaisir grâce à, et dans son propre corps ». Ainsi elle revendique la possession du corps par la personne et son indivisibilité. Reprenant Descartes, le rapport du corps à l’espace est un corps ouvert à l’extérieur et sa surface en est la peau. Le corps est aussi notre outil de relation avec l’autre. Il est l’incarnation de notre individualité. Il apparait aussi comme outil technique ; TOMAS et al. (2009) 17 dans leur ouvrage Le corps : l’œuvre du collectif de travail, aime à citer MAUSS (1950) : « Le corps est le premier et le plus naturel instrument de l’homme […] le premier et le plus naturel objet technique de l’homme, c’est son corps ». 2.3.1.Corps et psychose MARZANO-PARISOLI et al. (2007)18 rapportent dans leur Dictionnaire du corps une définition proposée par DELION en 2002, concernant le rapport entre corps et psychose « La psychose est un trouble fondamental du rapport au monde, le corps étant le premier instrument dont dispose l’enfant dans son développement, celui-ci sera donc aux premières loges dans la pathologie psychotique : troubles de la constitution du corps, dissociation de l’image du corps. ». FREUD (1923), dans la deuxième topique réunit trois grandes instances psychiques : le ça (pôle pulsionnel), le Moi (intérêt de la totalité de la personne, raison et narcissisme) et le Surmoi (agent critique, intériorisation des interdits et des exigences). Il exprime l’idée que « la forme sur laquelle le Moi va d’abord prendre modèle est celle du corps ». 15 Cit. In. Dictionnaire du Corps, de ANDRIEU, A ; BOËTSCH, G. (Dir.). Paris : CNRS. 2008. 370 p. MICHELA MARZANO-PARISOLI M. Penser le corps. Paris : Presses Universitaires de France – PUF. 2002. 182 p. page 2. 16 17 TOMAS. J.-L. ; et al. Le corps : l'œuvre du collectif de travail. Revue Corps, 2009/1 n° 6, p. 23-30. 18 Cit. In. Dictionnaire du corps, de M. MARZANO-PARISOLI, Paris : Presses Universitaires de France – PUF. 2007, 1072 p. (Quadrige Dicos Poche). p.782 25 2.3.2.La limite du corps : la peau Il n’est pas possible de parler du corps, de citer Freud, sans évoquer le concept du Moi-peau que Didier ANZIEU (1995) a élaboré: « Une figuration dont le Moi de l'enfant se sert au cours des phases précoces de son développement pour se représenter lui-même comme Moi contenant les contenus psychiques, à partir de son expérience de la surface du corps […] Cela correspond au moment où le Moi psychique se différencie du Moi corporel sur le plan opératif et reste confondu avec lui sur le plan figuratif. » ANZIEU D. le Moi-peau, p.61 (1995) J’emprunte à Guy LESOEURS (2013), psychanalyste français, son analyse de l’ouvrage car je n’ai pas la prétention de pouvoir rester fidèle à l’original autant qu’il n’a pu le faire : « ANZIEU nous montre que tout s’organise à partir de la sensation et que le Moipeau représente 8 fonctions de la peau (par analogie biologique): 1. La maintenance, proche du holding (tenir) de Winnicott ; cette « fonction sac » contient et retient le bon et le plein des soins maternels et ceci permet l’érection du penser. 2. La contenance, proche du handling (soigner) maternel, permet les jeux entre le corps de la mère et celui de l’enfant et leurs sensations respectives. Ceci a une fonction de marquage de la limite entre le dedans et le dehors. 3. La constance, fonction de protection des agressions de l'autre et des stimuli du monde externe que Freud nomme pare-excitation. Défense contre l’effraction pulsionnelle endogène tout en laissant une place à l’appétit d’excitation. 4. L’individuation. Le Moi-peau permet l’émergence du soi et l’unicité de l’individu. 5. La correspondance. L’inter-sensorialité donne sens. Le Moi-peau est surface reliante. 6. La sexualisation. Les contacts peau à peau avec la mère, les soins maternels préparent l’autoérotisme et le plaisir. Le Moi-peau exerçant la fonction de surface de soutien de l’excitation sexuelle assure une continuité entre les plaisirs auto-érotiques, les plaisirs narcissiques du Moi et les plaisirs intellectuels du penser. 7. L’énergisation. Le Moi-peau sert de recharge libidinale du fonctionnement psychique. 8. La signifiance. Le Moi-peau est le « parchemin originaire » lieu d’inscription et de trace des représentations des premiers signifiants, choses, mots et formations symboliques, comme si le Moi-peau était recouvert de cire. » 26 2.4. Hypothèse La médiation, nous dit KAËS (2012) 19, est un processus et comme tout processus il est induit par du mouvement. Au-delà du médiateur choisi, il y a ce qui se met en mouvement dans le Cadre. Ce dernier est un espace particulier dans lequel des mouvements psychiques s’opèrent (projections, symbolisation, attaques, transferts et contre-transferts). Le cadre est aussi l’interrelation entre le patient et le soignant et se joue alors ce qu’on attend d’une relation humaine : l’échange. Ce que RACAMIER (2002) invoque c’est la vie de cet espace qui doit être souple et contenant à l’image de « la mère suffisamment bonne » de WINNICOTT (1950). Dans ce cadre il y a des individus, patients et soignants qui sont incarnés par leur corps, figurant leur individualité. Ce corps est enveloppé de peau qui contient, maintient… « Corps lieu de l’histoire, réceptacle incarné d’une mémoire corporelle qui nous relie à nos origines » voilà comment POTEL (2014) introduisait la question du corps dans son ouvrage dédié à la médiation en psychomotricité, Le corps et l’eau20. Ainsi, l’usage d’une médiation corporelle pour pallier au manque de capacité d’expression et/ou d’intellectualisation du symptôme peut-elle faire soin si le cadre est inerte et sans vie ? Trouve-t-on du soin dans un geste désintéressé ou éloigné de la part du soignant? Je pose donc l’hypothèse que le cadre fait soin plus que l’objet de médiation luimême ; et puisque le garant du cadre est le soignant lui-même, alors je me tournerai vers les professionnels pour identifier l’impact de leur imprégnation dans une médiation corporelle à visée thérapeutique en mesurant l’écart entre l’avant et l’après de l’événement organisé. 