Des objectifs largement dépassés

Transcription

Des objectifs largement dépassés
Dossier
Le comité
d’agrément,
au cœur
du modèle
La lettre du réseau Initiative
Des femmes
et des hommes
mobilisés
14 400 bénévoles des plateformes
se mobilisent chaque jour,
au sein d’Initiative France
pour accompagner les créateurs
vers la réussite de leurs projets.
Cet engagement est l’un
des atouts majeurs du réseau.
Aux côtés des 861 salariés,
ces bénévoles, chefs d’entreprise,
cadres salariés actifs ou jeunes
retraités, anciens créateurs
bénéficiaires, apportent
leur concours à l’action
des plateformes. Qu’il s’agisse
de s’impliquer au sein
des plateformes de leur région,
de contribuer à la réflexion
stratégique sur l’avenir du réseau
ou plus généralement sur le statut
de bénévole (lire p. 2), ou encore
en s’impliquant dans les comités
d’agrément des plateformes,
les bénévoles sont essentiels
à la vie du réseau. Les comités
d’agrément du réseau Initiative,
composés d’experts (chefs
d’entreprise, banquiers,
experts-comptables, avocats…)
décident du financement et
de l’accompagnement du porteur
de projet. Leur professionnalisme
et leur indépendance contribuent
à la crédibilité des plateformes
sur leur territoire. Crédibilité
auprès du créateur qui, au-delà
du prêt, obtient un avis autorisé
sur son projet ; crédibilité
auprès des réseaux bancaires ;
crédibilité, enfin, auprès
des partenaires (lire dossier
de ce numéro). En 2012,
7 900 bénévoles se sont mobilisés
au sein des comités d’agrément.
Il s’agit d’un engagement
significatif. Ce ne sont pas moins
de 4 500 réunions de ces comités
qui ont été organisées
cette même année.
N o 191 - février 2014
Transmission et reprise d’entreprise
Des objectifs
largement dépassés
Le fonds Île-de-France Transmission fête ses quatre ans
et aborde l’avenir avec confiance.
L
e 12 décembre dernier, Initiative
Île-de-France et Réseau Entreprendre Ile-de-France ont célébré quatre
années de collaboration fructueuse
au travers du dispositif Île-de-France Transmission en présence de 120 participants.
Lancé en 2010 avec le concours de la Région
et de la Caisse des Dépôts (CDC), ce fonds
de prêt d’honneur à taux zéro est dédié spécifiquement au financement de la reprise et
de la transmission de TPE et PME à potentiel en Île-de-France. Initialement, les protagonistes s’étaient fixé des objectifs modestes
comme le rappelle Édouard de Penguilly,
président d’Initiative Île-de-France. Quatre
ans plus tard, Île-de-France Transmission
a contribué à la reprise de 223 entreprises,
sauvegardant ainsi plus de 2 600 emplois.
Rien qu’en 2012, 56 entreprises ont été reprises, ce qui a permis de créer et de maintenir
619 emplois. Les partenaires présents ont
salué ces résultats à l’instar de Christophe
Brezillon, expert développement économique de la CDC. Celui-ci a rappelé toute
l’utilité de ce dispositif dans un contexte
où la transmission d’entreprise est une
réelle problématique tout en assurant que
Édouard
de Penguilly,
président
d’Initiative
Île-de-France
(à droite),
aux côtés
de Jean-Philippe
Christoph,
président
de Réseau
Entreprendre
Île-de-France
(à gauche).
la CDC continuera à soutenir ce fonds
dans les années à venir.
Île-de-France Transmission compte désormais
un nouveau partenaire : l’Institut du mentorat entrepreneurial (IME) qui intervient
dans le développement des entreprises à
fort potentiel de croissance en proposant
à l’entrepreneur d’être accompagné par
un mentor sur une durée de 12 à 18 mois.
Île-de France Transmission propose à ses
bénéficiaires un accompagnement adapté
à leur besoin, complémentaire du suivi
effectué par les plateformes locales. Ainsi,
les repreneurs à fort potentiel de développement sont identifiés et orientés vers l’accompagnement que propose l’IME. Enfin,
la globalité des repreneurs ont la possibilité
de rejoindre le Club des repreneurs d’Île de
France Transmission. Lancé au cours de la
soirée, il réunira l’ensemble des repreneurs
soutenus. Chacun pourra ainsi partager son
expérience et agrandir son réseau professionnel. Cet espace révélera également les
synergies possibles entre entrepreneurs qui
conduiront peut-être à l’établissement de
partenariats commerciaux. Marion Fournier
actus
Les bénévoles,
forces vives du réseau
La première Université régionale du bénévolat
économique d’Initiative Indre s’est tenue
le 29 novembre dernier.
