Des interactions langagieres efficaces pour aider l`enfant a
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Des interactions langagieres efficaces pour aider l`enfant a
Les schèmes sémanticosyntaxiques dans le processus interactionnel d’acquisition Journée d’étude Linguistique de l’acquisition du langage oral et écrit : retour sur des questions théoriques samedi 19 Novembre 2011 Emmanuelle Canut Nancy Université – ATILF & AsFoReL Martine Vertalier Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 - CLESTHIA & AsFoReL Une conception sociale du langage Le langage : une fonction biologique et sociale. La fonction langage : capacité initiale de penserparler L’actualisation de la fonction langage permet l’accès à l’abstraction Développement du langage et de la pensée indissociables et interdépendants Sans le soutien du langage [la pensée] est incapable de se développer (Wallon, 1945). Ce n'est pas l'activité mentale qui organise l'expression, mais au contraire c'est l'expression qui organise l'activité mentale, qui la modèle et détermine son orientation (Volochinov/Bakhtine, 1929/ 1977). Une conception sociale du langage Le langage : une fonction, pas un outil, un instrument ? ◦ Benveniste : Parler d’instrument , c’est mettre en opposition l’homme et la nature. La pioche, la flèche, la roue ne sont pas dans la nature. Ce sont des fabrications. Le langage est dans la nature de l’homme qui ne l’a pas fabriqué. (…) Nous n’atteignons jamais l’homme séparé du langage et nous ne le voyons jamais l’inventant. (…) C’est un homme parlant que nous trouvons dans le monde, un homme parlant à un autre homme, et le langage enseigne la définition même de l’homme (« De la subjectivité dans le langage », Problèmes de linguistique générale 1, 1966, p. 259) ◦ J.-P. Bronckart : En un sens, ce rejet de la conception du langage comme instrument n’est qu’une conséquence logique de l’argument qui précède : si le langage est constitutif de l’humain, il ne peut dès lors constituer une sorte de ressource qui serait mise à sa disposition secondairement, ce qui implique que cet humain serait antérieurement, ou primairement, constitué sur d’autres bases. (…) Mais si cette thèse est sans nul doute recevable au plan phylogénétique, elle paraît bien plus discutable au plan de l’ontogenèse (…) . Les humains intériorisent le langage « ce qui donne naissance à des ressources psychiques sémiotiques (…) qui peuvent ensuite être ré-exploitées, d’une part dans la gestion des conduites et dans le cadre des apprentissages sociaux évoqués, d’autre part dans les productions langagières propres ; et dans les deux cas, ces ressources langagières constituent bien, en synchronie, des « instruments psychologiques », au sens attribué par Vygotski à ce syntagme. (« Genres de textes, types de discours et « degrés de langue ». Hommage à François Rastier », Texte inédit prononcé au Deuxième congrès international d’interactionnisme socio-discursif, Lisbonne, 10-13 octobre 2007). ◦ V. Descombes : Le contenu mental de quelqu’un dépend de son histoire et de ses repères culturels (La denrée mentale, p. 312) Une conception socio-interactionniste de l’apprentissage La mise en fonctionnement du langage : l’apprentissage, dépendant des relations avec l’entourage ◦ L’enfant naît dans un monde déjà « parlé et parlant » (Merleau-Ponty, 1945). ◦ Son langage s’actualise dans une langue, celle parlée par son entourage. Son langage ne se réalise pas dans le « standard » des grammaires Apprendre à parler pour ensuite apprendre à lire et à écrire Réflexion initiale de Laurence Lentin (1971/1973/1975) ◦ Enjeu scolaire et social de l’apprentissage du langage pour l’accès à l’écrit ◦ Postulat : penser-parler-lire-écrire sont des activités cognitivo-langagières voir Debaisieux et Vertalier sur les rapports oral-écrit et Bronckart pour le lien avec la notion de genres de discours ◦ Premières observations : repérage de différences