Analyse traditionnelle du marché du travail

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Analyse traditionnelle du marché du travail
Cours Marché du travail et politiques d’emploi
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
Pierre Cahuc/Sébastien Roux
ENSAE-Cours MTPE
24 mars 2006
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
24 mars 2006
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Introduction
Motivation :
Analyse macro-économique du marché du travail sur les agrégats
observés (chômage, emploi, salaires ...)
La plupart des éléments empiriques montrent que le problème du
chômage est plus lié à un défaut de création d’emplois qu’à une forte
hausse de l’offre de travail : on est aux limites du modèle classique
Deux visions du fonctionnement du marché de l’emploi :
Vision classique : Modèle de concurrence parfaite.
Le salaire réel réalise en permanence l’équilibre entre offre et demande.
Vision keynésienne : Marchés en situation durable de déséquilibre
Des rigidités à court et moyen terme sur le salaire réel empêchent le
marché du travail de s’ajuster.
Ces rigidités sont représentées par le processus de formation des
salaires, reposant sur la courbe de Phillips, c’est-à-dire l’existence
d’une relation décroissante entre taux de chômage et taux de
croissance du salaire moyen.
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Introduction
Politique économique
Conséquence en terme de politique économique à mettre en oeuvre.
Dans la vision classique, les cycles résultent de changements de la
situation d’équilibre : les politiques de relance sont alors inefficaces
car le niveau de l’équilibre est déterminé par des variables réelles.
Dans la vision keynésienne, les cycles reflètent des déséquilibres
prolongés sur différents marchés que l’on peut combattre par des
politiques de relance.
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Introduction
Rigidités
Dans ce qui suit, seul le marché du travail présentera des rigidités créant un
état de déséquilibre durable. Les rigidités peuvent être de plusieurs ordres :
Rigidité nominale : Délai de réaction des salaires aux variations de
prix, ce type de rigidité justifie la politique de stabilisation des prix.
Rigidité réelle : reflète les problèmes d’ajustement de l’offre de
travail à la demande. C’est le mécanisme à la base de la relation entre
évolution des salaires et chômage.
Dans le modèle classique, le salaire assure l’équivalence de l’offre et de la
demande.
Mais
Il ne représente pas bien les fluctuations agrégées
Il n’accorde aucune influence aux politiques de relance
Il ne donne pas d’explication au chômage involontaire
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Introduction
Courbe de Phillips
D’où une représentation alternative : l’approche Keynésienne.
Le salaire nominal est caractérisé par une rigidité à court terme
Cette rigidité prend la forme d’une relation entre hausses du salaire
nominal, inflation et taux de chômage.
Cette relation sera appelée Courbe de Phillips.
Elle reflète l’arbitrage à court terme entre l’augmentation de l’inflation et
le chômage, elle ne reflète pas les effets de long terme.
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Le modèle classique
Le modèle classique
Modèle simple : 3 biens, travail, bien produit et monnaie.
yt : log de la production agrégée
mt : log de la masse monétaire
pt : log de l’indice des prix
Égalité entre offre et demande sur le bien produit :
yt = mt − pt
(1)
yt = at + lt
(2)
Technologie de production :
où lt est le log du nombre de travailleurs et at est le log de la productivité.
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Le modèle classique
Prix fixé par les entreprises en concurrence imparfaite :
pt = wt − at + χ
(3)
où wt est le log du salaire, et χ est le taux de marge (qui dépend du
pouvoir de monopole). L’égalité sur le marché des biens et la technologie
de production amènent à exprimer la demande de travail en fonction du
prix du bien :
lt = mt − pt − at
(4)
Offre de travail des ménages :
ltS = l̄ + η (wt − pt )
(5)
η correspond à l’élasticité de l’offre de travail au salaire réel.
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Le modèle classique
A l’équilibre sur le marché du travail, l’offre de travail égalise la demande
de travail
lt = ltS = lt∗
Donc, à l’équilibre :
lt∗ = l̄ + η (at − χ)
pt∗ = mt − lt∗ − at
wt∗ − pt∗ = at − χ
Statique comparative :
δm > 0 : Effet seulement sur pt∗
δa > 0 : (wt − pt ) et lt augmentent, pt diminue
δχ > 0 : (wt − pt ) et lt diminuent, pt augmente.
Remarque : Le modèle classique n’est pas assimilable au modèle de
concurrence pure et parfaite (sur les biens), le seul prérequis est que les
prix équilibrent le marché du travail.
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Le modèle classique
Équilibres dans le modèle classique
Effets de chocs sur la productivité a, la masse monétaire m et le taux de
marge χ.
l D
t
ltS
δa
δm
δa
w-p
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δχ
at-χ
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p
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Le modèle classique
Critiques :
Pas de chômage involontaire, seulement des inactifs choisissant de ne
pas travailler.
Dans la plupart des pays, l’élasticité de l’offre de travail au salaire est
faible, si bien que la courbe d’offre est plate. Dans ce cas, les chocs
de productivité n’ont qu’un effet sur les salaires, et pas sur l’emploi,
ce qui est en contradiction avec les évidences empiriques.
