CINÉTIQUE FORMELLE DES RÉACTIONS COMPOSÉES

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CINÉTIQUE FORMELLE DES RÉACTIONS COMPOSÉES
CINÉTIQUE FORMELLE DES
RÉACTIONS COMPOSÉES
I. OBTENTION GÉNÉRALE DE L’ÉQUATION DIFFÉRENTIELLE
Dans un réacteur, ont lieu plusieurs réactions mettant en jeu plusieurs espèces. Soit A une espèce. On va voir sur
d [A]
un exemple comment exprimer
. On a trois réactions simultanées :
dt
k
→ C + D (réaction 1)
A + B 
k
D 
→ A + X (réaction 2)
k
2 A 
→ E
(réaction 3)
 d [A] 
α
β
• Si la réaction (1) a lieu toute seule, on peut écrire : v1 = − 
= k1 [ A ] [ B]
 dt 

1
 d [A] 

 représente la dérivée de A par rapport au temps en tenant comte uniquement de la réaction (1).
 dt 1
 d [A] 
γ
• Si la réaction (2) a lieu toute seule, on peut écrire : v2 = 
= k2 [ D ]
 dt 

2
1
2
3
 d [A] 

 représente la dérivée de A par rapport au temps en tenant comte uniquement de la réaction (2).
 dt  2
 d [A] 
δ
Si la réaction (3) a lieu toute seule, on peut écrire : v3 = − 
= k3 [ A ]
 dt 

3
Pendant dt, la concentration de A peut varier à cause des réactions chimiques (1), (2) et (3).
La variation globale de A est due à la variation de A due à la réaction (1) + variation de A due à la réaction (2) +
variation de A due à la réaction (3). Soit d [ A ] = ( d [ A ]) + ( d [ A ]) + ( d [ A ]) . On obtient :
•
1
2
3
d [A]  d [A]   d [A]   d [A] 
d [A]
=
+
+
. On en déduit :
= −v1 + v2 − 2v3
 dt   dt   dt 
dt
dt

1 
2 
3
Bilan : Quand on a trois réactions chimiques simultanées, il faut être capable d’écrire très rapidement :
d [A]
α
β
γ
δ
= −k1 [ A ] [ B] + k2 [ D ] − 2k3 [ A ]
dt
Moyen mnémotechnique : si A est un réactif : signe (–). Si A est un produit : signe (+). On met devant le
signe (+) ou (–) le coefficient stœchiométrique devant A.
II. RÉACTIONS OPPOSÉES (OU INVERSABLES)
k

→ CH3COOC2H5 + H2O (réaction d’estérification).
Exemple : C2H5OH + CH3COOH ←

k
1
−1
C’est une réaction dont le terme est gouverné par un équilibre chimique, c'est-à-dire qu’à l’état final, vont
coexister réactifs et produits. Cette réaction est gouvernée par une constante thermodynamique d’équilibre (voir
chapitre sur la constante d’équilibre).
II.1 Premier exemple d’une réaction opposée d’ordre 1
Soit la réaction : 2A R B. On a une seule réaction chimique. On fera donc un seul tableau de matière. Par
d [A]
k
→B
2A 
, on la décomposera en deux réactions simultanées : 
k
dt
B → 2A
d [A]
On a vu au paragraphe précédent la méthode pour obtenir
.
dt
d [A]
= −2k1 [ A ] + 2k−1 [ B]
dt
On ne peut pas séparer les variables pour intégrer car on a trois variables : A, B et t. A et B ne sont pas
indépendantes.
contre, par commodité pour écrire
Q Cinétique chimique (40-104)
1
−1
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Il suffit de faire un tableau de matière en concentrations pour exprimer A et B en fonction de l’avancement
volumique x.
R
B
2A
a0
b0
b0 + x
a0 – 2x
d [A]
dx
On a alors
=−
; [ A ] = a0 − 2 x et [ B] = b0 + x .
dt
dt
dx
On obtient alors : −2
= −2k1 ( a0 − 2 x ) + 2k−1 ( b0 + x ) , soit
dt
dx
+ ( 2k1 + k−1 ) x = ( k1 a0 − k−1b0 ) (Équation 1)
dt
On reconnaît une équation différentielle du premier ordre à coefficients constants avec un second membre
dx
= 0 . On a :
constant. Avant de la résoudre, on peut la simplifier en se plaçant à l’équilibre : x = xe et
dt
0 + ( 2k1 + k −1 ) xe = ( k1 a0 − k−1b0 ) (Équation 2)
t=0
t
En faisant la différente (1) – (2), on obtient :
dx
+ ( 2k1 + k−1 ) x = ( 2k1 + k−1 ) xe .
dt
La résolution se fait en quatre étapes :
• Solution générale de l’équation homogène (ou régime libre) : xSG = λ exp ( − ( 2k1 + k−1 ) t )
•
Solution particulière de l’équation sans second membre (ou régime forcé ou régime permanent) :
xSP = xe
•
x = xSG + xSP = λ exp ( − ( 2k1 + k−1 ) t ) + xe
•
Détermination de la constante d’intégration λ en utilisant les conditions initiales.
À t = 0, x = 0 = λ + xe , d’où λ = − xe .
(
On obtient : xSG = xe 1 − exp ( − ( 2k1 + k−1 ) t )
La constante d’équilibre vérifie : K =
[ B]
[A]
eq
2
eq
=
)
(b
0
(a
0
+ xe )
− 2 xe )
2
II.2 Deuxième exemple d’une réaction opposée d’ordre 1
k

