Détective publique

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Détective publique
ils en parlent encore...
VÉRONIQUE BARBIER
Détective
publique
"Au quotidien", magazine d'information de la RTBF,
décline la vie quotidienne des Belges sous toutes
ses formes et sur un ton résolument positif, convivial et décontracté. Il est présenté par Véronique
BARBIER et Sébastien NOLLEVAUX. Rencontre
avec l'élément féminin de ce sympathique duo.
Carte d'identité
Nom: BARBIER
Prénom: Véronique
Profession: journaliste,
présentatrice de l'émission
de la RTBF "Au quotidien"
Signe distinctif:
l'esprit critique à la une!
En secondaire, quelles matières
vous plaisaient particulièrement?
Quel a été votre parcours scolaire?
Véronique BARBIER: J'ai suivi mes
primaires et secondaires dans l'enseignement catholique à Ath. Après ma
rhéto, j'ai consacré une année à une
spécialisation en langues, car je
n'étais nulle part en néerlandais!
Finalement, je me suis lancée dans
mes études de journalisme à l'IHECS.
Pourquoi le journalisme?
VB: Quand j'étais petite et qu'on me
demandait ce que je voulais faire, je
répondais détective privé! Et je
pense que ce n'était pas innocent de
dire cela à l'époque. Maintenant, on
pourrait dire que je suis devenue une
"détective publique"!
À quelle époque détective privé
a-t-il laissé la place à journaliste?
VB: Vers 14 ans, j'ai commencé à
faire de la radio libre. C'est donc à ce
moment que je me suis dit que j'essaierais plus tard de travailler dans
les médias. Quand j'ai commencé
mes études de journalisme, je voulais clairement faire de la radio.
Finalement, je m'en suis détournée
au profit de la télé, mais j'y reviendrai
un jour, c'est certain!
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Des personnes de référence
vous ont-elles influencée dans
ce choix?
VB: Certaines, oui. Mon frère a entrepris des études de journalisme avant
moi. Je voyais donc ce qu'il suivait
comme cours à l'IHECS, où la pratique est aussi importante que la formation théorique. Ce côté pratique
m'a séduite. J'admirais aussi des personnes telles que Jean-Luc DELARUE, Mireille DUMAS… J'étais fort
intéressée par les débats de société.
Quand je voyais ces émissions-là à
16 ans, je me disais que c'était ce que
je voulais faire plus tard: faire parler
les gens et raconter leur histoire.
Et que représentait l'école
pour vous?
VB: J'ai toujours aimé l'école, cela a
toujours été un plaisir pour moi de
travailler, d'apprendre. Mais j'étais un
peu contestataire! Je voulais qu'on
m'écoute, qu'on tienne compte de
mon point de vue, ou qu'on me
démontre que j'avais tort. Il me semble fondamental que les enfants aient
un esprit critique, tout en trouvant la
bonne limite avec l'impertinence.
Bien sûr, cet esprit critique est également important en journalisme.
entrées libres < N°21 < septembre 2007
VB: J'aimais bien les maths, mais
c'était uniquement pour pouvoir
écouter de la musique pendant que
je travaillais! En fait, je ne voulais pas
poursuivre le latin et je me suis donc
retrouvée en scientifiques, alors que
je suis une littéraire. Ce choix reste
pour moi un vrai regret… Ce n'est
pas toujours la matière qui vous attire, mais parfois les enseignants qui
vous font l'aimer.
Par ailleurs, y a-t-il des matières
que vous regrettez de ne pas
avoir apprises à l'école?
VB: J'aurais bien suivi un cours d'actualité, pour apprendre à lire les quotidiens, à décoder, à regarder la télé tout
en ayant l'esprit critique. C'est important d'avoir son opinion. Je passe parfois dans les écoles à l'occasion de
l'opération "journalistes en classe". Je
dis aux élèves qu'il ne faut pas tout
prendre pour argent comptant!
Des enseignants vous ont-ils
marquée?
VB: En secondaire, un prof qui donnait histoire de l'art et religion nous a
ouvert les yeux sur toute une série
de choses; c'était quelqu'un de très
ouvert, on pouvait parler de tout avec
lui. Un homme très catholique, passionné par la religion.
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Ces deux métiers nécessitent de
capter l'attention d'un public…
Avez-vous des trucs pour cela?