19 KAES, R. Le mal être. Paris : Dunod. 2012. 280p. POTEL, C. Le corps et l’eau, une médiation en psychomotricité. Toulouse : Erès. 2014. 173 p. (collection Poche – santé mentale). 20 27 3. ENQUETE DE TERRAIN 3.1. Présentation du dispositif et des modalités d’enquête La thématique de l’enquête requiert d’extraire des données subjectives pour mettre en avant des compétences, des savoirs-être et des notions psychologiques de la part des infirmiers en psychiatrie. L’usage d’un questionnaire peut engendrer une perte de substance qui serait délétère pour le résultat attendu. Ainsi, je choisi d’orienter mon enquête par la réalisation d’interviews. La stratégie est de demander à différents infirmiers de relater une expérience de médiation corporelle à visée thérapeutique auprès de patients dans le cadre de l’institution psychiatrique. Seuls les infirmiers sont interviewés. Étant le cœur de métier des psychomotriciens, je choisi de ne pas les interroger pour rester dans le champ des soins infirmiers. Les rendez-vous sont pris auprès des professionnels avec demande d’autorisation et accord des structures de soins dans lesquelles ils exercent. Malheureusement, des évènements incombant au fonctionnement du service (fermeture temporaire), des événements de vie, dramatiques pour l’un d’eux (décès d’un professionnel), n’ont pas permis la réalisation de l’enquête tant les professionnels étaient indisponibles soit physiquement, soit psychiquement. Seul un entretien a eu lieu par visioconférence. C’est pourquoi, pour poursuivre mon étude, et rester dans l’analyse de récit, j’ai dû m’adapter et m’orienter vers une recension d’articles issus de la littérature professionnelle reconnue et faisant témoignage de l’usage d’une activité physique, d’un sport, d’une médiation corporelle à visée thérapeutique. 3.1.1.Choix et construction de l’outil d’enquête Par le récit d’une activité à médiation corporelle, je souhaite faire ressortir les éléments clés du déroulement de cet événement à travers la sémantique employée : l’implication du soignant dans l’activité et son impact sur la clinique du patient. La définition du cadre dans le témoignage et la posture professionnelle permettront ou 28 non de valider l’hypothèse émise : le cadre est plus thérapeutique que le médiateur lui-même. 3.1.2.Choix des lieux et des populations Les interviewés ont été choisis en fonction de leur expertise, c’est-à-dire leur expérience de création d’activités à médiation corporelle. La recherche des textes s’est faite sur internet par mots-clés : « témoignage, médiation corporelle, sport, activité physique, psychiatrie ». L’orientation vers des revues francophones professionnelles est privilégiée. La revue "Soins – Psychiatrie" des éditions Elsevier Masson ainsi que la revue "Santé Mentale" sont retenues ainsi qu’un article de l’association CEMEA (Centres d'Entrainement aux Méthodes d'Education Active) et le témoignage d’un cas clinique de Chantal AUBEAU, cadre de santé, infirmière psychiatrique de formation et diplômée de sophrologie, dans son livre « la médiation thérapeutique en psychiatrie ». 3.1.3.Modalités de réalisations La réalisation d’une grille d’analyse composée de critères et d’indicateurs (Catégories) sera établie d’après les informations recueillies. C’est une approche ouverte et inductive de généralisation et d’abstraction des données qui permettra de formuler les catégories. La méthode utilisée se réalise en trois étapes selon ADREANI et CONCHON (2005): • Etape 1 : lecture ligne par ligne des données pour les généraliser (processus d’abstraction) • Etape 2 : recherche d’ensembles similaires, classement et comparaison • Etape 3 : codage des principales dimensions et codage sélectif des idées centrales et/ou répétitives. Le codage utilisera l’unité syntaxique (les phrases) et l’unité sémantique (les idées). Le codage reprendra les fonctions du sujet humain ((MERKLING, 2010) déjà utilisé lors de la pré-enquête. 29 3.1.4.Traitement des données recueillies C’est un traitement sémantique qui est réalisé. L’étude des idées, par approximation, est adaptée à ce type d’analyse de contenu. 3.2. Analyse des données recueillies Le tableau 2 représente dans les fonctions du corps humain, les capacités affectives, le tableau 3, les capacités cognitives pour s’ajuster aux sollicitations internes et/ou externes, le tableau 4 celles de gestion des informations absorbées et le tableau 5, les capacités d’interaction avec l’environnement. 