La gouvernance multi-niveaux et l`action entrepreneuriale politique

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La gouvernance multi-niveaux et l`action entrepreneuriale politique
La gouvernance multi-niveaux et l’action entrepreneuriale politique dans la
coopération transfrontalière: modélisation du processus d’innovation
Justin Lawarée1 et Florine Meunier2
Papier présenté au Congrès Mondial de la Science Politique IPSA à Montréal, Canada
Juillet, 19-24, 2014
Work in progress. Please do not cite!
Abstract : Se mouvant dans un environnement à la fois multi-niveaux et polycentrique – par
la diffusion du pouvoir de décision et par porosité des sphères publique et privée -, les
organisations publiques des États européens se doivent d’adopter une action de plus en plus
coordonnée et transversale. En outre, le cadre budgétaire rigoureux voire austère en vigueur
dans de nombreux États européens contraint le secteur public à fonctionner « mieux » avec
« moins ». Dans cette configuration, l’innovation dans le secteur public est l’un des moyens
permettant à une organisation de transformer ses pratiques et de saisir les opportunités de
développement. Parmi les différentes organisations publiques amenées à innover, les
universités constituent un objet d’étude intéressant. En effet, ces dernières sont à la fois peu
étudiées par la littérature sur l’innovation publique et à la fois le prototype même des
organisations publiques innovantes. Basée sur l’étude du cas de l’Université métropolitaine
transfrontalière, cette recherche vise à répondre à la question suivante : « Comment le
processus d’innovation, au regard de l’acteur, se produit-il dans un contexte transfrontalier et
multi-niveaux européen ?». Derrière cette interrogation, l’objectif est d’expliciter la
dynamique du processus de création d’une innovation transfrontalière. Pour ce faire, nous
examinons celui-ci à l’aune d’un modèle théorique articulant l’entrepreneuriat public et la
gouvernance multiniveaux.
Mots-clés : Entrepreneuriat public, innovation publique, Université Métropolitaine,
gouvernance Multiniveaux, gouvernance transfrontalière.
1
2
Assistant de recherche et d’encadrement, Université Catholique de Louvain, campus Mons (Belgique)
Assistante de recherche et d’encadrement, Université Catholique de Louvain, campus Mons (Belgique)
1
Se mouvant dans un environnement à la fois multi-niveaux et polycentrique – par la
diffusion du pouvoir de décision et par porosité des sphères publique et privée -, les
organisations publiques des États européens se doivent d’adopter une action de plus en plus
coordonnée et transversale. De plus, le cadre budgétaire rigoureux voire austère en vigueur
dans de nombreux États européens contraint le secteur public à fonctionner « mieux » avec
« moins ». Dans cette configuration, l’innovation dans les administrations est l’un des
moyens permettant à une organisation de transformer ses pratiques et de saisir les
opportunités de développement. C’est pourquoi, cette recherche analyse le processus
d’innovation rencontré dans une organisation publique et s’emploie à élucider les logiques
d’innovation à l’aune d’un cadre particulier : le contexte transfrontalier.
Parmi les différentes organisations publiques amenées à innover, notre intérêt s’est
porté sur celles évoluant dans le domaine des savoirs et plus précisément, sur les universités3.
En effet, ces dernières sont à la fois des objets d’étude peu étudiés par la littérature sur
l’innovation publique et à la fois le prototype même des organisations publiques innovantes.
Comme objet d’étude, les recherches menées se concentrent essentiellement sur le rôle des
fonctionnaires et/ou des décideurs politiques, sur le leadership, sur la structure et les
dynamiques organisationnelles. Dans cette perspective, l’examen d’un cas d’innovation au
sein de l’université met en évidence de nouvelles variables favorisant l’innovation publique.
En tant qu’idéal type d’une structure publique innovante4 - autonomie, mise en concurrence,
allocation du budget combinant partie fixe et partie variable, etc. -, l’analyse de pratiques
innovantes au sein de l’université esquisse les pistes d’action potentielles favorisant
l’innovation publique. Ainsi, la mise en avant de certaines pratiques, processus, services ou
caractéristiques organisationnelles enrichit d’une part, le dialogue au sein du secteur public et
d’autre part, la littérature de nouveaux cas empiriques.
Dans cette recherche, le cas étudié – la création et la conceptualisation de l’Université
métropolitaine - est plongé dans un contexte transfrontalier puisqu’il est issu d’un partenariat
entre universités belges (Kulak à Kortijk et FUCaM à Mons) et française (PRES Lille Nordde-France). L’intérêt pour l’étude d’un cas transfrontalier réside dans la nature même de la
coopération transfrontalière. Cette dernière peut être un facteur influant sur la forme et la
substance de l’innovation organisationnelle. À ce titre, les études réalisées par Marks (1992)
sur les fonds de cohésion européens renvoient à la question du multi-niveaux via les
programmes Fonds Européens de Développement Régional (FEDER) et INTERREG. Depuis
la fin des années 70, divers outils de financement européen au niveau transfrontalier ont vu le
jour. Dès 1979, des programmes sont élaborés en collaboration avec les institutions
européennes, les Etats Membres de l’UE, les autorités régionales et locales (Journal Officiel
des Communautés Européennes, 1979). L’opérationnalisation de ces fonds FEDER est
possible à travers des Programmes d’Initiative Communautaire (Journal Officiel des
Communautés Européennes, 1999). Créé dès 1990, INTERREG est un outil qui cofinance5 et
soutient des projets à caractère transfrontalier (Europa, 1990).
Au regard des différents éléments évoqués ci-dessus, notre recherche formule la
question de départ suivante : « Comment le processus d’innovation, au regard de l’acteur, se
produit-il dans un contexte transfrontalier et multi-niveaux européen ?» Derrière cette
3
Nous considérons les universités belges et françaises comme faisant partie du secteur public sur la base du
financement. Les universités belges et françaises sont financement principalement par les fonds publics.
4
La logique sous-tendant ce postulat est la suivante: les établissements universitaires étant incités à se
démarquer de leurs concurrents, s’efforce d’acquérir un ou plusieurs avantages comparatifs de nature
pédagogique, technologique, symbolique, sociodémographique, etc. L’innovation apparaît alors être un des
moyens permettant à une organisation d’acquérir cet avantage comparatif.
5
Les principes de partenariat et d’additionnalité seront ajoutés par le niveau européen – l’addition vise une
complémentarité entre fonds européens et fonds régionaux ou étatiques (Marks, 1992).
2
interrogation, l’objectif premier de cette recherche est de saisir la dynamique du processus de
création d’une innovation transfrontalière dans le domaine des savoirs tel que l’Université
Métropolitaine. Concrètement, l’unité d’analyse étant l’individu, nous étudions le rôle de
ceux-ci dans le processus d’innovation en considérant l’impact d’un contexte multi-niveaux et
transfrontalier. Enfin, Nous proposons une analyse intégrant à la fois les facteurs endogènes et
exogènes. La contribution de notre papier se situe, donc, dans l’articulation du concept
d’« entrepreneur public » avec la gouvernance dans une étude multi-niveaux et
transfrontalière à travers un questionnement basé sur l’innovation dans le secteur public.
La structure de notre papier est la suivante : Primo, un cadre d’analyse comprenant les
différents concepts nécessaire à l’appréhension du processus d’innovation , secundo, un
explicatif de la méthodologie mobilisée; tertio, une présentation du cas de l’Université
Métropolitaine, quarto, une analyse liant les éléments empiriques et concepts théoriques.
1. Cadre d’analyse
1.1. L’innovation, l’entrepreneuriat public et la gouvernance
Au regard d’une littérature pluridisciplinaire - management public, analyse des
politiques publiques, économie, psychologie -, l’adoption d’une posture réflexive est
nécessaire. À cet égard, nous explicitons succinctement notre positionnement théorique.
Premièrement, la question de la temporalité est essentielle dans l’analyse de l’innovation. Á
ce propos, de nombreux auteurs proposent un phasage du processus d’innovation. Dans cette
recherche, nous mobilisons le modèle élaboré6 par King & Roberts (1991 ; 1992) et Roberts
(1992). Le choix de ce modèle repose sur deux critères: son ancrage disciplinaire en sciences
politiques ainsi que sa lisibilité aisée. Á la lecture de ce modèle, notre analyse porte
exclusivement sur le portage du projet et non, sur l’implémentation. De ce fait, nous
n’abordons par les thématiques liées à la mise en œuvre du projet.
Deuxièmement, les processus de création et de conceptualisation d’une innovation
sont, par nature, dynamiques et itératifs. Durant ceux-ci, les innovateurs mobilisent, à la fois
des éléments endogènes – c’est-à-dire prenant naissance à l’intérieur de l’organisation. Il
s’agit des logiques d’action des acteurs, des règles et normes de l’organisation, de la structure,
des discours, des ressources, etc. - et à la fois des éléments exogènes - configuration
politiques, contexte socio-économiques, etc. En partant de cette articulation, nous postulons
qu’au vu de son effort à théoriser le comportement et les stratégies des acteurs d’innovation,
la littérature sur l’entrepreneuriat public s’avère pertinente pour expliquer et qualifier le rôle
des acteurs durant le processus d’innovation. En outre, les éléments endogènes sont
répertoriés au moyen de la littérature sur l’innovation organisationnelle dans le secteur public7
tandis que les éléments exogènes interférant dans le processus d’innovation sont mis en
évidence par l’entremise de la littérature sur la gouvernance multi-niveaux.
