FORMATION : Que doit faire un exilé en cas d`arrestation ? Animée

Transcription

FORMATION : Que doit faire un exilé en cas d`arrestation ? Animée
FORMATION : Que doit faire un exilé en cas d’arrestation ?
Animée par Norbert Clément, avocat au barreau de Lille et Marie Hélène Calonne, avocate au barreau de
Boulogne-sur-Mer
But : donner des outils pour encadrer et limiter les arrestations des exilés.
Le séjour irrégulier n’est plus une effraction. Donc pourquoi préparer les exilés à une éventuelle arrestation ?
Tout est prévu dans la loi sur les conditions dans lesquelles doivent se dérouler un contrôle d’identité et une
retenue ou arrestation (dans le CESEDA- Code de l’entrée et du séjour des étrangers et demandeurs d’asile - et
le Code de procédure pénale). Mais dans la pratique, c’est l’application des textes qui pose problème.
La procédure à respecter est rédigée par les policiers et les gendarmes.
La seule action de l’exilé est souvent de signer.
Souvent les questions sont pré-rédigées avec des choix multiples.
La procédure est relue par l’OPJ (officier de police judiciaire) à la fin de la garde à vue et elle est modifiée si les
subalternes n’ont pas respecté les formes.
Des plaintes ont été déposées sur faux en écriture publique, mais elles sont restées sans suite.
L’idée du formulaire « Pass » est de rétablir l’égalité des armes entre préfet / administration / policiers / exilés.
Pour les personnes retenues : 10 à 20% de libération en moyenne devant le JLD, ça peut passer à 75% quand les
exilés ont fait valoir leurs droits
C’est important parce que cela peut faire capoter des procédures.
Sur internet, vous trouverez en tapant « Jamais sans mon avocat », une notice en anglais, français et arabe sur ce
que doit faire un sans papier qui est en France depuis un moment. Attention ce ne sont pas les mêmes conseils
pour un exilé de passage !!
Les conseils donnés dans cette formation sont valables pour une personne qui n’a pas l’intention de rester en
France ou qui n’a pas de documents officiels pour prouver des démarches effectuées en France. Ils sont valables
également pour des exilés vivant dans d’autres villes.
Ça marchera mieux pour des personnes arrêtées en masse parce que ça complique le travail de la police. Les
personnes peuvent être libérées aussitôt, sinon ça l’aidera dans la suite de la procédure.
Important que les exilés soient acteurs de leur arrestation. Important de connaitre ses droits.
Exercer leurs droits aura des conséquences à plusieurs moments de la procédure.

Le contrôle d’identité
Le Code de procédure pénale (CPP) doit être respecté, nous sommes dans un Etat de droit, il y a des règles pour
priver des personnes de liberté, même ne serait ce qu’une heure.
A78-1 à 78-5 CPP
https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?
cidTexte=LEGITEXT000006071154&idArticle=LEGIARTI000006575155&dateTexte=&categorieLien=cid
A L611 -1 du CESEDA
https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?
idArticle=LEGIARTI000026911117&cidTexte=LEGITEXT000006070158&dateTexte=20160422&oldAction=
rechCodeArticle&fastReqId=1954782221&nbResultRech=1
Il existe deux types de mesures de police :
Mesure de police judiciaire
Mesure de police administrative
Au moment de l’arrestation, on ne sait pas dans quel type de police on se trouve. La vérification n’est faite qu’au
moment du contrôle par un juge.
Le Juge judiciaire est le garant des libertés individuelles (en rétention c’est le JLD= juge des libertés et des
détentions)
Le contrôle du juge se fait a posteriori.
Pour effectuer un contrôle de police judiciaire :
- Raison plausible de soupçonner qu’une personne a commis ou a tenté de commettre une infraction,
qu’elle fait l’objet de recherche dans le cadre d’une poursuite judiciaire
-
Réquisitions du procureur, déterminées dans le temps et dans l’espace
On voit beaucoup de réquisitions qui se répètent, mais attention, il n’existe pas de réquisition permanente du
procureur, même si parfois on en a l’impression
Exemple de motifs pour contrôler des personnes :
Circuler dans une voiture avec des plaques étrangères
Si on contrôle le véhicule, normalement on ne contrôle que le conducteur
Pour effectuer un contrôle de Police administrative :
Prévention du trouble à l’ordre public, c’est très vague.
Contrôle dans les gares, aéroports et ports peuvent être faits sans qu’il y ait des « raisons plausibles de
soupçonner une infraction….»
Il existe un arrêté qui prévoit des contrôles dans les gares de Calais et Boulogne sur Mer
On peut contrôler dans la zone de 20 km aux frontières intérieures shengen
Donc : on voit qu’il existe de nombreuses possibilités de faire des contrôles d’identité.
Le juge administratif ne s’intéresse pas au contrôle des conditions du contrôle d’identité.
Pour toute personne qui est arrêtée, on écrit la nationalité sur le PV au moment du contrôle d’identité, même si la
personne l’a déclarée seulement plus tard.
On emmène l’exilé en retenue (16h) ou en GAV (24h renouvelables).
En GAV, c’est le code de procédure pénale qui s’applique. En retenue, c’est le CESEDA. Cela peut être aussi en
audition libre ou une vérification d’identité.
L’exilé généralement ne sait pas dans quelle procédure il se situe.

