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LES LIVRES ET LES IDÉES
Red Mafiya.
How The Russian
Mob Has Invaded
America
Par Robert I. Friedman
Godfather
of the Kremlin.
Boris Berezovsky
and the looting
of Russia
Par Paul Klebnikov
Les mafias « rouges »
à l’assaut du monde
PIERRE LORRAIN*
L’extension internationale de la pègre russe
fascine médias et éditeurs. Ces deux livres,
publiés aux Etats-Unis, sacrifient certes au goût
du sensationnel, mais comportent aussi nombre
d’informations inédites.
P
our paraphraser Karl Marx, un
spectre flotte aujourd’hui sur
le monde, celui des mafias russes.
A en croire plusieurs livres publiés
aux Etats-Unis au cours des
derniers mois, l’effondrement du
communisme soviétique aurait
lâché sur la planète une menace
autrement plus redoutable que la
très crainte Armée rouge : celle
des bandes criminelles organisées,
évidemment cataloguées de cette
même couleur écarlate qui symbolise l’ennemi depuis bien avant le
début de la guerre froide. Profitant
du vide du pouvoir provoqué par
le démantèlement de l’URSS, la
« Red Mafiya » aurait transformé la
Russie et les autres nouveaux Etats
indépendants en une sorte d’île de
la Tortue surdimensionnée, entièrement contrôlée par la pègre,
paradis de tous les malfrats et base
arrière d’une vaste entreprise de
conquête du monde, avec pour
mot d’ordre : « Mafieux de tous les
pays, unissez-vous ! »
Curieusement, cette vision apocalyptique est très récente. Jusqu’en
* Journaliste, écrivain, spécialiste de la Russie. Dernier ouvrage publié : La mystérieuse
ascension de Vladimir Poutine, Paris, Editions du Rocher, 2000.
1999, le sujet des « mafias russes »
n’intéressait réellement que les
spécialistes de la Russie et de la
lutte contre le crime organisé.
Seule la presse à sensation se faisait l’écho des agissements hauts
en couleur des criminels russes et
des risques qu’ils faisaient courir au
monde, notamment en cherchant
à brader le potentiel nucléaire
soviétique à des « Etats voyous »
et à des bandes terroristes internationales, allégation qui ne reposait, en fait, sur aucun fait avéré.
De leur côté, les médias sérieux
mettaient l’accent sur le rôle des
mafias russes dans des activités
aussi diverses que le trafic de
drogue, les ventes illicites d’armes,
les réseaux de prostitution, l’extorsion et le blanchiment d’argent,
sans donner dans le catastrophisme de leurs collègues de caniveau : pour eux, l’apparition des
« mafias russes » sur la scène internationale aux côtés de leurs
illustres prédécesseurs comme la
Cosa Nostra américaine, les mafias
siciliennes, les yakusa japonais, les
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triades chinoises ou les cartels
colombiens impliquait une augmentation quantitative de la criminalité organisée, nullement un saut
qualitatif.
QUAND LA PÈGRE
DEVIENT MÉDIATIQUE
S
1
Red Mafiya.
How The Russian
Mob Has Invaded
America
(« Mafiya rouge.
Comment
la pègre russe
a envahi
l’Amérique »),
Little Brown,
New York, 2000,
296 pages.
2
Godfather of
the Kremlin. Boris
Berezovsky
and the looting
of Russia
(« Le Parrain
du Kremlin.
Boris Berezovski
et le pillage
de la Russie »),
Harcourt,
New York, 2000,
400 pages.