langagières entre les enfants d’école maternelle entre 3 et 6 ans Observation de différences entre les productions langagières des enfants (1) Dès 3 ans (narration) ◦ E- il [la] mange les des des des après il a (indistinct) après il a chauffé là après après m- maman elle a dit (indistinct) chauffer là après il a dit (indistinct) p(l)us chauffer là ◦ E- une goutte est tombée sur son museau et il court il saute il aboie quand une goutte d'eau tombe sur son museau Sur quoi portent les différences ? ◦ Sur l’organisation/la structuration du discours Linéarité ≠ hiérarchisation des actions dans le temps L’ordre de la pensée n’est pas donné par les événements, il est à réaliser mentalement. (Henri Wallon : De l’acte à la pensée, 1942) Observation de différences entre les productions langagières des enfants (2) Dès 3 ans (conversation) A. demande à M. (3 ans 5 mois) de se moucher. M. montre sa poche vide et se dirige vers la boîte de mouchoirs dans la classe en criant mouchoi(r) mouchoi(r ) A. demande à J. (3 ans 1 mois) un mouchoir. J. répond : z’ai tout pris dans le paquet pour me moucher pa(rce) que z’ai le nez qui coule Sur quoi portent les différences ? ◦ Utilisation du para-verbal pour l’intercompréhension vs utilisation du seul langage pour être explicite Observation de différences entre les productions langagières des enfants (3) Des différences encore à 5-6 ans (narration) Y- la mère il a dit que euh t(u) as t(u) as bien dormi et i(l) répond ce petit garçon i(l) dit oui et i(l) dit t(u) as j(e) veux jouer un (pe)tit peu à Zorro euh et après j(e) veux vite fait me euh avant de manger euh de Zorro (…) i(l) fi- vite fait mange les tartines et va vite fait te man- euh bois ton chocolat L - alors Ludovic décide de monter au deu- deuxième étage et il frappe trois coups comme il fait d'habitude et et une toute petite petite voix répond ah c'est toi mon Ludovic ? entre vite alors Ludovic entre il crie un grand il crie un grand coup il crie très fort en voyant que Madame Adélina est tombée et euh et Madame Adélina essaie de faire rire Ludovic tu vois j'ai voulu sauter comme quand j'étais petite eh bien je suis tombée de mon lit Sur quoi portent les différences ? ◦ Sur la structuration du discours : Y- Constructions simples et essais de constructions complexes (discours indirect) L - multiples variantes langagières maîtrisées dont constructions complexes : comparatives, temporelles (quand, gérondif), infinitives Des différences que l’on peut retrouver au-delà de l’école primaire… Boimare (2009) : 15% des élèves au collège Sont dans l’incapacité d’enchaîner deux arguments pour défendre une idée, et donc de s’appuyer sur leur pensée verbale pour apprendre. Première thèse : parler n’est pas seulement communiquer Communiquer en situation : indispensable mais non suffisant à une production construite et explicite maximale ◦ Nécessité de pouvoir évoquer des événements situés hors de la situation d’interaction immédiate Parler : utiliser une diversité de constructions linguistiques en fonction du genre de discours, de la situation et de l’interlocuteur Une définition : Un enfant sait parler quand son fonctionnement langagier lui permet d’énoncer explicitement au moyen du seul langage verbal une pensée ou un enchaînement de pensées en ou hors situation. (Lentin 1971, repris dans Parler, penser, lire, écrire, 1998/2009) Deuxième thèse : apprendre à penserparler est un processus dynamique non pas des répétitions de modèles de structures déjà entendues (des « leçons de langage » à partir de règles de grammaire) ◦ mais un travail non conscient d’hypothèses sur le fonctionnement de la langue (Wallon : imitation novatrice). Non pas une « imprégnation », ni un « bain de langage », ◦ mais un fonctionnement cognitif complexe s’inscrivant dans une interaction langagière adaptée en situation, ancrée dans l’expérience de l’enfant Troisième thèse : apprendre à parler c’est apprendre à