C
ette université est née d’une volonté
commune de la Direccte Centre et d’Initiative Indre de démontrer aux plateformes Initiative tout l’intérêt de recruter des bénévoles prêts à s’engager au sein de ces structures.
La plupart font appel à des bénévoles membres
des associations comme EGEE et ECTI, notamment dans le cadre du parrainage. Et cela fonctionne bien. Toutefois, souligne Jeannine Pierre,
chargée de mission à Initiative Indre, « un bénévole qui dépend d’une plateforme s’implique
davantage, il devient un véritable ambassadeur de la structure en promouvant le parrainage autour de lui. Il participe au recrutement
de nouveaux parrains qui à leur tour vanteront
autour d’eux les mérites de la plateforme ».
Plus de 130 participants – bénéficiaires d’un prêt
d’honneur, bénévoles et salariés des plateformes – ont répondu présent. Initiative Indre
avait demandé à chacun de ses bénévoles de
venir accompagné d’un chef d’entreprise de
leurs réseaux. Cette journée a été marquée
par l’intervention d’Agnès Bricard, Présidente
d’honneur des experts-comptables, sur l’importance du suivi post-création, ainsi que par
la présence de Gyl Coppey, délégué général
adjoint d’Initiative France, qui s’est exprimé
sur la valeur socio-économique du bénévolat.
Les 26, 27 et 28 mai 2014
à Saint-Malo se tiendra
la prochaine Université du réseau
Initiative au cours de laquelle
aura lieu l’Assemblée générale.
2
l no 191 l février 2014
Gyl Coppey,
délégué général adjoint,
lors de son intervention.
Débat virtuel pour
initiative france
La deuxième édition des Assises du parrainage
et de l’accompagnement s’est tenue
le 5 décembre dernier autour du thème :
« Comment innover et améliorer
l’accompagnement des créateurs ? ».
Pour la première fois, ces assises ont été
organisées de façon virtuelle sur un site Web
dédié. Elles se sont ouvertes par un débat
filmé en direct et retransmis en ligne.
Réunis autour d’une table ronde animée
par une journaliste, quatre intervenants ­
– une entrepreneure soutenue par Initiative
Dombes Val de Saône, le délégué général
adjoint d’Initiative France, une chargée
d’affaires d’Initiative Indre et un parrain
référent d’Initiative Sud Hautes-Alpes –
ont, au travers de leur témoignage, introduit
le thème central de ces assises.
Puis, cinq débats thématiques animés
par des membres du réseau sélectionnés
pour leur expérience de terrain en matière
de parrainage se sont tenus en simultané
sous la forme de tchats écrits. Ces assises
ont attiré plus de 200 personnes qui ont
posté 160 contributions tout tchat confondu.
I n i t i at i v e P r ov e n ce -A l p e s - C ôt e d ’ A z u r
Vers une plus grande cohésion
Les 90 salariés
des 22 plateformes
d’Initiative ProvenceAlpes-Côte d’Azur (PACA)
et leurs présidents,
auxquels se sont
ajoutés leurs nombreux
bénévoles, se sont réunis
le temps d’un séminaire
de deux jours.
Les 25 et 26 novembre
2013, les deuxièmes Universités régionales des plateformes de la région
PACA se sont tenues en présence de 130 participants. Chacun a ainsi pu
mesurer l’ampleur du réseau auquel il appartient mais également
échanger sur ses pratiques liées au cœur de métiers des plateformes.
Ces deux journées s’inscrivaient également dans la réflexion autour
du projet stratégique national 2014-2018 du réseau. Les participants
ont été amenés à réfléchir sur les trois axes qui le composent au travers
d’une dizaine d’ateliers. Afin que ces universités répondent aux attentes
de chacun, et notamment à celles des salariés, les thématiques
ont été fixées collégialement en amont.
Une réunion des 22 présidents de plateforme s’est tenue en parallèle.
Elle a permis de dégager les principaux axes du futur projet stratégique
régional. Jean-Roch Boyer, président d’Initiative Provence-Alpes-Côte d’Azur,
a conclu ces Universités en appelant de ses vœux la pérennisation
et le développement du réseau régional par plus de croissance,
plus de cohésion et plus de performance.
dossier
par
Violette Queuniet
Grand oral
La mairie du 20e arrondissement a accueilli dans ses locaux
un comité d’agrément de Paris Initiative Entreprise.
Le comité
d’agrément, au
cœur du modèle
Composés d’experts bénévoles, les comités d’agrément décident
du financement et de l’accompagnement du porteur de projet.
Leur professionnalisme et leur indépendance contribuent
à la légitimité des plateformes sur leur territoire.