30 registre unités sémantiques unités syntaxiques capacités affectives cap « on se prépare, parfois avec une certaine appréhension » (Texte 3 – Cf. annexes) « Il y a du plaisir » (Texte 1 – Cf. annexes) « Les exercices lui plaisaient et elle en a proposé un qu’elle pratiquait pour s’échauffer avant les compétitions. » (Texte 2 –Cf. annexes) « Les patients y trouvaient de la joie et une détente corporelle et psychique, une relation de confiance accrue avec le thérapeute qui s’installe progressivement au cours des séances de piscine » (Texte 3 – Cf. annexes) émotionnel « (au début) … sur la défensive » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « lui dans la pratique du Tai-Chi (…) en fin de séance il me disait que ça l’apaisait, que ça lui faisait du bien » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « C’est difficile avec ce type de patient quant au bout du compte tu t’aperçois dans l’étude qu’il n’est pas réellement bipolaire… là tu dis qu’il y a un couac dans la prise en charge » (Int. IDE3 – Cf. annexes) conceptuel « notre terrain de jeux favori » (Texte 3 – Cf. annexes) « le plaisir de la vraie découverte » (Texte 3 – Cf. annexes) « exprime sa joie de vivre, pense et apprend plus facilement que sur terre » (Texte 3 – Cf. annexes) « mieux comprendre ses agirs et son rapport à la violence afin de développer mon appareil psychique à penser les pensées » (Texte 1 – Cf. annexes) mobilisation psychique « sa capacité à se concentrer » (Texte 1 – Cf. annexes) « l’apprentissage va en général disparaître rapidement pour laisser place à ce grand plaisir à être sous l’eau même si la technique laisse à désirer » (Texte 3 – Cf. annexes) « favoriser la représentation mentale de l’acte par une sorte de traçage neuronal forcé » (Texte 3 – Cf. annexes) « Il est très appliqué » (Texte 1 – Cf. annexes) « à ceux qui désirent progresser » (Texte 3 – Cf. annexes) « progrès qui nécessite une certaine assiduité » (Texte 3 – Cf. annexes) Tableau au 2 : fonctions foncti du sujet ujet humain humai : les capacités affectives. 31 capacités cognitives ognitives pour s'ajuster à des sollicitations INT/EXT développement de la pratique professionnelle « C’est vrai que dernièrement j’ai découvert la Méditation de Pleine Conscience » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « là c’est vraiment quelque chose que j’aimerai pousser plus loin » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « j’avais déjà eu l’expérience de l’eau avec des patients psychotiques. » (Texte 3 – Cf. annexes) « en utilisant mes connaissances du milieu et en les affinant » (Texte 3 – Cf. annexes) « depuis l’âge de 10 ans je pratique le Karaté et à l’âge de 25 ans j’ai découvert le Karaté traditionnel où là on incorpore le Tai-Chi dedans. Petit à petit je me suis tourné vers le TaiChi. » (Int. IDE3 – Cf. annexes) expérience personnelle soignants indication « Mon expérience du tennis dans le soin remonte à plus de dix ans. En effet, lorsque, en qualité d’infirmier de secteur psychiatrique, je travaillais avec des adolescents en crise, j’ai utilisé cette médiation à quelques occasions, le plus souvent en individuel pour des jeunes qui avaient du mal à se poser. L’institution disposait d’une salle de sport où il était possible de pratiquer. Ayant moi-même, pendant plusieurs années, pratiqué ce sport en compétition et donné des cours d’initiation et de perfectionnement aussi bien à des enfants qu’à des adultes, j’avais acquis une certaine expertise dans la transmission d’un savoir centré sur la technique, l’organisation d’exercices pédagogiques mais aussi développé une posture de passeur fort intéressante dans les soins. » (Texte 1 – Cf. annexes) « Le sport semblait être un médiateur intéressant pour lui d’autant plus qu’il disposait de capacités physiques » (Texte 1 – Cf. annexes) « L’équipe pensait qu’utiliser un support qui avait toutes les faveurs de Stéphanie pourrait nous permettre d’intervenir sur plusieurs objectifs de soins pour elle » (Texte 2 – Cf. annexes) « l’activité aquagym a été désignée comme un révélateur » (Texte 2 – Cf. annexes) « Orientés ou sur leur demande, les patients seront là » (Texte 3 – Cf. annexes) « je l’ai inséré dans le groupe » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « Je le vois avec ses capacités sportives comme si la personne apragmatique avait disparu » (Texte 1 – Cf. annexes) « Les séances suivantes ont vu Stéphanie s’épanouir peu à peu » (Texte 2 – Cf. annexes) « Les retours de piscine sont tout à fait symptomatiques que le but recherché a été atteint : il règne dans la camionnette une ambiance de détente, de conversations, rires, voire de rigolade avec plaisanteries en tous genres » (Texte 3 – Cf. annexes) modification de l'état psychique « L’aisance sous l’eau, (…), traduit non seulement une bonne du patient adéquation au milieu, mais surtout une amélioration très sensible de l’état psychiatrique du patient, dans la mesure où le corps et l’esprit se fondent avec tranquillité dans un milieu a priori hostile » (Texte 3 – Cf. annexes) « il n’est plus (…) il est devenu » (Texte 3 – Cf. annexes) « il en ressort confiant et optimiste » (Texte 3 – Cf. annexes) 32 « j’ai des patients qui sont content de le faire, ils se sentent détendus même » (Int. IDE3 – Cf. annexes) modification « Ces patients au lieu de prendre le « si besoin », là-bas ils habitudes font le Tai-Chi » (Int. IDE3 – Cf. annexes) thérapeutiques objectif du soin « essayer de le revaloriser » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « L’objectif était double : transmettre des savoirs et tenter une rencontre suffisamment sécurisante. » (Texte 1 – Cf. annexes) « Le but recherché est celui de l’aisance dans l’eau, mais surtout cette sensation de bien-être, de fluidité du corps, cet apaisement et cette détente après la piscine. » (Texte 3 – Cf. annexes) « l’utiliser dans l’espoir qu’il