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ORCHESTRA DI PIAZZA VITTORIO
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DOSSIER PÉDAGOGIQUE
Dossier proposé dans le cadre du dispositif Lycéens à l’Opéra, financé par la Région Rhône-Alpes.
Dossier réalisé sous la direction de David Camus
Coordination générale Élodie Michaud
Rédaction des textes Jonathan Parisi
Suivi de fabrication Aurélie Souillet
Document disponible en téléchargement sur
www.operatheatredesaintetienne.fr
Contacts
Fanny Loingeville
Chargée du développement des publics
04 77 47 83 60 / [email protected]
Clarisse Giroud
Chargée de la médiation et de l'action culturelle
04 77 47 83 62 / [email protected]
« CARMEN »
ORCHESTRA DI PIAZZA VITTORIO
Élaboration et arrangement musical Mario Tronco et Leandro Piccioni
Direction artistique et musicale Mario Tronco
Chorégraphie Giorgio Rossi
Chef de chœur Laurent Touche
Conception décor et mise en espace Lino Fiorito
Adaptation du livret, chœur et transitions Serge Valletti
Création lumières Bruno Marsol
Costumes Katia Marcanio
Ingénieur du son Gianni Istroni
Son plateau Francesco Ferraioli
Accompagnement du projet Giacomo Scalisi
Carmen Cristina Zavalloni
Don Jose, harmonium, castagnettes Sanjay Khan
Micaela Elsa Birgé
Orchestra di Piazza Vittorio
Escamillo Houcine Ataa
Zuniga, flûtes Carlos Paz Duque
Le Dancaïre, gitan, trompette Omar Lopez Valle
Contrebandier, gitan, percussion Ernesto Lopez Maturell
Remendado, gitan, djembé, dumdum El Hadij Yeri Samb (Pap)
Basse et contrebasse Pino Pecorelli
Percussions Raul Scebba
Pianoforte, synthétiseur Leandro Piccioni
Oud Ziad Trabelsi
Cymbalum Marian Serban
Guitares Emanuele Bultrini
Musiciens invités
Violon Ion Stanescu
Trombone, accordéon, synthétiseur Simon Sieger
Clarinette Paolo Rocca
Artistes du Chœur Lyrique et de l’Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire
dirigés par Leandro Piccioni
Formation Dhoad
Tablas Amrit Hussain
Voix Percussion Jhori Mahendra, Kular, Sarwar
Danseuses Sapera Ganga, Sapera Manju, Sapera Chanda
Romafest
Danseurs Ovidio Toti, Vizi Dezso, Adam Josef, Biga Imre
Voix off
Gwenaël Morin, Virginie Colemyn
Grand Théâtre Massenet
Jeudi 17 octobre : 20h
Vendredi 18 octobre : 20h
Samedi 19 octobre : 18h
Durée 1h35 sans entracte - En français surtitré
Production Les Nuits de Fourvière / Département du Rhône
L’Orchestra di Piazza Vittorio a été créé par Mario Tronco et Agostino Ferrente
Coproduction Opéra Théâtre de Saint-Étienne
Costumes et décors réalisés dans les ateliers de l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne
SOMMAIRE
p.06 p.13 p.20 p.25 DÉCOUVERTE
DE L’ŒUVRE
Georges Bizet
La genèse de Carmen
Personnages et argument
Guide d'écoute
CARMEN
ÀUne L’OPÉRA
THÉÂTRE DE SAINT-ÉTIENNE
production atypique
Les maîtres d'œuvre
Les solistes
L'orchestre et les chœurs
Iconographie commentée de la production
PISTES
PÉDAGOGIQUES
Piste 1 - Carmen ou l'émancipation féminine
Piste 2 - Mettre en scène la mutinerie des cigarières
Piste 3 - Carmen dans tous ses états...
RESSOURCES
SUPPLÉMENTAIRES
L’Opéra Théâtre de Saint-Étienne / Présentation générale
Petite histoire d’une production
ANNEXES
p.28 Voix et tessitures
Composition de l'orchestre
Glossaire
Bibliographie sélective
DECOUVERTE
DE L'OEUVRE
GEORGES BIZET (Paris 1838 - Bougival 1875)
Né en 1838 à Paris,
Alexandre César Léopold
Bizet reçoit lors de son baptême le prénom de Georges
(l'usage voulait alors qu'un
enfant reçoive un prénom
supplémentaire à cette
occasion).
Il est le fils d'une pianiste et
Georges Bizet, photographie
d'un perruquier, reconverti
d'Étienne Carjat
un an avant sa naissance en
professeur de chant. Les premiers enseignements musicaux du jeune Bizet sont alors assurés par ses parents euxmêmes. Tandis que la famille entière jusqu'à son oncle
François Delsarte, professeur de chant très réputé, l'immerge dans la musique, Georges montre d'étonnantes
dispositions. À l'âge de neuf ans, il entre au Conservatoire
de Paris où il étudie le piano, l'orgue, l'harmonie et la composition. Diplômé d'un premier prix de piano en 1852, il
obtient en 1855 un premier prix d'orgue et de fugue, avant
de composer en un mois seulement sa première symphonie, la Symphonie en ut majeur.
En 1857, Bizet participe à un concours d'opérette* organisé par Offenbach. Sa première œuvre scénique,
Le Docteur Miracle, remporte alors le premier prix ex
aequo avec celle de Charles Lecocq. Composées sur le
même livret imposé, les deux opérettes seront jouées en
alternance au Théâtre des Bouffes-Parisiens. Cette même
année, alors qu'il n'a que 19 ans, Bizet obtient le Grand
Prix de Rome pour sa cantate Clovis et Clotilde (prix le plus
prestigieux pour un compositeur). Il s'installe ainsi pour
trois années à la Villa Médicis, lieu qui offre un cadre de
travail idéal aux jeunes lauréats.
En 1860, c'est dans une situation précaire qu'il
rentre à Paris. En pianiste brillant, Bizet retranscrit
de nombreuses œuvres célèbres pour le piano, ce
qui lui permet de subsister. Divers projets d'opéras
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vont également l'occuper, mais cherchant toujours
une forme de perfection musicale, Bizet se refusera à
l'écriture facile, flattant les oreilles du public bourgeois.
Il détruira alors de nombreuses partitions avant de les
achever. Ce n'est qu'en 1863, lorsque Léon Carvalho,
directeur du Théâtre-Lyrique, lui commande un opéra
que le compositeur parvient au bout de son entreprise.
Les Pêcheurs de perles sont ainsi joués lors de dix-huit
représentations et rencontrent un succès mitigé malgré les critiques très encourageantes de confrères tels
que Berlioz. Quelques années plus tard, Bizet épouse
Geneviève Halévy et intègre ainsi une grande famille juive
très influente dans le Paris de l'époque. En effet, le père
de Geneviève était non seulement le professeur de composition de Bizet, mais également compositeur, membre
de l'Institut et secrétaire perpétuel de l'Académie des
Beaux-Arts, tandis que son cousin Ludovic Halévy était un
librettiste réputé (il réalisera d'ailleurs le livret de Carmen
avec Henri Meilhac).
Après la guerre de 1870, Bizet est nommé chef des
chœurs de l'Opéra de Paris, mais il se retire au bout d'une
petite année, préférant le poste de chef de chant qu'on lui
propose à l'Opéra-Comique. C'est dans cette salle qu'il
créé Djamileh en 1872, année où il compose également
L'Arlésienne, son premier grand succès, et la suite pour
piano à quatre mains Jeux d'enfants, probablement sa
pièce la plus inspirée, la plus libre et la plus personnelle.
Son style s'affirmant peu à peu et s'affranchissant du carcan social dans lequel il évolue, Bizet se penche sur son
nouveau projet, un opéra réaliste mettant en scène non
pas de riches princes et bourgeois, mais des bohémiens
et contrebandiers : Carmen.
Malheureusement, le 3 juin 1875, soit trois mois exactement après la création de Carmen, Bizet meurt subitement, sans pouvoir profiter de la consécration de ce qui
reste aujourd'hui encore le plus grand chef d'œuvre de
l'opéra français.
Carmen un opéra-comique ?
OUI ! Même si l'héroïne meurt à la fin de l'œuvre, Carmen est bien un opéra-comique ! Tout simplement parce
que le terme d'opéra-comique ne veut en aucun cas dire que l'œuvre est drôle. Il s'oppose seulement au genre
de l'opéra (tout court), entièrement chanté et ne pouvant être joué qu'à l'Opéra de Paris (actuel Opéra Garnier).
Carmen est une œuvre où alternent passages chantés et passages parlés, et relève ainsi de l'opéra-comique, genre
qui constitue le répertoire de la salle du même nom : l'Opéra-Comique (sur l'actuelle place Boieldieu).
