La procédure d`offre amiable préalable au regard des ventes

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La procédure d`offre amiable préalable au regard des ventes
Axe 2 – Fiche 13 :
La procédure d’offre amiable préalable au regard des ventes par
adjudication
1 – Etat du droit en vigueur (l’adjudication forcée : de l’adjudication rendue obligatoire par la loi à
l’adjudication décidée ou autorisée par un juge). – La loi n° 2012!387 du 22 mars 2012 relative à la
simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives a modifié le régime des ventes
par adjudication au regard du droit de préemption de la Safer.
L'article L. 143!12 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction issue de l’article 89 de
cette loi du 22 mars 2012, prévoit désormais que l'arrêté préfectoral déterminant la surface minimale
pour l'application du droit de préemption de la Safer « peut comporter des dispositions ayant pour
objet, dans certaines zones ou pour certaines catégories de biens, d'obliger les propriétaires de biens
pouvant faire l'objet de préemption par la société d'aménagement foncier et d'établissement rural,
désireux de les vendre par adjudication volontaire, à les offrir à l'amiable à ladite société deux mois au
moins avant la date prévue pour la vente, à condition que la procédure d'adjudication n'ait pas été
autorisée ou ordonnée par un juge. (…) ».
Auparavant, l'exclusion de la procédure d'offre amiable préalable ne jouait que lorsque la procédure
d'adjudication avait « été rendue obligatoire par une disposition législative ou réglementaire », la
procédure d'offre amiable préalable ayant été introduite par l'ordonnance n° 67!824 du 23 septembre
1967 afin, rappelons!le, de limiter le recours à l'adjudication volontaire, surtout par les propriétaires
ayant vu, sur une déclaration d'aliénation de gré à gré, le prix contesté par la Safer (V. J.!L. Aubert in
Defrénois 1981, n° 101, p. 5).
Les raisons qui ont conduit le législateur a modifié le cadre de cette procédure sont exposées dans le
rapport n° 3787 fait par M. Etienne Blanc, au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la
législation et de l’administration générale de la République à l’Assemblée nationale, sur la proposition
de loi n° 3706 de M. Jean!Luc Warsmann, relative à la simplification du droit et à l’allégement des
démarches administratives : « Le droit de préemption est mis en œuvre selon des modalités et
procédures très diverses en fonction de la finalité qu’il sert, de la personne qui en est bénéficiaire et de
la nature de la cession concernée. Le code de l’urbanisme et le code rural et de la pêche maritime
distinguent notamment selon que la cession projetée est une vente par adjudication rendue
obligatoire par une disposition législative ou réglementaire ou une vente de gré à gré constitutive
d’une aliénation volontaire à titre onéreux. / Mais les ventes par adjudication ordonnées par le juge en
liquidation judiciaire ou dans le cadre d’une mesure de tutelle ne sont pas considérées comme des
ventes par adjudication rendues obligatoires par une disposition législative ou réglementaire. Elles ne
peuvent se voir appliquer le régime afférant aux ventes de gré à gré. / Pour ce qui est des ventes par
adjudication rendues obligatoires par une disposition législative ou réglementaire, la Cour de
cassation, statuant en sa première chambre civile, a jugé dans un arrêt du 11 décembre 2001 qu’une
adjudication, même décidée par un juge, ne doit pas être considérée comme rendue obligatoire dès
lors que ce juge peut tout aussi bien ordonner ou autoriser une vente sous une autre forme. Or, dans le
cadre de la liquidation judiciaire comme dans le cadre d’une mesure de tutelle, le juge peut autoriser
ou ordonner tout aussi bien une vente par adjudication judiciaire qu’une vente par adjudication
volontaire ou qu’une vente de gré à gré. Dans la mesure où le juge a donc le choix entre plusieurs
formes de vente, on ne peut considérer que les ventes par adjudication soient rendues obligatoires par
une disposition législative ou réglementaire dans le cadre de ces procédures. / Pour ce qui est du
régime des ventes de gré à gré, et plus précisément de l’exercice du droit de préemption dans le cadre
de ces ventes, il est inapplicable aux ventes en liquidation judiciaire ou en tutelle. L’expression d’une
intention d’aliéner avec fixation d’un prix par le vendeur n’a rien de commun avec la compétence
exclusive qu’a le juge pour autoriser ou ordonner la vente et fixer le prix ou la mise à prix dans le cadre
d’une vente en liquidation judiciaire ou en tutelle. / En l’état actuel du droit, le régime du droit de
préemption dans les ventes par adjudication intervenant dans le cadre d’une procédure de liquidation
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judiciaire ou d’une mesure de tutelle ne relève ni du régime applicable aux ventes rendues obligatoires
par une disposition législative ou réglementaire ni du régime applicable aux ventes de gré à gré. Cette
confusion est source d’insécurité juridique. / Sans remettre en cause le droit de préemption, à la fois
urbain et rural, cet article de la proposition de loi vise à clarifier le régime applicable à son exercice en
cas de ventes par adjudication réalisées en procédure de liquidation judiciaire ou pour le compte de
personnes en tutelle. / Afin de sécuriser ces ventes, le I de l’article modifie la rédaction de l’article L.