1.2. Le « héros » de l’innovation à travers le prisme de l’entrepreneuriat public
Au niveau individuel, plusieurs chercheurs insistent sur le rôle joué dans le processus
d’innovation par le « héros de l’innovation » (Considine et al., 2009, pp. 28-29 ; Sölvell,
6
Cfr. p.
Par soucis de clarté, nous employons le terme “innovation publique” comme terme générique désignant toutes
formes d’innovations adoptée et implémentée par et/ou dans le secteur public. Par “innovation
organisationnelle”, nous nous référons à “l’adoption (générée en interne ou en externe) d’un dispositif, d’un
système, d’un programme politique, d’un processus, d’un produit ou d’un service nouveau pour l’organisation
l’adoptant » (Damanpour, 1971).
7
3
2012). Ainsi, Morris et Jones affirment que « l’innovation est menée par un faible nombre de
personnes possédant les attributs requis nécessaires pour amener le changement à travers le
labyrinthe institutionnel et organisationnel des organisations du secteur public » (Morris &
Jones, 1999 cité dans Considine et al., 1999, p.28). Á la lecture de cet extrait, il convient de
remarquer des similitudes saillantes entre le héros de l’innovation et l’entrepreneur public.
Concept multidisciplinaire, le terme d’« entrepreneuriat public » revêt des colorations tantôt
économique, tantôt managériale ou politique. La clarification du sens donné au terme
d’ « entrepreneuriat public» est essentielle. Celui-ci se définit comme « la génération d’une
idée nouvelle ou innovante, la conceptualisation et l’implémentation d’une idée innovante
dans les pratiques du secteur public » (Roberts, 1992, p.56). Concrètement, comme le cite
Bernier et Hafsi (2002, p.4) « le processus entrepreneurial implique des valeurs […] et
implique des comportements traditionnellement associés au processus stratégique : identifier
et évaluer des ressources requises pour le réaliser, les acquérir et réaliser l’affaire et en
exploiter le bénéfice » (Stevenson et al., 1989 cité dans Bernier & Hafsi, 2002, p.4). C’est ce
processus stratégique qui est au cœur de notre recherche. Pour ce faire, nous examinons
quatre pans de ce processus stratégique (1) la perception d’une opportunité pouvant apporter
un gain, (2) le développement de l’innovation, (3) la conception d’une stratégie, (4) la
mobilisation d’autres acteurs et la dotation d’un leadership.
La perception d’une opportunité repose, tout d’abord, sur la collecte d’information. En
effet, la capacité de découvrir et d’exploiter une opportunité implique l’accès à l’information
des entrepreneur public (Mintrom, 2000, p.89). La connexion aux différents flux
d’information est partiellement liée à la notion de capital social. Ce dernier est la « position
dans un ensemble de relations sociales qui fournit des informations et un support politique, et
qui prend simultanément en considération l’aptitude d’utiliser son statut pour influencer
l’action des autres individus » (Fligstein,1997, p.378). Par la suite, l’individu, au moyen de sa
structure de connaissance, interprète les informations reçues et détermine s’il s’agit d’une
opportunité ou pas. Á cet égard, les chercheurs ont mis en avant une série de singularités dans
les schémas cognitifs entrepreneuriaux: (1) la confiance en soi, (2) la plus grande perception
d’un gain dans une situation incertaine (Palich & Bagby, 1995 cité dans Baron, 2002, p.16),
(3) l’optimisme infondé (Busenitz & Barney, 1997 cité dans Baron, 2002, p.16), (4) la vision
stratégique (Christopoulos, 2001, p.9), (5) la créativité (Mintrom, 2000, p.60), (6) la ténacité
(Christopoulos, 2001, p.9). Enfin, sur la base de l’interprétation des informations collectées,
l’entrepreneur décide s’il est profitable de développer son innovation.
Si l’identification d’une opportunité, de besoins non-satisfaits dans le secteur
public est relativement aisée, y apporter une solution adéquate requiert une « perspicacité
exceptionnelle » (Schneider et al., 1995, p.42). Le développement d’une idée innovante peutêtre découpé en deux étapes. Primo, l’entrepreneur génère l’idée innovante en inventant cette
dernière et éventuellement, en y appliquant des modèles provenant d’autres domaines (King
& Roberts, 1991, p. 168). Secundo, l’individu entreprenant définit le problème identifié et
formule les solutions alternatives plausibles8 (King & Roberts, 1991, p.168). Dans certain cas
ou secteur9, la dissémination de l’idée innovante complète le domaine d’activités (King &
Roberts, 1991, p.168).
Après avoir perçu l’opportunité et avoir développé une idée innovante, l’entrepreneur
8
L’objectif est de réaliser un benchmarking et de voir sur quelles facettes du problème, la solution proposée par
l’entrepreneur est plus convaincante, pertinente, efficace et/ou efficiente que les solutions alternatives – c’est-àdire, proposées par d’autres individus-. En outre, la définition d’un problème est le fruit d’un processus de
construction social et politique mettant en lumière certaines dimensions au détriment d’autres. Ainsi, la manière
avec laquelle l’entrepreneur va définir le problème et présenter sa solution est une étape essentielle pour la
réussite de l’innovation.
9
Par exemple, lors d’une mise à l’agenda d’une politique publique.
4
élabore un plan stratégique. Pour ce faire, ce dernier prend en compte deux paramètres :
l’environnement organisationnel et l’environnement global (Mintrom, 2000, pp. 98-101).
Citant Schumpeter, Mintrom (2000, pp. 98-99) affirme « qu’au-delà de l’ingéniosité et des
capacités de prises de décisions requises pour réussir, […] l’habilité d’anticiper et de gérer la
résistance et l’hostilité d’autres acteurs est essentielle10». L’environnement immédiat, de par
les règles et les normes sociales qui le structure, contraint l’action de l’entrepreneur. Aussi,
Bien qu’une connaissance approfondie de l’organisation soit nécessaire pour élaborer un plan
stratégique, la possession de ressources tangibles et de ressources intangibles accroit le champ
des possibles de l’entrepreneur. Les ressources tangibles sont soit des ressources monétaires
dont dispose l’entrepreneur public à titre privé, soit des ressources monétaires propre à
l’organisation. Les ressources intangibles renvoient à l’autorité formelle, la légitimité (Leca et
al., 2007) et la « ressource humaine » (Price, 1971). La première fait référence à « la
reconnaissance de la légitimité de l’acteur à prendre des décisions » (Phillips et al., 2000 cité
dans (Leca et al., 2007, p.16). La position officielle de l’individu dans l’organisation est une
des sources d’autorité formelle. La seconde, la légitimité est le « degré auquel les actions et
les valeurs de l’entrepreneur sont vues comme étant constamment en accord avec les valeurs
et les attentes de l’environnement » (Leca et al, 2007, p.16). La troisième se réfère
essentiellement au concept de « professionnel » c’est-à-dire « un membre du personnel ayant
une connaissance approfondie d’une matière particulière, la mettant à disposition [de
l’organisation, du parti politique, etc.], et permettant d’augmenter les capacités de l’équipe
pour laquelle l’acteur travaille » (Price, 1971, p.316).
La gestion de la résistance et de l’hostilité au changement requiert, de la part de
l’entrepreneur, de l’empathie et la capacité d’induire de la collaboration (Mintrom, 2000,
p.102). À ce titre, les compétences sociales et relationnelles de l’entrepreneur sont
indispensables. Fligstein (2001, p.176) précise que l’entrepreneuriat requiert la mobilisation
de compétences sociales (social skills ), parmi lesquelles la plus incontournable est
« l’aptitude d’induire de la coopération avec d’autres acteurs ». Cette capacité consiste à
motiver les autres individus à coopérer et nécessite de l’empathie et l’aptitude à convaincre
les autres acteurs des bienfaits apportés par la coopération. Par ailleurs, au sein d’une
organisation, la capacité à motiver ses subordonnés est déterminante (Schneider et al., 1995,
p.161). Dès lors, l’entrepreneur s’évertue à développer une culture organisationnelle favorable
à l’innovation et à la coopération entre membre (Mintrom, 2000, p.163). Cette dernière action
ne signifie pas que l’entrepreneur soit capable de modifier la culture en vigueur dans une
organisation mais plutôt, que la coopération et les valeurs favorisant cette dernière sont
constamment mise en avant par l’entrepreneur – ouverture d’esprit, esprit d’équipe,
spontanéité des discussions et encouragements -.
1.3. Le processus d’innovation et les éléments endogènes l’impactant
Ayant montré le rôle clés pouvant être joué par l’acteur innovant, cette section
poursuit l’objectif d’enrichir notre cadre d’analyse en structurant le processus d’innovation et
en y répertoriant les éléments endogènes prépondérant. Pour les raisons explicitées
précédemment, nous avons optés pour le modèle conçu par Roberts (1992). Ce dernier
décompose le processus d’innovation en trois étapes : la création, la conceptualisation et
l’implémentation. La création, « implique la génération d’une idée innovante et l’association
de cette idée à un besoin, à un problème » (Roberts, 1992, p. 58). Cette idée innovante
apparait comme une solution à un problème rencontré parmi d’autres. Il convient donc d’en
établir la validité et la faisabilité. La conceptualisation, « commence lors du développement
de l’idée. Des plans sont formulés afin de rendre l’idée innovante plus tangible » (1992, p.58).
10
Traduction libre.