*
les termes suivis d'un astérisque sont à retrouver dans le glossaire p29
LA GENÈSE DE CARMEN
Durant l'été 1872, alors qu'il organise les répétitions de
L'Arlésienne, Bizet médite déjà son futur projet. Ainsi,
quand les directeurs de l'Opéra-Comique, Messieurs
Du Locle et Leuven, lui commandent une nouvelle
œuvre, le compositeur s'entoure des librettistes Henri
Meilhac et Ludovic Halévy et propose immédiatement
Carmen.
Si Du Locle se montre peu enthousiaste, il reste moins
catégorique que Leuven qui trouve impensable que le
rôle-titre puisse être assassiné sur la scène de l'OpéraComique : « Carmen ! ... La Carmen de Mérimée ? ... Est-ce
qu'elle n'est pas assassinée par son amant ? ... Et
ce milieu de voleurs, de bohémiennes, de cigarières ! ...
À l'Opéra-Comique ! ... Le théâtre des familles ! ...
Le théâtre des entrevues de mariages ! ... Nous avons,
tous les soirs, cinq ou six loges louées pour ces
entrevues... Vous allez mettre notre public en fuite...
C'est impossible ! » (LACOMBE, Georges Bizet).
Promettant d'accentuer l'esprit coloré et enthousiaste
de l'œuvre en adoucissant les traits les plus noirs du
drame, Halévy remporte finalement l'approbation
de Leuven qui conclue néanmoins leur entretien en
lançant : « Je vous en prie, tâchez de ne pas la faire
mourir ». Six mois plus tard, alors que Bizet cherche
déjà l'interprète idéale pour le rôle-titre, Leuven
démissionne de son poste de directeur ; le maintien de
Carmen au programme de l'Opéra-Comique demeure
sans doute parmi les raisons de son départ.
Pourtant, lors de l'écriture du livret, Meilhac et Halévy
atténuent considérablement la noirceur de la nouvelle
de Mérimée. Les librettistes ajoutent même de
nouveaux personnages plus rassurants, dont Micaëla
qui se pose comme l'alternative féminine douce et
romantique, et passent sous silence certains épisodes
comme la prostitution de Carmen.
Convaincu de tenir un sujet non seulement pertinent,
mais capable de faire éclore son style compositionnel,
Bizet participe activement à la rédaction du livret. Le
compositeur veille à l'agencement des scènes, à la
cohérence de l'évolution dramatique. Il réécrit même
certains passages entiers du texte, expliquant qu'il
souhaite entendre précisément tel ou tel mot dans
la bouche de ses personnages. Le texte final de la
Habanera, par exemple, demeure presque entièrement
de la main du compositeur, qui se révéla bien plus
inspiré que Halévy !
Le choix du rôle-titre va également mobiliser toute
l'énergie de Bizet, car il faut trouver à la fois une
chanteuse et une actrice ; certaines interprètes
pressenties ont par ailleurs refusé le contrat, refroidies
par cette fin tragique et le tempérament débridé du
personnage ! Dans ce panorama peu favorable, une
chanteuse semble pourtant vouloir interpréter le rôle de
Carmen plus que toute autre : il s'agit de Célestine GalliMarié. En effet, la mezzo-soprano alors âgée de trentecinq ans défend, tout comme Bizet, une conception
nouvelle du mouvement scénique, plus vraie, et surtout
affranchie des poses stéréotypées de l'époque. Bizet
pousse alors Du Locle à signer rapidement l'accord qui
engage Galli-Marié. Connaissant la situation financière
difficile de l'Opéra-Comique, celle-ci acceptera même
de réduire ses cachets pour être sûre que l'œuvre voie
le jour.
C'est en octobre 1874 et dans un contexte compliqué
que les répétitions commencent. La partition est jugée
trop difficile et met en difficulté certains musiciens et
chanteurs. De la même manière, les audaces de Bizet
quant à la mise en scène sont montrées du doigt et
perçues comme des atteintes à la tradition. Mais plus
encore, il semblerait que Du Locle ne croit pas au
succès de Carmen. Ne misant pas sur l'œuvre pour
relever la situation financière de l'Opéra-Comique,
le directeur se désinvestit alors totalement du projet,
au point de ne prendre part ni à la conception des
costumes, ni à celle des décors, et de confier la mise
en scène à Charles Ponchard, son régisseur de scène.
Bizet ne reçoit d'ailleurs pas plus de soutien de la part
de ses librettistes, craignant bien trop de risquer leur
réputation auprès du public des "honnêtes gens".
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Le 3 mars 1875, devant Gounod, Delibes, Massenet,
Offenbach, Daudet ou encore Dumas fils, Carmen
est créée. L'œuvre suscite immédiatement les plus
vives critiques. Si la musique est jugée hybride, c'est
la condamnation morale du livret et du personnage
de Carmen qui se fait la plus virulente. Carmen est
traitée de « louve dans la bergerie », « bête fauve
», « abominable rôle qu'on ne devrait jamais porter
à la scène » (articles de presse au lendemain de la
première). Les critiques jouent même aux redresseurs
de l'ordre social : « il faudrait la bâillonner et mettre un
terme à ces coups de hanches effrénés en l'enfermant
dans une camisole de force après l'avoir rafraîchie
d'un pot à eau versé sur la tête » (Le Siècle, 8 mars
1875). Bref ! Il semblerait que le public parisien "bien
pensant" de la fin du XIXe siècle ne soit pas prêt à voir
sur scène une femme qui puisse simplement séduire
les hommes plutôt que de se laisser séduire !
Malgré ce contexte de création peu engageant, Carmen,
proposée dans sa version avec récitatifs chantés (les
dialogues parlés étant inexécutables à l'étranger) sera
jouée à Vienne en octobre 1875, puis à Stockholm,
Saint-Pétersbourg, Londres, New-York, Dublin en
1878, rencontrant chaque fois un succès plus grand.
L'audace de Bizet reste, aujourd'hui encore, d'avoir su
montrer des êtres de chair et de sang, en mouvement,
pris dans des enjeux sociétaux plus grands qu'eux et
non figés dans une "réalité artificielle".
Carmen, de la condamnation à la consécration...
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Peu soutenue par le directeur de l'Opéra-Comique qui
ne croit pas en son possible succès, malmenée par
les chanteurs qui n'en comprennent pas la musique,
descendue par la critique dès le lendemain de la première,
Carmen n'était vraiment pas destinée à devenir ce chefd'œuvre universellement connu.
Lors des répétitions, on raconte même que les interprètes
de Carmen et Don José, tout deux fidèles à Bizet, ont
menacé de quitter la pièce si l'on s'opposait encore aux
volontés du compositeur. Mais à force d'acharnement et
de conviction, Bizet aura réussi à faire éclore une œuvre
dont la plus grande qualité reste la sincérité, musicale
comme dramatique.
De célèbres critiques...
Saint-Saëns : « Enfin j'ai vu Carmen, c'est un chef d'œuvre
et je ne te l'envoie pas dire. »
Nietzsche à propos de la Habanera : « C'est un exercice de
séduction, irrésistible, satanique, ironiquement provocant.
C'est ainsi que les anciens imaginaient Eros. Je ne connais
rien de semblable en musique. » (Lettres à Peter Gast)
Théodore de Banville, lui, approuve la disparition de « ces
jolies poupées bleu ciel et rose qui firent la joie de nos pères
au profit de vrais hommes et de vraies femmes, éblouis et
torturés par la passion. » (Le National, 8 mars 1875)
Nietzsche : « Cette œuvre délivre ! [...] J'envie Bizet d'avoir
eu le courage de cette sensibilité plus méridionale, plus
brune, plus brûlée... Enfin l'amour, l'amour re-transposé
dans la nature originelle... L'amour dans ses moyens de
guerre, dans son principe de haine mortelle des sexes. »
(Lettres à Peter Gast)
Célestine Galli-Marié de l'Isle dans Carmen,
peinture de Doucet, 1886.
PERSONNAGES ET ARGUMENT
Personnages principaux
L’action en deux mots…
Carmen (mezzo-soprano) - bohémienne
Don José (ténor) - brigadier
Escamillo (baryton) - célèbre toréro
Micaëla (soprano) - jeune paysanne
Frasquita (soprano) - bohémienne amie de Carmen
Mercédès (mezzo-soprano) - bohémienne amie de Carmen
Le Dancaïre (baryton) - contrebandier
Le Remendado (ténor) - contrebandier
Moralès (baryton) - brigadier
Zuniga (basse) - lieutenant
Carmen, cigarière au charme dévastateur, est
conduite en prison suite à une émeute ayant
éclaté à la manufacture de tabac. Mais tandis
que le brigadier Don José la surveille, celle-ci
use de ses charmes pour s'enfuir. Désormais
fou d'amour pour la jeune bohémienne, Don
José n'aura de cesse de la retrouver. Mais
l'insaisissable Carmen a déjà en tête bien
d'autres projets...