143!12 du code rural et de la pêche maritime en remplaçant la référence à une adjudication rendue
obligatoire par une disposition législative ou réglementaire par la référence à une adjudication
autorisée ou ordonnée par un juge. / Le II de l’article étend cette rédaction, qui tient compte de la
marge d’appréciation du juge et de sa possibilité de choix entre plusieurs formes de vente, aux
dispositions du code de l’urbanisme applicables au droit de préemption urbain (articles L. 142!3 et L.
213!1 du code de l’urbanisme). / Ces modifications rédactionnelles contribueront à sécuriser les ventes
d’actifs effectuées en liquidation judiciaire ou dans le cadre d’une mesure de tutelle, et à favoriser
ainsi la circulation des biens. » (cf. p. 331 à 333 du rapport).
Il en résulte que la modification ainsi opérée avait pour seul objet de préciser les modalités de mise
en œuvre du droit de préemption rural sans le remettre en cause, en corrigeant une discordance
entre la loi et l’état de la jurisprudence en ce qui concerne les ventes par adjudication d’un bien,
autorisées ou ordonnées par un juge, dans le cadre d’une procédure de liquidation judiciaire ou d’une
mesure de tutelle.
La procédure d’adjudication avec offre amiable ne concerne plus désormais que les adjudications
volontaires, c'est!à!dire toutes celles qui ne sont pas « autorisées ou ordonnées par un juge », telles
que les ventes d’actifs effectuées en liquidation judiciaire ou pour le compte de mineurs et de
majeurs protégés.
2 – Constat. – La procédure d’offre amiable consiste, ainsi qu’il a été dit, à obliger le propriétaire
désireux de vendre ses biens par adjudication volontaire à les offrir préalablement à l’amiable à la
Safer.
Au contraire, en présence d'une adjudication forcée, la procédure se déroule sans offre amiable. Dans
ce cas, l'acquisition par le titulaire du droit de préemption a lieu au prix de la dernière enchère, par
substitution à l'adjudicataire. L'exercice du droit de préemption par la Safer ne peut donc avoir pour
effet de modifier les prix et conditions de la vente par adjudication. Il en va de même dans le cas où le
juge!commissaire a autorisé la vente de gré à gré, aux prix qu’il aura fixé (V. Cass. Civ. 3ème, 19
septembre 2012, n° 10!21858, publié au Bulletin).
Telle qu’est rédigée et interprétée la fin de la seconde phrase de l’article L. 143!12 du code rural et de
la pêche maritime, dans la rédaction que lui a donnée la loi du 22 mars 2012 précitée, l’exercice de la
procédure d’offre amiable préalable à la Safer apparaît extrêmement limitée.
Ainsi, par exemple, les biens d’un mineur en tutelle n’ont pas à être offerts à l’amiable à la Safer
lorsque le juge prescrit une mise en vente publique aux enchères. Plus largement, l’exclusion
concerne tous les cas où un juge peut, dans le cadre notamment de la liquidation judiciaire comme
dans le cadre d’une mesure de tutelle ou d’une procédure de licitation, autoriser ou ordonner tout
aussi bien une vente par adjudication judiciaire qu’une vente par adjudication volontaire ou une vente
de gré à gré.
Pour l’adjudication volontaire et la vente de gré à gré, on comprend mal pourquoi la Safer ne
bénéficierait pas de l’offre amiable, alors que l’une des missions que lui a confiée le législateur est
précisément de « lutter contre la spéculation foncière », ce que ces deux formes de vente peuvent
favoriser.
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3 – Dispositif proposé. – Il a pour objet de limiter le bénéfice de l’exclusion de l’offre amiable
préalable aux seules ventes par adjudication judiciaire ordonnées par un juge.
Proposition. Il pourrait être envisagé de modifier l’article L. 143!12 du code rural et de la
pêche maritime comme suit :
!
Modifier sa deuxième phrase en insérant après les mots « adjudication volontaire » les mots « ou
de gré à gré » et de supprimer les mots « , à condition que la procédure d'adjudication n'ait pas
été autorisée ou ordonnée par un juge » ;
!
Insérer une troisième phrase ainsi rédigée : « Cette disposition n'est toutefois pas applicable à la
procédure d’adjudication judiciaire ordonnée par un juge. ».
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