Empiriquement, des études montrent que les politiques de relance
peuvent avoir des effets transitoires (Bartolini et al., 1995, Economic
Policy)
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Le modèle classique
Illustration empirique
Les séries présentées sont
at = productivité apparente du travail
lt = emploi total
wt = salaire réel
Elles sont exprimées, en log, en écart relatif à leur tendance. Pour
toute série xt , xt∗ est la tendance, résultant de l’application d’un filtre
HP, λ = 100 sur la série annuelle xt correspondante.
Pays
Espagne
France
Italie
Japon
Royaume-Uni
États-Unis
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corr
at −at∗ wt −wt∗
at∗ , wt∗
corr
0, 28
−0, 00
0, 01
0, 71
−0, 11
0, 59
Source : OCDE, 1960-2006
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at −at∗ lt −lt∗
at∗ , lt∗
−0, 41
−0, 05
−0, 12
0, 43
−0, 26
−0, 05
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Le modèle classique
Productivité
06
02
00
98
96
94
92
04
20
20
20
20
19
90
88
86
84
82
80
78
76
Coût du travail
Italie
19
19
19
19
19
19
19
19
74
72
70
68
Emploi
19
19
19
19
66
60
Coût du travail
19
19
19
19
19
19
19
19
60
19
62
19
64
19
66
19
68
19
70
19
72
19
74
19
76
19
78
19
80
19
82
19
84
19
86
19
88
19
90
19
92
19
94
19
96
19
98
20
00
20
02
20
04
20
06
Emploi
0.006
0.005
0.004
0.003
0.002
0.001
0
-0.001
-0.002
-0.003
-0.004
-0.005
64
France
0.01
0.008
0.006
0.004
0.002
0
-0.002
-0.004
-0.006
-0.008
62
Espagne
0.005
0.004
0.003
0.002
0.001
0
-0.001
-0.002
-0.003
-0.004
-0.005
Productivité
Japon
06
20
04
20
02
00
20
20
98
96
19
19
94
19
92
19
90
19
86
88
19
19
82
84
19
19
78
80
19
19
76
19
72
74
19
19
68
70
19
19
66
19
60
19
62
19
64
19
66
19
68
19
70
19
72
19
74
19
76
19
78
19
80
19
82
19
84
19
86
19
88
19
90
19
92
19
94
19
96
19
98
20
00
20
02
20
04
20
06
19
64
-0.005
60
0
0
19
0.005
19
0.005
19
0.01
0.01
62
0.015
0.02
0.015
-0.005
-0.01
-0.01
-0.015
Emploi
Coût du travail
Productivité
Emploi
Coût du travail
Royaume-Uni
Productivité
Etats-Unis
0.008
0.015
0.006
0.01
0.004
0.005
0.002
06
20
02
04
20
20
00
20
98
96
19
19
92
94
19
19
90
19
86
88
19
19
82
84
19
19
78
80
19
19
76
19
72
74
19
19
68
70
19
19
66
19
62
64
19
19
-0.002
19
19
60
19
62
19
64
19
66
19
68
19
70
19
72
19
74
19
76
19
78
19
80
19
82
19
84
19
86
19
88
19
90
19
92
19
94
19
96
19
98
20
00
20
02
20
04
20
06
-0.005
60
0
0
-0.004
-0.01
-0.006
-0.008
-0.015
Emploi
Coût du travail
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Productivité
Emploi
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Coût du travail
Productivité
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La courbe de Phillips
La courbe de Phillips
Selon l’approche Keynésienne, il existe une rigidité nominale sur les salaires
qui empêche l’offre et la demande de travail de s’ajuster.
Le processus d’ajustement des salaires est décrit alors par la relation de
Phillips, qui traduit le “dilemme” entre accélération de l’inflation et niveau
du chômage.
Dans ce cadre théorique, les politiques de relance ont un effet à court
terme.
La Courbe de Phillips est une relation empirique établie par Phillips
(1958) qui met en évidence une corrélation négative entre les
augmentations nominales de salaire et le niveau de chômage sur les
données britanniques entre 1861 et 1957.
Son interprétation est que le chômage exerce une pression à la baisse sur
les salaires nominaux (par exemple à travers un mécanisme de concurrence
sur le marché de l’emploi qui ne fonctionnerait pas parfaitement).
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La courbe de Phillips
Modélisation
Pour simplifier, on suppose η = 0 et ltS = l̄.
Si le salaire w n’équilibre pas le marché du travail, lt < l̄. Le chômage est
alors défini comme la différence entre l’offre de travail et la demande.
ut = ltS − lt = l̄ − lt
(6)
La relation de Phillips propose une raison à l’existence du chômage, i-e à
l’inadéquation entre l’offre et la demande de travail : le salaire nominal ne
s’ajuste pas de façon à équilibrer le marché mais selon la relation de
Phillips.
On dispose alors d’un mécanisme décrivant l’évolution des salaires
reflétant le déséquilibre entre l’offre et la demande sur le court terme.
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La courbe de Phillips
L’évolution des salaires sur le court terme peut dépendre d’autres facteurs
que le seul chômage ut , par exemple l’évolution des prix ∆pt . L’équation
s’écrit alors :
∆wt = λ0 + (1 − λ1 ) ∆pt + λ1 ∆pt−1 − λ2 ut + λ3 ∆at
(7)
Chaque coefficient de cette équation fait référence à différentes notions de
rigidité.
