3. Engagements soumis aux risques financiers
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3. Engagements soumis aux risques financiers
Solvabilité 2 La détermination des provisions Séminaire EFE « Les menaces de Solvency II » Paris, 1er décembre 2008 Pierre THEROND [email protected] Introduction Les problématiques d’évaluation de contrats d’assurance sont devenues monnaie courante : gestion des risques, mise en place de couvertures, calcul de provisions techniques (Solvabilité 2, IFRS 4, IFRS Contrats d’assurance phase 2), d’exigence de capitaux (Solvabilité 2), valorisation de compagnies (Embedded Value, cession de sociétés). EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 2 Introduction Le pilier 1 de Solvabilité 2 repose sur une vision économique des dettes et créances des assureurs : actifs et passifs d’assurance ; actifs en représentation des engagements ; exigences de capitaux propres : SCR et MCR ; éléments éligibles ; surplus. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 3 Introduction Dans ce dispositif, les provisions doivent permettre la transférabilité des engagements en cas de défaillance de l’assureur ! D’où le recours à des méthodes d’évaluation market consistent censées prendre en compte le risque le plus finement possible relativement aux informations disponibles. Par ailleurs, cette étape d’évaluation est cruciale compte tenu de la structure standard qui va y faire systématiquement référence au travers de la Net Asset Value (NAV). EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 4 Sommaire 1. Principes d’évaluation 2. Engagements sans PB financière 3. Engagements avec PB financière 4. Autres points importants EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 5 1. Principes d’évaluation Les spécifications techniques de QIS4 donnent une hiérarchie dans les méthodes d’évaluation des actifs et des passifs : méthodes mark to market ; méthodes maket consistent mark to model ; dans certains cas, les valeurs comptables (IFRS et normes locales) peuvent s’avérer des proxies acceptables ; enfin, sans meilleure information, il est possible de se tourner vers les valeurs comptables locales. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 6 1. Principes d’évaluation Les spécifications techniques de QIS4 précisent le contexte d’évaluation des provisions techniques en distinguant : les engagements non-couvrables pour lesquels marge pour risque et best estimate doivent être distingués ; les engagements couvrables, pour lesquels l’approche financière classique de valorisation doit être employée (prime de risque incluse dans le prix obtenu). N.B. Dans tous les cas, l’évaluation doit être market-consistent (TS.II.A.1) EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 7 1. Principes d’évaluation Engagement d'assurance Couvrable ? Oui Marked to Market Pas de nécessité de calculer séparément BE et RM EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Non Marked to Model (market consistent) « BE » et « RM » distinguées Page 8 1. Principes d’évaluation Cette distinction repose sur les approches classiques : de l’assurance, où l’on cherche à contrôler les variations adverses d’un risque mutualisable ; de la finance, où l’on cherche à éliminer un risque systématique. Depuis quelques années, le recours opérationnel aux méthodes financières pour valoriser les engagements d’assurance s’est accru. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 9 1. Principes d’évaluation Depuis la fin des années 70, la littérature académique s’intéresse à ce problème et s’appuie notamment sur l’analogie entre garanties d’assurance vie et dérivés financiers pour chercher à évaluer ces contrats. L’application directe des théories de la finance de marché se heurte néanmoins à certains écueils : interdépendance de risques financiers et non-financiers, comportements observés différents de ceux « d’investisseurs rationnels » latitude de réduction du risque par la gestion des actifs importante. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 10 1. Principes d’évaluation Best estimate TS.II.A.10. : « Valeur actuelle probable des flux futurs intégrant la valeurtemps de l’argent en utilisant la structure par termes des taux d’intérêts sans risque ». approche nécessairement prospective ; utilisation d’hypothèses best estimate ; calcul de l’engagement brut. N.B. Universalité de la définition : pas de distinction vie/non-vie ou claims/pre-claims ! EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 11 1. Principes d’évaluation Steps to calculate the Risk Margin under a Cost-of-Capital approach Marge pour risque 1 Project the SCR for future years until run-off of the current liability portfolio Objectif de transférabilité Méthode du coût du capital ! 