soit thérapeutique pour les patients » (Texte 3 – Cf. annexes) « c’est parce que c’est un moment différent pour eux, qu’on s’intéresse vraiment à eux » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « je ne sais pas comment diriger une activité si je ne suis pas imprégné par celle-ci. Moi ce que je propose, je le réfléchi, j’élabore, il y a tout un travail en amont. Si je ne sais pas j’aurai du mal (à être soignant) et cela ne m’est jamais arrivé de faire quelque chose de différent de ce que je suis moi » (Int. IDE3 – Cf. annexes) professionnel « Je suis passé du théorique à la pratique et je transmets aux patients et aux collègues. C’est global. Je partage l’activité avec les patients, je ne fais pas celui qui sait et qui garde pour lui : je partage. » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « La posture du clinicien cherche à donner la possibilité d’un pouvoir dire » (Texte 1 – Cf. annexes) « une écoute contenante portée par la relation soignantsoigné, le cadre de soins, le projet thérapeutique faisant tiers. » (Texte 1 – Cf. annexes) « C’est ainsi que je remarque sa raquette de tennis. Je ne savais pas alors qu’elle allait me permettre d’établir un lien avec Franck, en sortant de cette position de mauvais objet que le soignant put représenter pour lui : rappel des limites, de ses obligations, du tiers porté par le cadre de soins » (Texte 1 – Cf. annexes) « Pour cela, il a fallu que je me laisse surprendre par l’imprévu, que j’accueille psychiquement des thématiques qui pouvaient lui poser problème et moi me toucher, voire me déstabiliser » (Texte 1 – Cf. annexes) « véritable fonction alpha, sur laquelle il pouvait s’appuyer. Cet espace était un lieu de transformation du matériel brut de cet adolescent favorisant un certain travail de symbolisation dans un processus de subjectivation intrapsychique. » (Texte 1 – Cf. annexes) posture soignante « Sans la vigilance de l’équipe soignante » (Texte 1 – Cf. annexes) « L’utilisation de l’art du quotidien dans un lieu met toujours en évidence un nouvel espace, investi par les soignants et les patients […] un espace du praticable, notamment dans ce qui est devenu au dehors impraticable » (Texte 1 – Cf. annexes) 33 « un événement va me faire comprendre toute la fragilité psychique » (Texte 1 – Cf. annexes) « nécessaire de faire avec notre propre impuissance à aider l’autre, à travailler avec notre surdité et nos points aveugles pour amener de la souplesse et ne pas croire que tout est affaire de mauvaise volonté » (Texte 1 – Cf. annexes) « les professionnels de la relation doivent être un peu contrebandiers, savoir se situer aux marges des systèmes de prescription et chercher surtout à préserver le sens de leurs pratiques » (Texte 1 – Cf. annexes) « Mais il fallait accepter ce fait et notre idée était de se donner du temps et de donner du temps à Stéphanie. La certitude de réussite que nous avions était simplement le sourire qu’elle avait esquissé lors de l’entretien médical pour prescription de cette activité. » (Texte 2 – Cf. annexes) « ce qui nous a donné envie d’aller plus loin » (Texte 3 – Cf. annexes) « il s’agit de le préparer en lui expliquant les modalités de la séance, l’accompagner dans l’eau, le rassurer à chaque fois qu’il est nécessaire, et surtout lui donner confiance en ses propres possibilités en lui donnant les clés du déplacement aquatique facile, et ainsi du plaisir dans l’eau. Il faudra tenir, soutenir, regarder, mettre en mouvement " le membre mort ", lui redonner vie et aisance » (Texte 3 – Cf. annexes) « Ce cheminement se fera par une prise en charge très rapprochée du moniteur » (Texte 3 – Cf. annexes) « c’est en effet aux soignants de mettre en place des structures qui s’adaptent au mieux au monde de la psychose, et non d’utiliser pour les psychotiques des modèles thérapeutiques réservés aux névrosés. » (Texte 3 – Cf. annexes) préjugé « J’ai été surpris au départ car je pensais que les psychotiques, quand je leur parlerai de cette activité, allaient s’en foutre un peu, qu’ils ne seraient pas intéressés. » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « Est-ce qu’ils s’ennuient ? Est-ce qu’ils veulent voir les autres ? Ce qu’il se passe ? Comment ils font ? » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « La rencontre a-t-elle opéré sur ce temps ? Quel lien s’est-il véritablement créé » (Int. IDE3 – Cf. annexes) questionnement « une incapacité à développer ma faculté de rêverie pour professionnel donner du sens à ses ressentis a fait obstacle. Mon intuition est qu’il y avait une impossibilité à la relation, que le lien de connaissance ne permettait pas l’émergence « d’une véritable activité de pensée, d’un appareil à penser les pensées » (Texte 1 – Cf. annexes) Tableau au 3 : fonctions foncti du sujet ujet humain humai : les capacités cognitives pour s’ajuster aux sollicitations ions Internes Inter (INT) et Externes Exte (EXT). 