λ1 reflète le niveau de rigidité nominale : il s’agit de la sensibilité du
salaire nominal aux mouvements du niveau général des prix, liée à
l’illusion monétaire et/ou aux coûts de renégociation des contrats de
salaire.
1/λ2 reflète le niveau de rigidité réelle, la réaction du taux de
croissance du salaire réel au chômage. Plus les salaires sont rigides,
moins le niveau de chômage affecte le taux de croissance.
λ3 est l’indexation du salaires sur les gains de productivité, il reflète le
mécanisme de partage des rentes induites par les augmentations de
productivité.
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La courbe de Phillips
Inflation et NAIRU
Par rapport au modèle classique, le modèle Keynésien diffère par
l’adjonction d’une variable supplémentaire, le niveau de chômage ut et une
équation supplémentaire, la relation de Phillips.
Remarque : la différenciation de l’équation 3 amène
∆pt = ∆wt − ∆at
(8)
i-e les firmes répercutent sur les prix les augmentations nominales de
salaire (on pourrait imaginer un décalage).
L’équation 8 reflète le lien entre l’évolution des prix et celle des salaires du
côté de la demande de travail. Couplée avec la relation de Phillips, elle
amène la relation suivante entre évolution des prix et chômage.
λ1 (∆pt − ∆pt−1 ) = λ0 − λ2 ut − (1 − λ3 ) ∆at
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(9)
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La courbe de Phillips
Définition du NAIRU
Le NAIRU est alors défini comme le taux de chômage compatible avec une
inflation constante.
NAIRU = Non Accelerating Inflation Rate of Unemployment. Il est obtenu
à partir de l’équation 9.
ūt =
λ0 − (1 − λ3 ) ∆at
λ2
Remarques :
Le NAIRU est croissant avec le niveau de rigidité réelle 1/λ2 .
Il dépend du taux de croissance de la productivité (et non du niveau).
Si 0 ≤ λ3 < 1 (salaire non parfaitement indexé sur la productivité),
un ralentissement de ∆a entraı̂ne une hausse du NAIRU.
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La courbe de Phillips
Lien entre chômage et NAIRU
On a
λ1 (∆pt − ∆pt−1 ) = λ0 − λ2 ut − (1 − λ3 ) ∆at
0 = λ0 − λ2 ūt − (1 − λ3 ) ∆at
Donc
ut = ūt −
λ1
(∆pt − ∆pt−1 )
λ2
(10)
Ainsi, si λ1 = 0, i-e en l’absence de rigidités nominales, ut = ūt .
De même, si 1/λ2 = 0, ut = ūt = 0.
Si λ1 > 0, ut < ūt si l’inflation augmente (cf. effet de la politique de
relance) d’où le dilemme inflation-chômage.
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La courbe de Phillips
Conséquences sur les politiques économiques
D’un point de vue général, ces théories illustrent le fait que les politiques
agissant sur la demande globale sont efficaces à court terme, tandis que
celles qui agissent sur l’offre sont efficaces à long terme.
Etude d’une politique de relance monétaire
Hypothèses simplificatrices : ∆mt = ∆m, ∆at = ∆a.
Donc le NAIRU est égal à :
ū =
λ0 − (1 − λ3 ∆a)
λ2
A partir de l’expression de la demande de travail 4, on obtient
∆pt = ∆m − ∆a − ∆lt = π − ∆lt
π est ici la valeur stationnaire du taux d’inflation.
Donc, à population active constante, ∆ut = −∆lt .
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La courbe de Phillips
L’équation de demande globale reflète une relation croissante entre
chômage et inflation
∆pt = π + ut − ut−1
(11)
À court terme, ut−1 et ∆pt−1 sont connues, les valeurs d’équilibre en t du
taux de chômage résultent de l’intersection de
La courbe de Phillips (10) (Wage Schedule), qui gouverne le
mécanisme de formation des salaires.
La demande de travail (11) (Price Schedule), qui gouverne le
mécanisme de formation des prix.
Sur l’équilibre de long terme, les variables prennent des valeurs
stationnaires.
∆pt = ∆pt−1 = ∆p ut = ut−1 = u
Donc u = ū et ∆p = π.
A long terme, le chômage est égal au NAIRU.
(WS) correspond à la courbe de Phillips à long terme. Sa représentation
sous forme de droite verticale signifie qu’il n’y a plus de dilemme
inflation-chômage.