Argument
Acte I : Sur une place à Séville, des soldats désœuvrés
attendent la relève de la garde tout en observant les
cigarières travaillant à la manufacture. Micaëla, une jeune
navarraise, cherche en vain Don José, un brigadier auquel
elle fut promise en mariage. Bousculée par les soldats
entreprenants, elle repart. C'est l'heure de la pause
pour les cigarières qui se pressent à l'extérieur. Parmi
elles, Carmen, clamant l'amour frivole et ses plaisirs
(Habanera), fait une apparition remarquée de tous. Tous,
sauf Don José qui se tient volontairement à l'écart. Ne
supportant pas ce désintérêt pour son numéro, Carmen
décide de narguer le brigadier. Elle décroche alors une
fleur de son corsage et la lance à Don José, déjà envoûté.
Plongé dans ses pensées, Don José reçoit la visite de
Micaëla qui lui apporte des nouvelles de sa mère et du
pays. Mais une bagarre éclate à la manufacture et deux
cigarières, dont Carmen, sont interrogées. Comme elle
provoque ouvertement les soldats qui la questionnent,
Don José reçoit l'ordre de conduire Carmen en prison.
Sur le chemin, alors qu'elle achève de le séduire, Don
José desserre quelque peu la corde, lui permettant de
s'enfuir...
pour lui, cherchant à le posséder toujours plus et lui
proposant même de la suivre dans la montagne. Mais
les clairons sonnent bientôt la garde et Don José doit
se présenter à l'appel. Carmen l'accuse alors de ne pas
l'aimer réellement. Quand Zuniga, lui aussi charmé
par Carmen, frappe à la porte, une bagarre éclate entre
les deux soldats. Les contrebandiers séparent les deux
hommes et ligotent Zuniga, obligeant désormais Don
José à déserter...
Acte III : Dans la montagne, Carmen subit les reproches
de Don José qui la tient pour coupable de la perte
de son honneur. Elle tire les cartes avec Frasquita et
Mercédès qui se voient chacune un avenir heureux ;
mais à son tour, c'est inlassablement la même
prédiction funeste : la mort. Alors qu'il monte la garde,
Don José aperçoit un homme en approche. C'est
Escamillo, venu jusqu'ici par amour pour Carmen. Ne
supportant pas l'intrusion de son rival, Don José défie
le toréro en duel. L'apparition successive de Carmen
puis de Micaëla, venue ramener José à la raison, met
un terme aux provocations des deux hommes. Tandis
qu'Escamillo convie Carmen aux prochaines fêtes de
Séville, Don José se résout à suivre Micaëla, tout en
avertissant Carmen, sur la menace, qu'ils se reverront...
Acte II : À la taverne de Lilas Pastia, à la tombée de la
nuit, les bohémiens se réunissent. Carmen et ses amies
Frasquita et Mercédès engagent une danse tandis
qu'une foule, célébrant la victoire d'Escamillo, fait son Acte IV : Dans les rues de Séville, la foule se presse à la
approche. Le célèbre toréador de Grenade profite alors corrida. Avant d'entrer dans l'arène, Escamillo répète à
de cette ovation publique pour séduire Carmen, qui fait Carmen tout l'amour qu'il lui porte. Mais Frasquita et
pourtant mine de lui résister.
Mercédès mettent Carmen en garde du retour de Don
L'aubergiste feint la fermeture de la taverne pour José, déjà dissimulé parmi les spectateurs.
permettre aux contrebandiers de se réunir et de Décidée à lui faire face une bonne fois pour toutes,
planifier leur prochain coup. Deux d'entre eux, Le Carmen rejoint Don José. Il se montre tour à tour
Dancaïre et le Remendado sollicitent alors l'aide de suppliant et menaçant, la confortant dans sa décision.
Carmen, Frasquita et Mercédès. Mais Carmen refuse Se dressant devant Don José et devant son propre
de prendre part à ce nouveau plan, prétextant être destin, Carmen lui rend la bague symbole de leur amour
amoureuse. Sorti de prison où il a été détenu un mois passé, tandis qu'elle reçoit les coups de poignard
Maquette
costume
de LalaMusique
parCarmen,
Marie-Frédérique
Fillon,rejoint
mise en scène
de Laurent Brethome.
pourdu
avoir
facilité
fuite de
Don José
désespérés
de son ancien amant...
enfin celle qui a hanté ses pensées. Carmen danse
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GUIDE D'ÉCOUTE
Le guide d'écoute suivant propose de découvrir
l'œuvre à travers 4 extraits musicaux parmi les plus
célèbres de la partition : le prélude, la habanera, la
chanson bohème et l'air du toréador.
Tout en découvrant les "tubes" de l'œuvre, il sera proposé de réfléchir à la vie d'une œuvre lyrique après sa
composition. En effet, la partition de Bizet, même si
elle tient toujours lieu de référence principale, est si célèbre à travers le monde qu'elle a pu inspirer des générations et des générations d'artistes. Reprise, réinterprétée, remodelée, parfois complètement réadaptée,
Carmen est une œuvre vivante qui peut prendre des
visages parfois surprenants ! C'est d'ailleurs ce que
propose l'Orchestra di Piazza Vittorio en présentant
une nouvelle version de Carmen très haute en couleurs et riche de nombreuses influences musicales.
Nous proposons alors pour chaque piste musicale
étudiée, d'observer une forme de réécriture ou
d'adaptation de Carmen, qu'elle soit orchestrale,
vocale, scénique, etc.
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Note
Les versions discographiques de Carmen sont si
nombreuses et souvent si différentes qu'il est très difficile
de n'en proposer qu'une seule. Nous conseillons alors
aux amoureux du timbre chaud et sensuel de La Callas
de se procurer la version enregistrée avec Georges Prêtre,
aux curieux souhaitant redécouvrir l'œuvre dans une
version plus contrastée d'écouter la version de Michel
Plasson avec le duo Gheorghiu / Alagna, ou encore de
se tourner vers la solide version de Claudio Abbado,
interprétée par Teresa Berganza (Carmen) et Placido
Domingo (Don José).
1 - Prélude
Le prélude de Carmen s'articule autour des trois thèmes principaux de l'œuvre : le thème de la corrida, le thème du
toréador et le thème du destin.
Le thème de la corrida situe l'œuvre dans son contexte géographique. Il pose le décor hispanisant, son esprit de fête,
vif, coloré et éclatant. Le thème, dans la tonalité* franche de La majeur, se développe dans un flot de doubles croches
et use de nombreux trilles* qui participent à l'effervescence générale et génèrent une très grande vitalité. L'orchestre
très fourni et jouant fortissimo* nous laisse imaginer cette foule dense et animée qui se presse à la corrida.
Le thème du toréador succède immédiatement à celui de la corrida. Les accords très secs et pompeux des
trompettes et des trombones accompagnent le thème joué par les cordes sur un rythme de marche très solennel.
Après une montée spectaculaire, c'est tout l'orchestre qui reprend ce thème à l'unisson*.
Le thème du destin, quant à lui, parcourt véritablement toute l'œuvre. Il apparaît toujours joué à l'orchestre et jamais
aux voix. Comme une sorte de prédiction, ce thème n'est jamais très loin, fréquemment réexposé, comme quelque
chose d'inéluctable, mais il n'est finalement ni connu, ni énoncé d'aucun personnage, excepté l'orchestre. Symbolisant
le destin tragique de Carmen, ce thème se construit sur la gamme tzigane* et utilise la seconde augmentée* (cercle
rouge), intervalle de couleur orientalisante. La courbe sinueuse de la mélodie traduit, quant à elle, non seulement le
tempérament imprévisible de Carmen, mais également le parcours tortueux de sa vie amoureuse.
Les différentes Carmen orchestrales
Vidéo surprenante du prélude de Carmen interprété par un orchestre d'Iphone !
https://www.youtube.com/watch?v=mHnfVGtniaY
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2 - Habanera - « L'amour est un oiseau rebelle... »
La Habanera de Carmen est certainement l'air le plus célèbre de la partition et probablement même, l'air le plus
célèbre de tous les opéras. La habanera est une danse traditionnelle espagnole dont l'origine est vraisemblablement
havanaise ; elle apparaît en Europe au XIXe siècle.
Le rythme habituel de la habanera, à 2 temps (croche pointée double croche, deux croches - voir cercle rouge),
installe ici un caractère très dansant, déhanché et du même coup sensuel, qui se prête parfaitement bien à la
situation dramatique. En effet, la très séduisante Carmen nous livre ici sa vision de l'amour, cet « oiseau rebelle
que nul ne peut apprivoiser ».
Les différentes Carmen vocales
La musique elle-même, son rythme, sa mélodie et son orchestration ne sont pas les seuls paramètres permettant
de faire de la Habanera ce moment si captivant et sensuel. Car, en effet, d'un chef d'orchestre à l'autre, d'une
chanteuse à l'autre, cet air (comme n'importe quel air d'opéra) peut prendre des visages très différents.