5
Il s’agit, dès lors, d’opérationnaliser l’idée au moyen, notamment, de la rédaction de plan
d’action. L’implémentation, « débute par le test réel de l’innovante telle que conçue lors de la
phase de conceptualisation ». King (1992) ajoute à chaque étape un résultat. L’idée innovante
est alors le résultat de la phase de création, le prototype celui de la phase de conceptualisation
et l’innovation celui de la phase d’implémentation.
Figure 1 : Le processus d’innovation
Source : adapté de Roberts, N. (1992), Public Entrepreneur and Innovation, p.58
L’identification des conditions favorisant la transformation des pratiques
organisationnelles dans le secteur public est une thématique de recherche essentielle. Celle-ci
présente, néanmoins, une limite majeure : « l’extrême variance régulièrement observée dans
les études empiriques » (Damanpour, 1991, p.555). Si l’une des clés pour réduire cette
instabilité théorique a été de privilégier une approche par les subtheories - distinction entre
des innovations selon leur nature, leur magnitude, leur processus -, plusieurs chercheurs
assument le caractère contingent de l’étude du processus d’innovation (Berry & Berry, 1990 ;
Damanpour, 1991 ; Considine et al., 2009 ). Dans notre recherche, nous nous appuyons sur le
travail de synthèse de Damanpour (1991) qui liste une dizaine de déterminants
organisationnels ayant un impact sur l’innovation.
Parmi les déterminants organisationnels positivement corrélée avec le processus
d’innovation, nous mettons en avant : la spécialisation11, le renouvellement des
gestionnaires12, la communication interne et externe13, et l’attitude du manageur vis-à-vis du
changement (Damanpour, 1991, p.558 ; Considine et al. 2009, pp. 33-35). D’autres
déterminants organisationnels sont négativement corrélés à l’innovation. En effet, la
concentration accrue du pouvoir décisionnel, la formalisation et une verticalisation rigide de
la hiérarchie sont autant de facteurs impactant négativement les pratiques innovantes au sein
d’une organisation (Damanpour, 1991, p.558 ; Considine et al. 2009, pp. 33-35).
1.4. La gouvernance comme élément exogène de l’innovation
1.1.1. La gouvernance multi-niveaux comme approche à part entière dans les
Etudes européennes14
11
«Une plus grande variété de spécialistes fournirait une connaissance plus étendue et augmenterait la
fertilisation croisée des idées » (Damanpour, 1991, p.558).
12
« La longévité des gestionnaires/managers fournit une légitimité et une connaissance des tâches à accomplir,
de la gestion des processus politiques et de l’obtention des résultats opérés ». Ibidem, p.558
13
La communication externe est positivement corrélée à l’innovation car « l’analyse de l’environnement ainsi
que les activités professionnelles et extra-organisationnelles de leurs membres apportent de nouvelles idées à
l’organisation ». La communication interne se réfère « au processus facilitant la dispersion des idées à l’intérieur
de l’organisation ». L’augmentation et la diversité du nombre d’idées nouvelles accroit la fertilisation croisée et
contribue à créer un environnement interne propice aux nouvelles idées. Ibidem, p.559.
14
Ceci est appuyé par la contribution marquante de l’ouvrage de SAURUGGER, S., (2009), Théories et concepts
de l’intégration européenne, Science Po. Les Presses, Paris, 483p.
6
Marks et Hooghe parlent pour la première fois de la gouvernance multi-niveaux afin
de mieux appréhender la politique des fonds de cohésion – celle qui nous anime ici. Marks
l’identifiera comme telle en 199215. Cette approche se distingue des précédentes davantage
axées sur l’étude des liens entre Etats et UE pour transiter vers une prise en compte de
l’ensemble des niveaux concernés par une décision ou une mise en œuvre de politique
publique. Ainsi, les auteurs développent cet outil analytique mettant en lumière le rôle des
niveaux infra étatiques - régionaux, infra-régionaux et locaux. Des liens directs entre UE et
les niveaux infra étatiques peuvent être observés, dès lors. (Marks et al., 1996).
Par ailleurs, Levi-Faur affirme que ce type de gouvernance étudie en plus des
processus verticaux - supranationalisation et infranationalisation -, les processus horizontaux
- agrégeant divers acteurs publics mais aussi privés- dans la construction de politiques
publiques (Bache & Flinders, 2004, Levi-Faur, 2012). Hooghe et Marks (2003) affirment que
la gouvernance multi-niveaux perçoit le décentrement de l’Etat dans des contextes complexes,
multi-scalaires et multi acteurs, où les centres de pouvoir sont dispersés. Celle-ci renvoie
d’une part, à la négociation entre différents niveaux - européens, régionaux, locaux (Marks,
1993) et d’autre part, l’importante coordination entre ces niveaux et d’acteurs, impliquant de
l’incertitude (Négrier, 1999).
Selon Marks, Hooghe et Blank, la gouvernance multi-niveaux entrevoie des interstices
dans lesquels se faufilent les intérêts des acteurs qui eux-mêmes ont des liens entre eux via
des arènes de pouvoir différentes au sein desquelles des liens se créent entre niveaux européen
et local (Marks et al., 1996).
Hooghe et Marks (2004) ont établi une typologie de la gouvernance multi-niveaux.
Celle-là différencie le « Type I » du « Type II ». Le « Type I » correspond davantage au
fédéralisme où les niveaux de pouvoir ou institutions sont clairement distingués, avec une
répartition des compétences entre ces niveaux. En outre, le « Type I » a une fonction de
steering. Le « Type II », quant à lui, se réfère à la situation dans laquelle les niveaux de
pouvoir se chevauchent dans leurs compétences et où il existe davantage d’arrangement de
gouverne – des agences, partenariats, etc.. Ainsi, le « Type II » a une fonction de rowing. De
la sorte, selon les auteurs, le Type I renvoie à un système relativement stable tandis que le
Type II s’adapte et répond aux demandes changeantes de la gouvernance (Bache in Levi-Faur,
2012, p.630). Selon Bache, ces deux types ne sont pas exclusifs et peuvent se combiner.
(Bache in Levi-Faur, 2012, p.631).
Skelcher a établi à cet égard quatre types de relations entre entités de ce Type II avec
celle du Type I en UE (adapté de Skelcher, 2005, p.101 in Bache in Levi-Faur, 2012, p.631
)16 – ceci montre l’aspect aussi ascendant de politiques et horizontal:
15
La gouvernance multi-niveaux a été dans un premier temps usitée pour mettre en lumière la réalité neuve due à
l’introduction des principes du partenariat et de l’additionnalité (principe selon lequel les fonds structurels
doivent être additionnés aux fonds venant des Etats Membres, Marks, 1996, Bache in Levi-Faur, 2012). Dans
cette recomposition des fonds structurels en 1988, l’attention a été particulièrement tournée sur
l’empouvoirement des entités infra-nationales (Hooghe, 1996 in Kjaer, 2004) permettant un lien direct entre les
niveaux infra-étatiques et le niveau européen (par exemple, beaucoup de lobbies régionaux auront un accès
direct à l’UE à Bruxelles) (Kjaer, 2004, p.112). Dans un second temps, cette notion de gouvernance multiniveaux sera utilisée pour mettre en lumière les pratiques de politiques publiques en UE de manière plus générale
(Marks, 1992).
16
Traduction libre
7
La relation entre entités appartenant au Type I et Type II en UE
Type
de
la Caractéristiques
des
entités Nature des relations
relation
appartenant au Type II
Parallèle
Une alternative aux organisations Surtout informelles mais
gouvernementales
existantes
(par faisant
des
rapports
exemple les entités régionales de périodiques aux organes TI
partenariat pour la politique de (nationaux et européens)
cohésion européenne)
Complémentaire
Indépendantes mais réalisent des Surtout formelles, faisant des
activités qui s’ajoutent à celles déjà rapports directement aux
présents de celles des gouvernements institutions européennes
(par exemple, la Banque Centrale
Européenne)
Incorporée
Une
extension
formelle
du Surtout formelle, qui doit
gouvernement
(par
exemple, rendre des comptes auprès des
l’European Aviation Safety Agency)
institutions européennes
En opposition
Challengent le gouvernement et défend Surtout informelle, parfois
des intérêts particuliers (par exemple, formelle (par exemple, des
l’European
Trade
Union arrangements corporatistes)
Confederation)
La gouvernance multi-niveaux veut davantage appréhender les fonctionnements
européens internes. Pour ce faire, elle se focalise sur le rôle des acteurs - tant publics que
privés-, les variables stratégiques, normatives et idéelles qui fondent les décisions
européennes à différents niveaux de pouvoir. Pour Kohler-Koch ce sont les acteurs qui
modèlent les politiques européennes et non les institutions européennes17 (Kohler-Koch, 1996
in Saurugger, 2009, p.237). L’aspect normatif est également abordé dans la gouvernance
multi-niveaux ; Rhodes l’énonçe à travers la « métagouvernance18 » (Rhodes in Levi-Faur,
2012). Selon Jessop, la métagouvernance se retrouve aussi dans la gouvernance multiniveaux, Jessop affirme d’ailleurs la « métagouvernance multi-niveaux » adoptée par les
institutions européennes à travers de multiples dispositions de design de politiques (Jessop in
Bache & Flinders, 2004).