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La courbe de Phillips
Équilibres de court et de long terme
Δpt
(PS)t
(WS)t
E
π
(PS)
Et
Δpt-1
Et-1
(WS)
ut-1
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u
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ut
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La courbe de Phillips
Illustration empirique
Espagne
France
0.18
0.25
0.16
0.2
0.14
0.12
1973
Δw
Δw
0.15
0.1
1965
0.08
0.1
0.06
0.04
0.05
2006
2006
0.02
0
0
0
5
10
15
20
25
0
u
2
4
6
10
12
14
Japon
0.25
0.25
0.2
0.2
0.15
0.15
Δw
Δw
8
u
Italie
0.1
1961
0.05
2006
0.1
1966
0.05
2006
0
0
0
2
4
6
8
10
12
14
-0.05
0
1
2
3
4
5
6
10
12
-0.05
u
u
Royaume-Uni
Etats-Unis
0.3
0.1
0.09
0.08
0.07
0.06
0.05
0.04
0.03
0.02
0.01
0
0.25
Δw
Δw
0.2
0.15
1964
0.1
0.05
2006
0
0
2
4
6
8
10
12
14
2006
1961
0
2
4
u
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6
8
u
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La courbe de Phillips
Equation estimée
Équation ∆wt = λ0 + α∆pt − λ1 (∆pt − ∆pt−1 ) − λ2 ut + λ3 ∆at
Estimation contrainte : α = 1
Modèle
Const (λ0 )
Espagne (1974-2006)
n.c.
France (1966-2006)
n.c.
Italie (1961-2006)
n.c.
Japon (1966-2006)
n.c.
Royaume-Uni (1964-2006)
n.c.
Etats-Unis (1961-2006)
n.c.
0.029
(0.012)
0.029
(0.009)
0.072
(0.010)
0.057
(0.008)
0.088
(0.015)
0.066
(0.011)
-0.006
(0.011)
0.018
(0.008)
0.037
(0.010)
0.033
(0.008)
0.031
(0.008)
0.031
(0.008)
c.
c.
c.
c.
c.
c.
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
∆pt
(α = 1 ?)
0.992
(0.078)
(a)
0.894
(0.041)
(r)
0.871
(0.059)
(r)
1.205
(0.074)
(r)
0.956
(0.065)
(a)
1.017
(0.088)
(a)
∆2 pt (λ1 )
ut (λ2 )
∆at (λ3 )
R2
0.256
(0.142)
0.253
(0.138)
0.201
(0.082)
0.212
(0.088)
0.107
(0.130)
0.180
(0.131)
-0.049
(0.087)
-0.127
(0.090)
-0.148
(0.145)
-0.135
(0.143)
0.327
(0.158)
0.313
(0.140)
0.214
(0.073)
0.210
(0.061)
0.573
(0.071)
0.477
(0.065)
0.829
(0.125)
0.706
(0.117)
0.096
(0.278)
0.650
(0.208)
0.285
(0.101)
0.275
(0.100)
0.458
(0.141)
0.443
(0.114)
0.630
(0.224)
0.616
(0.168)
-0.198
(0.132)
-0.101
(0.137)
0.227
(0.139)
0.342
(0.134)
0.811
(0.083)
0.743
(0.087)
0.223
(0.163)
0.236
(0.161)
0.523
(0.113)
0.512
(0.096)
0.95
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
24 mars 2006
0.49
0.97
0.72
0.92
0.64
0.96
0.81
0.87
0.22
0.78
0.60
23 / 53
La courbe de Phillips
Examen de l’effet de court terme d’une hausse permanente
du taux de croissance de la masse monétaire.
Initialement : π = ∆m − ∆a. A partir de la date 1, π 0 = ∆m0 − ∆a, avec
∆m0 > ∆m.
Effet de court terme :
∆p1 = π 0 + u1 − u
λ1
(∆p1 − ∆p)
u1 = ū −
λ2
Donc
∆p1 =
u1 = ū +
λ2 0
λ1 π
+ λλ21
π+
1
>π
∆m − ∆m0
< ū
1 + λλ21
Remarque : Le taux de croissance de ∆m a un impact d’autant plus fort
que les rigidités nominales sont importantes.
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
24 mars 2006
24 / 53
La courbe de Phillips
Dynamique de l’inflation et du chômage
En exploitant les relations (10) et (11), la dynamique est décrite par le
système :
1
1
λ1
∆pt−1 − π
∆pt − π
=
1 − λλ21
ut−1 − ū
ut − ū
λ1 + λ2
Valeurs propres solutions de l’équation
λ1
−x
λ1 + λ2
Elles sont donc conjuguées x =
2
+
λ1
λ1 +λ2
|x|2 =
λ1 λ2
(λ1 + λ2 )2
=0
√
1 λ2
± i λ1λ+λ
. Or
2
λ1
<1
λ1 + λ2
Donc le système décrit converge vers une solution stationnaire.
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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25 / 53
La courbe de Phillips
Diagramme de phase
Δpt
π’
λ1 Δp - λ2 u = λ1 π - λ2 u
E’
π
E
Δp + u = π + u
u
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L’analyse traditionnelle du marché du travail.
ut
24 mars 2006
26 / 53
La courbe de Phillips
Construction du diagramme de phase
Pour décrire ce système dans le diagramme de phase, il faut considérer les
évolutions des grandeurs en fonction de leur valeur en t − 1.
λ2
(∆pt−1 − π + ut−1 − ū)
λ1 + λ 2
λ2
λ1
(∆pt−1 − π) −
(ut−1 − ū)
λ1 + λ2
λ1 + λ2
∆pt − ∆pt−1 = −
ut − ut−1 =
Donc
∆pt > ∆pt−1 ⇔ ∆pt−1 − π < −ut−1 + ū
ut > ut−1 ⇔ λ1 (∆pt−1 − π) > λ2 (ut−1 − ū)
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L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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27 / 53
La courbe de Phillips
Effet d’une politique de relance permanente
∆m0 > ∆m implique un nouvel équilibre se caractérisant par π 0 > π.