Nous proposons alors, pour comprendre l'importance de l'interprétation, de comparer différentes versions de la
Habanera, chantées par Maria Callas, Teresa Berganza, Régine Crespin, Julia Migenes et Angela Gheorghiu. Nous
pouvons alors nous demander ce que dégage chacune des voix entendues et tenter de trouver des adjectifs pour
les qualifier. Ainsi, laquelle de ces Carmen semble le mieux incarner votre vision du personnage ?
3 - Chanson bohème - « Les tringles des sistres* tintaient... »
Il s'agit bel et bien ici d'une chanson, puisque les personnages qui l'interprètent, Carmen, Frasquita et Mercédès,
se mettent eux-mêmes en scène dans la taverne de Lilas Pastia, en accompagnant leur chant par une danse.
Le thème musical par sa couleur, sonne typiquement andalou et progresse, à la manière du Boléro de Ravel,
selon un immense crescendo* et accelerando* orchestral (cercle rouge). L'effet ainsi provoqué est celui d'une danse
magique et ensorcelante de la part des zingarellas, qui dans des « tralala » répétés et accélérés, nous transmettent
à la fois toute leur ivresse, leur frénésie, leur fureur de vivre.
Les différents arrangements de Carmen
Extrait du film Carmen Jones d'Otto Preminger, où la chanson bohème
devient le tube jazzy d'un cabaret noir-américain !
https://www.youtube.com/watch?v=slb3EqGZMEY
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4 - Air d'Escamillo : « Votre toast je peux vous le rendre... »
L'air du toréador, s'il figure parmi les plus célèbres de l'œuvre, n'a pourtant pas été souhaité par Bizet mais par
ses librettistes qui avaient exigé à cet endroit de la partition un véritable air de bravoure. L'anecdote raconte même
que Bizet aurait confié son agacement au chef d'orchestre Charles Lamoureux : « Ah ! Ils veulent de l'ordure ! Et
bien ils en auront ! ». Cédant finalement, le compositeur aurait même apporté l'air à Halévy en disant : « Tiens !
Voici ta saleté ! ». L'air d'Escamillo est ainsi, non pas une "saleté", mais une page musicale très pompeuse
et conquérante, peignant un personnage plutôt arrogant. Et pour cause, l'air, loin d'être aisé pour le chanteur,
réclame un vaste ambitus* vocal, descendant jusqu'au si bémol grave (cercle gris) et montant jusqu'au fa aïgu
(cercle rouge).
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Les différentes Carmen scéniques
Remplissant sa mission désormais prépondérante d'aller à la rencontre de son public, l'opéra
s'invite parfois dans des lieux de notre quotidien, comme en témoigne cet air d'Escamillo
interprété sur une toute autre scène que celle d'un théâtre !
https://www.youtube.com/watch?v=bymQ0j4LcLY
« CARMEN »
À L’OPÉRA THÉÂTRE DE SAINT-ÉTIENNE
UNE PRODUCTION ATYPIQUE
Créée en juin 2013 dans le cadre des Nuits de Fourvière de Lyon, en collaboration avec l'Opéra Théâtre de SaintÉtienne, la version de Carmen de Mario Tronco et de l'Orchestra di Piazza Vittorio qu'il dirige a de quoi surprendre.
C'est une véritable relecture que cette production propose, tant au niveau musical que de l'adaptation du livret
et de la mise en scène. Elle pousse à l'extrême les notions de réadaptation et de réactualisation propres à toute
production lyrique (voir biographie de l'Orchestra di Piazza Vittorio p.17).
Pour cette production de Carmen, l'Orchestra di Piazza Vittorio collabore notamment avec des musiciens originaires
du Rajasthan et de la Roumanie, et des artistes du Chœur lyrique et de l'Orchestre Symphonique Saint-Étienne Loire.
Échange avec Mario Tronco
autour de son adaptation de Carmen
Sous quel angle avez-vous lu et réinventé l’histoire de
Carmen ?
Carmen est une histoire contemporaine : elle parle
d’une tragédie qui peut survenir chaque jour dans
le monde. On entend de plus en plus parler de ce
phénomène qu’on appelle le "féminicide" – à savoir ces
femmes qui meurent sous les coups, par jalousie, ces
"morts par amour", comme on les nomme. C’est un
fait aussi déconcertant qu’une guerre, et c’est ce que
nous voulons raconter : une histoire d’amour entre un
garçon et une femme plus âgée, qui finit en tragédie.
Nous voulons raconter la générosité des femmes,
et un peu l’égoïsme des hommes. Car les premières
aiment de manière passionnée, quand les seconds,
souvent, aiment l’idée de posséder… Cette histoire,
nous l’avons imaginée comme si elle se passait dans
deux mondes séparés : un monde terrestre, représenté
par une caravane de nomades qui va du Rajasthan vers
l’Espagne, et un monde supraterrestre, incarné par le
chœur de l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne. Le chœur
regarde cet autre monde, cette caravane qui passe sur
la terre, où a lieu cette énième tragédie de jalousie
qu’est Carmen. Et comme il a déjà vu cette histoire
des milliers de fois, il décide d’interagir avec elle : il
guide les personnages, leur donne des conseils, il va
même jusqu’à les remplacer. Il intervient donc un peu
comme le chœur grec, comme la Conscience : c’est un
personnage à part entière. L’histoire est la même que
celle de Carmen, mais nous avons beaucoup travaillé
sur la psychologie des personnages.
À ce propos, quels traits de caractère avez-vous donnés
à Carmen, Don José et Micaëla, qui forment le triangle
amoureux de cet opéra ? Et comment avez-vous arrêté
votre choix sur les solistes qui les interprètent ?
Nous n’avons pas imaginé une Carmen "mangeuse
d’hommes" et sans cœur, mais au contraire une Carmen
très amoureuse de Don José. Et c’est précisément
parce qu’elle en est très amoureuse qu’elle décide de le
sauver en le maltraitant, en le faisant s’éloigner d’elle ;
mais Don José est lui-même si épris d’elle qu’il reste
avec elle…
Je choisis toujours des acteurs qui présentent des
similitudes avec les caractères de leurs personnages.
Cristina Zavalloni est une force de la nature, une
femme dont l’énergie peut même faire peur : c’est
quelqu’un qui vous prend par la main et que vous
seriez prêt à suivre n’importe où, parce que, un peu
comme Carmen, elle vous entraîne… Sanjay Khan,
lui, est une âme pure, un garçon de 19 ans qui a un
rapport à l’amour totalement – et merveilleusement –
infantile. Il est d’une telle pureté qu’on peut l’imaginer
en devenir fou et tuer une femme… Quant à Elsa Birgé,
elle a à la fois le visage d’une enfant et la détermination
d’une femme forte : elle incarne donc d'une très belle
manière le rôle de Micaëla, qui est en fait une fausse
perdante. Dans Carmen comme dans notre spectacle,
c’est elle qui, à la fin, emportera Don José. Elle attendra
longtemps ; mais tôt ou tard, il lui reviendra.
13
14
Comme toujours avec l’Orchestra di Piazza Vittorio, la
musique elle-même raconte une histoire. Quel récit avezvous souhaité tisser en intégrant dans votre relecture de
Carmen des arrangements empruntés aux musiques du
Rajasthan ou de Roumanie ?
La culture gitane appartient au Rajasthan. Son voyage a
commencé là-bas il y a très longtemps – deux mille ans –
et a impliqué diverses parties du monde, des Balkans à
l’Espagne jusqu’au Maroc. Nous profitons de la grande
variété que nous avons sur scène, et de la présence de
musiciens originaires du Rajasthan et de la Roumanie,
pour raconter cette histoire en musique (voir Focus cidessous). Et cela donne effectivement un voyage tout
à fait cohérent. Quand nous avons commencé les
répétitions avec les musiciens du Rajasthan, le joueur de
cymbalum [le Roumain Marian Serban], les yeux pleins
de larmes, m’a dit : « Tu sais, Mario, ce sont eux, mes
ancêtres : moi, je viens de là, je suis leur descendant ».
Musicalement cela s’entend, c’est impressionnant :
même lorsqu’ils jouent ensemble pour la première
fois, ils connaissent les codes de manière atavique1.
Et ils interprètent de façon très naturelle la partition de
Carmen, même si elle est classique – il faut dire qu’elle
raconte le monde gitan d’une manière extraordinaire…
Quant à nous, d’une certaine façon, nous cherchons
aussi à apporter notre monde. Il s’agit d’une vraie
réécriture de Carmen, qui nous ressemble beaucoup,
qui ressemble à l’Orchestra di Piazza Vittorio.
Y a-t-il des moments où, tous deux, vous avez le sentiment
d’aller trop loin, de vous égarer dans ce travail de recherche
et d’invention qui est le vôtre ?