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bonheur sur la piste des malfrats
russes. Parmi les plus intéressants
de ces ouvrages, il faut citer ceux
de Robert I. Friedman1 et de Paul
Klebnikov2. Ces deux livres sont
complémentaires, car si le premier
est consacré à l’irruption et à
l’installation de la pègre russe aux
Etats-Unis depuis les années 70,
le second nous plonge dans ce
monde trouble de la Russie
contemporaine où les frontières
entre bandes criminelles, hommes
d’affaires et pouvoir politique ne
sont jamais clairement définies et
où l’on passe de l’un à l’autre sans
même s’en rendre compte.
i cette vision changea en 1999,
ce fut pour des motifs essentiellement politiques. La campagne
pour les législatives russes de
décembre se déroula dans une
atmosphère particulièrement délétère, où les accusations de corruption, de malversations diverses
et de collusion avec
des criminels remplaDisons-le tout de
Si tous les journalistes
cèrent les arguments
suite : le principal
électoraux. Ces scan- qui ont reçu des coups
défaut des deux oudales débordèrent de fil ou des lettres
vrages est de sacrilargement le cadre
fier par trop au
de menace décidaient
de la Russie pour imsensationnalisme et
pliquer aussi des éta- de se réunir, il serait
d’avancer des
blissements occiden- difficile de trouver
conclusions aussi
taux prestigieux,
hasardeuses que hâune salle assez grande
comme la très honotives, fondées sur des
rable Bank of New
arguments approxiYork, et même des institutions fimatifs et tronqués, dans le but, non
nancières internationales telles
de faire avancer la vérité, mais
que le FMI ou la Banque mondiale.
d’appâter le chaland. De ce point
La tempête médiatique fut d’autant
de vue, leurs titres vendent la
plus importante que les noms de
mèche : on voit mal, en effet, ce que
ces organismes se retrouvaient
les bandes criminelles russes ont
non seulement associés aux malde « rouge », couleur politique s’il
versations supposées de la « faen est, à part le sang de leurs
mille » du président Eltsine, mais
victimes. Et qualifier Berezovski
aussi à des opérations criminelles
de « parrain du Kremlin » laisse
de blanchiment organisées par des
entendre à la fois l’appartenance
« parrains » de triste notoriété,
du magnat à la pègre et la localicomme le célèbre Mikhas, chef
sation de sa « mafia » dans la citade l’une des bandes criminelles les
delle du pouvoir moscovite.
plus actives en Russie. En réalité,
ces affaires qui défrayèrent la chroSi l’on en croit son introduction,
nique pendant quelques semaines
Robert Friedman aurait été mereposaient en grande partie sur
nacé de mort par deux importants
des amalgames abusifs, mais elles
caïds russes : Viatcheslav Ivankov,
donnèrent l’impression fâcheuse
dit Iapontchik (le « Japonais »), une
que les « mafias russes » avaient
célébrité de la pègre moscovite
envahi la planète.
installée aux Etats-Unis au début
des années 90, et Semion MoguiPlusieurs livres virent alors le jour,
levitch que Friedman qualifie de
« surfant » sur cette vague média« gangster le plus dangereux du
tique. Leurs auteurs, généralement
monde ». Comme on le sait, les
des journalistes d’investigation, se
hommes ne sont grands que par la
lancèrent avec plus ou moins de
taille de leurs ennemis. Toutefois,
l’intimidation faisant partie du
code du savoir-vivre des bandits
russes, si tous les journalistes qui
ont reçu des coups de fil et des
lettres de menace décidaient de se
réunir, il serait difficile de trouver
une salle assez grande. Friedman
croit savoir que Moguilevitch a
lancé un contrat de 100 000 dollars sur sa tête. On peut le rassurer tout de suite : si c’était vraiment le cas, il ne serait plus là pour
en parler, puisque sa seule mesure
de précaution fut de se mettre au
vert pendant quelques jours.
Un autre défaut du travail de
Friedman est que l’auteur ne cite
pas ses sources, se réfugiant derrière des étiquettes vagues comme
« un historien du sport russe » ou
« un haut fonctionnaire du FBI ».
Il accorde aussi une très grande
importance aux confessions de
certains mafieux, comme un certain Ludwig Feinberg, dit Tarzan,
bien que leurs déclarations soient
contredites par les faits. Ainsi, ledit
Feinberg aurait servi d’intermédiaire entre les trafiquants de
drogue colombiens et des bandes
criminelles organisées en Russie.