S
ix à dix personnes réunies autour d’une table :
chefs d’entreprise, banquiers, experts-comptables, avocats… Au centre, un porteur de projet.
Au terme d’un dialogue
d’une trentaine de minutes, destiné à cerner l’adéquation homme (ou femme)-projet-territoire et la viabilité de l’entreprise,
le comité décidera ou non d’attribuer un
prêt d’honneur qui renforcera les fonds
propres du créateur. Tel est le fonctionnement du comité d’agrément des plateformes Initiative France. Un modèle unique
en son genre, comme l’explique Sabine
Hamot, responsable du pôle appui aux
stratégies territoriales à Initiative France :
« Il s’agit d’un modèle totalement atypique qui combine le regard de professionnels (les acteurs institutionnels ne siègent
pas), la présence systématique du porteur
de projet et la pluralité des compétences.
L’intérêt ? Il permet une analyse qui n’est
pas uniquement financière, offre un temps
de conseil à l’entrepreneur, ce qui enrichit
son dossier et aide à définir l’offre d’accompagnement qui lui sera proposée. »
Les deux piliers du comité d’agrément :
indépendance et souveraineté. Deux principes inscrits dans la charte éthique d’Initiative France et dans le référentiel métier.
« Le comité d’agrément doit être indépendant de toute pression institutionnelle et
économique, et cela doit se manifester
dans la présidence, dans le règlement et
dans le fonctionnement. Et il doit être souverain, c’est-à-dire que sa décision s’applique à tout le monde, au président de
la plateforme comme à nos financeurs.
Ces principes sont à l’origine de la crédibilité dont jouit le comité d’agrément et,
au-delà, la plateforme », souligne Michel
Lefèvre, président de la Commission Qualité du réseau Initiative France.
Crédibilité auprès du créateur qui, au-delà du
prêt, obtient l’avis autorisé d’experts sur son
projet ; crédibilité auprès des réseaux bancaires qui, très souvent, s’appuient sur
l’analyse du comité pour accorder des
février 2014 l no 191 l
3
prêts aux porteurs de projet ; crédibilité,
enfin, auprès des bénévoles et partenaires de la plateforme dont les compétences
sont reconnues.
Ce modèle de comité d’agrément, les
plateformes le font vivre et l’enrichissent en permanence. Cela passe notamment par la préparation du porteur de
projet, afin de favoriser sa réussite et de
mieux éclairer les membres du comité ;
par la composition équilibrée des comités pour garantir une vision pluridisciplinaire ; par un travail de médiation
bancaire auprès des banques partenaires de la plateforme ; par le soin apporté
à préserver l’indépendance des décisions.
Revue de ces bonnes pratiques à travers
l’exemple de cinq plateformes.
Michel Lefèvre préside la Commission Qualité
du réseau Initiative.
Les bonnes pratiques à la loupe
Faire progresser
la vision des banquiers
Initiative Saône et Loire couvre quatre bassins d’emploi et a choisi de
constituer un comité d’agrément différent
pour chacun d’entre eux. Lorsqu’il a pris
la direction de la plateforme en 2008,
Michel Andrès a constaté une meilleure
dynamique dans les comités qui comptaient plusieurs banquiers. « Il y règne une
certaine émulation : les remarques sont
constructives, positives, les banquiers
apprennent beaucoup les uns des autres
et cela rejaillit sur les dossiers. Ils portent
un autre regard sur le financement des
TPE, en prenant en compte à la fois l’aspect humain et financier ». Il entreprend
alors de faire venir davantage de banques
aux comités. Un travail de longue haleine
mais qui a bien abouti. Dans le comité de
Charolles, par exemple, au nord du département, la Banque populaire était la seule
représentée. Aujourd’hui, BNP Paribas, le
Crédit Agricole et la Caisse d’Épargne
l’ont rejointe. Chargé de clientèle entreprise à la Banque populaire Bourgogne
Franche-Comté, Alain Bouillot apprécie
« l’approche complémentaire » de chaque
banque : proche des artisans dans son cas,
des agriculteurs pour le Crédit Agricole,
des professions libérales pour BNP Paribas.
« Nous avons chacun nos spécialités ainsi
qu’une bonne connaissance de notre territoire. Cela permet des échanges très riches
et profite aux porteurs de projet ». La
vision des « non-banquiers » autour de la
table – expert-comptable, chef d’entreprise,
expert de la CCI, – enrichit également son
point de vue. Depuis dix ans au comité
d’agrément, il apprécie aussi l’évolution
dans la présentation des dossiers : « Avant,
nous n’examinions que les dossiers papier.
