Oum Kalsoum Tout au long de sa carrière, la diva égyptienne a

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Oum Kalsoum Tout au long de sa carrière, la diva égyptienne a
Oum Kalsoum
Tout au long de sa carrière, la diva égyptienne a abordé tous les genres musicaux et
interprété les grands noms de la poésie arabo-musulmane en révolutionnant la
métrique.
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Née vers 1904 à Tmaïe al-Zahayira, un village situé dans le delta du Nil, Kalsoum,
fille d'un imam de mosquée, a naturellement débuté par des chants religieux, se
produisant dans des fêtes le plus souvent dédiées à des saints (plus tard, sa gloire
aidant, le calendrier local s'enrichira du nom d'une nouvelle sainte que ses familiers
appelleront tout simplement Thuma ou Oum). Son patronyme circule vite dans la
région et tout le monde parle d'un androgyne (son père tenait à ce qu'elle s'habille en
garçon bédouin) à cordes vocales uniques. En visite à Tmaïe, Cheikh Abu al-'Alla,
spécialiste de la déclamation du maqam (mode classique), l'entend, tombe en extase
et lui suggère, ainsi qu'à sa famille de s'installer au Caire, marchepied indispensable
pour accéder à une notoriété à la hauteur de son talent.
En 1919, Le Caire est le théâtre d'une révolution sanglante. Après le rejet par
Londres de l'indépendance totale exigée par le parti Wafd, des nationalistes ont été
exilés. Trois ans plus tard, les assassinats de ressortissants britanniques se
multiplient. Oum Kalsoum en a gardé des souvenirs bouleversants. De là daterait son
patriotisme ardent qui se concrétisera ensuite par un soutien sans faille à l'effort de
guerre. Ses détracteurs ironisent sur un opportunisme qui lui permet de chanter
successivement les louanges du roi Farouk, de Nasser puis de Sadate. Les religieux
crient au scandale parce qu'ils considèrent comme un blasphème le fait pour une
femme de chanter le Coran. Mais Oum Kalsoum a toujours tenu bon même lorsque
les Frères musulmans jugent scandaleuse sa façon de mêler le profane au religieux.
Elle a répliqué, en 1928, par un texte profane (« Si je devais oublier et
pardonner/Mes yeux me le reprocheraient ») interprété sur fond d'air musulman
classique. D'autres ont jasé sur sa vie privée, la soupçonnant d'aimer les femmes et
de s'être résolue à épouser son docteur pour se fabriquer une façade honorable.
Mais la cantatrice a su séduire toutes les franges de la société, du balayeur au
président (Nasser fut l'un de ses plus fervents admirateurs et ne ratait jamais un de
ses fameux concerts donnés le premier jeudi de chaque mois), du paysan démuni au
fonctionnaire embourgeoisé. Certains se sont interrogés sur l'impact d'exception que
pouvait avoir sur les foules la « Sett » (la Dame), celle qui est tenue pour la « mère
des Arabes » comme l'avaient proclamé certaines affiches.
Oum Kalsoum a domestiqué tous les genres et interprété tous les grands noms de la
poésie arabo-musulmane en révolutionnant la métrique. Dans le domaine de
Kalsoum, les textes d’Omar Khayyam l'hédoniste, d'Ahmed Chawki, l'« Emir des
poètes » (dont elle a chanté le troublant Demandez aux cruches de vin), de
Mahmoud Bayram Ettounsi, une véritable encyclopédie ambulante, de Taher Abu
Facha le passionné ou d'Ahmed Chafik Kamel le romantique, prennent une autre
allure, une autre tournure, une autre dimension. Ils tendent, portés par une voix si
prenante, vers le sublime.
C'est sur scène qu'elle exprime toute son énergie et sa classe. Elle y dégage un
magnétisme tel que le public, subjugué, suit toutes les émotions lues dans la voix et
sur son visage. Il retient son souffle lorsqu’elle raconte ses tourments, agite les bras
lorsqu’elle trace des arabesques imaginaires, maudit les traîtres et souffre à sa place
lorsqu’elle évoque la fuite d'un amant, se tient le cœur lorsqu’elle pousse un profond
soupir... En un mot, l'auditoire vibre avec la légende.
Contrairement à Farid El Atrache ou Abdel Halim Hafez, Oum Kalsoum a tourné très
peu de films. Elle ne se trouvait pas bonne comédienne et une maladie des yeux lui
fournira le prétexte idéal pour déserter à jamais les plateaux. Dans le cadre de
l'année de l’Egypte, un projet présenté par Youssef Chahine devait être vivement
attendu. Il s'agit d'un concert filmé en 35 mm et en couleur (les précédents étaient
tous en noir et blanc) dont Chahine a récupéré les rushes. Ce travail devrait être
visible à la Cinémathèque de la danse et, un jour, à l'Olympia, l'unique salle hors
pays arabes, où elle s'est produite en 1967.
© Hall de la Chanson

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