34 capacités ités de gestion des informations absorbées mouvement corps « Le match est passionnant. Les échanges durent longtemps » (Texte 1 – Cf. annexes) apprentissage du « qu’ils se sentent, qu’ils aient un corps » (Int. IDE3 – Cf. annexes) corps « Au bout du bout il n’a pas pratiqué » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « dès que nous quittions le bâtiment, Stéphanie reprenait le même fonctionnement. » (Texte 2 – Cf. annexes) « Des effets durables » (Texte 3 – Cf. annexes) espace Dans l’institution, les bienfaits pourront se traduire par transférabilité «plus de vitalité, d’optimisme, d’action, de réveils plus faciles, de projets plus à même de se réaliser. Ce meilleur fonctionnement mental permet de poursuivre dans de bonnes conditions le travail psychothérapique. Les patients sont par ailleurs plus disposés à participer aux activités institutionnelles ; ils se montrent en général plus attentifs à leur corps (toilette, habillement). Ces effets bénéfiques ne sont pas infinis et nécessitent de plonger à nouveau régulièrement. » (Texte 3 – Cf. annexes) Tableau au 4 : fonctions foncti du sujet ujet humain humai : les capacités de gestion des informations absorbées. s. 35 capacités acités d'interaction d'inter avec l'environnement « L’unité de soins constitue un espace transitionnel » (Texte 1 – Cf. annexes) « Cela ne correspondait pas non plus au cadre fixé, à savoir qu’en dehors d’une excuse médicale tout le monde assistait à la séance » (Texte 2 – Cf. annexes) « nous avons insisté sur les conditions de travail dans le milieu piscine avec les patients : piscines au personnel accueillant, espace aquatique réservé pour un bon confort de mouvement, surtout dans la période d’apprentissage, aux heures de faible fréquentation, qui a pour conséquence de faibles nuisances sonores » (Texte 3 – Cf. annexes) « ce qui est rassurant pour eux dans le fond. Il fait comme moi en fait. Je ne dirai pas en fait comme lui mais de voir qu’il (moi) fait comme nous. Ça quelque part c’est rassurant. » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « faire des expériences multiples ayant un effet sécurisant et contenant au niveau psychique. Il leur permet de vivre l’expérience de leur intériorité encore fragile avec l’extériorité parfois insécurisante dans un espace intermédiaire qui les aident à transformer des éléments négatifs en éléments positifs » (Texte 1 – Cf. annexes) cadre « développer une véritable fonction contenante, rassurante et sécurisante pour ce jeune » (Texte 1 – Cf. annexes) « Cette fonction contenante, à travers ma posture de passeur d’un savoir tennistique, oscillait entre disponibilité, encouragements, félicitations, lors de la réussite de certains coups techniques, et fermeté, autorité, lorsque ce jeune ne respectait pas les fondamentaux ou les différentes consignes pouvant à certains moments le décourager » (Texte 1 – Cf. annexes) « Nous avions créé un espace d’apprentissage, une sorte de holding psychique et didactique qui progressivement le conduisait vers un processus de transformation, entre plaisir de réussir et acceptation de la limite dans un lien d’authenticité. » (Texte 1 – Cf. annexes) espace « créer un espace aidant à la rencontre et contribuant à contenir la souffrance psychique » (Texte 1 – Cf. annexes) « une passerelle faisant lien entre la séance et l’après séance » (Texte 2 – Cf. annexes) « Cet espace semble lui avoir ouvert un autre espace de soin. » (Texte 2 – Cf. annexes) « dans une prise en charge corporelle intense (holding et handling de Winnicott), approche corporelle variable en fonction de ce que peut supporter le patient » (Texte 3 – Cf. annexes) « L’obligation de rigueur et d’attention en plongée et dans sa préparation (sécurité) impose des limites à la folie et stimule donc vivement la " partie saine " du schizophrène, réveille le réflexe d’autoprotection, l’élan vital s’amplifie et prend le pas sur les aspects mortifères de la maladie. » (Texte 3 – Cf. annexes) 36 « (le temps court d'hospitalisation) … ça c’est une difficulté quand même » (Int. IDE3 – Cf. annexes) contrainte méthode apprentissage temporalité « Les thérapeutiques à médiation corporelle ne sont plus beaucoup à la mode dans les lieux de soins psychiatriques, malgré une très large utilisation chez les névrosés et les bienportants stressés » (Texte 3 – Cf. annexes) « il faut apprendre » (Texte 3 – Cf. annexes) « s’habituer » (Texte 3 – Cf. annexes) « acquérir des comportements » (Texte 3 – Cf. annexes) « Ils vont surtout apprendre paradoxalement avec leur corps » (Texte 3 – Cf. annexes) « Pour améliorer l’apprentissage, nous avons utilisé des techniques » (Texte 3 – Cf. annexes) « J’essaie de leur expliquer mais c’est assez difficile » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « apprendre avec » (Texte 3 – Cf. annexes) « j’ai les patients pendant soixante-douze heures, des fois un peu plus » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « Prendre le temps » (Texte 1 – Cf. annexes) « Toutefois, si le soin en psychiatrie s’inscrit dans un lien, celui-ci réclame beaucoup de temps pour se mettre en place » (Texte 1 – Cf. annexes) « les patients, il faut les laisser tranquilles. Aujourd’hui l’ambiance est plutôt à l’activisme et à la réponse immédiate, médicamenteuse ou autre, alors qu’il faut savoir prendre le temps de les laisser venir, suivre leur rythme. C’est nécessaire au travail de la construction d’une relation authentique, il y a trop de risque à faire écran » (Texte 1 – Cf. annexes) a d’emblée refusé de se mettre en maillot de bain. Nous n’insistons pas mais lui proposons d’assister à la séance sur un banc. Stéphanie nous dit préférer rentrer dans le service » (Texte 2 – Cf. annexes) cadre contrainte « le patient psychotique sait qu’il existe un lieu où il souffre moins, où il peut évoluer " librement " comme tout le monde ; c’est une trace, une mémoire » (Texte 3 – Cf. annexes) « Nous savions que la résistance que nous allions rencontrer » (Texte 2 – Cf. annexes) « le