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LA THÉORIE DES CHAMPS CONCEPTUELS Introduction Renouvellement de la question des savoirs I. Situations, schèmes et concepts 1. Les situations a) Définition et exemples Gérard Vergnaud, psychologue, aborde la question de l ’apprentissage en tenant compte à la fois du sujet (de ses connaissances) et des savoirs constitués. La notion de situation a été définie en didactique des mathématiques, par Guy Brousseau notamment, en lui conférant une dimension affective et cognitive (voir cours sur la théorie des situations). Il s’inscrit dans la continuité des travaux de Piaget qui a dirigé sa thèse, mais il prend une distance avec la réorganisation des connaissances dans des structures logico-mathématiques générales. Chez Vergnaud, les situation désignent l’ensemble des circonstances dans lesquelles se trouve une notion mathématique. Il ne dissocie pas le savoir de son utilisation : Exemples de situations d’addition. « La connaissance rationnelle est opératoire ou n'est pas. » Finalité de la théorie des champs conceptuel Fournir des moyens pour comprendre les filiations et les ruptures entre les connaissances d ’un sujet : A. Dans la classe, il y a des garçons et des filles. B. L’infirmière a toisé les élèves, elle a dit que j’ai grandi. C. Maud est plus âgée que moi et Elsa est plus jeune que moi. -sujet enfant ou adolescent (savoir-faire et savoirs exprimés) ; -sujet adulte (contraint par des habitudes professionnelles). I. Situations, schèmes et concepts 1. Les situations I. Situations, schèmes et concepts 1. Les situations b) Les situations et l’apprentissage des notions sous-jacentes c) Analyse des situations et des problèmes qu’elles posent Deux aspects sont à prendre en compte dans l’examen des situations proposées pour l’enseignement d’une notion : L’analyse des situations conduit à négliger les informations peu ou pas pertinentes au profit de celles qui le sont (variables connues et inconnues) et des relations entre elles. -d’une part leur extraordinaire diversité pour une même notion mathématique ; -d’autre part le rôle de chacune d’elles dans la construction des connaissances des élèves à propos de cette notion. En conséquence, se pose la question de l’ordre dans lequel les situations sont proposées, de la fréquence avec laquelle on rencontre ces situations dans l’enseignement ou dans la vie courante. Cela pose aussi la question de l’enseignement à proposer pour que les élèves sachent utiliser les notions qu’ils ont apprises, y compris pour résoudre des problèmes qu’ils n ’ont pas rencontrés auparavant. Une telle analyse permet de déterminer les problèmes issus d’une situation, au-delà même de ceux qu’on rencontre dans la vie courante. Exemple : hier matin j ’ai acheté une baguette « tradition » à la boulangerie de mon quartier, elle coûte un peu plus cher que la baguette ordinaire, mais elle est bien meilleur ! J ’ai payé avec une pièce de 2 euros cette baguette à 1,20 euros, la boulangère m ’a rendu huit pièces de 10 centimes car elle n ’avait pas d ’autre monnaie. Trois problèmes issus de cette situation d’achat d’un article payé en espèce avec rendu de monnaie. I. Situations, schèmes et concepts 1. Les situations I. Situations, schèmes et concepts 2. Les schèmes d) Classes de situations a) Définition La relation entre situations et notions mathématiques n’est pas simple : il y a souvent différentes situations pour une même notion, et souvent différentes notions pour une même situation. Un schème est l’organisation invariante de la conduite d’un sujet qui permet traiter une même classe de situations. En prenant le terme de situation au sens large (comprenant à la fois les circonstances dans lesquelles se trouve une notion mathématique et les problèmes qui sont issus de cette situation) Gérard Vergnaud propose de classer les situations en fonction leur traitement : deux situations seront dans la même classe si elles appellent le même traitement. Exemple : la classe des situations où une petite collection d’objets est à dénombrer. Le traitement est le même, on « compte » les objets un par un. I. Situations, schèmes et concepts 2. Les schèmes Le schème est fonctionnel, il