1 2 Dans QIS4, les SCR élémentaires relatifs aux risques financiers ne sont plus projetés : les primes de risque sont déjà incluses dans les prix évalués selon une approche market consistent. 2 4 ... 5 Determine the cost of holding future SCRs, by multiplying the projected SCR by the CoC factor 1 3 3 2 3 4 5 ... Discount the cost of holding future SCR's at the risk-free rate to get the CoC Risk Margin (RM) n RM CoC _ factor SCR i vi i 1 EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 12 Sommaire 1. Principes d’évaluation 2. Engagements couvrables 3. Engagements soumis aux risques financiers 4. Autres points importants EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 13 2. Engagements couvrables Possibilité de mettre en place un portefeuille répliquant parfaitement les flux dont on observe sur le marché le prix. La provision technique est alors égale au prix du portefeuille de couverture. Cela concerne essentiellement les contrats en unités de comptes sans garantie plancher avec la limite des frais… Ce type de contrats ne supporte pas de risque d’assurance. En IFRS, ils ne sont pas considérés comme des contrats d’assurance ! Des risques opérationnels demeurent provenant notamment de la communication auprès des assurés (renonciation, délai de placement, etc.) EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 14 2. Engagements couvrables Cas des garanties plancher en cas de décès L’assuré a payé une prime K investie en 0 dans une unité de compte (UC) de valeur S0 = K. Il se voit garantir : à tout instant t, le montant de l’unité de compte St ; s’il décède en , la quantité : max S , K S K S Ca n’est pas le flux d’une option financière à cause de L’engagement ne peut donc pas être considéré comme parfaitement couvrable En considérant la mutualisation (même imparfaite !) des décès, il est néanmoins possible de couvrir partiellement le risque. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 15 2. Engagements couvrables Cas des garanties plancher en cas de décès EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 16 Sommaire 1. Principes d’évaluation 2. Engagements couvrables 3. Engagements soumis aux risques financiers 4. Autres points importants EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 17 3. Engagements soumis aux risques financiers Parmi eux les contrats d’épargne en euros et, plus généralement, l’ensemble des contrats avec des dispositions de participation aux bénéfices financiers ! Les contrats d’assurance vie en euros représentaient en 2006 : 61 % de la collecte assurance de personnes (vs 20 % pour les UC) ; 105,5 G€ ; 900 G€ de provisions techniques. Source : rapport annuel FFSA, 2006. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 18 3. Engagements soumis aux risques financiers Dans une certaine mesure (cf. TS.II.A.16-31 des spécifications QIS4 par exemple), le risque sous-jacent du contrat peut être découpé : en risque couvrable, en risque non-couvrable. La partie couvrable du risque peut être évaluée en référence au prix de la couverture (approche risque-neutre ou déflateurs par exemple). La partie non-couvrable devra s’exprimer sous la forme : Best Estimate + Risk Margin EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 19 3. Engagements soumis aux risques financiers Lecture optionnelle Considérons un contrat d’assurance vie de type « épargne en euros ». La réglementation impose pour ce type de contrats : une clause de participation aux bénéfices techniques et financiers ; une possibilité de rachat avant le terme moyennant une pénalité limitée. Par ailleurs, les dispositions contractuelles ou la communication de l’assureur peuvent prévoir : un taux minimum garanti ou un taux annuel garanti ; la possibilité d’effectuer des versements libres ou programmés ; la tacite reconduction au-delà du terme. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 20 3. Engagements soumis aux risques financiers Lecture optionnelle La plupart de ces garanties peuvent s’interpréter comme des options financières. Exemple : Évolution de l’épargne acquise sur une année (TMG + PB) PM t 1 PM t 1 tmg β ρt tmg avec : t = taux de rendement des placements, tmg = taux minimum garanti, = taux de participation aux bénéfices. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 21 3. Engagements soumis aux risques financiers Lecture optionnelle Du point de vue de l’assuré, on a la correspondance : Garantie du contrat Dérivé financier correspondant Clause de participation bénéficiaire Option d’achat européenne Clause de remboursement anticipé Option de vente américaine Garantie de taux sur des versements futurs Swaptions EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 22 3. Engagements soumis aux risques financiers Lecture optionnelle Outre les limites traditionnelles de la théorie financière les garanties d’assurance présentent d’autres spécificités : latitude dans la revalorisation de l’épargne : gestion du rendement financier (rendement comptable rendement économique de l’actif) et caractère discrétionnaire de la PB ; comportements des assurés différent de celui des investisseurs « rationnels » sur un marché organisé : versements libres, rachats, prorogations, conversion en rente, etc. interdépendance de risques financiers et non-financiers (cf. Frantz, Chenut & Walhin (2003) pour l’analyse de cet aspect sur les contrats en UC). EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 23 3. Engagements soumis aux risques financiers Dès lors que l’on est confronté à des options et garanties financières asymétriques (ex : taux garanti, participation aux bénéfices, etc.), le recours à des méthodes stochastiques d’évaluation s’avère indispensable au risque de ne pas mesurer correctement la valeur-temps de ces garanties. Ces modèles doivent permettre de reproduire les interactions entre : la gestion financière de l’actif général (ou cantonné le cas échéant) ; le rendement technique et financier de la société ; la revalorisation des contrats ; le rachat des contrats. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 24 3. Engagements soumis aux risques financiers Exemple : gestion du portefeuille financier Portefeuille de contrats d’épargne : durée fixe = 8 ans ; TMG annuel = 2,5 % ; participation aux bénéfices financiers = 90 % ; Hypothèses : Pas de PB (discrétionnaire) au-delà de l’engagement contractuel ; Pas de rachat avant le terme, ni de décès. Objectif : donner une valeur à ce portefeuille de contrats. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 25 3. Engagements soumis aux risques financiers Exemple : gestion du portefeuille financier Si l’on note PMk, la valeur de l’épargne à la date anniversaire k, le processus de revalorisation, à chaque date anniversaire est le suivant : PM k où k 1 1 max 2,5%;90% ρk 1 PM k est le rendement financier sur la k-ème période. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 26 3. Engagements soumis aux risques financiers Exemple : gestion du portefeuille financier L’assureur a investi en 0 la prime dans un actif financier composé : pour 30 % d’actions de volatilité 20 % ; pour 70 % d’un bon de capitalisation sans risque qui sert un rendement de 4 %. On suppose que le taux sans risque est constant sur les 8 ans. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 27 3. Engagements soumis aux risques financiers Exemple : gestion du portefeuille financier Étudions 2 stratégies de gestion du portefeuille financier : l’assureur ne touche plus à ses actifs jusqu’au terme du contrat : ρ k θS k θS k 1 1 θ Bk 1 θ Bk 1 1 chaque début d’année, le portefeuille est recomposé pour conserver la répartition initiale (30/70) : ρ k θ Sk Sk 1 1 θ Bk 1 Bk 1 Dans l’univers risque-neutre, les deux processus de rendement ont, sur une période, une même espérance égale au sans-risque. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 28 3. Engagements soumis aux risques financiers Exemple : gestion du portefeuille financier Distribution empirique de la revalorisation de l’épargne au terme 8% Pas de recomposition Recomposition annuelle 7% 6% 5% 4% 3% 2% 1% 65 % 73 % 80 % 88 % 95 % 10 3% 11 0% 11 8% 12 5% 13 3% 14 0% 14 8% 15 5% 16 3% 17 0% 58 % 50 % 43 % 35 % % 28 20 % 0% EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 29 3. Engagements soumis aux risques financiers Exemple : gestion du portefeuille financier Quelques remarques : La politique de recomposition annuelle conduit à une distribution plus resserrée autour de la moyenne. Dans les deux cas, l’espérance de revalorisation au terme est de l’ordre de 51 % (gain de 10 % sur 8 ans par rapport à un investissement sans-risque). Les profils de rendement sont très différents (cf. graphiques suivants). EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 30 3. Engagements soumis aux risques financiers Exemple : gestion du portefeuille financier Évolution du taux de revalorisation moyen 5,34% Pas de recomposition Recomposition annuelle 5,32% 5,30% 5,28% 5,26% 5,24% 5,22% 5,20% 5,18% 5,16% 0 1 2 3 EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 4 5 6 7 8 9 Page 31 3. Engagements