milieu aquatique favorisait largement les échanges soignés-soignants » (Texte 3 – Cf. annexes) « L’amélioration technique sous toutes ses formes entraîne des progrès dans l’aisance et rend le sujet habitant à part entière de ce nouveau milieu pour quelque temps » (Texte 3 – Cf. annexes) « mobilisation des organes des sens, de la cœnesthésie superficielle et profonde, souvent de façon inconsciente, que la plongée va devenir une formidable machine qui remettra en cause, en action, notre organisation psychique et physique » (Texte 3 – Cf. annexes) « le patient psychotique va plus apprendre avec son corps " retrouvé " qu’avec son " esprit " » (Texte 3 – Cf. annexes) 37 « démarche où se mêlent fréquentation du milieu, réflexion intellectuelle, action adaptée de notre corps dont le fonctionnement est largement remis en cause dans sa " sensorialité ", où dominent deux données physiques fondamentales : la pression hydrostatique et l’absence de gravité. » (Texte 3 – Cf. annexes) médiateur objet « puissant facteur mobilisateur » (Texte 3 – Cf. annexes) de soin « l’action décisive en termes d’apprentissage et de résultat thérapeutique est la fréquentation du milieu » (Texte 3 – Cf. annexes) « L’espace sous-marin joue un rôle de filtre pour le patient très vulnérable au stress lié à l’environnement ; c’est l’effet antihyperdopaminergique qui agit comme un neuroleptique ; en effet, bruit, lumière, couleurs, rapidité des gestes sont atténués, le patient étant lui-même enveloppé dans une sorte de coussin qui le porte » (Texte 3 – Cf. annexes) « L’espace sous-marin permet une évolution corporelle dans les trois dimensions comme dans l’espace en apesanteur. Déchargés de la gravité, les patients vont pouvoir se déplacer librement dans les trois dimensions ; ils vont pouvoir planer. Cette faculté de voler, de se sentir léger, va contribuer au bien-être physique et psychique du patient. » (Texte 3 – Cf. annexes) « L’équipement psychique et neurologique défaillant dans notre monde terrestre n’apparaît plus sous l’eau comme une inadaptation, mais parfois, bien au contraire » (Texte 3 – Cf. annexes) objectif « Le but de l’apprentissage de la plongée est de faire sien un d'apprentissage milieu inhabituel » (Texte 3 – Cf. annexes) « Je cherche à construire cette relation avec Franck dans cet art du quotidien, et à jouer mon scénario psychique professionnel en articulant la fonction maternante, à travers une certaine souplesse et une disponibilité à accueillir ses difficultés, à la fonction paternante, c’est-à-dire une certaine fermeté structurante capable de produire une fonction alpha » (Texte 1 – Cf. annexes) relation « En échangeant avec lui » (Texte 1 – Cf. annexes) « Il voulait faire un match pour voir qui serait le plus fort. Il avait besoin de se confronter à l’autre, ici l’adulte, l’infirmier dans un rapport de toute-puissance, de rivalité afin de lui poser des limites qu’il vivait sur un mode persécutif. » (Texte 1 – Cf. annexes) « Cet espace de jeu a permis une rencontre, la création d’un lien transférentiel et contre-transférentiel » (Texte 1 – Cf. annexes) « de manière inconsciente, nous voulions créer un espace intermédiaire pour favoriser la rencontre entre objectivité et subjectivité » (Texte 1 – Cf. annexes) « ayant beaucoup de mal à intégrer un groupe. Tendance au repli, elle reste longuement dans sa chambre et n’en sort que pour les cours et les repas » (Texte 2 – Cf. annexes) rapport à l'autre 38 rapport à l'autre « Rencontrer l’autre est si difficile qu’elle arrive par son comportement à provoquer un conflit qui a pour résultat un retour en chambre. » (Texte 2 – Cf. annexes) « ce sont les jeunes qui l’ont intégré au groupe en trouvant des solutions » (Texte 2 – Cf. annexes) « L’ensemble de cette relation entre le soignant et le malade, dans la séance préparatoire, dans l’eau et hors de l’eau, permet de mettre en place une relation transférentielle forte où s’associent paroles, gestes, émotions. » (Texte 3 – Cf. annexes) « Le patient débutant s’en remet complètement à nous dans une sorte de manipulation corporelle » (Texte 3 – Cf. annexes) « l’habitude du milieu avec l’acquisition d’une nouvelle sensorialité, d’une nouvelle image du corps à travers l’accompagnement moniteur va permettre une acquisition naturelle » (Texte 3 – Cf. annexes) « elle permet au départ une ouverture personnelle à un groupe (entraide entre plongeurs participant à une même aventure), puis progressivement vers d’autres structures sociales, élargissant ainsi le réseau relationnel des patients. » (Texte 3 – Cf. annexes) « d’une reprise descriptive des actions et des difficultés rencontrées par chacun suivant son propre point de vue et celui du moniteur, voire des autres membres » (Texte 3 – Cf. annexes) transmission adhésion corps contrainte « La plongée est un sport d’entraide, d’attention à l’autre : ainsi les anciens du groupe vont prendre en charge les nouveaux ; le patient plongeur chevronné va devenir pendant les séances d’initiation en piscine " moniteur " ; ainsi par exemple, les soignants de la clinique nouvellement introduits dans l’activité recevront un enseignement ad hoc par un patient. Ainsi s’expriment les changements de rôle, la réciprocité des échanges humains, suivant leurs aptitudes mise en évidence de la richesse et de l’utilité de la vie associative. » (Texte 3 – Cf. annexes) « je leur ai montré » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « Ils accrochent beaucoup » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « Beaucoup accrochent à l’exercice en soi en fait » (Int. IDE3 – Cf. annexes) « Les gestes techniques vont être appris avec plus de lenteur en raison des problèmes cognitifs des patients » (Texte 3 – Cf. annexes) Tableau 5 : fonctions du sujet humain : les capacités d’interactions avec l’environnement. 