tenir un discours Mise en fonctionnement cognitivo-langagière : actualisation par le fonctionnement sémantico-syntaxique de la langue ◦ La syntaxe étaye le fonctionnement de la pensée Mise en œuvre de la pensée abstraite, conceptualisation ◦ La syntaxe permet l'organisation des discours Mise en œuvre de l’organisation des relations logiques entre les événements pour les situer dans le temps et l’espace, évocation d’événements passés ou futurs, plus haut degré de décontextualisation Extension (allongement) et complexification (syntaxique) des énoncés Liens entre aspects structuraux (cohérence, cohésion, organisation syntaxique) et fonctionnels (informer, raconter, décrire, expliquer, argumenter…) Pourquoi des différences langagières entre les enfants ? L’explication des différences n’est pas (pas seulement) liée à une question de maturation cognitive ◦ Selon la stimulation en milieu familial et scolaire, l’enfant peut s’approprier des ressources langagières plus ou moins étendues. Selon les adultes, les propositions langagières peuvent être plus ou moins ajustées aux besoins de l’enfant, lui permettant ou non de faire de nouvelles hypothèses sur le fonctionnement de la langue. Le rôle des interactions adulte-enfant dans l’apprentissage du langage Une condition de l’apprentissage : l’étayage ◦ Travaux fondateurs de Bruner (1983) dans la lignée de Vygotski (1934) Rôle des interactions adulte-enfant (0-3 ans) pour le développement de la dimension pragmatique du langage ◦ Travaux fondateurs de Lentin (1971-73/198489/1995-98) Rôle des interactions adulte-enfant (3-6 ans) pour le développement de la dimension syntaxique du langage Hypothèse des schèmes sémantico-syntaxiques créateurs Schèmes sémantico-syntaxiques créateurs (1) Définition (L. Lentin,1971) ◦ Les schèmes sémantico-syntaxiques créateurs ne sont pas des modèles, mais des stimulations mentales de mise en relation d'éléments verbalisables. Ce fonctionnement mental permet à l'apprenant, dans d'autres circonstances, de s'approprier pour son propre système langagier un fonctionnement dont on lui a donné l'expérience L’enfant capte des raisonnements verbalisés en situation par l’adulte, qu’il peut réutiliser/exploiter dans d’autres situations et contextes linguistiques. Aspect créateur ◦ renvoie à la question du sens et donc de la compréhension Aspect génératif ◦ renvoie à la question de l’autonomie : produire des énoncés jamais entendus auparavant Schèmes sémantico-syntaxiques créateurs (1’) Caractère non conscient du fonctionnement des schèmes ◦ Kant : Le schème (transcendantal) => représentations mentales, intermédiaires entre les phénomènes sensibles (l’intuition) et les catégories de l’entendement pur (représentations intellectuelles). (Critique de la raison pure, 1781) ◦ Humboldt : « forme interne de la langue (innere sprachform) » : [si nous considérons à présent la réaction de la langue sur l’esprit, la forme grammaticale véritable,] lors même que l’attention ne se porte pas à dessein sur elle, produit et laisse l’impression d’une forme, et favorise ainsi le développement de la pensée abstraite (De l’origine des formes grammaticales, 1821/1969, Ducros, p. 51) Schèmes sémantico-syntaxiques créateurs (1’’) Jespersen : Expressions figés et expressions libres (La philosophie de la grammaire, 1924/1971) ◦ Alors que la mémoire, simple répétition de ce que l’on a jadis appris, suffit à la manipulation des expressions figées, les expressions libres exigent un autre type d’activité mentale ; il faut chaque fois que le locuteur les recrée en choisissant les mots qui correspondent à une situation donnée. (…) Ce qui importe, c’est qu’en prononçant cette phrase il suit toujours un certain schéma. (…) Comment de tels types grammaticaux en viennent-ils à exister chez le locuteur ? On n’enseigne pas à un enfant très jeune la règle selon laquelle il faut placer le sujet en tête, ou celle qui veut que l’objet indirect