Les droits en GAV / en retenue / audition libre :
En audition libre / en retenue / en GAV, en fonction du cadre juridique, les droits sont différents.
Comme on ne sait pas dans quelle procédure on est, on va conseiller aux exilés de demander tous les droits
possibles.
Comment redevenir acteur : exercer ses droits.
Distribution du formulaire élaboré par les avocats pendant la formation. Le formulaire est en ligne.
www.pole-juridique.fr/pass.pdf
Formulaire type utilisable pendant un bon moment, valable dans toute la France, et dont la version en ligne sera
réactualisée si nécessaire.
Dernière grosse rafle à Calais a eu lieu le 2 juillet 2014. 200 personnes ont été placées en rétention. 600
personnes ont été contrôlées.
Et aucune n’a exercé ses droits…
Si ces 600 personnes avaient toutes demandé un avocat, un médecin, d’informer leur famille et une personne de
leur choix, et un interprète dans la langue qu’elles maîtrisent… la rafle se serait retournée contre
l’administration, qui aurait été totalement dépassée.
Pour éviter que le formulaire soit déchiré par la police et ne puisse pas servir à la personne. On en remplit deux.
La personne arrêtée peut présenter le premier formulaire au policier au moment du contrôle, s’il le déchire, la
personne peut présenter le second formulaire au moment de l’audience devant le juge.
Le formulaire est destiné à l’OPJ – officier de police judiciaire
Les bénévoles doivent expliquer l’intérêt du formulaire aux exilés et remplir avec eux.

Les éléments à compléter :
Je suis Mr/Mme … né le….. à …..
C’est l’état civil. C’est important parce que des personnes sont emmenées au poste parce qu’on ne connait pas
leur état civil.
C’est mieux que cet état civil soit écrit par l’exilé lui-même sur le formulaire parce qu’il s’agit du véritable état
civil de la personne, et il ne risque pas d’y avoir d’erreur de la part d’interprètes.
Lors de la GAV, retenue, Il y aura prise d’empreintes, il vaut mieux donner la donner la même identité que celle
qu’on a déjà donnée si on a déjà été arrêtée. En effet, la police retrouvera nos empreintes et donc la précédente
idée donnée.
Si on n’a jamais été arrêté ça peut être différent.
Refuser de donner ses empreintes est un délit.
On ne met pas sur le formulaire la nationalité de la personne car sinon on peut nous demander des documents
prouvant la régularité du séjour.
La date de naissance c’est très important, notamment pour les mineurs.
Si la personne ne connait pas sa date de naissance, on met l’âge déclaré de la personne.

A quel moment donner le formulaire adressé à l’Officier de police judiciaire ?
Le formulaire est à destination de l’OPJ, hors ce sont les APJ (Agent de Police Judiciaire) qui vont m’arrêter.
L’idée est de montrer le formulaire à la première personne que l’on rencontre au commissariat.
Quans le juge libère une personne sur un motif d’erreur de procédure, les policiers doivent s’expliquer devant
leur hiérarchie. Donc ils ont intérêt à respecter la procédure.

Je veux un interprète dans la langue que je comprends : la langue est ..
Il y 4000 procédures chaque année dans le NPDC, donc difficile de trouver un interprète.
Souvent ce sont les mêmes qui interviennent, ce qui créé parfois des situations de dépendance vis-à-vis des
policiers.
Pas mal de problème avec certains interprètes, qui confondent leur travail avec celui de la police.
Si la personne dit qu’elle parle anglais, elle risque d’avoir un interprète en anglais ou que les policiers parlent en
anglais avec lui. Il faut dire la langue qu’on maitrise, « la langue qu’il a indiqué comprendre » (L111-7
CESEDA).
La personne arrêtée doit choisir la langue dans laquelle doit se passer la procédure. Il vaut mieux demander un
interprète.
La case interprète sur le formulaire est cochée.
Si la police ne trouve pas d’interprète, la procédure ne pourra pas avoir lieu.
Il faut que ce soit les langues officielles du pays de la personne.
Il est écrit à la fin du formulaire, « je ne renoncerais à mes droits qu’en présence de mon avocat ». Donc si le
policier ne trouve pas d’interprête, le policier ne pourra pas faire un procès verbal de « renonciation au droit ».
Si je n’ai pas d’interprète, il vaut mieux ne pas répondre aux questions des policiers, on risque de ne rien
comprendre.