Bien sûr. Dans ce genre de tâche, il y a toujours des
moments de doute. Retravailler des opéras merveilleux
comme Carmen ne sert a priori à personne ! Et très
souvent, nous nous demandons en effet : « Mais
pourquoi ?... Cette œuvre est déjà tellement belle ! »
Cependant, il est intéressant de mettre en scène un
opéra avec des personnes qui ne viennent pas du
milieu de l’opéra, de le faire chanter par des interprètes
qui ne soient pas toujours des chanteurs lyriques, de
se réapproprier un répertoire populaire d’une manière
véritablement populaire. Si nous faisions jouer l’opéra
comme tel, nous n’y arriverions pas : ce n’est pas
dans notre culture ni dans nos capacités techniques.
Cette approche restitue une vérité à l’opéra, et même
quelquefois à la composition… Avec Leandro, nous
cherchons à mettre la composition à nu, à la rendre
la plus simple possible et à comprendre où se trouve
le centre de l’émotion. Même jouée à la guitare avec
des accords simples et chantée par une voix non
lyrique, une aria peut revêtir une très grande beauté ;
parce qu’elle atteint alors un niveau d’émotion qui
nous donne l’impression d’avoir compris ce moment
particulier où l’auteur l’a composée. C’est peut-être la
part la plus intéressante de notre travail – ou, tout au
moins, celle qui nous amuse le plus.
L’objet de l’Orchestra di Piazza Vittorio n’est pas
simplement de mélanger ou de juxtaposer des cultures et
des musiciens en apparence éloignés, mais bien de trouver
entre eux des liens cohérents, de voir comment ils peuvent
interagir et se répondre.
L’Orchestra di Piazza Vittorio est en fait une sorte de
miracle, et le grand mérite en revient aux musiciens,
qui sont des personnes curieuses, passionnées par les
cultures des autres. Je me souviens de notre premier
jour de répétition, il y a dix ans. Chacun regardait
l’instrument de l’autre en disant : « Qu’est-ce qu’il
est beau ! Mais comment est-ce qu’on l’accorde ? Et
celui-ci, quel son donne-t-il ? ». C’est cette curiosité
qui rend possible le travail sur les partitions que nous
accomplissons avec Leandro Piccioni.
Extraits d'une conversation avec Richard Robert,
Conseiller artistique aux Nuits de Fourvière
1 - dû à des habitudes ancestrales
Focus
Les Gitans Dhoad du Rajasthan (Nord-Ouest de
l'Inde) proposent une musique subtile, ethnique
et spirituelle, aux confluents des cultures gitanes,
hindoues et musulmanes, un mélange qui n’est
pas sans rappeler une musique sacrée du Pakistan.
LES MAÎTRES D’ŒUVRE
Mario Tronco
Direction artistique et
Lino Fiorito
Conception décor et
musicale
mise en espace
Né à Caserte en Italie,
Mario
Tronco
est
compositeur,
arrangeur
et pianiste. En 1980, il
commence à jouer avec
le groupe Piccola Orchestra Avion Travel avec lequel
il travaille pendant 25 ans. Après des débuts sur la
scène rock underground et une brève période pop à
la fin des années 80, le groupe est salué avec l'album
Bellosguardo (1992). La critique relève son originalité
et sa grande capacité à renouveler la tradition
de la chanson italienne, avec un style original,
sophistiqué, élégant et fluide. En 2000, il remporte
au festival de San Remo le prestigieux prix de la
critique et du jury (meilleure chanson et meilleurs
arrangements) pour Sentimento. Le besoin incessant
d’explorer de nouveaux horizons musicaux conduit
les membres d'Avion Travel à rechercher des projets
aussi différents que possible; c’est ainsi que Mario
Tronco crée l’Orchestra di Piazza Vittorio auquel il se
consacre à plein temps.
Léandro Piccioni
Élaboration et
arrangement musical
Chef
d’orchestre,
arrangeur et pianiste,
il collabore avec Mario
Tronco depuis Avion Travel
et depuis la formation
de l’Orchestra di Piazza Vittorio, au sein duquel
il réalise les orchestrations des cordes, collabore
aux arrangements et à la direction d’orchestre. Il
a composé de nombreuses musiques de films. La
chanson Amore Fermati , orchestrée pour le film
Lascia perdere, Johnny lui a valu une nomination pour
un David di Donatello en 2008. Il est également
soliste pour Ennio Morricone et l’Orchestra Roma
Sinfonietta..
Né en Italie en 1955, il
partage maintenant sa vie
entre Naples et Cologne. Il
est plasticien et décorateur
pour le cinéma et le
théâtre. Depuis 1980, il a
participé à de nombreuses expositions personnelles
ou collectives en Italie et à l’étranger et ses œuvres
ont fait l’objet de publications dans des catalogues
ou des livres. Il est l’un des membres fondateurs
de la compagnie de théâtre d’avant-garde Falso
Movimento, et a collaboré avec les metteurs en
scène M. Bolognini, A. Capuano, T. De Bernardi,
M. Martone et T. Servillo. Il a travaillé comme chefdécorateur sur tous les films de Paolo Sorrentino
dont Il Divo, prix du jury du festival de Cannes en
2008 et prix Dante Ferretti du meilleur décor en 2009.
Giorgio Rossi
Chorégraphie
Giorgio Rossi est né à
Tradate (nord est de l’Italie).
À quatre ans à peine il
découvre le clown Dimitri
sur scène dans son univers
surréel et comprend alors
que le théâtre sera toute
sa vie. Il a fondé le Sosta Palmizi Network avec la
chorégraphe Rafaella Giordano. Depuis 1987, il a
réalisé plus de vingt-cinq chorégraphies en Italie et
à l’étranger. Il a aussi collaboré avec des cinéastes,
des musiciens et des écrivains. Parallèlement à son
parcours de danseur et chorégraphe, il enseigne l’art
poétique du mouvement dans des écoles de prestige
à Pékin, Londres…
15
LES SOLISTES
Laurent Touche
Chef de chœur
16
Chef du Chœur Lyrique
Saint-Étienne
Loire,
Laurent
Touche
est
régulièrement
invité
dans de nombreuses
institutions
musicales
pour son travail sur la musique française en France
et à l’étranger. Il débute sa formation musicale au
CRR de Saint-Étienne d’où il sort diplômé des classes
de piano, hautbois, musique de chambre, écriture,
solfège et analyse. Licencié en musicologie, il étudie
ensuite l’accompagnement au CRR puis au CNSMD
de Lyon. Une longue collaboration avec l’Opéra
Théâtre de Saint-Étienne le conduit successivement
aux fonctions de chef de chant, chef de chœur et
chef assistant, lui permettant ainsi de prendre part
à de nombreuses productions lyriques depuis 1995,
tout en poursuivant parallèlement ses activités de
pianiste accompagnateur et de chef d’orchestre dans
divers théâtres et festivals.
Cristina Zavalloni
Carmen
Née en 1973 à Bologne,
elle a étudié le chant
lyrique et la composition
au Conservatorio G.B.
Martini à Bologne. Son
talent vocal à multiples
facettes et son parcours éclectique l’ont amenée tour
à tour dans le champ du jazz, du chant lyrique, du
baroque, et de la musique de chambre du XXe siècle.
Des compositeurs contemporains comme Louis
Andriessen ou Luca Mosca écrivent pour elle rôles
et compositions (Opéra Signor Goldoni, La Fenice,
2007). On la retrouve sous la direction de Rinaldo
Alessandrini dans Le Couronnement de Pompée
à l’Opéra du Rhin (2005). Elle collabore depuis
2006 avec Alain Platel, les Ballets C de la B et le
compositeur Fabrizio Cassol, sur Vsprs (inspiré par
Monteverdi) ou Pitié ! (inspiré par Bach et La Passion
selon St Mathieu).
Sanjay Khan
Don José
Âgé de 19 ans, ce jeune
prodige est issu des Dhoad
Gitans du Rajasthan (cf
Focus p.14). Les Dhoad,
famille de musiciens gitans,
viennent du désert du Thar,
au Nord-Ouest de l’Inde.
L'ORCHESTRE ET
LE CHŒUR LYRIQUE
Elsa Birgé
Micaela
Née dans une famille de
musiciens, elle s’initie au
chant dès son plus jeune
âge. Parallèlement, elle se
forme à l’école Nationale
du Cirque A. Fratellini dès
8 ans. Devenue trapéziste,
elle se produit avec le Vrai-Faux Mariage de la
Caravane Passe (Cabaret Sauvage, Bataclan, tournée
en France et en Europe). Création 2010 : duo Fille de
la mer, spectacle mêlant cirque et musique. Création
2012 : Comment ça va sur la terre ?, concert poétique
pour petits et grands avec Linda Edsjö et Michèle
Buirette. Aussi, elle perfectionne sa technique vocale
aux côtés de Martina A. Catella (Glotte-Trotters),
référence en chants traditionnels du monde.