En 1993, il aurait notamment négocié six hélicoptères militaires
MI8 pour le compte du caïd de la
drogue Pablo Escobar et des « barons » des cartels. Or, à l’époque
concernée, à peine quelques mois
avant sa mort, survenue en décembre, Escobar n’était plus le
« boss » incontesté du trafic de
cocaïne et les « barons » en question lui donnaient la chasse aussi
bien que la police et les militaires
colombiens. Le cartel de Cali avait
même mis sa tête à prix.
LES « PARRAINS »
DE BRIGHTON BEACH
E
n pourtant, l’ouvrage de Friedman est intéressant à plus d’un
titre. D’abord, il dresse un portrait
psychologiquement très juste des
caïds de la pègre russe. Ensuite, il
évite bon nombre des approximations et des erreurs qui foisonnent
LES MAFIAS « ROUGES » À L’ASSAUT DU MONDE
dans les ouvrages similaires, dont
les auteurs semblent parfois ignorer que la pègre n’est pas née en
Russie avec la démocratie et que
les truands existaient aussi sous le
régime soviétique. Pour finir, il
raconte une histoire intéressante :
celle de l’installation de truands
russes aux Etats-Unis, notamment
à Brighton Beach, dans le borough
new-yorkais de Brooklyn.
Ce fut d’ailleurs avec le soutien
des mafieux américains (notamment le clan Genovese et la famille Colombo) que les caïds
russes comme Monya Elson, Evsei Agron ou Marat Balagula3,
imposèrent leur loi sur le quartier.
L’histoire des « parrains » de Brighton Beach, intitulée « L’invasion »,
constitue la partie la plus
intéressante du livre
de Friedman. La
Il situe l’irruption de Avec l’effondrement
seconde partie
la pègre russe aux
du communisme
(« Colonisation et
Etats-Unis au début
Conquête ») est
des années 70, lors de et la liberté
moins réussie, car
l’adoption de l’amen- de déplacement,
l’auteur sollicite trop
dement Jacksonles caïds de la pègre
les faits en faveur de
Vanik qui liait l’octroi
sa thèse : avec l’effonà l’URSS du statut voyaient s’ouvrir
drement du commude la nation la plus devant eux
nisme et l’essor de
favorisée à la liberté
de nouveaux champs
la criminalité orgad’émigration de la
nisée dans l’ancienne
communauté juive. d’activité
URSS, la mafia russe
Dans le flux d’émiaux Etats-Unis serait en passe de
grants qui quittèrent l’Union
prendre une importance détermisoviétique à partir de 1972 se
nante au point de supplanter son
trouvaient de nombreux criminels
homologue sicilienne aux Etatsdont Moscou voulait se débarrasUnis. Friedman la voit potentielser. Comme on le sait, la destinalement plus dangereuse, car les
tion finale de la majorité des émigangsters russes seraient mieux
grants soviétiques de l’époque (qui
éduqués que les italo-américains.
n’avaient bien souvent de juif que
Ce dernier point ne ressort nullele nom de famille figurant sur
ment du livre, qui montre plutôt
leur livret d’identité, ainsi que la
l’amateurisme de la pègre issue
mention de cette « nationalité »)
de l’ex-URSS. Ainsi Iapontchik,
n’était pas Israël, comme le stil’homme qui, dès son arrivée aux
pulaient les visas délivrés par les
Etats-Unis en 1992, est censé avoir
autorités moscovites (elles ne les
fait sortir la mafia russe du ghetto
accordaient que dans le cadre de
de Brighton Beach pour l’étendre
regroupements familiaux), mais
sur les cinquante Etats, a fini très
l’ensemble des pays occidentaux,
vite en prison. En réalité, ce caïd
notamment les Etats-Unis. A
de la pègre moscovite, qui avait
Brooklyn, le quartier de Brighton
purgé de nombreuses années de
Beach se transforma en une sorte
camp, n’était pas parti outrede petite Russie qui devint le
Atlantique de son plein gré mais
territoire des truands issus de
exilé par ses pairs qui craignaient
cette même émigration. A l’instar
ses foucades, ce qui ne plaide pas
de son homologue italo-américaine
en faveur de son intelligence.