précède l’objet direct ; et pourtant, sans qu’il lui soit rien enseigné de la grammaire, il abstrait, à partir des innombrables phrases qu’il a entendues et comprises, une certaine idée de leur structure, idée assez précise pour lui permettre de construire ses propres phrases […] (p. 15-16) Schèmes sémantico-syntaxiques créateurs (2) Proximité avec la définition générale de schème en psychologie (+ champ des sciences cognitives) ◦ Organisation, structure d’ensemble d’un processus issu de la reproduction d’expérience et généralisable d’une situation à une autre ◦ Intermédiaire entre l’image (la représentation) et le concept abstrait ce qui fait que c’est intégré à un fonctionnement et que cela devient une abstraction. Schèmes sémantico-syntaxiques créateurs (2’) ≠ schèmes verbaux chez Piaget (1945) Intermédiaires entre les schèmes sensori-moteurs et les schèmes conceptuels (La formation du symbole chez l’enfant) Mais volonté de prendre en compte la dimension sociale et de tendre à une explication du processus linguistique d’appropriation Schèmes sémantico-syntaxiques créateurs (3) Proximité avec la notion de schèmes d’expérience en sociologie phénoménologique Construction et réorganisation des connaissances/ savoirs à travers l’expérience, dans un contexte de sens, et dans les interactions sociales (intersubjectives) Schütz (1998) Eléments de sociologie phénoménologique ◦ La typification de la connaissance acquise, c’est-à-dire des conditions sous lesquelles les problèmes peuvent-être considérés comme suffisamment résolus, et les horizons comme suffisamment explicités, est déjà dans une certaine mesure socio-culturellement co-déterminée. Non seulement le vocabulaire, mais également la structure syntaxique du langage commun familier, la « forme interne du discours » (innere Sprachform) comme Wilhelm von Humboldt l’a nommé, contiennent le système de typification et donc les pertinences interprétatives qui sont considérées par la communauté linguistique comme testées et vérifiées, et conséquemment comme données au-delà de tout questionnement, comme approuvées et valides jusqu’à nouvel ordre, et qui dans le procès d’éducation et d’apprentissage sont donc transmises aux nouveaux membres du groupe. (p. 122) Les schèmes d’expérience, enfin, sont acquis par l’acteur au cours de son parcours biographique. Pour une grande part, ils ne résultent pas d’un procès d’invention ou de découverte dans son flux d’expérience, mais d’un procès d’acquisition de savoirs ‘construits intersubjectivement, conservés historiquement, transmis socialement’. (…) Les schèmes d’expérience médiatisent l’articulation des visées intentionnelles des acteurs. Sédimentés dans les réserves d’expérience comme des empreintes d’expérience passées, ils sont ré-activés dans le travail de configuration des situations comme des matrices d’expériences nouvelles. Extrait de CEFAÏ D., « Type, typicalité, typification. La perspective phénoménologique », Raisons pratiques : épistémologie, sociologie, théorie sociale, n° 5, Paris, E.H.E.S.S., 1994, p. 114. Schèmes sémantico-syntaxiques créateurs (4) Proximité avec les travaux sur les interactions exolingues ◦ Processus de grammaticalisation dans les interactions entre locuteur natif – apprenant de L2 Notion de « Séquences Potentiellement Acquisitionnelles » (B. Py / T. Jeanneret) Mais en linguistique de l’acquisition volonté d’intégrer le rôle constitutif du langage adressé à l’enfant ◦ Vocabulaire + syntaxe ◦ dans des corpus longitudinaux Contrairement à une représentation courante, le discours ne suit pas l’acquisition (au sens où le sujet devrait d’abord construire des moyens linguistiques, puis ensuite seulement les appliquer à des tâches de communication) mais il lui est étroitement lié. En d’autres termes, le discours ne peut pas être conçu comme une simple mise en œuvre de moyens linguistiques qui lui préexisteraient (…) On peut envisager les choses de