Maintenant, les porteurs de projet viennent le défendre et c’est vraiment un plus :
la façon dont le créateur défend son dossier change notre regard ».
En 2013, les quatre comités d’agrément ont étudié près de 160 dossiers
et accordé 120 prêts d’honneur. Selon
Michel Andrès, la présence de banquiers
bon connaisseurs du tissu économique
local a un impact non négligeable dans
la sécurisation des entreprises à leur
démarrage.
Préparer les porteurs de projet
en amont du comité
Les porteurs de projet qui se présentent devant le comité d’agrément de
l’agglomération du Grand Rodez (l’un des
huit centres de décision d’Initiative Aveyron) arrivent bien armés. Depuis maintenant près de vingt ans, une procédure de
préparation au comité a été mise en place.
Deux membres du comité, de profils différents, rencontrent systématiquement chaque porteur de projet quelques semaines
avant le comité. Ils lui présentent la plateforme et le réseau puis examinent son projet, son bilan prévisionnel, discutent avec
lui de sa politique commerciale, etc. L’entretien dure entre une et deux heures et,
dans la mesure du possible, se déroule sur
le site de l’entreprise ou de la future entre-
4
l no 191 l février 2014
prise. Un rapport est ensuite rédigé pour
le comité.
Lors de l’entretien, les rapporteurs jouent
aussi un rôle de conseil. « Nous sommes là
pour aider le porteur de projet à créer ou à
reprendre une entreprise dans les meilleures conditions », souligne Gérard Boissins,
ancien chef d’entreprise bénévole depuis
quatre ans à Initiative Aveyron. Cela
conduit de temps à autre les créateurs à différer leur projet, mais pour mieux réussir.
Tels ces deux jeunes qui voulaient ouvrir
une chocolaterie destinée aux particuliers
dans la périphérie de Rodez. « Nous leur
avons dit : personne ne viendra vous voir.
Ils nous ont écoutés, sont revenus quatre
mois plus tard en ayant trouvé un local en
centre-ville. Aujourd’hui, ils rencontrent
beaucoup de succès alors qu’ils n’auraient
pas tenu six mois dans l’autre local »,
témoigne Gérard Boissins.
Cette préparation est également utile pour
les membres du comité. Connaissant déjà
le projet grâce au rapport, ils peuvent
poser des questions ciblées et laisser le
porteur de projet s’exprimer. Porteur qui
est en outre rassuré par la présence des
rapporteurs qu’il connaît déjà.
En 2013, le comité du Grand Rodez a examiné une trentaine de dossiers et engagé
300 000 € de prêt d’honneur. La majorité
des autres comités d’Initiative Aveyron ont
adopté cette procédure d’accompagnement
et les autres sont en passe d’y adhérer.
dossier
Le comité d’agrément, au cœur du modèle
à savoir
Comment gérer
les non votants
projet à la loupe
Le comité d’agrément d’Initiative Haute-Provence
auditionne une porteuse de projet.
Impliquer davantage
de chefs d’entreprise
À Initiative Haute-Provence, les
comités d’agrément sont volontairement resserrés : six à sept personnes maximum, dont systématiquement deux chefs
d’entreprise. « S’il y avait plus de participants, les chefs d’entreprise seraient en
minorité car moins disponibles que les
banquiers ou experts-comptables. Or,
nous voulons préserver cet équilibre pour
garantir une approche complémentaire
des dossiers », explique Barbara Bernadès,
directrice de la plateforme. Les chefs d’entreprise, a-t-elle constaté, ont une meilleure
approche de la gestion de l’entreprise, un
avis éclairé sur l’adéquation personneprojet et connaissent bien leur environnement économique.
Thomas Dufour, dirigeant d’une entreprise
agroalimentaire (découpe d’agneaux pour
la grande distribution), estime apporter
au comité son « expérience de la réalité de
l’entreprise : en tant que chefs d’entreprise,
nous sommes au contact des fournisseurs,
des clients, nous nous frottons à la gestion
quotidienne. On sait de quoi on parle.
C’est notre plus ». Ses points de vigilance ?
Le réalisme du projet, l’expérience qu’a le
créateur de l’activité dans laquelle il se
lance, ses motivations. Il apprécie aussi
de confronter son point de vue avec celui
des autres membres du comité, banquiers
et experts-comptables, toujours dans l’optique d’aider le créateur.
Pour enrichir son vivier de chefs d’entreprise, la plateforme fait de plus en plus
appel aux porteurs de projet qu’elle a
aidés. C’est le cas de Gérard Violin, qui a
obtenu un prêt d’honneur en 2007 quand
il a repris une entreprise de fournitures de
bureautique. De son passage au comité
d’agrément, il se souvient « d’avoir eu
l’impression d’être évalué par ses pairs ».