A court terme : efficacité, ut < ut−1
A long terme : ut = ū et ∆p 0 > ∆p
Remarque : Ces effets sont rendus possibles par l’existence de rigidités
nominales. Si λ1 = 0, il n’y a pas d’effet à court terme. A contrario, s’il
existe des rigidités nominales à long terme i-e la somme des coefficients
dans la relation de Phillips de ∆pt et ∆pt−1 est égale à γ < 1 alors
u = ū −
(1 − γ) (∆m − ∆a)
λ2
ce qui affecte le NAIRU. (Au passage, l’égalité γ = 1 n’est pas rejetée
pour un grand nombre de pays).
En conclusion, le NAIRU est surtout utilisé par les banques nationales car,
dans cette théorie, l’écart du chômage au NAIRU peut être considéré
comme un indicateur avancé de l’inflation. Si ut < ū, il existe alors des
tensions inflationnistes.
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28 / 53
Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Effets macro-économiques de la RTT
On considère donc une économie avec trois biens : la monnaie, le travail et
un bien produit par une entreprise représentative en situation de
concurrence parfaite.
La demande annuelle est définie par la relation :
yt = mt − pt
(12)
La fonction de production est représentée par la relation :
yt = a + lt + ht
(13)
wt est le salaire horaire. La maximisation du profit implique
pt = wt − a
(14)
La relation de Phillips s’écrit :
∆wt = λ0 + ∆pt−1 − λ2 ut , λ0 > 0, λ2 > 0
(15)
On suppose que ∆mt = ∆m, ∀t. et que la durée du travail ht est un
paramètre exogène de politique économique pour tout t.
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L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Chômage d’équilibre de court terme
L’équation de demande, avec celle de production, amène
∆yt = ∆m − ∆pt = ∆lt + ∆ht = −ut + ut−1 + ∆ht
car ∆lt = −ut + ut−1 . Donc
ut = ∆pt + ut−1 − ∆m + ∆ht
(16)
Or la courbe de Phillips implique
∆pt = ∆wt = λ0 + ∆pt−1 − λ2 ut
(17)
Donc,
ut
= ut−1 + ∆ht − ∆m + ∆pt
= ut−1 + ∆ht − ∆m + λ0 + ∆pt−1 − λ2 ut
Donc
ut =
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
ut−1 + ∆ht − ∆m + λ0 + ∆pt−1
1 + λ2
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30 / 53
Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Représentation graphique de l’équilibre de court terme
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Effet d’une variation des heures
Seule la courbe de demande est affectée : Si ∆ht > 0, elle est
déplacée vers la gauche (ou le bas). Une augmentation des heures a
donc un impact négatif sur le chômage de court terme.
Une augmentation des heures a le même effet qu’un choc positif de
productivité. Ce choc positif de productivité peut impacter la
production yt ou l’emploi lt . L’impact sur la production affecte le
niveau général des prix pt à la baisse à travers l’équation de demande,
ce qui pousse à une baisse des salaires wt à travers l’équation de
formation des prix dans les entreprises.
La courbe de Phillips limite l’ajustement à la baisse des salaires en
fonction du niveau de chômage, lui même affecté par le choc de
productivité sur l’emploi. Au final, la nouvelle situation d’équilibre de
court terme conduit à un niveau de chômage plus élevé et une
inflation plus faible.
∂ut
1
=
∂∆ht
1 + λ2
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L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Le niveau de production est donné par
∆yt = −ut + ut−1 + ∆ht
Donc
∂ut
λ2
∂∆yt
=−
+1=
∂∆ht
∂∆ht
1 + λ2
A priori, l’effet sur la production d’une hausse des heures est ambigu :
d’une part la productivité par tête augmente, d’autre part le niveau
d’emploi diminue. Au final, la baisse du niveau d’emploi est plus que
compensée par la hausse de la productivité par tête : une hausse des
heures a un impact positif sur le niveau de production de l’économie (et
vice-verça).
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L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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33 / 53
Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Équilibre stationnaire, ou de long terme
L’équilibre stationnaire de l’économie (encore appelé équilibre de long
terme) se caractérise par des niveaux constants du taux d’inflation
(soit ∆pt = ∆pt−1 , ∀t) et du taux de chômage (soit ut = ut−1 , ∀t).
Á inflation constante, le taux de chômage d’équilibre stationnaire est
amené par l’équation de Phillips
∆p = λ0 + ∆p − λ2 u
λ0
u =
λ2
Le niveau de chômage de long terme est donc indépendant du niveau
des heures.
Une variation des heures n’a qu’un impact transitoire sur les prix, pris
en compte dans l’équilibre de court terme. Sur le long terme, il n’y a
pas d’impact : comme dans la section précédente, le niveau de
chômage ne dépend pas du niveau de la productivité, mais de ses
variations.