la manière suivante : moyens linguistiques désigne un état intermédiaire dans le processus de grammaticalisation, à miparcours entre la simple prise d’un élément nouveau (par imitation d’une séquence discursive, ou par consultation d’un dictionnaire ou d’un manuel) et sa saisie, c’est-à-dire son intégration à la compétence linguistique (…) C’est ainsi que l’acquisition d’un nouvel élément linguistique présent dans le discours implique qu’il fasse l’objet d’une opération de focalisation et de décontextualisation. C’est en effet seulement dans la mesure où il est dégagé de son contexte d’occurrence qu’il devient disponible pour de nouveaux emplois, et qu’il est prêt à prendre place dans le système des connaissances intermédiaires (interlangue) (…) Nous postulerons par hypothèse l’existence d’un cheminement prototypique qui se déroulerait de la manière suivante : d’abord la prise consiste pour l'apprenant à s'approprier, grâce à un effort d'imitation et de répétition, une base, une sorte de matière première verbale sur laquelle il puisse, dans un deuxième temps, effectuer une opération de décontextualisation ; celle-ci rend ensuite le nouvel élément disponible pour la suite du travail de verbalisation, ceci grâce à une opération de recontextualisation. B. Py, « Interaction exolingue et processus d'acquisition », Cahiers de l'ILSL, n° 7, 1995, p. 159-160 et 171. Schèmes sémantico-syntaxiques créateurs (5) Lien avec les travaux de L.S.Vygotski (sociointeractionnisme) ◦ Effet catalyseur de l’apprentissage du langage : si les offres de l’adulte comportent des fonctionnements langagiers adaptés c’est-à-dire proches des capacités de l’enfant si l’adulte s’appuie sur ce que l’enfant maîtrise déjà (niveau actuel), mais fait des propositions excédant légèrement ce niveau (niveau potentiel) Transposition de la notion de Zone Proximale de Développement On utilise l’interaction (ou la collaboration) avec un enfant pour évaluer sa Zone de développement proximal (subjective), parce que cela lui donne l’occasion de se livrer à l’imitation, grâce à laquelle on va identifier les fonctions psychologiques en cours de maturation mais encore inadaptées à une performance indépendante. S. Chaiklin, 2003/2009, « La place de la Zone de développement proximal dans l’analyse des apprentissages et de l’enseignement chez Vygotski », in Vygotski et l’éducation. Apprentissages, développement et contextes culturels, p. 51. Chaque fonction psychique supérieure apparaît deux fois au cours du développement de l’enfant : d’abord comme activité collective, sociale et donc comme fonction interpsychique, puis la deuxième fois comme activité individuelle, comme propriété intérieure de la pensée de l’enfant, comme fonction intrapsychique L.S.Vygotski, 1935/1985 « Le problème de l’enseignement et du développement mental à l’âge scolaire » in B. Schneuwly et J.P. Bronckart, Vygotsky aujourd’hui, Delachaux et Niestlé, p. 111. Traces de « schèmes sémanticosyntaxiques-créateurs » : exemple (1) Appropriation des relatives que/qui chez Sabrina entre 4 ans 2 mois et 5 ans 5 mois Essais dans des reprises immédiates Corpus 11 (4 ans, 2 mois) A10- oui ils attendent le car ils attendent le car qui va les emmener au grand magasin S11- il attend le car que i(l) va ramener au grand magasin Corpus 16 (4 ans 6 mois) A8- oui y a des gouttes d’eau qui viennent sur le visage de Julien et il aime bien ça S10- il aime bien ça (…) et ,, il ai/ i(l)/ i(l)/ il aime bien marcher sous les gouttes qu’i(l) (ou qui ?) pleut/ qu’i(l) (ou qui ?) pleut Occurrences dans des reprises différées (construction incomplète) Corpus 17 (4 ans 8 mois) A29- oui il mange/ S29- sa/ la tartine qu’i(l)/ qu’a (p)réparée maman Occurrences attestées en reprise immédiate Corpus 23 (5 ans et 5 mois) A44- non il sort du camion un canapé qui est très lourd S46- il sort du camion un canapé qui est très lourd Occurrences attestées en reprise immédiate avec