C’est ce qu’il cherche à perpétuer maintenant qu’il est de l’autre côté de la barrière.
« La création d’entreprise, c’est une affaire
d’hommes et de femmes. Les chiffres sont
importants mais il faut aussi apprécier la
motivation du candidat ».
Les chefs d’entreprise ont le jugement sûr :
le taux de pérennité des entreprises aidées
est de 81 % au bout de trois ans et 100 % des
prêts d’honneur ont donné lieu à un prêt
bancaire, avec un effet levier de 10. Le signe,
comme le souligne Barbara Bernadès, que
« la plateforme est reconnue en tant qu’expert du territoire et de l’entreprise ».
Les comités d’agrément accueillent
fréquemment des invités non-votants :
nouveaux bénévoles, journaliste, expert,
technicien CCI ayant accompagné
le porteur de projet, etc. Pourtant,
le règlement intérieur des plateformes
ne dit rien à leur sujet.
Pour permettre aux plateformes de faire
face à certaines demandes ambiguës
– telle une collectivité locale imposant
d’être systématiquement invitée
en échange de sa contribution financière
à la plateforme –, le comité d’éthique
d’Initiative France a formulé
une recommandation dans sa session
du 18 septembre 2013 : que chaque
plateforme ajoute un paragraphe
à son règlement intérieur portant
sur les conditions d’invitation
dans son (ou ses) comité(s) d’agrément.
Par exemple, l’impossibilité d’accueillir
des invités permanents. Il rappelle
aux plateformes l’obligation de faire signer
à chaque invité un engagement
de confidentialité et de leur préciser
que les données liées aux projets
présentés doivent être détruites à l’issue
du comité (en conformité avec la Charte
éthique et le référentiel métier).
Enfin, il propose, en lien avec la commission
qualité, la création d’une fiche sur le sujet.
Présidé par Jean Aubineau, le comité d’éthique
veille au respect de la charte éthique du réseau.
février 2014 l no 191 l
5
dossier
Le comité d’agrément, au cœur du modèle
Assurer l’indépendance
du comité d’agrément
Sur le papier, toute plateforme doit
« garantir son indépendance décisionnelle et institutionnelle ». Dans la vraie
vie, les pressions existent. Comment y résister, surtout lorsqu’elles émanent de collectivités locales finançant la plateforme?
Sophie Fourquin, directrice d’Initiative Vallée de la Drôme Diois, a trouvé la parade :
« Dans un territoire très rural, avec des
enjeux politiques forts, nous parvenons à
garder l’indépendance décisionnelle des
comités d’agrément grâce à leur composition. Le premier président de la plateforme
était le directeur de la Coopérative Jaillance
de la Clairette de Die, la plus grosse entreprise du territoire. Avoir un leader économique assoit votre position », explique-telle. Elle reconnaît aussi être aidée par le
fonctionnement local de l’aide à la création
d’entreprise. La porte d’entrée, ce sont les
chargés de mission des intercommunalités.
Les élus locaux connaissent donc les projets
avant même la plateforme, ce qui limite
leur ingérence.
Par courtoisie et volonté de transparence,
la plateforme invite chaque nouveau président chargé de l’économie d’une des trois
intercommunalités à assister à un comité
d’agrément. Par ailleurs, le chargé de mission de l’intercommunalité qui a accompagné le porteur de projet en amont assiste
lui aussi au comité, sans droit de vote, bien
entendu. « C’est l’occasion pour lui de faire
passer un message s’il y a lieu, par exemple que le projet est vraiment indispensable
pour la vie économique de la commune. Ce
qui n’empêche pas le comité de prendre sa
décision en toute indépendance », indique
Sophie Fourquin. Dans l’immense majorité,
les élus jouent le jeu. Les récalcitrants sont
renvoyés au règlement d’Initiative France.
Ce fut le cas il y a quelques années : un élu
s’opposait à ce que le comité d’agrément
statue sur un dossier porté par un créateur
membre d’un syndicat professionnel qui
lui déplaisait. Le comité a passé outre et a
accordé le prêt. Et l’élu n’a jamais mis à exécution sa menace de quitter la plateforme…
Faciliter la médiation
bancaire
Depuis la crise financière de 2008, la
directrice de Paris Initiative Entreprise
(PIE), Laurence Jones, constate un durcissement des conditions d’octroi de crédit aux
créateurs d’entreprise. Aussi a-t-elle accentué le rôle de médiation bancaire de la plateforme. Le comité d’agrément constitue une
étape cruciale. « C’est notre comité qui permet de déclencher le financement bancaire.