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L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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34 / 53
Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Dans l’équilibre de long terme, l’effet de la durée du travail sur la
production d’équilibre de long terme est donné par l’équation
yt = a + lt + ht
Ainsi, sur le long terme, lt = 1 − ut est constant, une augmentation des
heures se traduit intégralement par une augmentation de la production :
∂y
=1
∂h
La différence avec l’effet des heures dans l’équilibre de court terme vient
de l’absence de l’effet des heures sur le niveau d’emploi qui créait une
ambiguité sur le court terme. Ici, il n’y a pas d’effet négatif de
l’augmentation des heures sur le niveau de production global de l’économie.
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35 / 53
Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Construction du diagramme des phases
Pour représenter l’équilibre dans le diagramme des phases, il faut exprimer
ut − ut−1 et ∆pt − ∆pt−1 en fonction de (ut−1 , ∆pt−1 ). Ainsi, les zones
pour lesquelles ut − ut−1 > 0 correspondent à celles telles que
∆ht − ∆m + λ0 + ∆pt−1 − λ2 ut−1 > 0
et celles telles que ∆pt − ∆pt−1 > 0 sont telles que
u − ∆ht + ∆m > ut−1 + ∆pt−1
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
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36 / 53
Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Diagramme des phases
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Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Rigidité sur le salaire annuel
w est le ln du salaire annuel.
Le profit d’une entreprise est égal à
Π = PY − WL = PALH − WL = L (PAH − W )
si bien que la relation entre prix et salaire doit dépendre du nombre
d’heures travaillées. On a alors
pt = wt − a − ht
Sur le court terme, l’équation de demande, avec celle de production, amène
∆yt = ∆m − ∆pt = ∆lt + ∆ht = −ut + ut−1 + ∆ht
Or, en utilisant la relation de Phillips
∆pt
= ∆wt − ∆ht
= λ0 + ∆pt−1 − λ2 ut − ∆ht
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L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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38 / 53
Application : les effets d’une réduction du temps de travail
Ainsi, le chômage de court terme est égal à
ut =
λ0 + ∆pt−1 + ut−1 − ∆m
1 + λ2
Il ne dépend plus de la variation des heures. Du fait que les rigidités sur les
salaires ne portent que sur les salaires annuels, le choc de productivité par
tête induit par une modification des heures travaillées est intégralement
transmis dans les prix, sans effet sur le niveau d’emploi. D’une manière
générale, si la productivité n’intervient pas directement dans la courbe de
Phillips, il n’y a aucune raison qu’elle affecte le niveau du chômage à court
ou à long terme.
Sur le long terme, le niveau du chômage ne dépend que des rigidités
salariales réelles, il a le même niveau que dans le reste du problème.
Dans ce cadre, une réduction du temps de travail avec compensation
salariale conduirait à une simple augmentation du coût du travail et à un
effet très défavorable sur l’emploi.
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39 / 53
Analyse des rigidités nominales
Justification de l’existence des rigidités nominales
Les effets des politiques de relance sont conditionnés par les anticipations
des agents.
Si anticipations sont adaptatives, inefficacité à long terme.
Si anticipations sont rationnelles, inefficacité à court terme.
Fondement théorique à la courbe de Phillips ?
Hypothèse : Les différences d’anticipation sur les prix conduisent à des
choix différenciés.
pt n’est pas parfaitement anticipé, d’où l’existence de pta le prix anticipé.
Offre de travail :
ltS = l̄ + η (wt − pta )
mais les entreprises connaissent parfaitement pt .
Demande de travail :
yt = mt − pt , Équilibre sur le marché des biens.
yt = lt , Fonction de production (simplifiée).
pt = wt + χ, Mécanisme de fixation des prix.
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40 / 53
Analyse des rigidités nominales
Anticipations adaptatives
On définit πta = pta − pt−1 le taux d’inflation anticipé.
Le processus de révision des anticipations suit alors l’équation :
a
a
πta − πt−1
= (1 − λ) ∆pt−1 − πt−1
avec λ < 1.
∞
P
λτ −1 ∆pt−τ
Comme lim λt π0a = 0, on a : πta = (1 − λ)
t→∞
τ =1
Pour simplifier, on peut considérer λ = 0, i-e la vitesse de révision des
anticipations est maximale. On a alors πta = ∆pt−1 et
pta = pt−1 + ∆pt−1 = wt−1 + χ + ∆pt−1
D’où la relation de Phillips : ∆wt = χ + ∆pt−1 − η1 l̄ − lt
On a bien une relation entre l’évolution des salaires et l’emploi, dont la
valeur stationnaire est égale à l̄ − χη.
Mais il n’y a pas de chômage involontaire, seulement des chômeurs
”volontaires”.
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Analyse des rigidités nominales
Anticipations rationnelles
Les mesures de politique publique sont inefficaces même à court terme si
les agents font des anticipations rationnelles.
On considère mt comme une variable aléatoire.