(mais à plus petite échelle), cette
mafia – qui conserva des liens avec
Friedman semble victime d’une
les gangs sévissant dans la mère
erreur de perspective. Si, pendant
patrie – pratiquait le racket, le tral’époque soviétique, la commufic de drogue, les jeux clandestins,
nauté russe installée aux Etatsle commerce illégal du sexe, et les
Unis vivait en vase clos, c’est parce
autres activités criminelles qui sont
qu’elle ne pouvait pas faire autrel’apanage des bandes organisées.
ment. Avec l’effondrement du
communisme et la liberté de
déplacement, l’isolement prit fin,
tandis que les caïds de la pègre
russe voyaient s’ouvrir devant eux
de nouveaux champs d’activité. Il
est certain que l’irruption des
bandes russes sur la scène internationale et leur collusion avec les
gangs déjà établis en Occident s’est
traduite par une augmentation
radicale des activités criminelles,
notamment dans le domaine du
trafic de drogue et du blanchiment
de l’argent sale. Mais il est difficile
d’extrapoler sur l’hégémonisme
de la « mafia rouge » car, à la différence de l’hégémonisme soviétique, il ne repose pas sur une prétendue supériorité idéologique. Le
but de toutes les bandes criminelles du monde est le même :
faire le plus de profit au moindre
effort, ce qui implique de régner
sur le plus grand territoire possible. De la sorte, la limite à l’expansion d’un gang est la volonté de
ses voisins de protéger leur propre
territoire. En d’autres termes, les
Russes ne pourraient supplanter
les Siciliens aux Etats-Unis que s’ils
disposaient d’une force supérieure. Pour Friedman, la chose ne
semble pas faire de doute puisque,
selon lui, la « mafia rouge » dispose
d’un atout dont la Cosa Nostra,
malgré sa puissance financière et
son organisation très structurée,
ne pourrait même pas rêver : les
ressources immenses d’un Etat entièrement contrôlé par la pègre.
BEREZOVSKI
ET LES TCHÉTCHÈNES
L
à se situe le point crucial :
la Russie est-elle un Etat
mafieux ?
La réponse que donne Paul Klebnikov dans son livre est ambiguë. Le
sensationnalisme lui impose de répondre oui, alors qu’il ne dispose
pas des éléments qui lui permettraient de le faire. Il est donc obligé
de procéder par amalgame.
Puisque, au moment de la rédaction
3
Dans un but
de simplification,
nous conservons ici
la translittération
anglaise des noms
russes. Nous
n’employons
la translittération
française que
pour des individus
connus, comme
Berezovski (au lieu
de Berezovsky),
Moguilevitch (au
lieu de Mogilevich)
ou Eltsine
(au lieu de Yeltsin).
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de son livre, il était de notoriété
prétexte d’aider ce dernier à édipublique que les « oligarques »
ter ses mémoires à l’étranger. Pour
(les principaux magnats de l’indusKlebnikov, cette collusion du poutrie et des affaires) contrôlaient
voir avec un entrepreneur louche
l’économie russe, il lui suffisait de
était dans l’ordre des choses,
trouver un biais permettant d’aspuisque le président russe et les
socier ces hommes d’affaires à des
siens étaient des bandits de la pire
malfrats. Ce n’était pas bien difficile
espèce : n’ont-ils pas bradé les
dans la mesure où il n’était guère
richesses de la Russie, qu’ils ont
possible de réussir dans les affaires
rabaissée du rang de « troisième
en Russie, ces dernières années,
puissance économique mondiale »
sans violer des lois inadaptées qui
à celui d’un pays du tiers-monde ?
interdisaient tout et
son contraire. Toute- Une plongée saisissante Là se situe le princifois, frauder le fisc
pal défaut du livre :
ou obtenir des certi- dans la Russie
sa charge contre le
ficats d’exportation de l’ombre, des guerres président russe et
illégaux sont des ac- de gangs, des fortunes
les « jeunes réfortivités délictueuses,
mistes » qu’il porta
mais non criminelles vite faites
au pouvoir se nourrit
c o m m e p e u v e n t et des magouilles
d’approximations et
l’être le trafic de économiques
d’idées toutes faites,
drogue, le racket ou
sans entrer dans la
la traite des blanches. en tout genre
réalité des faits. Ainsi,
il est étonnant que
Klebnikov est conscient de cette
quelqu’un puisse aujourd’hui
faille dans sa démonstration, et il
parler de l’URSS comme de la
tente de l’escamoter en postulant
« troisième puissance économique
qu’au moins un oligarque pourmondiale » alors que l’on n’ignore
rait être également un criminel. Il
plus rien de l’état de délabrement
s’agit bien entendu du héros de
du pays à la fin de l’ère Gorbatchev.