comporte à la fois l’organisation des gestes, des formes langagières, des opérations de pensées, des interactions sociales qui permettent de traiter une classe de situations. Exemple : le schème du dénombrement des petites collections. Ce schème repose sur différents principes : abstraction, ordre indifférent, bijection, cardinalité... Ces principes sont des concepts (bijection, cardinalité) ou des théorèmes (abstraction, ordre indifférent) qui n ’ont pas besoin d’être formulés pour être utilisés : ce sont des concepts-en-acte et des théorèmes-en-acte. I. Situations, schèmes et concepts 2. Les schèmes b) Composantes des schèmes c) Efficacité des schèmes On distingue quatre éléments organisateurs des schèmes : Les erreurs viennent d ’une mauvaise adaptation d ’un schème à la particularité de la situation (problème d’inférence), d ’une mobilisation d ’un schème inadapté à la situation (défaut de conceptualisation), d ’un théorème-en-acte faux, etc.. -le ou les buts, les sous-buts et les anticipations ; -les règles d’action, de prise d’information et de contrôle, dont la fonction est de générer la conduite ; -les invariants opératoires (concepts-en-acte, théorèmes-en-acte) qui permettent de sélectionner l’information pertinente et de la traiter ; -les inférences en fonction des particularités de la situation rencontrée et qui s’effectuent à partir des informations et du but visé. •Exemple 1 Il y a 9 enfants dans la ronde. •Exemples 2 et 3 35 - 17 22 •Exemple 4 1/2 + 1/3 = 2/5 Problème : Maud a 4 ans de moins que Raphaël. Maud a 17 ans. Quel est l ’âge de Raphaël ? Réponse : Raphaël a 13 ans. I. Situations, schèmes et concepts 3. Les concepts I. Situations, schèmes et concepts 3. Les concepts a) Définition des concepts b) Exemple : le concept d’addition Dans une étudie didactique ou psychologique, Vergnaud propose de ne réduire les concepts ni à leurs définition, ni à leur utilisation : •Cette opération est définie mathématiquement en fonction des éléments sur lesquels elle porte. « Un concept ne se peut pas se réduire à sa définition, du moins si l’on s’intéresse à son apprentissage et à son enseignement » Exemple : Si les entiers naturels sont définis comme des cardinaux, l’addition des entiers naturels se définit par la réunion d’ensembles disjoints. « Un concept-en-acte n’est pas un concept, un théorème-en-acte n’est pas un théorème » Vergnaud définit un concept par trois ensembles : -La référence : l’ensemble des situations qui donnent du sens au concept ; -Le signifié : l’ensemble des invariants sur lesquels repose l’efficacité des schèmes ; -Le signifiant : l’ensemble des formes langagières et non langagières qui permettent de représenter symboliquement le concept, ses propriétés, les situations, et les procédures de traitement. II. Les champs conceptuels 1. Des modèles différents pour analyser les problèmes L’analyse d’une situation ou d’un problème convoque des modèles différents suivant les objectifs de l’analyse (linguistique, logique, etc.), la théorie des champs conceptuels donne un rôle essentiel aux concepts eux-mêmes. Problème 1 : Maud a joué aux billes à la récréation de 10h avec son amie Claire. Elle en a perdu 8. Avec combien de billes Maud repartira-t-elle sachant qu ’elle est arrivée avec 24 billes ? Problème 2 : Maud a joué au billes. Elle en a perdu 8, il lui en reste 16. Combien en avait-elle ? Une analyse linguistique et une analyse des schèmes de traitement de la situation mettent en relief des complexités différentes, elles ne conduisent pas toujours aux mêmes conclusions quant à la difficulté des problèmes. •Dans la théorie de Vergnaud, le concept d’addition est défini par : -l’ensemble des situations d’addition (partie/tout, report de longueur, etc.) ; -l’ensemble propriétés de l’addition, y compris celles qui sont sousjacentes aux techniques (ordre indifférent des nombres, mais pas des chiffres, effet sur l’égalité, etc.) ; -l’ensemble des formes langagières et non langagières (les termes plus, somme, ajouter, retenue, etc., les expressions « je pose », « je retiens », etc., les symboles +, (), = , etc.) II. Les champs conceptuels 2. Filiations entre connaissances et champ conceptuel Une situation et