soumis aux risques financiers Exemple : gestion du portefeuille financier Évolution du coefficient de variation du taux de revalorisation 80,0% Pas de recomposition Recomposition annuelle 79,5% 79,0% 78,5% 78,0% 77,5% 77,0% 76,5% 76,0% 0 1 2 3 EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 4 5 6 7 8 9 Page 32 Sommaire 1. Principes d’évaluation 2. Engagements couvrables 3. Engagements soumis aux risques financiers 4. Autres points importants EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 33 4. Autres points importants 1. Primes futures enjeu comptable majeur au regard de la problématique des frais d’acquisition ; dispositions communes entre le draft de QIS4 et le DP de la norme IFRS phase 2, évolution dans la version finale de QIS4, orientations nationales complémentaires. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 34 4. Autres points importants 1. Primes futures Critères du Discussion Paper (IFRS) : Primes que l’assurée doit payer pour conserver la garantie d’assurabilité ; Primes que l’assureur peut réclamer de manière exécutoire ; Primes dont la prise en compte a pour effet d’augmenter la provision. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 35 4. Autres points importants Primes futures Contractuellement exigibles ? Oui Non Garantie d’assurabilité : • prix contractuellement contraint ? • pas de reconfirmation du profil de risque Oui Non Inclure ces primes revient à augmenter le passif ? Oui Primes futures à intégrer EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Non Primes futures à ne pas intégrer Page 36 4. Autres points importants 1. Primes futures Critère de QIS4 : primes périodiques pondérées par les probabilités d’expérience d’occurrence. Complété par les dispositions de l’ONC : en assurance vie : référence à l’ « équilibre actuariel global à la souscription », exemption des versements libres et de la retraite supplémentaire, prise en compte des primes futures des contrats emprunteur ; en prévoyance : pas de prise en compte dès lors que primes ou garanties sont révisables annuellement. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 37 4. Autres points importants 2. Participation aux bénéfices L’évaluation des provisions doit intégrer l’ensemble des flux aux assurés et bénéficiaires y compris ceux relevant de la participation aux bénéfices futures et discrétionnaires. Les spécifications techniques de QIS4 proposent une segmentation fine des différentes couches de PB. La PB future a un statut particulier : intégrée de fait dans l’engagement envers les assurés au niveau des provisions ; sa capacité d’absorption des chocs est prise en compte en déduction de l’exigence de capitaux propres. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 38 4. Autres points importants 2. Participation aux bénéfices Sa modélisation effective nécessite un modèle qui reproduit : les intérêts techniques ; les contributions ; les dotations/reprises à la PPE ; les incorporations aux contrats. Sachant : qu’en amont, les bénéfices financiers sont pilotés par la modélisation de la réalisation de plus-ou-moins values latentes ; qu’en aval, les taux de revalorisation impactent les rachats. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 39 4. Autres points importants 2. Participation aux bénéfices En pratique, certains mécanismes peuvent poser problème notamment du fait de la non prise en compte des affaires futures : respect de la règle des 8 ans pour la PPE ; taux de revalorisation invraisemblables. Par ailleurs, l’incertitude autour de la PB technique est rarement modélisée en pratique. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 40 Conclusion L’évaluation des provisions est une étape fondamentale qui conditionne l’intégralité du processus (bilan, SCR, MCR). Sur le plan opérationnel, il est urgent : de se doter de modèles de projection ; de construire des hypothèses best estimate (cadences de règlement, tables de mortalité/arrêt de travail, etc.) ; de cartographier son portefeuille eu égard à la problématique des primes futures. Un travail plus conséquent est nécessaire dès lors que l’on dispose de contrats d’assurance vie participatifs. EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Page 41 Contacts Frédéric PLANCHET Pierre THEROND [email protected] [email protected] ISFA Université Claude Bernard – Lyon 1 50, avenue Tony Garnier F-69007 Lyon WINTER & Associés Bureau de Paris 43-46 avenue de la Grande Armée F-75116 Paris +33-(0)1-45-72-63-00 EFE – Les menaces de Solvency II – 1er décembre 2008 Bureau de Lyon 18, avenue Félix Faure F-69007 Lyon +33-(0)4-37-37-80-90 Page 42