→ B. On peut utiliser la même méthode que précédemment pour déterminer xe et x
Soit la réaction : A ←

k
1
−1
en fonction du temps.
Dans ce cas particulier, on peut exprimer facilement K en fonction de k1, k–1.
d [A]
= −k1 [ A ] + k−1 [ B]
dt
[ B]eq k1
d [A]
= 0 = −k1 [ A ]eq + k−1 [ B]eq . Soit
=
.
À l’équilibre,
dt
[ A ]eq k−1
On a donc une relation entre une grandeur caractérisant la thermodynamique (situation à l’équilibre)
k
et des grandeurs cinétiques (vitesse avec laquelle le système évolue) : K = 1 .
k−1
k

→ B et ne doit pas être utilisée si l’énoncé ne le
Attention : Cette relation n’est valable que pour A ←

k
1
−1
précise pas.
Q Cinétique chimique (40-104)
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III. RÉACTIONS SUCCESSIVES OU CONSÉCUTIVES
La réaction globale résulte d’un ensemble de réactions au cours desquelles les réactifs fournissent des produits
intermédiaires qui se décomposent eux-mêmes en d’autres réactifs.
β
β
Exemple : filiation radioactive (désintégration β − = −10 e ) : 239
U 
→ 23993 Np 
→ 239
Pu .
92
94
−
−
III.1 Calcul général
k
→B
A 
On considère les réactions successives d’ordre 1 : A 
→ B 
→ C . On peut écrire : 
k
B
C

→

À t = 0 : [A]0 = a0 et [B]0 = [C]0 = 0.
1
k1
k2
2
a) Loi cinétique
Méthode 1 utilisée en TD d’informatique :
On a deux réactions chimiques. On définit un avancement pour chaque réaction. La difficulté est que B
appartient aux deux réactions chimiques. On peut commencer par faire deux tableaux de matière « comme
si » les réactions étaient indépendantes. Pour regrouper les deux, il suffit de remarquer que la réaction (1)
apporte x moles par litre de B et la réaction (2) consomme y moles par litre de B, d’où x – y.
A
→
B
B
→
C
t=0
a0
0
0
0
t
a0 – x
x
x–y
y
d A 
d B
On peut en déduire deux équations différentielles sur x et y en écrivant :   et   .
dt
dt
d
x

 dt = k1 ( a0 − x )
d A 
d B
= − k1 A  et
= k1 A  − k2 B , d’où 
dt
dt
 dx − dy = k ( a − x ) − k ( x − y )
1
0
2
 dt dt
Méthode 2 utilisée pour la suite du cours :
 d [A]
= −k1 [ A ]

 dt
 d [ B]
= k1 [ A ] − k2 [ B]

 dt
 d [ C]
= k 2 [ B]