Notons que des intersections existent entre les différentes « gouvernances » : Hooghe
et Marks (2003) voient la possible coexistence de la gouvernance multi-niveaux avec la
gouvernance locale ; des réalités où des juridictions multiples superposées ou imbriquées
peuvent exister avec une possibilité de fragmentation et/ou de consolidation et d’un aspect
polycentrique des pouvoirs horizontalement (Hooghe & Marks, 2003, p.3). Denters & Rose
(2005) soulignent que les mutations du niveau européen ont engendré d’importantes
modifications des niveaux inférieurs - locaux, notamment, pour la conduite d’action publique.
17
Pour peu que ceux-ci soient orientés vers les mêmes objectifs par rapport à un objet défini.
Rhodes mentionne qu’il existe trois grandes tendances au cœur de la gouvernance en Science Politique à
l’heure actuelle; la gouvernance en réseaux (où l’évolution principale a été de mettre de la place en faveur de
liens auparavant purement étatiques vers des liens tournés vers le marché et enfin vers les réseaux et où la
gouvernance est en somme vue comme résultante des partenariats créés entre organisations, acteurs, etc.), la
méta-gouvernance (où l’Etat guide et oriente les actions dans la mesure où la gouvernance elle-même est
contenue dans le modus operandi de l’Etat, à travers par exemple le storytelling) (Rhodes in Levi-Faur, 2012,
pp.33-48) et enfin la manière d’interpréter l’Etat en changement - où la place de l’Etat comme référent central
n’est pas discuté et est plus de l’ordre de la croyance. Des intersections à ces trois tendances existent, sleon
l’auteur (Rhodes in Levi-Faur, 2012, pp.33-48).
18
8
Abordons alors la gouvernance en contexte transfrontalier, mettant en évidence le niveau local
– le lien direct entre UE et niveaux locaux ou régionaux ayant été mis en exergue par Marks,
Hooghe et Blank (2006), surtout dans le cadre des fonds de cohésion européens (Marks,
1992).
1.1.2. La gouvernance en contexte de coopération transfrontalière19
Jessop souligne que le transfrontalier met en avant les liens horizontaux ainsi que les
liens avec les niveaux de pouvoir supérieurs – verticalité- (Jessop, 2004 voir aussi Perkmann,
1999). Jessop identifie ces liens sous forme de triade - joignant les deux côtés d’une frontière,
eux-mêmes reliés aux niveaux supérieurs de pouvoir jusqu’au point culminant de l’Union
Européenne (Jessop in Bache & Flinders, 2004). Comme l’affirment Marks et al. (1996),
Maury ajoute également que des niveaux de pouvoirs étatiques peuvent être évités, créant
parfois une ligne directe entre niveau local transfrontalier et européen (Maury, 2006). Les
phénomènes transfrontaliers mettent en avant à la fois de la gouvernance multi-niveaux
(Spinaci & Vara-Arriba, 2009) et à la fois, de la gouvernance locale (Hamman, 2003). Dès
lors, les deux approches seront ici traitées.
Au niveau de la gouvernance multi-niveaux, Perkmann affirme qu’elle peut être
« déliée » : les acteurs de chaque côté de la frontière poursuivrent des objectifs différents en
relation avec les juridictions dont ils relèvent (Perkmann, 1999). Selon l’auteur, la coopération
transfrontalière prend la forme d’organisations horizontales spécifiques représentant les
acteurs publics, managers, académiques, etc. Selon lui, la coopération constitue des réseaux
horizontaux qui travaillent de concert (Perkmann, 1999). Dans l’approche multi-niveaux,
Spinaci et Vara-Arriba mentionnent l’importance de l’institutionnalisation qui renforce l’effet
multiscalaire (Spinaci & Vara-Arriba, 2009)20.
La gouvernance locale souligne qu’il existe de plus en plus de juridictions où la
fragmentation et/ou la consolidation existent ; déplaçant la focale sur un gouvernement
centralisé vers une réalité polycentrique (Hooghe & Marks, 2003, p.3). La gouvernance
locale, en contexte transfrontalier, renvoie à des recompositions de l’action publique dans le
cadre de la multiplicité des différents types d’acteurs en présence, mais aussi par l’idée que
« par le bas », les élus ou d’autres acteurs puissent faire émerger des pratiques spécifiques
d’action publique (Hamman, 2004, p.237). Hamman ajoute que la coopération transfrontalière
est de type plus horizontale, répondant à des caractéristiques localisées et ancrées sur un
territoire donné, participant à une européanisation « horizontale » (Hamman, 2003). O’Dowd
et Perkmann ajoutent que l’organisation politique, administrative et légale centrale d’un Etat
peut se répercuter sur la manière dont la coopération transfrontalière s’opère entre deux
entités infraétatiques (Perkmann, 1999 ; O’Dowd, 2003).
Toujours au niveau local, Maury, Guérin et Dupeyron s’accordent sur le
fait qu’une identité similaire de chaque côté de la frontière constituée une ressource
permettant le lancement dans la coopération (Maury, 2008, p.76 ; Guérin, 2008, p.247).
Malgré la volonté d’obtenir des fonds, dans le cas européen d’INTERREG, Maury attire
l’attention sur l’ensemble des contraintes qui y sont liées et que les acteurs publics locaux n’y
voient pas de retombée immédiate en terme d’électorat (Maury, 2008, p.76). En 2007,
Dupeyron affirme ce manque de légitimation est compensé par faire des projets labellisés
19
Pérez González définit la coopération transfrontalière comme « tout type d’action concertée entre les
institutions publiques de deux (ou plusieurs) Etats voisins, appliquée dans des zones ou des territoires situés des
deux côtés d’une frontière, dans le but de renforcer les relations de voisinage entre ces Etats et leurs collectivités
territoriales respectives par l’utilisation de tous les moyens de coopération disponibles » (1993, p.307).
20
Spinaci et Vara Arriba parlent des Groupements Européens de Coopération Territoriale (GECT). Soulignons
que leur propos s’apparente au Type I vu comme plus institutionnalisé, au sens de Hooghe et Marks (2004).
9
« européens ». En terme de territoire, Saez et Leresche conçoivent la coopération
transfrontalière comme étant une logique « adhocratique » plutôt que « topocratique » pour
les acteurs publics locaux (Leresche & Saez, 1997, p.43). Le territoire pertinent n’est donc
plus le territoire donné. Enfin, Dupeyron énonce que les acteurs publics locaux et régionaux
se lancent la coopération transfrontalière souvent pour jouer un rôle d’entrepreneur et
favoriser une dynamique voire une relance économique de leur région/municipalité. Les
désavantages de la coopération transfrontalière existent quand même, selon Dupeyron - par
exemple : divergences de compétences entre élus de part et d’autre, difficultés dans la prise de
décision… A contrario, l’auteur affirme que les bonnes relations entre élus participent de
cette coopération. Dupeyron cite que les inputs positifs de l’action publique
transfrontalière sont les référentiels transfrontaliers et l’appel à une expertise (Dupeyron,
2007).
2. Méthodologie
Le choix de notre unique étude de cas, l’Université Métropolitaine, a été posé dès le
départ de la réflexion, dans le but d’étudier en profondeur un cas d’ innovation
organisationnelle transfrontalière dans le domaine des savoirs. Afin d’étudier cet objet de
recherche, nous élaborons une démarche scientifique reposant sur l’approche déductive qui se
base sur une construction théorique préalable à la récolte et au traitement des données.
Premièrement, nous avons construit le cadre théorique à partir d’une analyse des
recherches et des manuscrits traitant de l’innovation dans le secteur, de l’entrepreneuriat dans
le secteur public et de la gouvernance, ainsi que de la gouvernance dans des situations
transfrontalières. La littérature utilisée est au confluent de plusieurs disciplines – économie,
science politique, mangement public, etc. –.
Deuxièmement,
notre recherche utilise deux
techniques méthodologiques
complémentaires: l’analyse de sources primaires (via des entretiens semi-directifs) et
secondaires21. Ces entretiens ont été menés auprès des acteurs académiques et politiques
impliqués dans le processus d’innovation du projet de l’Université Métropolitaine dans les
trois territoires concernés (France, Wallonie, Flandre). Ces entretiens ont été menés en aval de
la construction théorique et les questions ont été de type ouvertes pour quelques-unes
(souvent, en rapport avec l’expérience professionnelle de la personne interrogée) et pour le
reste, orientées sur le cadre théorique et les hypothèses développés (à ce titre, nous avons pu
notamment nous référer à Flick, 2009, p.156-165). L’entretien semi-directif se justifie par la
volonté de nous focaliser sur la dimension interpersonnelle des individus entreprenant et sur
les mécanismes de gouvernance transfrontalière (avec la volonté d’interroger des individus
situés à différents niveaux). Nous totalisons sept entretiens menés de mai à juin 2013 et
auprès des acteurs ayant participé au processus d’innovation étudié. Les sources secondaires
renvoient essentiellement à des articles de presse, communiqués de presse et autres supports
(présentations power point,etc.) en rapport avec le cas de l’Université Métropolitaine.
21
Nos sources primaires sont les documents administratifs explicitant le programme INTERREG IV, FranceWallonie-Vlaanderen, la fiche descriptive du projet « L’Université Métropolitaine/ De Metropole Univesiteit »,
la présentation de l’Université Métropolitaine/ De Metropole Universiteit lors de la conférence de presse ainsi
que le compte rendu du Comité d’accompagnement de lancement (2011) de l’Université Métropolitaine/ De
Metropole Universiteit. Les sources secondaires sont principalement des articles de presse, des reportages
vidéos.