VB: Non, je pense qu'il y a aussi une
part d'inné. De notre côté, nous
avons travaillé le ton de l'émission,
mais certaines choses sont naturelles. Je pense que quelqu'un de passionné ne peut que captiver. Une part
de la communication est déjà établie.
Photo: © RTBF
Votre émission aborde-t-elle parfois
des sujets en lien avec l'école?
MÉTIER DE JOURNALISTE
On a également diffusé un sujet sur
un prof de gym qui s'est complètement remis en question. Il travaille
avec des jeunes qui vont devenir
maçons et leur apprend la meilleure
façon de porter une charge sans se
faire mal au dos, de monter sur un
échafaudage, de trouver l'équilibre.
Les élèves se sont rendu compte que
même le cours de gym pouvait leur
servir! Les profs qui se remettent en
question, qui font évoluer leur cours
pour que cela soit encore plus utile
pour les élèves, moi je dis bravo!
Informer ou convaincre?
Informer sans nécessairement convaincre. Les gens doivent avoir l'esprit critique. Ce n'est pas à moi de les convaincre, mais à eux d'entendre ce qu'on
leur dit et de se faire leur propre opinion.
Expliquer ou bousculer?
Expliquer et parfois bousculer. De temps en temps, c'est utile de bousculer
un peu le public. Cela me fait penser à l'émission fiction du 13 décembre à
la RTBF, qui en a peut-être choqué certains, mais pourquoi pas! C'était sans
doute utile.
Relayer ou interpréter?
Relayer. Ce n'est pas à moi d'interpréter. Je dois essayer d'être la plus objective possible, car il y a toujours de la subjectivité. On a tous notre sensibilité,
notre personnalité. Mais on n'est pas là pour imposer une vérité!
Une dernière anecdote?
Expert ou témoin?
Témoin de ce qui se passe autour de nous. En tout cas, dans mon boulot
aujourd'hui, c'est ce que l'on me demande de faire. Ceci dit, il est bon, dans
une équipe de journalistes, d'avoir également des experts.
Auriez-vous pu être enseignante?
VB: J'ai postulé dans une école de
journalisme, pour faire partager mon
métier. Mais pour le reste, je ne sais
pas! J'admire beaucoup les professeurs de maternelle, car ils se retrouvent avec des petits bouts qu'il faut
vraiment encadrer. Je pourrais peutêtre enseigner en secondaire, car je
me dis que l'échange est peut-être
plus évident qu'en primaire, et dans
les années supérieures encore
davantage.
VB: Oui, on essaie d'aller dans les
écoles, de donner la parole à ses différents acteurs et d'observer ce qui
se fait de différent, qui puisse ouvrir
les enfants au monde extérieur.
Nous avons visité, par exemple, une
école où les enfants doivent s'occuper d'un potager; nous avons aussi
déjà parlé de l'hyperactivité. Il est
important de sensibiliser les enseignants aux difficultés des enfants. Je
ne peux qu'encourager les profs à
avoir des initiatives un peu ludiques,
qui seront tout aussi bénéfiques.
Quel parallélisme pouvez-vous
trouver entre le métier d'enseignant et celui de journaliste?
VB: Comme l'enseignant, le journaliste essaie d'être didactique, de pousser les gens à ouvrir les yeux sur ce
qu'il y a autour d'eux, à faire connaissance avec le monde.
Le prof fait la même chose avec ses
élèves, qui ne comprennent malheureusement pas toujours que cela les
fait évoluer.
VB: Quand j'étais en 5e secondaire, le
directeur a appelé mes parents pour
leur annoncer qu'il me renvoyait de
l'école. Bien que je n'aie jamais eu de
retenue, j'étais considérée comme trop
impertinente. Ce n'était pas accepté,
j'étais hors norme. Aujourd'hui, les
profs me disent qu'ils ont un bon souvenir de moi, mais on voulait tout de
même me virer de l'école! Finalement,
j'ai pu y terminer mes secondaires,
mais le fait d'avoir été rabrouée reste
une blessure de jeunesse. Je veux
bien qu'on nous apprenne à mieux
gérer cet esprit critique, mais sans
nécessairement nous casser! „
INTERVIEW FRANÇOIS TEFNIN
TEXTE BRIGITTE GERARD
entrées libres < N°21 < septembre 2007
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