L'Orchestra di Piazza
Vittorio
L'Orchestra di Piazza
Vittorio est composé
actuellement
de
dixhuit musiciens de dix
nationalités
différentes.
Explorant le potentiel que
représente ce panaché de racines et de cultures, il
développe un langage et une musique uniques, qui
s'inspirent des influences et traditions musicales
de chacun. Ainsi l'orchestre mêle des univers très
différents, allant entre autres du classique au rock, à
la pop, en passant par le reggae, brasse des sonorités
du monde entier, incorpore des instruments peu
connus, des airs universels déjà anciens,... pour
créer une musique inclassable.
L'Orchestre Symphonique
Saint-Étienne Loire
Créé en 1987, l’OSSEL a
su s’élever au rang des
grands orchestres français.
En devenant Directeur
musical de l’orchestre en
2003, Laurent Campellone
entreprend un travail en profondeur sur la qualité
artistique de cet ensemble. L’OSSEL est un acteur
culturel incontournable qui accomplit une mission
essentielle d’éducation et de diffusion du répertoire
symphonique et lyrique. L’Orchestre a su acquérir
une solide réputation, en particulier dans le répertoire
romantique français.
Le Chœur Lyrique
Saint-Étienne Loire
Placé
sous
la
responsabilité musicale
de Laurent Touche, le
Chœur Lyrique SaintÉtienne Loire constitue
aujourd’hui un outil de
niveau professionnel incontestable grâce à la rigueur
apportée au recrutement de chacun des artistes, tous
susceptibles, outre leur travail collectif, d’assurer des
prestations individuelles de qualité. L’Opéra Théâtre
de Saint-Étienne est désormais reconnu comme
l’un des acteurs incontournables de la vie lyrique
française.
Pour cette production de Carmen, les artistes du
Chœur lyrique et de l'Orchestre Symphonique sont
dirigés par Leandro Piccioni.
17
ICONOGRAPHIE COMMENTÉE DE LA PRODUCTION
Ci-dessous des éléments servant à définir l’esthétique de l’ensemble de la production, notamment en matière de
costumes. Des photographies de personnes comme d'accessoires ou de bijoux sont incorporés aux croquis de
la costumière Katia Marcanio, permettant aux couturières de se baigner dans l’univers esthétique souhaité par le
metteur en scène. Notons que l'ensemble des costumes de Carmen ont été réalisés dans les ateliers de couture
de l'Opéra Théâtre de Saint-Étienne.
18
Les décors de Carmen ont également été réalisés dans les ateliers de l'Opéra Théâtre de Saint-Etienne. Ici, il s'agit
davantage d'un travail de mise en espace, réalisé par Lino Fiorito, incorporant musiciens et chanteurs dans un
même lieu scénique.
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20
PISTES
PEDAGOGIQUES
PISTE 1
CARMEN OU L'ÉMANCIPATION FÉMININE
Objetif : Comprendre la vision de la femme que propose l'œuvre
Outils : Livret de Carmen
Mots-Clés : Condition féminine, conservatisme, féminisme
Cette piste pédagogique propose d'étudier l'image de la femme que défend l'œuvre. En effet, Carmen et Micaëla,
les deux personnages principaux, incarnent des figures féminines extrêmement différentes.
Dans les extraits du livret proposés, il peut être intéressant de relever les informations que l'on apprend sur
chacune des deux femmes, mais aussi les champs lexicaux utilisés et enfin la façon dont chacune parle d'ellemême et dont les autres personnages, notamment masculins, s'adressent à elles.
Dès lors, en trouvant des adjectifs pour les qualifier, il sera possible de faire le portrait de chacune des deux
femmes, avant de réfléchir sur ce que chacune d'elle révèle de la condition féminine au XIXe siècle. Ainsi, qu'incarne
chacune des deux femmes ? Qu'est ce que chacune instaure comme rapport à l'homme ? Enfin, quelles autres
œuvres depuis Carmen proposent une lecture engagée de la féminité ?
Extraits possibles
Pour Micaëla :
Acte I, n°2, Micaëla et Moralès ;
Acte I, n°3, Don José et Moralès ;
Acte I, n°7, Duo entre Micaëla et Don José ;
Acte III, n°22, air de Micaëla.
Pour Carmen :
Acte I, n°6, Dialogue entre Carmen et Don José ;
Acte I, n°9, Dialogue entre Carmen et Don José ;
Acte III, n°20, Trio des cartes entre Carmen, Frasquita
et Mercédès.
Thématiques à observer
Les symboles, prénoms, couleurs et croyances :
Si Micaëla apparaît au premier acte avec une jupe bleue (couleur de l'habit de la Vierge), Carmen, elle, est faite de
rouge et de noir, les couleurs des cartes dans lesquelles elle lit l'avenir, couleurs de la passion mais aussi de la mort.
Ainsi, tandis que Carmen lit la bonne aventure (Acte III, n°20), Micaëla prie le seigneur de la protéger (Acte III, n°22).
Les seuls prénoms des deux personnages féminins les opposent déjà, Micaëla venant de l'archange Michaël, et
Carmen venant de "charme". Enfin, à diverses reprises, Don José dit à Carmen qu'elle est le diable (Acte III, n°19),
tandis que l'héroïne utilise elle-même le champ lexical du sortilège : « le charme a opéré » (Acte I, n°9).
Les origines géographiques et la condition sociale :
Micaëla est une jeune paysanne, venue de Navarre, région d'enfance de Don José. Si elle est orpheline, c'est peutêtre seulement pour la rendre plus attachante et la relier plus encore à l'ordre familial, puisqu'elle a été recueillie
par la mère de Don José, dont elle porte d'ailleurs un message.
Carmen de son côté n'est jamais reliée à quelque famille que ce soit. Plus encore, c'est une bohémienne, qui n'a
donc pas de terre spécifique, une nomade, un personnage libre et affranchi.
Le rapport aux hommes :
Tandis que Micaëla vouvoie systématiquement chaque homme auquel elle s'adresse, y compris Don José qu'elle
connaît pourtant depuis l'enfance, Carmen, elle, tutoie rapidement ses interlocuteurs, surtout lorsqu'il s'agit d'arriver
à ses fins : "où me conduirez-vous ?", suivi de "laisse-moi m'échapper !" (Acte I, n°9). De la même manière, les
hommes, notamment les soldats, vouvoient tous Micaëla, jeune paysanne respectable, alors qu'ils tutoient sans
hésitation Carmen : "ce ne sont pas des chansons que je te demande, c'est une réponse" (Acte I, n°9).
Enfin, quand Micaëla prie Don José de rentrer au pays pour revoir sa mère (Acte III, n°24), Carmen, elle, ordonne
qu'il la suive dans la montagne (Acte III, n°17).
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PISTE 2
METTRE EN SCÈNE LA MUTINERIE DES CIGARIÈRES
Objectif : Se mettre à la place des acteurs et du metteur en scène en essayant de jouer un extrait de l'œuvre
Outils : Extrait du livret de Carmen, extraits vidéos
Mots-Clés : mise en scène, espace de jeu, jeu d’acteur, gestuelle
Cette piste pédagogique propose aux élèves de s’essayer à la mise en scène afin de comprendre que chaque
nouvelle production, à l’opéra, propose un regard neuf et unique sur l’œuvre. En prenant comme support le texte
de la scène de mutinerie entre les cigarières (Acte I, n°8), les élèves se répartiront en groupes comportant 12
interprètes (4 cigarières sopranos, 4 cigarières altos, Zuniga, Don José, et 2 soldats) et 1 ou plusieurs metteur(s)
en scène. Chaque groupe pourra alors se réunir sous forme d’ateliers pour réfléchir à la façon de mettre en scène
ce passage, c'est-à-dire la façon d’organiser cette scène dans l’espace : quel espace de jeu définir, où se positionner,
à quelle distance les uns des autres, quand se déplacer… et la façon de la jouer : quels attitudes, gestes, regards,
quelle intonation de voix, quel débit de paroles, quels accessoires, etc… ?
Dans cette scène, les cigarières tentent d'expliquer au lieutenant Zuniga les raisons de la bagarre ayant éclaté à
la manufacture de tabac. Deux groupes se forment immédiatement, l'un soutenant Carmen et l'autre Manuela...
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ACTE I, n°8,
Les cigarières, Don José, Zuniga, des soldats
Les ouvrières sortent rapidement et en désordre.
Cigarières sopranos
Au secours ! au secours ! n'entendez-vous pas ?
Cigarières altos
Au secours ! au secours ! messieurs les soldats !
Cigarières sopranos
C'est la Carmencita !
Cigarières altos
Non, non, ce n'est pas elle !
Cigarières sopranos
C'est la Carmencita !
Cigarières altos
Non, non, ce n'est pas elle !
Cigarières sopranos
C'est elle! C'est elle!
Elle a porté les premiers coups !
Cigarières altos entourant le lieutenant
Ne les écoutez pas !