10
3. Le projet de l’Université Métropolitaine
3.1. Le contexte global
Le domaine des savoirs en France est centralisé. L’Etat dispose de la compétence en
matière d’enseignement et de recherche supérieure. L’évolution majeure depuis 2006 est la
création des Pôles de Recherche et d’Enseignement Supérieurs (PRES) qui modifient le
paysage universitaire français : par bassins, les universités sont amenées à mettre en œuvre
des aspects de gouvernance (Etablissement Publics de Coopération Scientifique EPCS), de
mutualiser des outils entre universités, de faire face dès lors à une concurrence internationale
forte due aux grandes universités, etc. Le PRES Lille-Nord de France, actuellement CUE Lille
Nord de France en fait partie (Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche,
2013). Actuellement, le Ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (Ministère
français de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, 2012) régit la recherche
technologique, fondamentale et l’ensemble des moyens relatifs à leur bonne mise en œuvre22
(Légifrance, 2013). Pour la Belgique, les années 80 sont décisives dans la fédéralisme belge.
La recherche essentiellement fédérale est transférée en partie aux Communautés (recherche
fondamentale, Fédération Wallonie-Bruxelles, 201323) et Régions (recherche appliquée,
technologique)24. Les provinces belges sont également compétentes pour l’enseignement
secondaire et supérieur (Belgium, 2013).
Au niveau transfrontalier franco-belge, les entités fédérées belges ont la compétence
de la conclusion d’accords internationaux ou supranationaux (Wallex, 1988). Ainsi, des
accords de coopération transfrontalière sont signés entre les deux pays dès 1999 dans les
matières culturelles, linguistiques et universitaire (France diplomatie, 2013). La convergence
de l’ensemble de ces éléments permettra à INTERREG IV A France-Wallonie-Vlaanderen
(2007-2013), à travers ses priorités (INTERREG IV France-Wallonie-Vlaanderen, 2013), de
financer de la coopération au niveau universitaire entre la France et la Belgique (WallonieFlandre).
3.2. L’Université Métropolitaine
Le projet INTERREG « Université Métropolitaine » (De Metropole Universiteit) a vu
le jour en septembre 2011 et est « un projet coopératif entre le campus courtraisien de la KU
Leuven Kulak (chef de file), le PRES Université Lille Nord de France (actuellement
Communauté d’Universités et d’Etablissements Lille Nord de France) et les anciennes
FUCaM (actuelles UCL Mons), faisant partie du programme opérationnel INTERREG IV
France-Wallonie-Vlaanderen. Il a pour but de « mener des actions communes et intégrées en
matière de vie quotidienne transfrontalière. » (Université Métropolitaine, 2013). Ce projet
s’inscrit dans la troisième priorité phare du Programme Opérationnel d’INTERREG IV A
France-Wallonie-Vlaanderen c’est-à-dire « Renforcer le sentiment d’appartenance à un espace
commun en améliorant l’offre et en facilitant l’accès aux services transfrontaliers »
(INTERREG IV France-Wallonie-Vlaanderen, 2013) et a pour but de favoriser des échanges
d’enseignants et d’étudiants (niveau Baccalauréat au côté belge et licence du côté français) et
la mise sur pied d’un Honours College pour les étudiants (Université
Métropolitaine/Metropole Universiteit, 2011, p.1). La durée du projet est fixée du 1er
septembre 2011 au 31 août 2014 (Université Métropolitaine, 2011).
22
Prévu par le décret 2012-1221du 2 novembre 2012 de l’enseignement supérieur (Légifrance, 2013).
Notons que la Communauté française est désormais appelée « Fédération Wallonie-Bruxelles ».
24
A travers l’article 6 bis de la loi spéciale du 8 août 1980.
23
11
3.2.1. L’idée de l’Université Métropolitaine
L’acteur à l’origine de l’idée de l’ « Université Métropolitaine » est le Vice-Recteur de
la Kulak, Jan Beirlant. Ce dernier, entré en fonction le premier août 2009, a connaissance de
projets universitaires qui ont été mis en œuvre dans des universités belges et étrangères. Le
premier volet du projet est l’Honours College. Il s’agit d’un projet universitaire répandu aux
Pays-Bas ainsi qu’au Royaume-Uni dont l’objectif est le développement de compétences de
recherche – expériences interdisciplinaire, méthodologique, etc. - en offrant aux étudiants un
programme d’étude supplémentaire à leur cursus. Le second projet est la transationale
Universiteit Limburg (tUL). Celle-ci, créée en 1999, se présente comme une université
transnationale ayant deux maisons-mères (Universiteit Hasselt et Universiteit Maastricht)
(tUL, 2013). Par ailleurs, Jan Beirlant porte un intérêt certain à l’Eurométropole LilleCourtrai-Tournai (Beirlant, 2013). Réfléchissant aux moyens de développer son campus
universitaire de petite taille dans un contexte de concurrence25, Jan Beirlant est convaincu que
l’Eurométropole peut faire de son campus, un campus universitaire international. Profitant de
la visibilité et de la légitimité que lui offre sa fonction, le Vice-Recteur de Kulak discute
fréquemment avec les décideurs politiques locaux. À ce titre, lors d’une discussion entre Jan
Beirlant et Jean de Béthune, Échevin de la ville de Courtrai (Kortrijk) (2001-2012) et
Président du Conseil provincial de Flandre Occidentale (2002-2012), ce dernier lui fait part de
son ambition de lancer un projet entre Lille et la Flandre Occidentale et propose à Jan Beirlant
de l’assister à une réunion à Lille en compagnie de Christian Sergheraert, à l’époque Président
du PRES. Durant ce rendez-vous, l’entente entre Christian Sergheraert et Jan Beirlant est
réciproque.
C’est dans ce cadre de ce rendez-vous que le Vice-Recteur de la Kulak informe
Christian Sergheraert de l’existence de tels projets universitaires. Concomitamment, Jan
Beirlant perçoit à la fois un gain et une opportunité de travailler avec Lille et évoque la
possibilité de coopérer sur un projet international. Le Président du PRES, Christian
Sergheraert explique que son intérêt se porte davantage sur une collaboration internationale
pour les étudiants de masters et pour la formation des doctorants. Cette préférence s’explique
principalement par sa volonté d’augmenter l’attractivité du PRES Université Lille-Nord de
France. Néanmoins, sur base de ces contacts amicaux, le Président du PRES accepte de
commencer un projet universitaire directement axé sur les bacheliers. L’accent mis sur
formation des bacheliers s’explique par le fait que la Kulak dispense uniquement les cours
pour les années de bacheliers et de doctorat. Les étudiants, une fois terminé leur bacheliers,
entrent en master majoritairement à Gand (UGent) ou Louvain (KUL).
3.2.2. La conceptualisation de l’Université Métropolitaine : du développement
de l’innovation à la conception d’une stratégie
Par la suite, le Vice-Recteur de la Kulak et le Président du PRES ont souhaité trouver
un troisième partenaire en Wallonie afin d’être éligible pour les projets INTERREG. Le choix
des FUCaM s’explique principalement par la dimension interpersonnelle entre Bart Jourquin
(Recteur des FUCaM) et Jan Beirlant. En effet, né de parents flamands, Bart Jourquin parle le
néerlandais. En outre, ces deux personnes ont eu l’occasion de se rencontrer à divers reprises
lors d’évènements. Bart Jourquin, habitant du tournaisis, vit au quotidien l’Eurométropole
Lille-Kortrijk-Tournai et s’est fait, lors de la procédure d’élection du Rectorat des FUCaM, la
promesse de rapprocher l’université de la région tournaisienne (Jourquin, 2013). De son côté,
Jan Beirlant souligne la bonne entente entre lui et Bart Jourquin. Cette bonne entente a
25
La KUL a fondé en 1964 sur le sol de la ville Courtrai un campus universitaire nommé Kulak. Ce dernier de
taille modeste a pour principal objectif d’attirer les étudiants de Flandre orientale vers la KUL et non plus
l’UGent.
12
permis, selon l’universitaire courtraisien, de donner les chances favorables au projet de se
concrétiser. L’idée de développer une l’Université Métropolitaine comprenant un Collège
d’Honneurs est partagée par les trois universités, via l’entremise des trois dirigeants.
Ayant défini les contours de l’organisation innovante, la problématique principale lors
de la conceptualisation de l’idée de l’Université Métropolitaine est celle du financement. Afin
de régler celle-ci, les trois universités décident de monter un projet dans le cadre du
programme européen INTERREG IV France-Wallonie-Vlaanderen. Lors de la création d’un
projet INTERREG, intervient l’adjointe au Vice-Recteur de la Kulak, Virginie Coucke. Cette
dernière est chargée de deux missions : la coopération transfrontalière depuis 2004 et
l’internationalisation depuis 2011. À cet égard, elle est aussi le référent technique pour
l’enseignement à l’Eurométropole (Coucke, 2013). Virginie Coucke a déjà complété plusieurs
fiches de projet INTERREG et a obtenu les co-financements. Celle-ci possède une expertise
administrative sur les procédures liées à INTERREG. Concrètement, sur l’ensemble des trois
universités partenaires, seule la Kulak dispose d’un membre du personnel administratif
possédant une telle compétence. De ce fait, la Kulak devient « lead partner » (opérateur chef
de file) du projet et rédige la fiche du projet. La qualité de chef de file implique la
coordination des autres partenaires dans les activités de reporting exigées par les autorités
administratives et également réceptionne le montant FEDER. Le choix du projet INTERREG
est justifié par Virginie Coucke sur base de deux éléments : INTERREG cadre, donne une
structure et subventionne en donnant des « start financiering » (Coucke, 2013). La conseillère
du Vice-Recteur de la Kulak écrit le projet très rapidement. Selon cette dernière, elle couche
sur papier ce qu’elle a eu en tête, ce dont elle a entendu parler ou ce qu’elle connaissait.
