Artaud au musée d`Orsay

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Artaud au musée d`Orsay
Artaud au musée d'Orsay !?
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Artaud au musée d'Orsay !?
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Date de mise en ligne : vendredi 2 mai 2014
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Cette fois, il n'est pas question, comme l'an passé à l'Orangerie, de l'influence du peintre japonais Hiroshige sur l'oeuvre de Van Gogh, mais des mots d'Artaud
sur le peintre.
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Artaud au musée d'Orsay !?
<span class='spip_document_117 spip_documents spip_documents_left' style='float:left; width:145px;'> <img
src='./?Antonin-Artaud-117' width="145" height="253" alt="Antonin Artaud " title="" /> Le noir regard saisi par Man
Ray côtoie l'autoportrait de celui qui se coupa l'oreille et pris sa main pour un bifteck. Sous les deux visages
rassemblés pour la circonstance, la foule des anonymes visiteurs argentés, cosmopolite venue tout exprès des pays
de la planète ou presque, avance, sage, bavarde et lente. Les amateurs des grandes oeuvres exposées, dans la
capitale la plus visitée au monde, célèbreraient un homme de 37 ans mort de pauvreté ? Les audio-guides
polyglottes ont tu la voix du poète.
« O vio profe / O vio proto / O vio loto / O théthé » écrit Artaud dans son Van Gogh Le suicidé de la Société.
La porte de l'ancienne gare d'Orsay enfin franchit, il est midi. Il nous faut encore attendre parqués comme des
moutons, -combien de temps encore à nous soumettre ? Enfin, nous basculons, nous l'espérons, plus rien ne sera
comme avant. Foule d'esclaves, le monde va changer de base. C'est ce matin même, où les corbeaux noirs au
dessus du champ de blé de l'ultime tableau peint à Auvers sur Oise, disparaissent. Le soleil brillera toujours ! Les
chaines se rompent. Chacun montre son billet aux gardiens du musée.
La foule, disciplinée, s'agglutine, s'aligne devant les autoportraits de Vincent.
Tout à coup, l'espace se vide : sur les murs grimacent les dessins sortis des griffes d' Artaud.
La majorité reste sourde à la voix grinçante du visionnaire qui tambourine Pour en finir avec le jugement de
Dieu.
Les visiteurs passent devant les extraits des films muets où apparaît celui qui écrivit Le Théâtre et son double. Non,
Artaud n'était peut être pas un grand acteur de cinéma. Ah oui, ses yeux, bien sûr, mais qu'importe. La foule
progresse et piétine devant l'arbre mort et le magnifique cerisier en fleurs du jardin de l'asile. Faute de temps, de
liberté, elle ne peut remarquer « cette coupure de lumière lilas qui mange les barreaux du grand fauteuil torve, du
vieux fauteuil écarquillé de paille verte ». Juste avant de sortir, elle jette sa fatigue aux organisateurs des suicides
de la société.
A quel prix, l'année prochaine, les organisateurs des grandes expositions vendront le peintre accablé de pauvreté
qui se tira un coup de fusil, rendu le plus célèbre du monde grâce aux couvercles des boites de chocolat ? Antonin
Artaud demeure invendable, l'âme de Vincent Van Gogh aussi et celle, tout autant, de la foule des anonymes.
Van Gogh/Artaud. Le suicidé de la société. (Exposition au musée d'Orsay du 11 mars au 6 juillet 2014
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