Grâce à notre carnet d’adresses, nous
envoyons le créateur vers nos partenaires
bancaires. Souvent, les banques contactées
par le créateur attendent l’avis du comité
d’agrément pour se prononcer. Notre valeur
ajoutée est là », indique Laurence Jones. La
médiation bancaire est essentielle pour les
porteurs de projet atypiques ou les entrepreneurs se lançant dans une activité non
traditionnelle.
Président du comité d’agrément création et
reprise, Jean-Pierre Charasch a lui-même été
banquier durant 35 ans. Il lui arrive souvent
de donner des conseils aux porteurs de projet
pour améliorer la présentation de leur dos-
6
l no 191 l février 2014
sier de demande de crédit. À condition que
le projet soit solide. « Les banques connaissent notre expertise. À partir du moment
où PIE soutient un créateur, c’est que l’on a
estimé que l’opération était viable. Le comité
est composé de personnes s’y connaissant
en entrepreneuriat », précise-t-il.
L’enjeu de la médiation bancaire est aussi de
permettre au créateur de choisir la banque
qui lui convient. « Avec peu de fonds propres, le porteur de projet se précipite vers
la seule banque qui accepte de lui accorder
un prêt. Le fait de regonfler ses fonds propres va lui permettre de faire le tri parmi les
banques et d’avoir une relation bancaire de
qualité », indique Jean-Pierre Charasch.
À PIE, le montant moyen du prêt d’honneur s’élève à 11 000 €. L’effet de levier sur
le prêt bancaire est de 6,4 pour la création et
de 13 pour la transmission.
Deux autres comités – un comité croissance
et un comité innovation – ont vu le jour en
2013 et jouent eux aussi ce rôle de médiation
bancaire (voir témoignage ci-contre).
témoignage
« Un jury
connecté
à notre réalité »
Avec deux
associés,
Louis-Philippe
Barban a créé
en janvier 2013
geolocaux.com,
un site Web
dédié à la vente
et à la location de biens immobiliers
pour les professionnels. Sa valeur ajoutée :
tous les biens sont géolocalisés,
avec l’indication des transports
en commun. Les annonceurs
(conseils en immobilier d’entreprise)
paient un abonnement mensuel. Le site
leur adresse ensuite les clients potentiels.
Fin 2013, pour accélérer la croissance
de leur entreprise et la développer au-delà
de l’Île-de-France, les trois créateurs ont
présenté une demande de prêt d’honneur
à Paris Initiative Entreprise (PIE).
« Nous avions besoin de renforcer nos fonds
propres pour obtenir un prêt bancaire.
Or, avec moins d’un an d’existence,
nous n’avions même pas un premier bilan
financier à proposer au banquier », explique
Louis-Philippe Barban. Avant de passer
en comité d’agrément, les trois associés
ont travaillé en profondeur leur dossier
avec une chargée de mission de PIE,
Clémence Dubosq. Devant le comité
d’agrément, spécialisé dans l’innovation
dans le domaine de l’Internet, ils se sont
sentis en confiance. « On ne s’est pas heurté
à des gens déconnectés de notre réalité.
Il y avait autour de la table des chefs
d’entreprise Web, des banquiers
d’affaires. Cela donne de la crédibilité.
Ils avaient une vraie volonté de comprendre
le projet et de nous connaître, de vérifier
l’adéquation homme-projet », constate
Louis-Philippe Barban. PIE a accordé un prêt
d’honneur de 18 000 € aux fondateurs
de Géolocaux. Ils espèrent obtenir 30 000 €
auprès de leur banque. Le dossier est en
cours et ils sont confiants : « L’acceptation
de PIE pèse beaucoup dans la décision
de la banque. Et même si elle refusait,
PIE a un pool de banquiers partenaires
vers qui nous orienter. Nous nous sentons
en position de force auprès de la banque :
ce n’est pas souvent le cas ! ».
outils
Chaque mois, une innovation, une bonne pratique, un nouveau dispositif passé au crible
Local Sécur’, un service
gratuit qui rassure
De quoi s’agit-il ?
La fondation Entrepreneurs de la Cité a été la première organisation
française à lancer le principe de micro-assurance. Reconnue d’utilité publique
en 2008, elle a pour mission de protéger l’initiative entrepreneuriale
des personnes exclues du monde du travail en s’appuyant sur les réseaux
d’accompagnement à la création d’entreprise. Depuis avril 2009, Initiative
France, tout comme France Active ou encore BGE, en est administrateur.
En juillet 2011, cette fondation a lancé un nouveau service gratuit
en partenariat avec le groupe Polyexpert : l’offre Local Sécur’ qui propose
un audit des risques du local professionnel à tout entrepreneur.