son livre : Boris Berezovski. Ce
En 1989, le professeur Tchazov,
mathématicien, né en 1946, se
ministre de la Santé publique, dans
lança dans les affaires pendant la
un discours demeuré célèbre
perestroïka gorbatchévienne en
devant le Congrès des députés du
montant une entreprise de vente
peuple, estimait lui-même que
de voitures. Or, il est impossible
l’Union soviétique était au niveau
d’avoir pignon sur rue dans le
d’un pays du tiers-monde. Et, à
Moscou post-communiste sans bél’époque, Eltsine n’était pas au
néficier d’une krycha (un « toit »,
pouvoir. A la même tribune,
une protection). Les bandes
d’autres orateurs situaient l’écotchétchènes contrôlaient alors le
nomie soviétique quelque part
marché de l’automobile, et Bereentre le Brésil et le Venezuela. Il
zovski se retrouva donc sous leur
est donc difficile de prétendre,
« protection ». Klebnikov postule
comme le fait Klebnikov, que ce
que le racketté pouvait être le
sont les gouvernements eltsiniens
complice des racketteurs, car il
qui l’ont rabaissée à ce niveau.
entretint par la suite les meilleures relations du monde avec
Il n’en demeure pas moins que
les gangs tchétchènes.
Godfather of the Kremlin constitue
une plongée saisissante dans la
Berezovski, toutefois, serait resté
Russie de l’ombre, de la pègre, des
un homme d’affaires d’envergure
guerres de gangs, des fortunes vite
moyenne s’il n’avait pas eu la bonne
faites et des magouilles éconofortune d’être introduit dans le
miques en tout genre. Klebnikov,
cercle intime de Boris Eltsine sous
lorsqu’il ne tente pas de faire
œuvre d’économiste ou d’historien (il n’est ni l’un ni l’autre), et
qu’il ne se laisse pas emporter par
des polémiques douteuses, effectue un véritable travail d’investigation, décomposant méticuleusement la carrière et les affaires de
Berezovski et mettant en lumière
la manière dont les « oligarques »
se sont enrichis.
A la différence de Friedman,
Klebnikov cite abondamment ses
sources : documents comptables,
archives de sociétés, rapports
de services de renseignement ou
d’agences privées de sécurité
viennent toujours confirmer les
déclarations de nombreuses
personnalités qui vont de Mikhaïl
Gorbatchev à Vladimir Goussinski en passant par Berezovski
lui-même, de hauts responsables
du FBI, des hommes d’affaires
suisses, des hommes politiques
russes ou étrangers, sans oublier
le général Alexandre Korjakov,
qui fut un temps l’éminence grise
et le meilleur ami de Boris Eltsine
avant de tomber en disgrâce. Le
seul reproche que l’on puisse
faire à Klebnikov en la matière
est justement d’accorder une
trop grande importance au témoignage de Korjakov, qui avait
trop de comptes à régler avec le
président russe et avec Berezovski pour être tout à fait crédible. C’est à partir de ses déclarations que sont nées les
spéculations sur le rôle très important qu’aurait joué Berezovski dans les derniers mois
de pouvoir de Boris Eltsine.
Klebnikov tient l’homme d’affaires
pour le véritable responsable de
la valse des Premiers ministres
depuis avril 1998 et l’artisan de
l’ascension de Vladimir Poutine.
Or, depuis son élection à la présidence de la Russie, ce dernier
a eu à de nombreuses reprises
l’occasion de démontrer qu’il
n’était pas une marionnette de
Berezovski ni de n’importe quel
autre oligarque. l