 dt
On a des équations différentielles couplées.
d [ A ] d [ B] d [ C ]
+
+
= 0 . C’est prévisible par la conservation de la matière :
On remarque que
dt
dt
dt
[A]+[B]+[C] = [A]0 + [B]0 + [C]0 = a0. On pourra en déduire [C] en fonction de [A] et [B].
Pour finir la résolution, on peut résoudre l’équation (1) puis la (2) et en déduire [C].
b) Calcul des concentrations au cours du temps
d [A]
+ k1 [ A ] = 0 . On a alors :
• La première équation s’écrit :
dt
[ A ]0 = α = a0 . On a donc : [ A ] = [ A ]0 exp ( −k1t ) .
•
La deuxième équation est :
d [ B]
dt
= k1 [ A ] − k2 [ B] , soit
d [ B]
dt
[ A ] = α exp ( −k t ) .
1
À t = 0,
+ k2 [ B] = k1 a0 exp ( − k1t ) . La résolution
se fait en 4 étapes :
o Régime libre : [ B]SG = λ exp ( −k2 t )
o
Régime forcé : On cherche une [ B]SP de la même forme que le second membre, c'est-à-dire
sous la forme d’une exponentielle : [ B]SP = µ exp ( − k1t ) . Pour déterminer µ , il suffit de
réinjecter dans l’équation différentielle :
d [ B]SP
dt
= − k1 µ exp ( −k1t )
−k1 µ exp ( −k1t ) + k2 µ exp ( − k1t ) = k1 a0 exp ( − k1t ) , d’où µ =
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k1
a0
k2 − k1
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[ B] = λ exp ( −k t ) + k
o
À t = 0 : [ B]0 = 0 = λ +
2
[ B] = k
•
k1
a0 exp ( − k1t )
− k1
2
o
−k1
k1
a0 . On a finalement :
a0 , soit λ =
k2 − k1
k2 − k1
k1
a0 ( exp ( −k1t ) − exp ( − k2 t ) )
− k1
2
On en déduit [ C ] = a0 − [ A ] − [ B]
c) Étude graphique
 d [ A ] 

