Accompagnement en ligne - La Ligue de l`enseignement

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Accompagnement en ligne - La Ligue de l`enseignement
Accompagnement en ligne
Un outil à maîtriser
Beaucoup d’espoirs, fondés sur les possibilités offertes par l’accompagnement en ligne, ont été
déçus. Quelle leçon en tirer ? Les instruments du e-learning ne sont qu’un outil dans un système.
C’est un bon outil, mais on ne saurait tout fonder sur un seul outil.
Ces dernières années, on a vu apparaître des propositions de soutien ou d’accompagnement
scolaire en ligne. Leurs ambitions sont diverses. Daskoo.org présente par exemple comme le
premier site de partage de cours, sur le modèle de la communauté. Destiné à l’origine aux
étudiants, il s’adresse aussi aux élèves des lycées.
Autre modèle « communautaire », Teacheo permet aux élèves et aux professeurs de se
rencontrer en ligne, avec des interactions qui ne se limitent pas à la transmission de savoir, mais
offrent aussi la possibilité de se payer et se noter. Différentes fonctionnalités sont utilisées : chat
audio ou vidéo, fonction tableau blanc, partage d’exercices et de PowerPoint, outils de partage,
enregistrements de sessions. Kemal El Moujahid, l’un des deux fondateurs du site, pointe
l’impact sur les inégalités, en se faisant l’avocat du diable : « Va-t-on avoir d'un côté les foyers
aisés dotés d'un nouvel avantage, et de l'autre, les ménages plus modestes laissés de côté par le
progrès ? » Et de répondre que comme beaucoup d'innovations, c'est l'utilisation qu'on en fait
qui apporte une réponse. Or, explique-t-il, lorsqu'il s'appuie sur des modèles communautaires,
Internet peut être un véritable facteur de réduction des inégalités, notamment en favorisant un
ajustement au plus juste des prix pratiqués, sans l’opacité des agences traditionnelles. Il pointe
également le décloisonnement géographique permis par Internet. Il se flatte enfin d’avoir créé
« un système plus équitable où aucune commission n'est prélevée sur les revenus des
professeurs particuliers, souvent des étudiants du supérieur qui cherchent à financer leurs
études » ; tout en admettant que la question de l'équipement des ménages doit être posée.
On ne peut s’empêcher cependant de penser que si ces modèles peuvent aider de bons élèves qui
ne bénéficieraient pas d’un environnement optimal, leurs limites sont évidentes si l’on considère
leur capacité à s’attaquer aux vraies questions, celles qui touchent aux inégalités et aux élèves les
plus en difficulté.
À cet égard, le site Paraschool.com offre des possibilités plus intéressantes. S’inscrivant dans une
logique d’accompagnement plus que de soutien scolaire proprement dit, il propose
explicitement une démarche d’aide à la remédiation.
Il insiste ainsi sur les interactions, en associant étroitement les parents (le responsable légal
dispose d’un compte pour suivre les progrès de son enfant) mais surtout en évitant une logique
de consommation « à l’heure » ou à la prestation, au profit d’abonnements. Il vise aussi à entrer
dans la classe et à faire participer les enseignants, constituant ainsi une plateforme pédagogique
intégrée, dans une logique de décloisonnement du temps scolaire.
Les démarches les plus convaincantes sont ainsi celles qui s’articulent le plus étroitement avec le
travail mené à l’école, et non en concurrence avec elle. Au total, les plateformes de e-learning
peuvent constituer une voie intéressante pour renouveler le soutien scolaire, mais elles
s’écartent assez nettement des logiques d’accompagnement scolaire. Elles restent peu
collectives, restent fondées sur une confrontation aux savoirs scolaires, et ne se donnent guère
les moyens de prévenir le décrochage toujours probable des enfants.
Dans ce contexte la première difficulté confirmera aux enfants en difficulté leur « nullité ». Ce
problème, tous les enseignants le connaissent, et c’est sans doute l’un des aspects les plus
passionnants de ce métier – l’un des plus difficiles, aussi. Dans le cas d’une action à distance, où il
est spécialement difficile de prévenir le découragement ou pour en repérer les premiers signes,
cette fragilité peut se révéler fatale et dans ce cas la tentative risque d’aggraver les difficultés de
l’élève. C’est là, sans doute, la principale faiblesse du e-learning. C’est donc un outil imparfait,
voué à s’insérer dans un système qui corrigera ses imperfections ou réduira leur impact.

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