39 3.2.1.Interprétation factuelle Ce qu’il parait ressortir des témoignages c’est que, d’une part, les médiations corporelles utilisées semblent faire jouer une grande partie des capacités d’interactions et des capacités cognitives autant des soignants que des patients, et d’autre part, l’histoire du soignant à travers ses compétences acquises dans les sports ou activités physiques proposées apparait être un élément clé pour la définition du cadre thérapeutique. ✦Les capacités affectives. L’émotion qui est dégagée à travers les récits semble être principalement la notion de plaisir. Cependant pour atteindre cet état, la mobilisation psychique du patient parait intense tant dans la difficulté que dans l’implication lors de la réalisation. Dans la narration des auteurs, on ressent de la satisfaction et l’imprégnation du soignant dans le cheminement vers ce résultat. ✦Les capacités de gestion des informations absorbées Si les médiations proposées mettent en mouvement le corps du patient pour qu’il réintègre sa corporéité, la question de la transférabilité dans le quotidien du patient reste aléatoire : le patient pourrait-il utiliser dans la vie quotidienne cette nouvelle ressource ? A-t-il les capacités psychiques pour en mobiliser cette réflexion ? Existet-il un phénomène d’usure dans le temps de l’effet thérapeutique dans la médiation ? ✦Les capacités d’interaction avec l’environnement. Une activité en milieu aquatique permet de mettre en avant les effets intrinsèques de l’eau comme médiateur thérapeutique. Cependant, la maîtrise en sécurité du corps dans l’eau pour atteindre de nouvelles sensations et donc de nouvelle connaissances sur son corps, nécessite un apprentissage. Celui-ci devrait donc mobiliser et développer les capacités relationnelles du patient comme du soignant. Il se crée un espace d’interaction entre le patient, son corps, l’élément eau, le soignant (dans son rôle) et le corps du soignant. 40 La notion d’espace prend toute sa dimension par le cadre qui oscille entre institution, implication et application soignante, rapport à l’autre et partage. ✦Les capacités cognitives pour s’ajuster à des sollicitations internes et/ou externes. C’est certainement la clé de voûte pour qu’une médiation soit thérapeutique. En effet, les témoignages des soignants montrent un équilibre fragile entre ce qui est de la part du patient et de la part du soignant. La posture soignante est majoritairement traitée par les auteurs à travers leur implication dans le projet. Implication qui est également nécessaire par le patient. Cette implication, ils la partagent ensemble, en se réunissant dans l’action. Le bagage de compétences techniques acquises en amont par le soignant lui confère une certaine légitimité. Cette dernière est reconnue presque inconsciemment par le patient, en se plaçant en position sécuritaire, du fait de la maîtrise du sujet par le soignant : le cadre créé est rassurant et sécurisant. L’indication n’est pas l’exercice psychique le plus difficile pour les soignants au sujet des besoins d’un patient, au même titre que le questionnement professionnel en équipe. Il semble apparaître en filigrane que c’est la compétence dans l’activité corporelle proposée qui donne naturellement du sens pour le soignant, et donc l’émancipe dans le projet de soin. La médiation proposée n’est-elle pas finalement à double sens ? Parlante pour le soignant et parlante pour le soigné ? Ne sommesnous pas dans la dimension du partage et de la transmission de nos savoir-faire ? 3.2.2.Diagnostic des informations analysées Les points positifs de cette enquête sont la capacité des professionnels (lorsqu’ils sont disponibles) à répondre favorablement aux questions posées et de partager leurs expériences. La littérature montre que l’écriture dans le domaine de la psychiatrie est une culture qui permet de développer la pratique professionnelle et d’ouvrir le champ des possibles dans la prise en charge des patients. L’aspect négatif viendrait du fait que la médiation corporelle est très peu utilisée en psychiatrie (seuls quelques centres disposent de moyens importants pour faire pratiquer des activités physiques). Aussi, le petit nombre de soignants proposant une activité 41 physique adaptée crée une situation de dépendance d’un seul soignant qui perturbe la continuité de la prise en charge quand ce dernier est absent. L’hypothèse émise selon laquelle, le cadre fait plus soin que l’objet de médiation luimême, semble vérifiée, mais je veux être prudent. Nous avons vu que l’eau est un médiateur à part entière, qui de lui-même, par ses caractéristiques, aura des vertus thérapeutiques. Néanmoins, l’approche de ce milieu nécessite une assistance pour des aspects sécuritaires et donc de préparer un espace, un cadre que seul le soignant peut mettre en jeu en fonction des besoins du patient. Alors oui, je pense, que ce n’est pas tant l’objet qui fait médiation que le cadre qui est posé. Pour que le cadre soit rassurant, sécurisant et respirant, le soignant doit donc être dans la maîtrise de l’objet de médiation. 