Les racines du mal

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Les racines du mal
Les racines du mal
Qui en veut à Andrée Mathie pour lui détruire, de nuit, son
verger ? L’Hérimoncourtoise a déposé plainte
Des arbres détruits avec un produit corrosif, des branches cassées : presque toutes les nuits,
Andrée Mathie subit des dégradations dans son jardin-verger. Photo Lionel VADAM
C’est comme si une mini-tempête avait soufflé sur les 6 hectares qui entourent la grande bâtisse en pierres, située rue de
l’Étang à Hérimoncourt. De loin, les dégâts semblent dérisoires. Le jardin d’Andrée Mathie, 85 ans, a le charme d’un
petit parc sauvage où la verdure déborderait sur les dalles et les allées. De près, la vision est moins paradisiaque. Elle est
même déplorable. Tous les arbres, toutes les plantes sont abîmées. Un noisetier aux feuilles jaunies s’affaisse sur luimême : « Regardez, quelqu’un a creusé un trou dans l’écorce pour que le produit corrosif atteigne le vaisseau qui
transporte la sève », indique l’octogénaire. Par endroits, les branches des mirabelliers, pruniers, framboisiers sont
pourries : « Certains ont séché en une ou deux nuits. Tous les matins, je constate de nouvelles dégradations. Ça dure
depuis cinq ans mais depuis deux mois, c’est quotidien. Quelqu’un détruit mon verger et mon jardin en pulvérisant un
produit comme de l’insecticide (ou de la soude ?) sur les végétaux. Je suis obligée de jeter les confitures, elles
pourrissent trop vite », déplore la dame face à un imposant cerisier squelettique qui ne donne plus aucun fruit.
« On ne me fera pas partir d’ici »
L’Hérimoncourtoise dénonce d’autres méthodes employées : « Mes arbres ne tiennent plus droit. Ils tombent, des
branches sont arrachées. Une personne s’évertue à les plier, à mon avis avec un treuil ». À quelques mètres, un pommier
a été déraciné. Andrée Mathie montre des pivoines dont il ne reste que les feuilles : « Chaque bouton a été enlevé pour
que les plantes ne fleurissent plus ». Seul le buddleia (arbre à papillons) offre encore quelques fleurs violettes odorantes.
Le rosier grimpant le long de la véranda agrémentée d’une décoration en fer forgé est régulièrement écrasé : « Mais il
repousse toujours », parvient à sourire Andrée Mathie.
Catastrophée et scandalisée par ces délits répétitifs, l’habitante a déposé plainte plusieurs fois : « Il y va aussi de ma
santé, de celle de ma famille. On pourrait s’empoisonner. Les gendarmes sont venus. J’ai fait dresser un constat
d’huissier. J’ai une marge de manœuvre limitée. On ne peut pas expertiser les arbres. Neuf cents produits peuvent être
utilisés… Ce dont je suis sûre, c’est que l’auteur agit les nuits, discrètement. De toute manière, comme nous sommes
trois femmes à vivre ici, on ne peut pas intervenir. Il me faudrait un maître-chien », glisse-t-elle.
Pourquoi un tel acharnement ? Andrée Mathie a sa petite idée sur la question : « Je pense que l’on convoite ma maison.
Mais je ne céderai pas. On ne me fera pas partir. Cela fait 200 ans que ma famille (Jacotey) habite à Hérimoncourt.
Cette maison appartenait à mes grands-parents. Et même si cette rue était baptisée « rue des cols blancs », mes aïeux ont
toujours travaillé la terre, les plantes, les vergers. J’ai été élevée ici. Les femmes de ma famille brodaient, cousaient,
tricotaient. On sait tout faire ».
L’octogénaire a passé des milliers d’heures dans son jardin depuis son retour de Paris, en 1997 : « Il n’y avait rien. J’ai
tout planté. Je l’ai toujours bien entretenu. Quand je vois le résultat, j’ai mal au cœur. J’entends aussi que la terre ne
peut plus nourrir les milliards d’habitants qui vivent dessus. Et certains s’amusent à piétiner ce que donne la nature.
Quel gâchis sur le plan environnemental ! », s’insurge la retraitée.
Aude LAMBERT

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