Cigarières sopranos entourant le lieutenant
Ne les écoutez pas !
Toutes les cigarières
Monsieur, écoutez-nous !
écoutez-nous! écoutez-nous !
Monsieur, écoutez-nous !
Cigarières altos elles tirent l'officier de leur côté
La Manuelita disait et répétait à voix haute,
qu'elle achèterait sans faute un âne qui lui plaisait.
Cigarières sopranos même jeu
Alors la Carmencita, railleuse à son ordinaire,
dit : Un âne, pour quoi faire ? Un balai te suffira.
Cigarières altos
Manuelita riposta et dit à sa camarade :
Pour certaine promenade, mon âne te servira !
Cigarières sopranos
Et ce jour-là tu pourras à bon droit faire la fière !
Deux laquais suivront derrière, t'émouchant à tour
de bras.
Toutes les cigarières
Là-dessus, toutes les deux se sont prises aux cheveux,
toutes les deux, toutes les deux se sont prises aux cheveux !
Zuniga avec humeur
Au diable tout ce bavardage !
Prenez, José, deux hommes avec vous
et voyez là dedans qui cause ce tapage !
Cigarières sopranos
C'est la Carmencita !
Cigarières altos
Non, non, ce n'est pas elle !
Cigarières sopranos
Si fait, si fait; c'est elle !
Cigarières altos
Pas du tout !
Cigarières sopranos
Elle a porté les premiers coups !
Zuniga assourdi
Holà! Éloignez-moi toutes ces femmes-là !
Cigarières sopranos
C'est la Carmencita qui porta les premiers coups !
Cigarières altos
C'est la Manuelita qui porta les premiers coups !
Cigarières sopranos
La Carmencita!
Cigarières altos
La Manuelita
Cigarières sopranos
La Carmencita!
Cigarières altos
La Manuelita
Cigarières sopranos
Si!
Cigarières altos
Non!
Cigarières sopranos
Si!
Cigarières altos
Non!
Cigarières sopranos
Si!
Cigarières altos
Non!
Cigarières sopranos
Si! Si! Si! Si!
Zuniga
Voyons, brigadier... Maintenant que nous avons
un peu de silence... qu'est-ce que vous avez trouvé
là-dedans ?
Don José
J'ai d'abord trouvé trois cents femmes, criant,
hurlant, gesticulant, faisant un tapage à ne pas
entendre Dieu tonner... D'un côté il y en avait une,
les quatre fers en l'air, qui criait : Confession !
confession! je suis morte... Elle avait sur la figure
un X qu'on venait de lui marquer en deux coups de
couteau, en face de la blessée j'ai vu...
Il s'arrête sur un regard de Carmen
Zuniga
Eh bien ?..
Don José
J'ai vu mademoiselle...
Zuniga
Mademoiselle Carmencita ?
Don José
Oui, mon lieutenant...
Zuniga
Et qu'est-ce qu'elle disait, mademoiselle Carmencita ?
Don José
Elle ne disait rien, mon lieutenant, elle serrait les
dents et roulait des yeux comme un caméleon.
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PISTE 3
CARMEN DANS TOUS SES ÉTATS...
Objectif : Identifier les moments forts, incontournables de l'œuvre et observer leurs possibles mutations
Outils : Livret de Carmen, recherches personnelles
Mots-clés : Réécriture, transposition, adaptation
Cette piste pédagogique propose, après la lecture du livret de Carmen ou de son argument, de s'intéresser aux scènesclés, incontournables, de l'œuvre et d'en trouver les échos, les réadaptations dans les arts en général.
Il est alors possible, soit d'étudier la réécriture de Carmen, de la nouvelle de Mérimée au livret de l'opéra de Bizet, soit
de chercher d'autres versions de l'œuvre, dans le cinéma, la peinture, ou même la bande-dessinée.
Nous proposons alors dans un premier temps, d'identifier les moments et symboles forts de l'œuvre. Après avoir
cherché d'autres versions ou réécritures de l'œuvre, il s'agira alors d'observer ce que sont devenus ces passages-clés.
Il sera alors intéressant de déterminer sur quel plan se situe la réécriture : le plan musical, scénaristique, scénique,
l'univers visuel, le lieu dramatique ?
Enfin, une réflexion plus globale pourra être menée sur l'essence même de Carmen, afin de dégager la colonne
vertébrale de l'œuvre et d'observer les éléments qui demeurent intangibles et sans lesquels le mythe de Carmen n'est
plus identifiable.
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1. Carmen d'Olivier Py, 2012. / 2. Carmen Jones d'Otto Preminger, 1954. / 3. Carmen, Delcourt, 2012. / 4. Blancanieves de Pablo Berger, 2012.
RESSOURCES
SUPPLEMENTAIRES
L’OPÉRA THÉÂTRE DE SAINT-ÉTIENNE
Bénéficiant d’une notoriété nationale et internationale
importante, l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne se situe
parmi les maisons d’opéra les plus dynamiques en
termes de public.
L’Opéra Théâtre de Saint-Étienne est un établissement
de la Ville de Saint-Étienne soutenu par le Conseil général
de la Loire, la Région Rhône-Alpes et le Ministère de la
Culture.
Le Chœur Lyrique Saint-Étienne Loire et l’Orchestre
Symphonique Saint-Étienne Loire placés sous la
direction musicale de Laurent Campellone sont les
acteurs essentiels d’une programmation qui sait
également s’ouvrir aux artistes de tous les horizons.
La vocation première de l’Opéra Théâtre de SaintÉtienne est une vocation lyrique : avec ses propres
ateliers de construction de décors et de réalisation de
costumes, l’Opéra Théâtre produit et coproduit chaque
saison de nouvelles œuvres lyriques.
L’institution a également pour mission de proposer au
plus grand nombre une programmation riche avec une
exigence de qualité dans les domaines de la musique
classique (musique symphonique, musique de
chambre...), de la danse, du théâtre, en allant également
vers des formes aussi diverses que le cirque, le cabaret...
L’Opéra Théâtre remplit également une mission
capitale auprès du jeune public, proposant une saison
dédiée, riche et variée. Enfin, dans le domaine de
l’action culturelle et de la médiation, l’Opéra Théâtre,
en relation avec de nombreux partenaires (universités,
Éducation nationale, écoles de musique..), souhaite
développer ses propositions aux personnes n’ayant
pas spontanément accès à la culture (politique tarifaire,
décentralisation des concerts...). Des visites guidées
sont également organisées. Certaines représentations
sont précédées 1 heure avant le début du concert d’un
Propos d’avant-spectacle (présentation sous la forme
d’une conférence).
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PETITE HISTOIRE D’UNE PRODUCTION
Le directeur détermine les différents "titres" qui seront
programmés durant la saison. Il choisit ensuite un metteur en scène pour la production d’un opéra. Ce dernier
associe un certain nombre de collaborateurs au projet
dont un décorateur éclairagiste et un costumier. À ces
derniers d’imaginer la conception des décors et des costumes tout en se conformant à des critères résolument
déterminés : état d’esprit du spectacle, contexte historique et découpage acte par acte de l’ouvrage, caractéristiques techniques de la scène, budget consacré à la
production.
La première étape concrète du projet consiste généralement en la présentation des maquettes. Celles-ci sont
paramétrées par le directeur technique qui connaît toutes
les contraintes du théâtre, tandis que les responsables
d’ateliers conseillent les concepteurs pour définir les
techniques et les matériaux les plus adaptés à la réalisation des décors et costumes.
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Le premier travail de construction se déroule dans les ateliers de menuiserie et de serrurerie qui réalisent chacun
de leur côté les différents éléments du décor.
L’assemblage du décor est ensuite confié à l’atelier de
construction. Les parties monumentales sont conçues
comme un puzzle qui doit pouvoir se manipuler et s’assembler en scène avec aisance et rapidité. Légers tout en
étant rigides, les différents éléments sont confectionnés
dans des dimensions qui leur permettent d’être transportés dans des containers pour les tournées à venir.
Une fois la base structurelle du décor réalisée, celle-ci est
habillée par l’atelier de décoration après avoir fait occasionnellement l’objet d’un équipement électrique (installation de moteurs, d’éclairages ou de dispositifs sonores).
Son personnel, constitué de peintres et de sculpteurs
issus, dans la majorité des cas, d’écoles des Beaux-Arts,
doit être rompu à toutes sortes de techniques de reproduction : faux marbres, faux stucs, peintures de genre sur
tous supports, fabrication d’ornements et d’accessoires
(casques, boucliers, ceintures, parures, etc.) dans des
matériaux divers : bois, acier, terre, matières synthétiques
(mousse de polyuréthane expansée, résine, latex).