Futur occupant d’un local proFessionnel ?
En quoi consiste cette offre ?
Dans le cadre de sa démarche de Responsabilité sociale d’entreprise (RSE),
Polyexpert, groupe leader dans la gestion et l’expertise des sinistres
pour le compte des sociétés d’assurances et des entreprises, a souhaité mettre
les compétences de ses experts au service des créateurs d’entreprise.
10 % des entrepreneurs assurés par la fondation connaissent un sinistre lié
à leur local, ce qui fragilise fortement leur entreprise. Des sinistres qui,
à 70 %, auraient pu être évités. Avec l’offre Local Sécur’, la fondation
aux côtés de Polyexpert entend prévenir ces risques et protéger
l’entrepreneur lors de la location de son local professionnel. Cette offre vise
les micro-entrepreneurs assurés par la fondation tout comme les créateurs
d’entreprise accompagnés par un réseau d’aide à la création d’entreprise.
Ainsi, les plateformes du réseau Initiative peuvent faire bénéficier leurs porteurs
de projet d’un diagnostic réalisé par un expert bâtiment de Polyexpert
qui effectuera une visite de 30 à 45 minutes du local de l’entrepreneur
afin de contrôler les installations et l’alerter sur les risques éventuels.
Quelle est la démarche à suivre ?
Le nombre de visites effectuées par Polyexpert est en constante augmentation :
de 6 en 2011, il est passé à 35 en 2012 puis à 75 en 2013. Les réseaux
d’accompagnement y contribuent fortement puisqu’en 2012, ils ont été
les principaux prescripteurs d’audits (61 %). À compter du premier semestre
2014, Polyexpert couvrira la région Île-de-France, ainsi toutes les plateformes
du réseau Initiative seront en mesure de proposer cette offre à leurs porteurs
de projet. Le rapport d’audit qui découle du diagnostic peut se révéler
particulièrement pertinent pour le comité d’agrément, si celui-ci est réalisé
suffisamment en amont. Le comité pourra s’appuyer sur les conclusions
et ajuster le plan de financement en conséquence. Comment procéder ?
La fondation met à disposition des plateformes un flyer de présentation
de Local Sécur’ afin qu’elles communiquent auprès de leurs bénéficiaires.
Les porteurs de projet intéressés n’ont ensuite qu’à demander à leur plateforme
de contacter la fondation pour être mis en relation avec un expert.
Page réalisée par Marion Fournier
E r r at u m
Contrairement à ce que nous écrivions dans le dossier
Entrepreneuriat féminin de notre numéro 189 de décembre 2013, la conférence
mentionnée dans l’interview de Virginie Andrysiak a été organisée par la Fédération
nationale des caisses d’épargne (FNCE) lors du Salon des micro-entreprises
et non par le Salon des micro-entreprises.
pour éviter les mauvaises surprises,
Faites-le expertiser gratuitement
avec l’oFFre LocaL Sécur’
Hayat Boaira,
Déléguée
générale de la
fondation Entrepreneurs
de la Cité
Local Sécur’ est en adéquation totale
avec les valeurs de la fondation
que sont la protection des créateurs
d’entreprise et la pérennisation de leur projet.
Ce service constitue néanmoins une offre à part
entière puisqu’il intervient spécifiquement
dans la prévention des risques liés aux locaux.
Je tiens à souligner que ce service ne s’adresse
pas uniquement à notre cœur de cible habituelle
que sont les micro-entrepreneurs. Il n’est pas
nécessaire non plus d’avoir souscrit à une microassurance auprès de la Fondation. Ce service
entièrement gratuit s’adresse à l’ensemble
des entrepreneurs qui ont été soutenus par un réseau
d’accompagnement à la création d’entreprise.