Toutefois, la fiche du projet a été remplie sur base des conseils et de l’aval du Vice-Recteur,
Jan Beirlant. Pour concrétiser davantage les idées de l’Université Métropolitaine, notamment
le Collège d’Honneurs, et pour opérer les bons choix, les trois dirigeants se réunissent en
compagnie de Virginie Coucke.
Dans un même temps, la question du co-financement du projet a occupé Bart Jourquin
et Jan Beirlant. Ces derniers se sont entretenus avec les acteurs publics issus des niveaux de
pouvoir leur apparaissant opportuns. Ayant travaillé dans un cabinet ministériel durant
plusieurs années, Bart Jourquin possède une expérience des négociations et des arbitrages
politiques. De ce fait, il s’est rapidement entretenu avec le Ministre-Président de la Wallonie
Rudy Demotte. Ce dernier provient du tournaisis et se positionne très favorablement vis-à-vis
de la Wallonie Picarde et de l’Eurométropole. Le cabinet du Ministre-Président a pu, par ces
différents contacts, donner des conseils en vue de l’octroi des financements européens. Le Cofinancement du projet est assuré par le fond FEDER, la Wallonie et les fonds propres. Jan
Beirlant, quant à lui, possède aussi des contacts avec les décideurs politiques de la Province
de Flandre occidentale et du Gouvernement flamand. La Kulak étant le seul campus
universitaire en Province de Flandre Occidentale, cette dernière accorde davantage
d’importance et de soutien. Elle cofinance, à cet égard, projet. Du côté flamand, le cofinancement est également assuré par la Province de Flandre Occidentale, la Région
Flamande, le fond FEDER et des fonds propres. Par contre du côté français, aucune demande
n’a été formulée à quelques niveaux de pouvoirs. Les hommes politiques n’ont pas été tenus
au courant de la création et de la conceptualisation. Ce qui explique que le co-financement du
PRES est divisé entre des fonds FEDER et un financement propre.
4. Analyse
La partie analytique se veut synthétique et calquée sur le processus de Roberts (1992)
cadrant le processus d’innovation en trois phases. Etant centrés sur les phases de création et
de conceptualisation du processus, nous abordons ces deux temporalité sans entrer dans la
troisième phase, celle d’implémentation.
13
4.1. Phase de création
Au niveau des acteurs individuels, Jan Beirlant est à la base de l’idée du projet de
l’Université Métropolitaine. Celui-ci a, en premier, développé l’idée sur base d’informations
préalablement récoltées. Ce fait révèle l’importance de l’expérience ainsi que de la connexion
aux réseaux internes – en l’occurrence, le monde académique flamand- et externe – le monde
académique international – (Mintrom, 2000). En effet, dans son ouvrage publié en 2000 et
intitulé Policy Entrepreneurs and School Choice, Mintrom observe que la diffusion
d’expériences innovantes se produit principalement par l’intermédiaire du réseau externe
tandis que le réseau interne impacte davantage la réalisation de l’innovation. En outre, si Jan
Beirlant a aussi perçu le gain potentiel d’une telle innovation et en a saisi l’opportunité (selon
Bernier & Hafsi, 2002), il a fait preuve de créativité, de stratégie – construction d’un plan
d’action adéquat (King & Roberts, 1991) -, de compétence sociale – aptitude d’induire de la
coopération (Fligstein, 2001) - et de la persuasion. Cette dernière se concrétise dans la
capacité de l’universitaire flamand à convaincre Christian Sergheraert qui était davantage
favorable à un projet de collaboration transfrontalier axé sur les masters et la formation
doctorale.
Christian Sergheraert a, pour sa part soutenu de façon indéfectible le projet, il n’en a
pas été à proprement parler le moteur. Le Président du PRES a également démontré sa vision
stratégique, sa compétence sociale. Sa vision stratégique se remarque par son habilité à
anticiper les évènements – il postule que l’Université Métropolitaine est le premier pas vers
une coopération entre le PRES et des Universités de réputation internationales belges,
notamment, l’Université catholique de Louvain, la Katholieke Universiteit Leuven,
Universiteit Gent ou encore l’Université Libre de Bruxelles. L’initiative est donc restée
cloisonnée au monde académique (Coucke, 2013).
Au niveau horizontal (entre acteurs), dans le cadre de la gouvernance multi-niveaux et
locale (Bache & Flinders, 2004, Levi-Faur, 2012), des liens informels entre le Vice-Recteur
de la Kulak et le monde politique existent (notamment à travers des rapports informels de Jan
Beirlant avec Stefan Vandemeulebroeck de l’Eurométropole, avec Jean de Béthune de la
Province de Flandre Occidentale (Beirlant, 2013), nous constatons néanmoins que la création
s’attachera tout d’abord à cristalliser des partenaires universitaires pour le projet, de manière
détachée du politique. Les bonnes relations entre élus pour mettre en place le projet ont été
grandement conditionnées par la structure de l’Eurométropole Lille-Kortijk-Tournai où Rudy
Demotte et Stefaan De Clerck se connaissaient déjà bien et ont dès lors favorisé le projet
Université Métropolitaine. De là, existait déjà un référentiel transfrontalier (renvoyant à ce
qu’affirme Dupeyron, 2007) fort favorisant la mise sur pied du projet. Néanmoins, les liens
avec le politique resteront ponctuels et peu formalisés lors de la phase de création du projet.
Les liens formels établis entre monde universitaire et politique sont peu présents dans la phase
de création du projet, ce qui amoindrit la gouvernance locale, mise en avant par Hamman
(2004) au niveau transfrontalier où des juridictions multiples sont présentes et où
l’européanisation horizontale produit tout de même ses effets.
Toujours dans une vision horizontale entre acteurs, le territoire « adhocratique » de la
coopération transfrontalière mis en avancé par Saez et Leresche (1997) fait sens pour
l’Université Métropolitaine. En effet, ce territoire a été choisi par les Recteurs par souci
d’entente entre eux et a donc vu son périmètre se délimiter en fonction des liens unissant les
universités via leur Recteur et non pas par pertinence du territoire de l’Eurométropole
(englobant Lille Métropole, mais plus largement toute la Région Nord-Pas-de-Calais à travers
le PRES Lille Nord de France, Mons à travers la FUCaM et Courtrai à travers la Kulak). En
effet, l’Eurométropole n’inclut pas la ville de Mons. Ce constat nous amène donc à répondre
affirmativement à la notion de territoire « adhocratique » des auteurs, et montre une
originalité d’inclure des territoires a priori peu concernés par un projet « eurométropolitain ».
14
Dans l’aspect contextuel, nous analysons, tout d’abord, le caractère normatif du cadre
européen pour le Projet de l’Université Métropolitaine (Kohler-Koch in Saurugger, 2009,
Perkmann, 1999). L’UE promeut depuis 2001 à travers le rapport Mandelkern (Europa, 2001),
le Livre Blanc sur la gouvernance (Europa, 2008) et plus tard le Traité de Lisbonne de 2009
(Europa, 2013), une gouvernance basée tant entre les Etats Membres et ses institutions que à
travers mêmes les processus de fabrication de politique publique - du niveau européen au
niveau le plus fin de mise en œuvre, avec une articulation entre niveaux institutionnels. Ainsi,
des éléments clefs par rapport à l’innovation sont apparus dans la volonté européenne de faire
de la politique publique à travers la subsidiarité, l’efficacité et l’inclusion citoyenne. Les idées
de qualité et d’impact des décisions prises au niveau européen ont également été traitées
(Europa, 2008). L’Union Européenne a donc mis en avant une réelle volonté de gouvernance
au niveau de l’ensemble des Etats Membres et collectivités sub-nationales à travers également
Le Committee of the Regions White Paper on Multi-Level Governance de 2009 dans lequel il
est clairement explicité la nécessité de « faire du multi-niveaux » pour la politique de
cohésion (CoR, 2009) réaffirme un design de politique de cohésion particulier. Ceci rejoint
clairement ce que nous annoncent Rhodes (2012) à travers la tendance de la métagouvernance
mais surtout Jessop (2004) sur la métagouvernance multi-niveaux (Rhodes in Levi-Faur,
2012, Jessop in Bache & Flinders, 2004).
Nous affirmons donc que l’Union Européenne donne un cadre normatif à la politique
menée dans le cadre d’INTERREG et que la métagouvernance est un contexte dans lequel
naît et évolue l’Université Métropolitaine.
Lors de la phase de création du projet, nous constatons l’importance des relations
interpersonnelles et inter-organisationnelles. Les liens entre l’académique et le politique sont,
quant à eux, surtout informels. A ce stade, nous pouvons affirmer que nous sommes en
présence d’une idée satisfaisant les intérêts des acteurs universitaires et politiques et qui se
meut dans un cadre normatif européen (Marks et al., 1996). Même si le niveau politique a été
volontairement écarté dans la phase de création (Coucke, 2013), le projet n’en a pas pour
autant évidé les intérêts politiques présents au départ désirant favoriser un développement de
partenariats entre universités dans la région transfrontalière (et notamment à travers
l’Eurométropole et l’e-campus favorisé par Demotte) (Beirlant, 2013, Jourquin, 2013 et
Kieken, 2013). Une forme de négociation informelle lors de rencontres antérieures entre
Beirlant, Jourquin et des acteurs politiques tels que Rudy Demotte et Stefaan De Clerck - qui
sont Présidents à tour de rôle de l’Eurométropole - avait déjà été amorcée et les deux
dirigeants connaissaient en quelque sorte l’agenda politique. On se rend compte également
que l’aspect proactif et volontaire (au sens de Perkmann, 1999), dans le chef de Beirlant.