3.2.3.Synthèse, limites et apports L’échantillon analysé est bien trop faible pour en tirer une généralisation dans le champ infirmier. Ce qui ressort c’est la limite de transférabilité du soin dans le quotidien du patient. Si dans le cadre de la resocialisation, l’objet de médiation trouve une place dans la vie post-hospitalisation, alors l’activité peut perdurer et être un repère pour le patient. Elle permettrait également une modification des traitements chimiothérapiques (diminution ou arrêt de l’usage des « si besoin »). Connaissant l’impact positif de l’activité physique sur les névrosés et les individus sains, la réintégration de l’activité physique au sein des centres de soins psychiatriques serait légitime. Les contraintes liées au fonctionnement de ses structures est à prendre en compte mais il reste possible de créer du mouvement physique avec peu de moyens. La question de la formation des infirmiers psychiatriques se pose : majoritairement dans l’analyse psychique et l’intellectualisation des cas cliniques, n’ont-ils pas eux aussi perdu le rapport au corps ? 42 CONCLUSION « On soigne que la tête ici ! ». C’est par cette remarque faite par un patient schizophrène que je souhaite conclure, car elle est poignante de vérité. Il est vrai que nous sommes concentrés sur l’état psychique du patient et que l’on oubli sa première enveloppe, qui est son corps physique. Son cadre à lui, si difficile parfois d’en toucher les rebords, est remplacé par celui de l’institution que les soignants veillent à tenir, à garantir pour ce patient. Mais finalement, ne nous raccrochons-nous pas aussi à ce cadre pour nous sécuriser? Sorti du contexte exclusif de la psychiatrie, la question du cadre est transférable aux soins généraux. Le soin somatique, pour COLLIERE (1996), s’inscrit dans l’intention, la reconnaissance de ses propres limites, sa disponibilité, sa sincérité, son ouverture à l’autre. Si, pour le psychotique, la relation à l’autre et au monde est complexe, n’oublions pas que c’est lui le patient. Nous, soignants, devons avoir le courage de nous impliquer, car c’est de la relation à l’autre dont il est question et il en va de la qualité des soins. Faisons respirer ce cadre ; lui donner vie c’est s’autoriser aussi à nous mouvoir autant dans notre psyché qu’on ne le fait avec les patients. 43 BIBLIOGRAPHIE ANDREANI, J.-C. ; CONCHON F. (Dir.), Méthodes d’analyse et d’interprétation des études qualitatives : état de l’art en marketing. ESCP-EAP, Institut INSEMMA. 2005. 26 p. ANDRIEU, A ; BOËTSCH, G. (Dir.). Dictionnaire du Corps. Paris : CNRS. 2008. 370 p. ANZIEU, D. Le Moi-peau. Paris : Dunod. 1995. 292 p. AUBARD, I. ; DIGONNET, E. ; et al. Ateliers en psychiatrie, médiations thérapeutiques. Issyles-Moulineaux : Elsevier Masson. 2007. 150 p. AUBEAU, C. ; CICCOTTI, L. (Dir.). La médiation thérapeutique en psychiatrie, Support et techniques de resocialisation. Paris : Heures de France – hdf. 2011. 99 pages. BROSSEAU, Henry. Praticable. 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SITOGRAPHIE Décret de compétences n° 2004-802 du 29 juillet 2004 relatif aux dispositions réglementaires du code de la santé publique régissant l’activité professionnelle de l’infirmier, disponible sur : http://legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000787339 46 Résumé : « Le Cadre, un espace de soin » Parce qu’avant d’être un « patient », l’individu malade est un être social, donc donner soin à un patient en psychiatrie passe par l’utilisation de la première fonction de l’Homme : l’interaction avec les autres. Lorsqu’un patient atteint de troubles psychiatriques a des difficultés dans son rapport au monde, les soignants utilisent la médiation pour renouer le dialogue lorsque la communication est altérée. L’activité physique, appelée également médiation corporelle, est un outil souvent employé dans le projet de soin des patients. Nous interrogeons à travers différents interviews d’infirmiers exerçant en psychiatrie ce qui fait soin dans l’activité physique : l’indication, l’objet de médiation, le cadre ? Au regard des résultats de ces entretiens semi-directifs relatant des expériences vécues, nous pouvons mesurer l’écart entre l’avant et l’après médiation. Il semble que l’implication du soignant dans le projet thérapeutique du patient et l’espace qui lui est ouvert soient les fondements du soin. Mots clés : indication, médiation, cadre, corps Abstract: « The Framework, an area of Care » Because before being a « patient », the sick person is a social human being, so giving care to a patient in psychiatry is through the first function of human: the interaction with others. When a psychiatric patient has difficulties in his relationship to the world, caregivers use mediation to resume dialogue when communication is impaired. Physical activity, also known as mediation body, is a tool often used in the draft of patient care. We want, by interviewing nurses practicing in Psychiatry, who give care by using physical activity the following information: the activity advised, the object of the mediation and the framework? With regard to the results of these semistructured interviews recounting experiences, we can measure the gap between before and after mediation. It seems that the involvement of the caregiver in the therapeutic project of the patient breaks down the barrier of the nurse/patient relationship and opens are the foundations of care. Key words: Indication, mediation, framework, body 108