les problèmes qui en sont issus ne portent jamais sur une seule notion mathématique. En conséquence, certaines notions sont liées dans les processus d’enseignement et d’apprentissage. Problème 1 (numération de position et cardinal d ’un ensemble) : Nadia a 18 euros. Elle a un billet de 10 et le reste en pièces de 1 euro. Combien a-t-elle en pièces ? Problème 2 (mesure d ’une grandeur, transformation et transformation inverse) : Bachir a grandi de 18 cm en un an. Il mesure maintenant 1,75 m. Quelle était sa taille l ’an dernier ? La notion de champ conceptuel permet d’aborder ensemble les situations et les concepts, elle est définie pour un ensemble de concepts par : -l’ensemble des situations portant sur ces concepts ; -ces concepts et les théorèmes permettant de résoudre les problèmes issus de ces situations. II. Les champs conceptuels III. Le sujet et la théorie champs conceptuels 2. Filiations entre connaissances et champ conceptuel 1. Catégorisation des situations d’un champ conceptuel Exemple Le champ conceptuel des structures additives recouvre : -l’ensemble des situations dont le traitement met en œuvre une addition, une soustraction ou un enchaînement de ces opérations ; -les concepts de cardinal, de mesure, de transformation temporelle de mesure, de comparaison quantifiée de mesures, de nombre naturel, relatif, d ’axe gradué, de déplacement orienté et quantifié, d’abscisse, etc. Les situations d’un même champ conceptuel sont nombreuses. La catégorisation que propose Vergnaud tient compte à la fois des structures mathématiques sous-jacentes aux situations et du développement psychologique des moyens de traiter ces situations. La catégorisation des situations du champ conceptuel des structures additives sera présentée dans le cours sur les problèmes additifs. Exemples de situations additives différenciées par Vergnaud : - « j’ai trois bonbons dans ma main, j’en rajoute deux et je la referme. Combien y a-t-il de bonbons dans ma main ? (réussite à 5 ans) -les théorèmes qui décrivent les propriétés de l’addition et de la soustraction (commutativité de l ’addition, neutralité du zéro, etc.), ainsi que ceux qui permettent de traiter des situations : - « Robert vient de perdre 5 billes, il en a maintenant 7. Combien en avait-il avant de jouer ? » (difficultés jusqu’à 8 ans) Cardinal de la réunion de deux ensemble : card (A u B) = card (A) + card (B) - card (A n B) - « Julie a joué aux billes, elle en a perdu 6 à la récréation de l’après-midi. Au cours de la journée, elle a gagné 10 billes. Que s’est-il passé le matin ? » (75% d ’échec à 12 ans) Transformation et transformation inverse : T(I) = F implique T -1 (F) = I III. Le sujet et la théorie champs conceptuels III. Le sujet et la théorie champs conceptuels 2. Le rôle des signifiants dans l’activité du sujet Langage naturel fonctions : et symbolismes particuliers 3. Le sens dans la théorie des champs conceptuels remplissent trois •Une fonction de communication Le sens d’un concept pour un sujet est sa relation aux situations et aux signifiants de ce concept, c’est-à-dire les schèmes évoqués chez le sujet par ces situations ou ces signifiants. Problème Les signifiants langagiers permettent au sujet de désigner ou de percevoir tel objet de la situation, telle relation, telle propriété, telle intention, tel but, etc. Un pâtissier a fabriqué 274 chocolats. Il prépare des paquets. Dans chaque paquet, il doit mettre 16 chocolats. Combien peut-il remplir de paquets ? •Une fonction calculatoire Démarches de trois élèves A, B et C de CM1 Les signifiants langagiers permettent au sujet de d’organiser son traitement de la situation : organiser et effectuer les calculs, conserver les résultats intermédiaires, contrôler les résultats, etc. A pose l’opération 274 u 16. B pose l’opération 274 – 16. •Une fonction d’accompagnement de la pensée C calcule 16 + 16 + 16 48 + 48 + 48 192 + 48 = 240 240 + 34 = 274 et, finalement, répond 34 paquets. Les symboles en algèbre, les figures à main levée en géométrie, les schémas en arithmétique sont autant de signifiants dont on use pour résoudre un problème, y compris dans la recherche d’une démarche efficace pour parvenir à la solution. = + 48 48 = 192