4.2. Phase de conceptualisation
Au niveau des acteurs individuels, le Vice-Recteur de la Kulak a mobilisé une
panoplie de ressources offertes par l’organisation : la légitimité, l’autorité formelle (Leca et
al. 2007) ainsi que les ressources humaines à sa disposition - l’expertise de Virginie Coucke (Price, 1971). Via la mobilisation et l’utilisation de ces ressources, il a imposé la Kulak
comme « lead partner » du projet. Lors de chaque phase du processus de l’innovation, Jan
Beirlant joue un rôle (pro)actif et revêt la fonction d’entrepreneur public des acteurs
universitaires.
Dans le processus d’innovation en tant que tel, il apparaît un acteur central dans la
conceptualisation : Virginie Coucke, la conseillère du Vice-Recteur de la Kulak. Celle-ci est
considérée comme une professionnelle disposant des compétences spécifiques indispensables
à la conceptualisation et à l’implémentation du projet : la rédaction d’une fiche projet
INTERREG, sa mise en œuvre et la réalisation des activités de reporting. Par ailleurs, par les
contraintes liées au montage de la fiche projet, elle a joué un rôle essentiel dans la
15
structuration et donc, la conceptualisation de l’Université Métropolitaine. L’expertise
(Dupeyron, 2007) se retrouve donc dans le chef de Virginie Coucke, l’adjointe au Rectorat de
la Kulak, dans sa capacité à monter des projets INTERREG. Son expertise a été utile à la
rédaction du projet, ce qui participera a à sa bonne réception par les niveaux supérieurs.
Toutefois, si elle détient la légitimité organisationnelle – tant au niveau des valeurs que de ses
capacités -, elle ne détient pas d’autorité formelle et doit s’en référer à la volonté de son ViceRecteur. À ce titre, elle n’est pas considérée comme un entrepreneur public, mais plutôt
comme une personne disposant d’une compétence spécifique indispensable au projet qui
permet la conceptualisation du projet – notamment sur les contraintes liées à INTERREG
Christian Sergheraert, pour sa part, présente deux caractéristiques inédites d’acteur
dans les profils examinés. Ainsi, il a fait preuve de ténacité et de persuasion, non pas durant la
phase de développement de l’innovation, mais durant la conception de la stratégie et le début
de l’implémentation. En effet, une partie du corps académique français n’a pas perçu le gain
possible qu’offre l’Université Métropolitaine. Pour ces derniers, l’apport de ce projet était
marginal au vu de la taille des universités belges partenaires et de leur réputation
internationale. Malgré ces désaccords, le dirigeant français a maintenu son soutien ainsi que
sa participation dans le projet. Troisièmement, le Recteur des FUCaM, Bart Jourquin, a été le
troisième dirigeant sollicité dans le projet de l’Université Métropolitaine. S’il n’a pas participé
proprement dit au début de la phase de création du projet– la perception d’une opportunité -,
son intégration à ce dernier est le résultat de sa position dans l’organisation –autorité
formelle- et de sa légitimité. Par ses origines et son vécu, Bart Jourquin est sensible à la
question de l’Eurométropole et de la coopération transfrontalière, particulièrement entre la
Wallonie et la Flandre. Parlant le néerlandais, celui-ci tisse aisément des liens – compétence
sociale- avec le Vice-Recteur de la Kulak. Par ailleurs, dès le début de sa participation, Bart
Jourquin se montre proactif et utilise son expérience politique pour favoriser la concrétisation
du projet. À cet égard, il mobilise se mobilise en tant qu’académique disposant d’un réseau
régional politique développé et cible son action « politique » sur Rudy Demotte, MinistrePrésident de la Wallonie. Les conseillers et attachés de ce dernier conseillent Bart Jourquin
sur la manière de conceptualiser le projet et ainsi, d’optimiser ses chances de réussite.
En ce qui concerne l’horizontalité entre acteurs, le développement de relations s’est
opérée avant tout entre les acteurs universitaires via la création d’un réseau (Beirlant,
Sergheraert puis Jourquin), dans le premier temps de la conceptualisation du projet. Ces
relations, existantes depuis quelques années déjà entre monde universitaire et politique, ont pu
être davantage être utile dans le cadre favorable d’INTERREG et surtout pour la volonté
d’entreprendre de la Kulak et à l’aboutissement de la conceptualisation du projet.
L’aspect vertical entre acteurs et niveaux de pouvoir (Levi-Faur, 2012, Marks et al,
1996) de la gouvernance multi-niveaux est davantage transcendant dans la phase de
conceptualisation du projet. En effet, une fois la décision arrêtée sur le projet entre partenaires
universitaires, les exigences incluses dans les projets INTERREG - de trouver par les
partenaires des sources de financements complétant les 50 % des montants alloués par le
FEDER-, ont nécessité que les trois universités se tournent vers les institutions publiques dont
elle relèvent juridictionellement parlant (sauf pour le cas du PRES) afin d’obtenir des
subsides. Les acteurs universitaires se sont tournés vers les juridictions dont ils relèvent où les
acteurs publics seraient les plus susceptibles de pouvoir octroyer le plus facilement des
subsides aux partenaires du projet (Jourquin, 2013). Ainsi, du côté wallon, Bart Jourquin a pu
rencontrer les acteurs clefs politiques de la Wallonie. Du côté flamand, Jan Beirlant a pu créer
des liens forts avec Jean de Béthune (province de Flandre occidentale) et Pascal Smet (Région
et Communauté flamandes). Pour le PRES, aucun financement externe n’a été cherché par
Christian Sergheraert étant donné que cet Etablissement public est déjà financé indirectement
par les collectivités infranationales françaises telle que la Région Nord-Pas-de-Calais).
16
La négociation entreprise entre acteurs universitaires et le monde politique d’un côté
flamand et de l’autre wallon, a donc été voulue dans le but d’obtenir les subsides suffisants
pour commencer le projet. Ceci a permis de faire approuver le projet beaucoup plus
facilement au niveau de la Région wallonne et de et de la Région et Communauté flamandes
(Coucke, 2013). Néanmoins, la relation entre acteurs politiques et du monde universitaire est
liée mais peu interdépendante; seuls les acteurs issus des universités sont dépendants des
fonds issus des niveaux politiques européens, régionaux, communautaires et provinciaux. Le
PRES n’est concerné que par le niveau européen (Higgins, 2013). Les objectifs du côté des
acteurs publics (français, wallon et flamand) était de créer à travers l’Eurométropole un
terreau fertile pour les échanges universitaires (dont l’e-campus en est une émanation).
Toutefois, en terme de lien avec les acteurs publics et les territoires dont ils sont issus (élus),
chaque partenaire possède des objectifs qui cadrent plutôt avec les objectifs politiques des
acteurs publics sur les territoires auxquels ils appartiennent. Du côté des FUCaM, l’idée était
de cadrer avec les souhaits de développer le territoire de la Wallonie Picarde de manière
transfrontalière, provenant du Ministre président wallon, Rudy Demotte (Wallonie Picarde,
2011). Du côté flamand et français, les objectifs ont été liés purement aux acteurs
universitaires et non publics – le premier visant à étoffer sa compétitivité face à des
universités flamandes concurrentes (Beirlant, 2013), le second à trouver dans le projet de
l’Université Métropolitaine un tremplin pour toucher les universités mères KUL et UCL à
terme (Higgins, 2013).
Au niveau de l’influence des niveaux de pouvoir sur le transfrontalier – selon
Perkmann (1999) et O’Dowd (2003)-, l’organisation étatique (fédéralisation très forte en
Belgique vs centralisation plus forte en France) a amené une influence relative sur la
conceptualisation du projet Université Métropolitaine, en ce qui concerne le choix des
partenaires. Notons que de la structure étatique – surtout du côté belge - aura permis aux
partenaires d’aller trouver au sein des niveaux de pouvoir le plus d’opportunités de faire
aboutir le projet pour le côté belge (Jourquin, 2013). Aussi, il est intéressant de noter qu’à
l’interne, le PRES inclus dans le projet est organisé de manière publique pour une grande
partie, ce qui n’a pas induit la nécessité d’adjoindre des niveaux politiques français dans le
financement du projet (Higgins, 2013). Ceci aura une influence relative sur la construction des
partenariats publics et universitaires dans le projet mais n’aura pas été un facteur majeur
influençant directement la conceptualisation du projet.