Je veux m’entretenir avec un avocat. Je veux qu’il assiste mes auditions
C’est la personne qui va intervenir de l’extérieur, le seul allié de l’exilé. Pas parce que l’avocat est l’ami de
l’étranger, mais parce que c’est son boulot de le défendre. Il n’a pas à être objectif, neutre, au contraire : il est du
côté de l’exilé.
L’avocat doit rappeler à la personne l’ensemble de ces droits.
L’avocat doit être appelé par la police. La police doit prouver que l’avocat a été appelé.
EN GAV , il doit venir dans les deux heures. En retenue administrative, dans l’heure qui suit son appel.
Cela peut être un avocat choisi, mais risque qu’il ne soit pas disponible.
Ne mettre le nom de l’avocat sur le formulaire que si on a l’accord de l’avocat. De plus si les exilés changent de
villes, cela ne marchera pas.
On peut mettre un avocat désigné quand on a l’accord de celui-ci et/ou qu’on est sur une action précise
(expulsion d’un camp par exemple).
Si la personne n’a pas d’avocat, elle peut répondre aux questions sur l’état civil et montrer le formulaire.
Il faut réfléchir si c’est dans l’intérêt de la personne de parler sans la présence de son avocat s’il n’y a pas
d’avocats dans les deux heures ou dans l’heure.
Généralement, on conseillerait plutôt aux personnes d’accepter de parler quand elles ont une adresse fixe (ex :
j’habite dans les containers), de la famille présente en France (un frère mineur dans le bidonville…).
De toute façon, de nombreux exilés renoncent à leur droit à l’avocat sous la pression.
Si l’avocat est là : on signe le procés verbal d’audition.
Si l’avocat n’est pas là : on ne signe pas !
L’avocat est le témoin de l’audition. Il doit être du côté de son client.
Si on a signé, on ne peut pas dire au juge que le Procès verbal est inexact.
Si on ne signe pas, il sera écrit « la personne refuse de signer » L’exilé pourra alors expliquer au juge pourquoi il
a refusé de signer. Par exemple : il n’a pas reçu une lecture intégrale des procès-verbaux, il n’est pas d’accord
avec leur contenu, il avait réclamé un avocat, il avait présenté le « Pass » et il n’en a pas été tenu compte…

Je veux être examiné par un médecin
Très important quand l’arrestation a été « musclée ».
Mais souvent ça se déroule sans interprète et de manière rapide.
Le médecin doit relever des traces de coups.
Parfois, les personnes sont envoyées à l’hopital, donc faut une escorte, ça prend du temps…

Je veux prévenir moi-même ma famille et une personne de mon choix
Ce n’est pas un droit dans toutes les procédures, mais on peut le demander.
Cela peut couter très cher au commissariat et cela doit être mentionné dans le PV avec le bon numéro de
téléphone. Cela complique les choses pour la police et augmente les possibilités de faire sauter la procédure
devant le juge.
Il n’y a pas de limite de temps pour les coups de fil passé par l’exilé. Si c’est le policier qui téléphone, ça ira très
vite.

Je ne renoncerais à ces droits qu’en présence de mon avocat
Ne donner que son état civil si on n’a pas d’interprète dans ma langue.
Ne pas parler si on n’a pas d’interprète dans la langue qu’on a demandé.
L’avocat a deux heures ou une heure pour venir. S’il ne vient pas, on ne signe rien.
Ne rien signer sans avocat !!!
Le formulaire disponible en ligne sera actualisé en fonction des retours des associations et des avocats.
Par la suite, des indications seront données sur la version du « Pass » disponible en ligne pour savoir comment
utiliser le formulaire et comment l’améliorer.
Note insérée après la formation :
Suite à un premier retour d’expériences :

Le formulaire « Pass » a été légèrement modifié

Une notice d’explication a été créée et mise en ligne
Toutes les informations sont synthétisées ici :
http://pole-juridique.fr/wp/?p=2911
et là :
www.pole-juridique.fr/pass
Le site internet rappelle également l’adresse mail ([email protected]) pour faire remonter l’information,
et améliorer ainsi le formulaire et sa notice d’utilisation.