variation du Schème verbal Corpus 24 (5 ans 5 mois) A17- (…) sur le trottoir d’en face elle rencontre un petit copain qui lui fait/ S17- qui court ! A18- oui qui va à la boulangerie en lui faisant un signe de la main (…) Occurrences attestées en reprise différée. Première autonomie des verbalisations A60- oui oui la maman avait donné un portemonnaie à Anissa avec de l’argent dedans pour qu’elle achète du pain S63- oui après elle voit un p(e)tit garçon qui lui fait coucou à elle Traces de « schèmes sémanticosyntaxiques-créateurs » : exemple (2) Appropriation de la construction pour que chez Yan entre 5 ans et 6 ans 2 mois ◦ Essais dans des reprises différées (dont certains en combinatoire) Yan : 5 ans 7 jours A8- il lui dit merci pourquoi ? Y8- pour qu’i(l) fait un bisou il dit merci Bob […] A39- et une cuillère pour mélanger Y38- mélanger pour qu’on mange A40- pour mélanger Y39- pour mélanger qu’on mange Yan : 5 ans 21 jours A10- (…) il n’arrive pas à fermer son pantalon parce qu’il a grandi Y11- (…) faut pas grandir ! (par)ce que faut être petit pour faut pas être grandir Occurrences attestées en reprise immédiate et différée dans le même corpus. Première autonomie des verbalisations Yan : 5 ans 11 mois 8 jours A30- en deux files écartées Y30- et deux files écartées et Vincent met sa voiture bien pour pas qu’il arrive un accident (…) A33- pour pas qu’il y ait d’accident Y33- pour pas qu’il y ait d’acci/ d’accident Yan : 6 ans 19 jours Y36- (…) elle renverse du sirop et de l’eau/ A- mm/ Y37- pour pas qu’i(l) (indistinct) c’est son papa l’a acheté Yan : 6 ans 2 mois 9 jours A5- et oui pa(r)ce que tu vois il y a une petite framboise qui est dessinée sur le tube Y5- (…) Anaïs appuie un tout p(e)tit peu pour que ça sort Traces de « schèmes sémanticosyntaxiques-créateurs » : exemple (3) Appropriation de la construction du discours indirect (dire que/dire de) entre 5 et 6 ans chez Shanon 1- Reformulation par l’adulte de discours direct en discours indirect Corpus 6 (5 ans 11 mois 1 jour) Sh19- après t(u) as/ t(u) as euh bien bagarré les/ le/ le nours et le/et le heu A20- Christophe dit au chien qu’il a bien joué avec l’ours et le panda 1’- Apparitions d’essais de discours indirect avec insertion de discours direct dans la forme du discours indirect Corpus 6 (5 ans 11 mois 1 jour) Sh28- i(l) dit que que tu vas faire la douche Corpus 10 (6 ans 5 jours) Sh16- euh le chien dit que s’il te plaît je peux bagarrer avec toi ? 2- Reformulation par l’adulte des essais de l’enfant dans l’interaction immédiate et différée Corpus 9 (5 ans 11 mois 22 jours) Sh1- la mère il a dit que euh t(u) as bien dormi ? Sh6- je veux que les/ Christophe i(l) dit que/ que viens on va manger A10- il lui dit d’aller manger 2’- Premières occurrences attestées en reprise immédiate Corpus 15 (6 ans 1 mois 10 jours) A10 – elle dit que Pilou a disparu Sh11 – i(l) dit que ,, Pilou a disparu 3- Alternance conjointe d’essais et de reprises immédiates Corpus 20 (6 ans 3 mois 18 jours) Sh8 - i(l) dit à maman que, , euh ma / mes piles i(ls) sont i(ls) marchent pas du tout A8 -Oui, il dit que les piles ne marchent pas. Sh9 - i(l) dit à maman que les piles i(ls) (=elles) marchent pas Sh10 – e(lle) dit que voilà ! J(e) vais/ je vais appuyer trop fort Processus interactionnel d’apprentissage du langage : schématisation (1) Rôle fondamental des reprises par l’enfant Les reprises immédiates ne suffisent pas à l’appropriation d’un élément : long cheminement des reprises immédiates vers les reprises différées Il n’y a reprise et appropriation que si l’adulte a proposé des reformulations des tâtonnements de l’enfant Une évolution générale : des essais aux formes linguistiques stabilisées et maîtrisées (autonomes) Les essais : zone dans laquelle l’enfant est potentiellement capable de s’approprier une construction. Besoin du retour de l’adulte pour valider ses hypothèses Processus interactionnel d’apprentissage