Dans un décor, ne sont construites et peintes que les parties laissées apparentes au public. L’aspect donné aux différents accessoires répond aux critères de la vraisemblance
et de l’illusion. L’art des ateliers de création d’un théâtre est
un art du faux : tel chaudron de cuivre martelé est fabriqué en mousse, tel socle de granit a pour support une
armature de fer ou de bois, elle-même recouverte de toile
plissée peinte alors en trompe-l’oeil, etc. Une fois achevé
l’ornement du décor, celui-ci est installé sur la scène pour
effectuer les essais d’éclairage. Certaines retouches sont
apportées par la suite : estompage d’une colonne trop brillante, rehaussements de couleur d’un accessoire, finition
des joints des éléments à assembler.
Pour la confection des costumes, le costumier procède à
l’échantillonnage des étoffes, de leurs coloris, de l’harmonie qu’elles peuvent générer une fois assemblées. Parfois,
lors d’exigences particulières, certains tissus font l’objet
d’une fabrication spéciale tandis que d’autres sont retravaillés à seule fin de provoquer un effet singulier. Transformations des couleurs, modifications de la texture : la
réalisation de costumes de scène constitue un travail artisanal où chaque pièce mérite une attention particulière
pour s’adapter au mieux à la personnalité de l’interprète
qui la portera. Une fois les textiles sélectionnés, l’élaboration du patron de chaque costume, ainsi que la coupe des
tissus et leur assemblage, sont effectués sur mannequin.
Après un essai en l’état, le costume est à nouveau ouvragé et se trouve agrémenté d’accessoires, de bijoux et
différents autres ornements, jusqu’à trouver son aspect
quasi définitif.
De la même façon que pour le décor, les costumes nécessitent réajustements et retouches jusqu’aux dernières
répétitions. Dans tous les cas, tous les éléments de décoration et de costumes réalisés pour un spectacle sont
répertoriés et classés afin que lors des représentations
aucun incident ne puisse venir altérer le déroulement du
spectacle. C’est souvent au lendemain de la “générale”
que le travail de création s’achève tout à fait.
Atelier
de fabrication
des costumes
Atelier de
constructuion
des décors : menuiserie
Atelier de construction
des décors : serrurerie
Atelier de
construction
des décors
Représentation de La Princesse de Trébizonde
(mai 2013- Opéra Théâtre de Saint-Étienne)
27
Montage des
décors sur le plateau
du Grand Théâtre Massenet
ANNEXES
VOIX ET TESSITURES
Une voix pour un personnage
Les différents registres de la voix humaine s’adaptent
par leur extension, leur timbre, leur caractère et
leurs capacités techniques à différents genres de
personnages.
Le choix que fait le compositeur est donc très important
pour que le rôle incarné par le chanteur soit crédible.
Voix de femmes
28
Soprano
C’est la voix la plus aiguë chez les femmes. Il existe
plusieurs caractères de voix.
La soprano "colorature" : capable de faire des vocalises
rapides et de monter dans les extrêmes aigus du registre.
Ce sont généralement des rôles de magiciennes, de
poupées, de personnages enchantés en lien avec le
surnaturel et le monde des dieux.
La soprano "lyrique" : une voix claire et expressive qui
s’adapte aux personnages des amoureuses, des jeunes
filles.
La soprano "dramatique" : elle a une couleur obscure,
veloutée idéale pour incarner des personnages plutôt
graves comme les reines, les femmes fières ou d’âge
mûr.
Personnage de soprano très connu : la Reine de la Nuit
(La Flûte enchantée).
Mezzo-soprano
C’est la voix moyenne chez les femmes. La voix de
mezzo s’adapte aux personnages de jeunes garçons, de
femmes séduisantes ou à des personnages au caractère
tragique.
Personnage célèbre de mezzo très connu : Carmen
(Carmen)
Alto
C’est une des voix féminines les plus graves. C’est une
voix souvent utilisée pour personnifier des nourrices,
des vieilles dames ou des guerriers. Il existe une voix
encore plus grave, c’est celle de contralto.
Voix d’hommes
Ténor
C’est une des voix les plus aiguës chez les hommes (on
trouve également une voix encore plus aiguë : celle de
contre-ténor). Selon la couleur et le caractère de la voix,
on distingue le ténor "léger", "lyrique" ou "dramatique".
C’est souvent la voix du ténor qui incarne les héros à
l’opéra. Ténors célèbres : Roberto Alagna, Luciano
Pavarotti, Placido Domingo...
Baryton
C’est la voix moyenne chez les hommes. Les rôles
attribués au baryton sont par exemple : Comte Almaviva
(Les Noces de Figaro), Barbe-bleue, Falstaff, Pelléas.
Barytons célèbres : Dietrich Fischer-Diskau, José Van
Dam...
Basse
C’est la voix la plus grave chez les hommes. Souvent la
voix de basse incarne des personnages terribles comme
des démons, des hommes méchants, parfois aussi la
basse représente la voix de Dieu.
COMPOSITION DE L'ORCHESTRE
Trompettes Trombones
Cors
Piano
Harpe
Violons II
Violons I
Clarinettes
Bassons
Flûtes
Hautbois
Altos
Chef
Tubas
Contrebasses
Violoncelles
GLOSSAIRE
Accelerando
Tonalité
Terme italien désignant une accélération progressive du
mouvement à un temps donné de la partition.
Étendue d’une mélodie entre sa note la plus grave et sa
note la plus aiguë.
Une tonalité se définit comme un monde sonore. Dans
cet ensemble de sons, une gamme choisie fait autorité
et sert de base à l’écriture mélodique et harmonique. La
tonalité peut être de do, de fa, de la, etc., elle peut être
majeur ou mineur et permet donc de multiples visages
et sensations sonores.
Crescendo
Trilles
Terme italien désignant une augmentation progressive
de l'intensité sonore, allant par exemple de la nuance
piano (doux) à la nuance fortissimo (très fort).
Alternance très rapide entre deux notes conjointes (ex :
mi et fa) utilisée comme ornement mélodique avant de
s’arrêter sur la note suivante.
Fortissimo
Unisson
Terme italien désignant une nuance d’intensité sonore
et signifiant « très fort » (par opposition au pianissimo).
Technique musicale consistant à faire chanter ou jouer à
tous les exécutants, la même ligne musicale et le même
rythme parfaitement en même temps.
Ambitus
Gamme tzigane
Gamme spécifique proposant un agencement des sons
différents de celui de la gamme majeure ou mineure
et produisant des couleurs sonores orientalisantes et
dansantes.
Opérette
BIBLIOGRAPHIE
À sa naissance, l'opérette est un genre théâtral qui
incorpore quelques chansons populaires. Au XIXe siècle
et notamment sous l'impulsion d'Offenbach, l'opérette
gagne en envergure et vise désormais une forme de
critique sociale, impliquant la composition d'une
véritable partition qui alterne numéros chantés, dansés,
et dialogues parlés.
Sur Carmen
Carmen, L'Avant-Scène Opéra n°26, Paris : Éditions
Premières loges, 2007.
MAINGUENEAU, Dominique, Carmen, les racines
d'un mythe, Paris : Sorbier, 1985.
MERIMEE, Prosper, Carmen, Paris : Larousse (Petits
classiques), 2008.
Seconde augmentée
Sur Bizet
LACOMBE, Hervé, Georges Bizet, Paris : Fayard, 2000.
THIEBLOT, Gilles, Georges Bizet, Paris : Bleu nuit,
2012.
La seconde augmentée est un intervalle, c'est à dire
une distance sonore entre deux sons. Entre do et ré,
par exemple, l’intervalle est petit, tandis qu'entre do et
si il est très grand (do, ré, mi, fa, sol, la, si…). Chaque
intervalle possède sa couleur propre. La seconde
augmentée, de son côté, révèle un caractère dansant et
une couleur orientalisante.
Sistre
Instrument de musique venu de l'Égypte antique formé
d'un morceau de bois en arc de cercle, sur lequel sont
positionnés des tringles agrémentées de coques de
fruits ou de rondelles métalliques s'entrechoquant
lorsque l'instrument est secoué. Le sistre, muni
autrefois d'un bâton pour l'empoigner, est aujourd'hui
devenu le tambour de basque, composé d'une peau
tendue sur un cadre agrémenté de petites cymbalettes
métalliques.
Sur l'opéra, ses métiers et la mise en scène
BOISSON, Bénédicte ; FOLCO, Alice ; MARTINEZ,
Ariane, éd., La mise en scène théâtrale de 1800 à nos jours,
Paris : puf, 2010.
BOLL, André, L’Opéra, spectacle intégral, Paris : Olivier
Perrin, 1963.
L'envers du décor, ouvrage collectif, catalogue de
l'exposition du Centre National du Costume de Scène,
Montreuil : Gourcuff Gradenigo, 2012.
29
30
Retrouvez l’Opéra Théâtre de Saint-Étienne sur internet
www.operatheatredesaintetienne.fr
Jardin des Plantes - BP 237
42013 Saint-Étienne cedex 2
[email protected]
Locations / réservations
du lundi au vendredi de 12h à 19h
04 77 47 83 40