Anticipation rationnelle :
pta = E (pt /It ) = pt−1 + E (∆pt /It )
D’où la relation de Phillips
∆wt = χ + E (∆pt /It ) −
1
l̄ − lt
η
Spécification de E (∆pt /It )
E (mt /It ) − E (pt /It ) = E (lt /It )
E ltS /It = l̄ − χη
En égalisant, on obtient la valeur du prix anticipé :
E (pt /It ) = E (mt ) − l̄ + χη = pta
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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42 / 53
Analyse des rigidités nominales
La valeur du prix d’équilibre pt dépend de la réalisation de mt
lt
= mt − pt
ltS
= l̄ + η (pt − pta ) − χη
Ainsi, le marché du travail s’équilibrant,
(1 + η) pt
= mt − l̄ + ηpta + χη
= mt − l̄ + ηE (pt /It ) + χη
= mt − E (mt /It ) + (1 + η) pta
donc
pt − pta =
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
mt − Emt
1+η
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43 / 53
Analyse des rigidités nominales
L’évolution de l’emploi à court terme s’écrit alors :
lt∗ = l̄ +
η
[mt − Emt ] − ηχ
1+η
Ainsi, seule la composante non anticipée de la politique économique peut
affecter le niveau d’emploi.
Remarque : Ce n’est pas seulement l’hypothèse d’anticipations rationnelles
qui aboutit à ce résultat mais aussi l’absence d’autres sources de rigidités
nominales, et toutes les hypothèses sur la façon dont les agents prennent
en compte l’information. Il est supposé en particulier que les agents ont
tous le même modèle et connaissent les liens entre ∆mt et ∆pt .
Au final, le résultat de totale inefficacité des politiques publiques est un
peu extrême.
Il faut retenir que les effets de ces politiques sont limités, et qu’elles sont
inefficaces pour accroı̂tre ”durablement” l’activité et que l’effet des
politiques de relance est principalement inflationniste.
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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44 / 53
Analyse des rigidités réelles
Analyse des rigidités réelles
Réflexion précisant les liens entre formation des salaires et taux de
chômage, portant sur deux points :
L’hétérogénéité des chômeurs qui peut créer une forme d’hystérésis du
chômage Une augmentation du chômage courant peut avoir des effets
structurels modifiant l’équilibre de long terme. Par exemple, les
chômeurs exclus durablement du marché du travail ont très peu de
chances de retrouver un emploi. Il existe alors une dynamique où le
taux de chômage dépend de l’histoire : il peut y avoir des effets
d’hystérèse.
La relation entre niveau du salaire et taux de chômage. Les modèles
théoriques expliquant la formation des salaires aboutissent à une
relation entre niveau du salaire et niveau du chômage (Blanchflower
et Oswald, 1995). Ainsi, les modèles se fondant sur les salaires
d’efficience ou la négociation salariale aboutissent au fait que le
salaire dépend du salaire de réservation.
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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45 / 53
Analyse des rigidités réelles
L’hysteresis du chômage
Une augmentation du chômage courant peut avoir des effets structurels
modifiant l’équilibre de long terme. Par exemple, les chômeurs exclus
durablement du marché du travail ont très peu de chances de retrouver un
emploi. Il existe alors une dynamique où le taux de chômage dépend de
l’histoire : il peut y avoir des effets d’hystérèse.
Sources de persistance du chômage, trois mécanismes possibles
1
Le pouvoir de négociation des insiders
2
Obsolescence du capital humain
3
Faible employabilité des chômeurs de longue durée
Dégradation du capital humain
Démotivation des chômeurs
Signal sur la qualité des chômeurs
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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46 / 53
Analyse des rigidités réelles
Hétérogénéité des chômeurs et effets d’hystérèse
Si les chômeurs de longue durée deviennent inemployables, seuls les
chômeurs ”récent” interviennent sur la variation des salaires.
La hausse ou la baisse des salaires va alors dépendre du niveau et de la
variation à court terme du taux de chômage.
La relation de Phillips s’écrit alors
∆wt = λ0 + (1 − λ1 ) ∆pt + λ1 ∆pt−1 − λ2 ut − λ02 ∆ut + λ3 ∆at
Comme ∆pt = ∆wt − ∆at , on a :
λ1 (∆pt − ∆pt−1 ) = λ2 (ūt − ut ) − λ02 ∆ut
où ūt correspond à la définition précédente du NAIRU.
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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47 / 53
Analyse des rigidités réelles
On peut alors définir un NAIRU de court terme tel que ∆pt = ∆pt−1
ût =
λ2
λ02
ū
+
ut−1
t
λ2 + λ02
λ2 + λ02
Une augmentation du chômage en t − 1 a un impact sur le NAIRU de
court terme, mais pas sur celui de long terme.
En terme de dynamique, on peut montrer que, à ∆m et ∆a constants,
l’économie converge vers un équilibre de long terme, si λ2 6= 0, avec une
inflation π = ∆m − ∆a et un chômage égal au NAIRU de long terme.
Cas limite λ2 = 0 : la croissance du salaire nominal ne dépend que de
l’évolution du taux de chômage. Dans ce cas, l’état d’équilibre dépend des
conditions initiales, il existe un effet d’hystérésis.
La solution à l’équilibre est la suivante : le niveau de chômage ne converge
pas vers une valeur fixe mais vers un trajectoire stationnaire,
∗
ut∗ = ut−1
+
λ0 − (1 − λ3 )
λ02
Un choc transitoire affecte alors durablement le niveau de chômage.
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L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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48 / 53
Analyse des rigidités réelles
Relation entre niveau de salaire et taux de chômage
Les modèles théoriques expliquant la formation des salaires aboutissent à
une relation entre niveau du salaire et niveau du chômage (Blanchflower et
Oswald, 1995). Ainsi, les modèles se fondant sur les salaires d’efficience ou
la négociation salariale aboutissent au fait que le salaire dépend du salaire
de réservation.