 = −k1 [ A ]0 = − k1 a0
 dt 0

 d [ B] 
Pente à t = 0 : 
 = k1 [ A ]0 − k2 [ B]0 = k1 a0

 dt 0

 d [ C] 
 dt  = k2 [ B]0 = 0
0

Extremum de [B] :
d [ B]
dt
= 0 pour t = tM. On a vu que
k1 = 1 s-1
k2 = 2 s-1
d [C]
dt
= k2 [ B] , soit
d 2 [ C]
dt
2
= k2
d [ B]
dt
.
[C] en fonction du temps admet donc un point d’inflexion en tM.
k
ln 2
k1
k1
.
a0 − k1 exp ( − k1t ) + k2 exp ( − k2t ) = 0 pour k1 exp ( − k1tM ) = k2 exp ( − k2tM ) , soit tM =
=
k2 − k1
dt
k2 − k1
d B
(
)
Le concentration de A baisse et n’est pas influencée par les réactions ultérieures.
B ne s’accumule pas indéfiniment. Il se transforme en C d’autant plus vite que le concentration de B est
grande.
C n’apparaît que très lentement au début de la réaction, le temps que B s’accumule.
III.2 Étude de deux cas particuliers
k1 = 20 s-1
k2 = 1 s-1
k1 = 1 s-1
k2 = 50 s-1
a) Cas particulier où k1 >> k2
k
k
A 
→ B 
→C
1
2
On définit un temps τ tel que k1τ 1 . Pour t > τ , on a exp ( −k1t ) exp ( − k2 t ) .
Soit [ A ] ≈ 0; [ B] ≈ a0 exp ( − k2 t ) et [ C] ≈ a0 (1 − exp ( − k2 t ) )
L’étape 1 est rapide alors que l’étape 2 est lente. B est une espèce qui est produite très rapidement et
consommée très lentement. La vitesse globale de réaction est conditionnée par l’étape 2.
L’étape 2 est l’étape cinétiquement limitante (ou déterminante).
Q Cinétique chimique (40-104)
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b) Cas particulier où k2 >>k1
k
k
A 
→ B 
→C
1
2
On définit un temps τ tel que k2τ 1 . Pour t > τ , on a exp ( −k2 t ) exp ( − k1t ) .
Soit [ A ] ≈ a0 exp ( −k1t ) ; [ B] ≈
d [ B]
dt
k1
k
a0 exp ( − k2 t ) ≈ 1 [ A ] ≈ 0 et [ C] ≈ a0 (1 − exp ( − k1t ) )
k2
k2
= k1 [ A ] − k2 [ B] = k1 [ A ] − k2
d [ B]
k1
≈0
A ] ≈ 0 . On obtient
[
dt
k2
L’étape 1 est l’étape lente et l’étape 2 est l’étape facile. On ne peut pas dire que l’étape 2 est rapide car
elle est précédée par une étape lente qui impose sa vitesse.
B est une espèce produite très lentement et consommée très rapidement : sa concentration dans le milieu
reste très faible.
L’étape 1 est l’étape cinétiquement limitante (ou déterminante).
III.3 AEQS ou principe de Bodenstein
Dans le deuxième cas particulier ci-dessus, B jour le rôle d’un intermédiaire réactionnel dans la réaction
A → C, c'est-à-dire que sa concentration n’apparaît pas dans la conservation de la matière : [ A ] + [ C] ≈ a0 .
Écrire que
d [ B]
dt
= 0 revient à appliquer l’AEQS (principe de l’état quasi stationnaire ou principe de
Bodenstein) qui s’appliquera systématiquement aux espèces très réactives et en faible concentration
dans le chapitre sur les mécanismes réactionnels.
III.4 Approximation de l’étape cinétiquement limitante
On généralise les résultats établis précédemment.
La vitesse de formation d’une espèce produite par une série de réactions élémentaires successives est
déterminée par l’étape présentant la plus faible constante de vitesse. Cette étape est appelée étape
cinétiquement limitante (ou déterminante) et impose sa vitesse aux étapes suivantes et donc à la réaction
globale de formation de l’espèce considérée.
IV. RÉACTIONS PARALLÈLES OU CONCURRENTES
IV.1 Définition
a) Réactions jumelles
k
A + B 
→ C+D
1
k
→ C’ + D’
A + B 
2
Ces deux réactions ont lieu simultanément. Elles sont appelées réactions jumelles car on a les mêmes
réactifs pour les deux réactions.
b) Réactions parallèles
k
A + B 
→ C+D
1
k
→ C’ + D’
A + B’ 
2
Ces deux réactions sont parallèles car on a au moins un réactif commun.
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IV.2 Étude de réactions jumelles
k
A + B 
→ C+D
1
k
→ C’ + D’
A + B 
On considère deux réactions chimiques dont les ordres partiels sont égaux à 1. On définit un avancement
pour chaque réaction. La difficulté est que A et B appartiennent aux deux réactions chimiques. On peut
commencer par faire deux tableaux de matière « comme si » les réactions étaient indépendantes. Pour
regrouper les deux, il suffit de remarquer que la réaction (1) consomme x moles par litre de B et la réaction
(2) consomme y moles par litre de B.
A
+
B
→ C+D
A
+
B
→ C’ +
D’
t=0
a0
b0
0 0
a0
b0
0
0
t
a0 – x – y
b0 – x – y x x
a0 – x – y
b0 – x – y y
y
d [A]
= −k1 [ A ][ B] − k2 [ A ][ B] = − ( k1 + k2 ) [ A ][ B] , d’où
dt
2
d( x + y)
dt
= ( k1 + k2 )( a0 − x − y )( b0 − x − y )
Il reste à trouver une relation entre x et y.
Dans le cas de réactions jumelles, on aura une relation simple en écrivant
d [ C]
dt
= k1 [ A ][ B] et
d [ C']
dt
d [C]
dt
et
d [ C']
dt
.
= k 2 [ A ][ B] .
En faisant le quotient des deux réactions, on a
d [ C]
d [ C']
En intégrant entre t = 0 et t, on obtient : [ C] − 0 =
=
k1
k
. On sépare les variables : d [ C] = 1 d [ C'] .
k2
k2
k1
[C'] − 0 .
k2
[ C] =
[C']
x k1
=
y k2
Les concentrations de C et C’ sont dans un rapport constant. On dit que l’on a un contrôle cinétique.
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