Pour ce qui est du multi-niveaux, alliant verticalité et horizontalité, nous remarquons
que les niveaux de gouvernement concernés par l’octroi de fonds dans le projet de
l’Université Métropolitaine sont : l’Union Européenne (fonds FEDER), la Région Wallonne,
Le Ministère flamand de l’Enseignement et la Province de Flandre Occidentale (Université
Métropolitaine/Metropole Universiteit, 2013). Les niveaux subsidiant sont donc multiples,
mais n’incluent par exemple pas la Province du Hainaut, qui possède une compétence en
matière d’enseignement, ceci a été un choix opéré dès le départ par les acteurs académiques
du côté wallon (Recteur Bart Jourquin à l’époque). Nous pouvons remarquer également une
asymétrie entre côté belge et côté français puisque le PRES Lille Nord de France est un
Etablissement public financé en partie par le Conseil régional Nord-Pas-de-Calais, Lille
métropole, Valencienne métropole, Arras communauté urbaine (Université Lille Nord de
France, 2013) mais dépend de ses pouvoirs de manière indirecte. Nous sommes bien donc
dans une gouvernance avec des niveaux de pouvoir dispersés (au sens de Hooghe et Marks,
2003). Les niveaux supérieurs pris en compte comme organes subsidiant ne sont pas les
niveaux classiques hiérarchiques : il y a eu un évitement volontaire de l’inclusion du Conseil
régional Nord-Pas-de-Calais (Higgins, 2013) et de la Province du Hainaut (Jourquin, 2013),
pour cette dernière c’était le risque de manque de soutien politique qui a fondé ce choix.
17
Nous sommes par ailleurs dans un Type II de gouvernance multi-niveaux au sens de
Hooghe et Marks où le fédéralisme belge et la décentralisation française dans un contexte plus
général de type fédéral crée des asymétries fortes et une dispersion des pouvoirs pour le cas
de l’Université Métropolitaine. Le Type II est exemplifié car le contrôle des budgets initiaux
ont été opérés par des organes de contrôle (contrôleur de gestion) différents de chaque côté de
la frontière – le côté français ayant un organe du PRES alors que les côtés belges ont des
organes de contrôles administratifs indépendants des FUCaM et de la Kulak (Delecosse,
2013). Aussi, au sens de Skelcher (2005), nous sommes dans une organisation de type
« parallèle » où les rapports, demandes de budgets etc. pour l’Université Métropolitaine ont
été renvoyés aux niveaux européens, régionaux pour le côté belge et étatique pour le côté
français.
Nous observons donc, comme l’affirment Jessop (2004) et Maury (2008) que le côté
français a vécu une mise en relation plus directe entre le niveau local et européen sans passer
nécessairement par les échelons intermédiaires – notons, ce qui est important, que le niveau
étatique n’a toutefois pas été évité (ce qui rejoint les propos de la permanence de l’Etat de
Jessop, 2004). Par contre, le côté belge s’est vu développer des relations à échelons
intermédiaires provinciaux (Flandre), régionaux (Flandre et Wallonie) et communautaires
(Flandre) et au niveau européen, tout en sélectionnant les organes à associer dans le projet,
ceci étant dû à la structure étatique fédérale belge. Concrètement, l’Etat belge a pu là être
évité.
Cette coopération transfrontalière agrège des institutions publiques de deux côtés de la
frontière de manière asymétrique. La coopération dans le cadre de ce projet est toutefois à
nuancer au moyen de l’approche par la gouvernance. La gouvernance dans la phase de
création renvoie plus à une gouvernance sectorielle, au sein du domaine des savoirs, puisque
n’incluant pas le niveau politique. Le partenariat avec certaines instances publiques pour les
subsides a montré un tournant vers un autre type de gouvernance, multi-acteurs et multiniveaux.
5. Conclusion générale
L’étude approfondie du cas de l’Université Métropolitaine a pour objectif d’analyser
les pratiques d’innovation dans le secteur public et, singulièrement, les universités. Afin
d’expliciter avec pertinence le processus d’innovation, cette recherche articule les théories
abordant le rôle actif des acteurs dans l’innovation avec la gouvernance locale et multiniveaux.
En termes d’acteurs, plusieurs éléments ressortent de l’analyse : les quatre acteurs cités
ci-dessous possèdent la légitimité soit via les valeurs similaires sur la coopération
transfrontalière qu’ils partagent, soit via leur compétence professionnelle (Virginie Coucke)
ou leur autorité formelle. Les trois Recteurs universitaires ont prouvé une capacité de
coopération, d’adaptation à l’environnement social de leur projet et ont montré de réelles
compétences sociales.
L’Université Métropolitaine, en conclusion, est le résultat de l’action d’entrepreneurs
publics, en particulier de l’action du Vice-Recteur, Jan Beirlant. Ces entrepreneurs publics ont
coopéré et se sont coordonnés afin de pousser leur projet durant toutes les étapes du processus
administratif. Affichant des capacités de proactivité, ceux-ci ont pu profiter d’un contexte
favorable pour faire émerger l’Université Métropolitaine. Leurs actions sont donc décisives
dans le processus d’innovation, d’autant plus, dans un contexte transfrontalier.
La gouvernance a été mise en lumière essentiellement dans la phase de
conceptualisation du projet. Les acteurs universitaires ont formalisé les liens avec les niveaux
de pouvoirs régionaux (du côté belge) et étatique du côté français. L’horizontalité entre
18
acteurs d’un même secteur – du domaine des savoirs, en l’occurrence -, de manière
transfrontalière, reste une des caractéristiques majeures de la phase de création du projet.
Notons que l’aspect normatif et la métagouvernance – voire de la métagouvernance
multi-niveaux – ont été observés dans le cas de ce projet de l’Université Métropolitaine.
Nous remarquons que l’innovation organisationnelle dans le cas de la
conceptualisation du projet de l’Université Métropolitaine provient bien, d’une part de
l’action spécifique d’entrepreneurs publics et d’autre part du contexte de gouvernance
impulsée par l’Union Européenne et en tant que résultat d’actions menées au niveau local
transfrontalier. A ce titre, nous pouvons nous interroger sur le contexte particulier que confère
le transfrontalier. Dès lors, nous établissons le schéma suivant :
19
Figure 1: Le début d’un processus d’innovation pour un projet INTERREG dont le
contexte est multi-niveaux et transfrontalier26
Nous affirmons que nous sommes bien dans une dynamique bottom-up et dans le
cadre ce projet, mais dans un contexte cadré de manière top-down par l’Union Européenne,
dont l’aspect normatif est repris et intégré par les acteurs universitaires et publics au niveau
transfrontalier. Un lien quasi direct entre niveau local et européen peut être retrouvé.
Par ailleurs, des intersections existent entre les approches théoriques utilisées : tant
dans la gouvernance que dans l’entrepreneuriat public, les acteurs possèdent et mobilisent des
compétences sociales telles que la persuasion, la coopération, la capacité de s’adapter à
l’environnement social.
Par leur position dans l’organisation, les individus recourent aux ressources détenues par leur
organisation, nous notons que les ressources principales ont été l’expertise et les ressources
financières.
Des complémentarités sont intéressantes à souligner entre l’entrepreneuriat et la
gouvernance : l’importance des réseaux informels - l’externe permettant la diffusion d’idée
innovante, l’interne permettant la conceptualisation et l’avancée du projet - couplés plus tard
au capital social (et donc, réseau politique). Le contexte de gouvernance et d’innovation
constituent un milieu fertile pour l’action entrepreneuriale et met en avant le processus de
fertilisation croisée, à savoir un cadre d’action publique stimulateur de projets individuels et
organisationnels.
Notons toutefois qu’en termes de limites, l’approche de la gouvernance continue à
porter à discussion les éléments de reddition des comptes, de légitimité de l’acteur –
26
Le schéma et sa légende son repris en annexe du document.
20
universitaire dans ce cas-ci- optant pour une décision de projet spécifique pour des universités
(financées en Belgique par des fonds publics, ne l’oublions pas…). Ce cas empirique n’évide
pas ces écueils.
Nous avançons également l’idée que la gouvernance ici étudiée reste originale ; elle
montre des liens entre organisations financées par les pouvoirs publics que sont les universités
et les partenariats opérés avec les niveaux de pouvoir publics. De cet état de fait, nous
constatons que la gouvernance, en tant qu’approche permettant de mettre en lumière des
phénomènes inédits et originaux, reste un cadre conceptuel encore peu affiné pour qualifier
réellement les liens qui unissent universités et instances publiques. Néanmoins, la
gouvernance en tant que stretched concept, nous permet de mettre en lumière cette réalité
empirique originale.
In fine, cette étude expérimentale est sujette à des biais d’ordre méthodologique et
théorique. Nous identifions d’une part, au niveau méthodologique, que les matériaux
empiriques ont été pauvres pour parvenir à contenter le principe de saturation des données.
D’autre part, au niveau théorique, porte sur l’articulation des approches théoriques mobilisées,
notamment dans la difficile articulation des niveaux d’analyse étudiés.
21
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26
7. Annexe
Figure 1 : Le début d’un processus d’innovation pour un projet INTERREG
dont le contexte est multi-niveaux et transfrontalier27
Légende :
Liens entre acteurs du projet de
l’Université Métropolitaine, dans la
création et conceptualisation
Liens aller-retour formels et informels
entre acteurs universitaires (Recteurs
représentant l’Université) et instances
politiques
Liens unissant les Recteurs et les
organisations – universités - qu’ils
représentent
Influence du cadre normatif européen sur
le projet de l’Université Métropolitaine
Accords internationaux permettant la
conduite de projets transfrontaliers entre
Etat français et entités fédérées belges –
mises sur « pied d’égalité » avec l’Etat
belge.
Aller-retour entre acteurs universitaires
Recteurs. Ce lien véhicule les idées des
27
Le schéma et sa légende son repris en annexe du document.
27
acteurs (Recteurs) et la coordination entre
eux.
Portage du projet par la Kulak
28