L’augmentation du chômage devrait donc peser sur les niveaux de salaire.
Formalisation :
wt − pt = λ0 + bt
où bt est le ln du salaire réel de réservation.
bt = λ3 at + (1 − λ3 ) (wt−1 − pt−1 ) − λ2 ut
La première partie de cette expression correspond à l’indexation du salaire
réel en l’absence de rigidités nominales, la seconde partie reflète l’effet de
la probabilité de sortie du chômage (qui décroı̂t avec le taux de chômage).
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L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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49 / 53
Analyse des rigidités réelles
En rajoutant des rigidités nominales, on arrive à l’expression suivante d’une
relation de Phillips modifiée :
∆wt
= λ0 + (1 − λ1 ) ∆pt + λ1 ∆pt−1 − λ2 ut
+λ3 ∆at − λ3 (wt−1 − pt−1 − at−1 )
On retombe sur une relation strictement identique à la relation de Phillips
lorsque λ3 = 0, i-e lorsque le salaire de réserve ne dépend que du salaire
réel passé, et non sur la productivité.
Avec ce mode de formation des salaires, on a une nouvelle expression du
NAIRU.
Si on considère que la règle de fixation des prix est la suivante :
pt = wt − at + χ
on aboutit à l’expression suivante pour le NAIRU :
ū =
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
λ0 + λ3 χ − (1 − λ3 ) ∆a
λ2
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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50 / 53
Analyse des rigidités réelles
Le NAIRU dépend alors du taux de marge du prix sur les salaires, i-e du
pouvoir de monopole des firmes, du coin fiscal sur les salaires et des coûts
du capital et de l’énergie. De nombreuses politiques publiques peuvent
alors agir sur le taux de chômage.
Remarque : cette représentation permet d’interpréter la différence
France-États-Unis en matière de chômage (Blanchard et Katz,1999). En
effet, le niveau de salaire n’interviendrait pas dans l’équation de salaire aux
États-Unis alors qu’il jouerait un rôle important en Europe. Pour ces
auteurs, la source du chômage en Europe serait lié au lien plus fort entre
productivité et salaire, lui-même imputable au rôle des syndicats dans les
mécanismes de formation des salaires et la législation de la protection de
l’Emploi.
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L’analyse traditionnelle du marché du travail.
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Investigations empiriques
Prise en compte de l’endogénéité
Équation : ∆wt = λ0 + α∆pt − λ1 (∆pt − ∆pt−1 ) − λ2 ut + λ3 ∆at
λ0
α
λ1
λ2
λ3
OLS
0.078
(0.009)
0.864
(0.038)
0.203
(0.075)
0.622
(0.066)
-0.191
(0.120)
France
2SLS
0.074
(0.012)
0.883
(0.045)
0.042
(0.126)
0.587
(0.091)
-0.178
(0.180)
GMM
0.075
(0.011)
0.865
(0.038)
0.072
(0.095)
0.589
(0.079)
-0.169
(0.163)
OLS
0.031
(0.008)
1.019
(0.093)
0.340
(0.169)
0.472
(0.150)
0.519
(0.127)
États-Unis
2SLS
0.036
(0.012)
1.064
(0.118)
0.511
(0.310)
0.554
(0.215)
0.461
(0.192)
GMM
0.038
(0.010)
1.094
(0.099)
0.556
(0.248)
0.619
(0.140)
0.454
(0.193)
Source : Données annuelles OCDE, 1965-2006.
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52 / 53
Investigations empiriques
Équation de Phillips augmentée
Équation : ∆wt = λ0 + α∆pt − λ1 (∆pt − ∆pt−1 ) − λ2 ut − λ02 ∆ut +
λ3 ∆at − λ03 (wt−1 − pt−1 − at−1 )
λ0
α
λ1
λ2
λ02
λ3
λ03
OLS
-0.200
(0.216)
0.920
(0.074)
0.221
(0.084)
0.650
(0.068)
-0.374
(0.232)
-0.027
(0.168)
0.045
(0.035)
Pierre Cahuc/Sébastien Roux (ENSAE)
France
2SLS
-0.742
(0.601)
1.159
(0.222)
0.175
(0.192)
0.555
(0.114)
-0.004
(0.518)
0.530
(0.578)
0.128
(0.094)
GMM
-0.757
(0.453)
1.141
(0.157)
0.145
(0.140)
0.565
(0.079)
-0.149
(0.391)
0.558
(0.387)
0.130
(0.072)
OLS
0.029
(0.245)
1.035
(0.132)
0.371
(0.186)
0.478
(0.156)
0.096
(0.192)
0.507
(0.137)
0.000
(0.038)
États-Unis
2SLS
-0.033
(0.326)
1.169
(0.217)
0.719
(0.419)
0.693
(0.281)
0.252
(0.304)
0.474
(0.234)
0.011
(0.050)
L’analyse traditionnelle du marché du travail.
GMM
-0.063
(0.214)
1.190
(0.150)
0.703
(0.297)
0.748
(0.172)
0.225
(0.188)
0.499
(0.225)
0.016
(0.033)
24 mars 2006
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