Cela nous semblait évident d’associer ces réseaux
qui font partie de l’ADN de la fondation. Au cours
du premier semestre 2014, cette offre va s’étendre
à la région Île-de-France, et couvrir ainsi toutes
les régions de France. L’ensemble des plateformes
Initiative sont donc en capacité de proposer
en complément de leur action ce service
à leurs porteurs de projet leur assurant ainsi
de partir sur les meilleures bases possibles. »
@
www.entrepreneursdelacite.org/section/actions/diagnos-
tic-des-risques/
février 2014 l no 191 l
7
l’histoire
Le premier entrepreneur
« remarquable »
L
orsqu’Initiative France a lancé le prêt
d’honneur Initiative Remarquable,
Initiative Aveyron a fait remonter à la
coordination nationale la candidature
de Christophe Montourcy. Il faut dire que l’entreprise qu’il a créée est par essence même un projet à fort engagement responsable. Christophe
Montourcy était chef d’une entreprise de construction de maisons à ossature bois employant quinze
salariés, quand un fabriquant de cuisines, avec
lequel il travaillait, a fait faillite en 2012. La commune d’Entraygues, située au Nord de l’Aveyron où est implantée l’usine, déplore 38 emplois
détruits. Un pan entier de l’économie locale s’effondre alors. Très investi localement, Christophe
Montourcy ne peut s’y résoudre. Aux côtés de ses
deux associés, il dépose une offre de reprise auprès
du liquidateur. Cette dernière est acceptée. Christophe Montourcy ambitionne alors de réutiliser un
des bâtiments de l’ancienne usine pour recréer une
unité de production de charpentes tout en réemployant les salariés qui ont été licenciés. Pari réussi
puisqu’en mai 2013, la société Charpentes d’Olt
voit le jour. Il s’agit d’une unité de fabrication de
charpentes industrielles en bois (fermettes) comptant six salariés. L’aide d’Initiative Aveyron, qui
avait déjà soutenu l’entrepreneur dans son premier
projet de création d’entreprise, a été primordiale.
10 000 euros ont été octroyés à chacun des associés.
Tout en
s’inscrivant
dans une
démarche
écologique,
Christophe
Montourcy
a sauvé
des emplois
dans sa
commune
en reprenant
en partie
une entreprise
condamnée.
Christophe Montourcy et
ses deux associés affichent
fièrement leur récompense
aux côtés du président
d’Initiative Aveyron,
Jean Thomas.
que dans la gestion des déchets ou encore l’utilisation d’énergies renouvelables au sein de Charpentes d’Olt.
Après examen de sa candidature, le comité Initiative
remarquable d’Initiative France et le comité d’agrément d’Initiative Aveyron ont tous deux donné leur
aval pour octroyer un prêt d’honneur Initiative
Remarquable à Christophe Montourcy. En signant
le contrat de prêt le 18 décembre dernier, Christophe Montourcy est ainsi devenu le premier entrepreneur remarquable depuis le lancement du prêt.
Pour l’occasion une remise de chèque officielle a été
organisée en présence notamment du maire d’Entraygues et du président d’Initiative Aveyron, Jean
Thomas. Un chèque qui s’élève à 85 000 € – 10 000 €
de prêts d’honneur octroyés à chacun des associés,
10 000 € de prêts attribués par le Crédit Agricole aux
mêmes conditions que les prêts d’honneur pour
chaque associé et 25 000 € de prêt Initiative remarquable affecté à Christophe Montourcy. « Diriger
deux entreprises au quotidien n’est pas une chose
évidente. Cela demande un investissement sans
relâche. La confiance qui m’est accordée par Initiative France, mais surtout localement par Initiative
Aveyron, et les différents acteurs économiques me
conforte dans l’idée que j’ai pris la bonne décision »,
témoigne Christophe Montourcy.
Marion Fournier
Dans un premier temps, la secrétaire-comptable et un
ouvrier qui travaillaient pour le compte du fabricant de cuisines ont été réembauchés. En 2014, ce
seront trois anciens ouvriers qui intégreront Charpentes d’Olt. Ils seront au préalable formés à leur
nouvelle fonction. Les salariés formés devront
à leur tour prendre en charge les nouveaux arrivants. L’objectif à terme étant que chaque personne licenciée et volontaire retrouve un emploi au
sein de Charpentes d’Olt, recréant ainsi une dynamique locale. Au-delà de la réindustrialisation du
site d’Entraygues, Christophe Montourcy milite
pour l’utilisation de bois certifiés PEFC (bois issus
de forêts gérées durablement) provenant du Massif Central. Une exigence à laquelle s’astreint son
entreprise. Il s’emploie également à faire en sorte
que les scieries locales adoptent la même démarche.
Cet engagement environnemental se traduit jus-
La Lettre Initiative est cofinancée par l’Union européenne / directrice de la publication Anne Chatauret / rédacteur en chef Amine Moussaoui
([email protected]) / rédaction Marion Fournier ([email protected]) / a participé à ce numéro Violette Queuniet /
maquette•réalisation Edire (Barbara Starita, Bernard Montelh, Félix Marciano) / photos Willy Vainqueur p. 1, DR. / impression SB Graphic, 93600 Aulnay-sous-Bois /
initiative france 55, rue des Francs-Bourgeois 75181 Paris cedex 04 • tél. 01 40 64 10 20 • fax 01 43 20 58 34 /
Signalez-nous vos changements d’adresse : [email protected] • www.initiative-france.fr
ISSN 1951-9672 • Abonnement annuel 30 € • 3 €
8
l no 191 l février 2014