du langage : schématisation (2) Adulte : offres, reprises, reformulations situées dans une zone proche du développement langagier ◦ engendrent l’émergence des essais : amorce des schèmes créateurs, prémices d’une forme de raisonnement ◦ favorisent l’extension et la complexification des énoncés de l’enfant (et donc l’appropriation des schèmes) Parler ◦ Pas un processus linéaire, modalités propres à chaque individu, dépendant des offres langagières que l’enfant reçoit ◦ Intégration dynamique de schèmes sémanticosyntaxique Processus interactionnel d’apprentissage du langage : schématisation (3) ADULTE Offres, reprises et reformulations ENFANT reprises IDENTIQUES AVEC VARIATIONS Incomplètes Immédiates ESSAIS Complètes Différées Autonomie Maîtrise des constructions Etudier les « schèmes sémanticosyntaxiques-créateurs » A expérimenter sur la base de (grands) corpus Plusieurs raisons : ◦ Différents genres de discours pour disposer de contextes situationnels et linguistiques variés ◦ Différents interlocuteurs (en famille, semi-expérimental avec des interactions éducatives sciemment adaptées) ◦ Les essais : indices pas toujours visibles (pas toujours enregistrés) ◦ Corpus longitudinal suffisamment long et diversifié pour atteindre la fin du processus d’appropriation Mais la quantité n’est pas forcément un critère : notion de rare event (K. Nelson et al.) Rare event learning theory (Nelson & al. 2001) L’apprentissage requiert l’association délicate de conditions positives d’ordre cognitif, motivationnel, social et linguistique L'enfant peut s'approprier des éléments alors même qu'on ne les trouve que rarement dans le langage de l'adulte (effet catalyseur). Cela dépend entièrement de la manière dont ces éléments sont insérés dans le discours (contextes saillants) et font sens pour l’enfant ◦ Crucial events - the rare events that make for change - are seen as combinations of readiness by the child, in terms of prior linguistic structures in place, prior cognitive structures in place, and current, momentary, attention and processing tendencies, together with a flow of conversation which makes available in input those examples which challenge the current level of the child and do so in a way that makes attention and processing easy. (p. 52). ◦ A little of the right kind of evidence for the child’s current level is often all that is required to induce an advance to the next level (p. 48). Prouver l’existence des « schèmes sémantico-syntaxiques créateurs » ? Revient à la question : peut-on saisir le développement ? ◦ Pas possible d’atteindre l’intrapsychique. ◦ Mais on a des indices dans le fonctionnement de l’interpsychique : ruptures/points de changements/ transformations (au sens vygotskien) Revient à la question du lien entre apprentissage et développement ◦ A saisir à travers des données observables : les essais et les avancées/modifications dans le langage de l’enfant (manifestations visibles d’un phénomène psychologique) Implications pédagogiques En lien avec les programmes de l’Education Nationale (2002 – 2008) ◦ Maîtrise des variantes de la langue Implication pour l’enseignant ◦ Prise de conscience de la forme linguistique des énoncés produits par lui-même et l’enfant ◦ Offres et reformulations dans des zones potentielles de développement langagier ◦ Nécessité de l’individualisation des interactions L’apport le plus réel, le plus profond, le plus efficace, et aussi le mieux contrôlable – pour ne pas dire le seul contrôlable – viendra de l’entraînement basé sur une situation non préparée, non prévue, fortuite, sur une situation de dialogue vrai entre l’adulte et l’enfant, entre UN adulte et UN enfant. (Lentin, 1973, p. 57) les premiers essais peuvent être décevants, sembler inefficaces ; mais d’après notre expérimentation en cours, il n’y a pas d’échecs. Une sollicitation de ce genre, brève mais répétée régulièrement, ne reste pas sans effet. (Lentin, 1972, p. 134)