Amos Gitai Architecte de la mémoire
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Amos Gitai Architecte de la mémoire
Amos Gitai Architecte de la mémoire Elysée Lausanne Dossier pédagogique Derrière Amos Gitai le rideau Dossier pédagogique Elysée Lausanne 2/16 Chers enseignants et éducateurs, Le Musée de l’Elysée vous invite à découvrir l’exposition Amos Gitai Architecte de la mémoire, coproduite avec la Cinémathèque suisse, La Cinémathèque française et GALERIES, Bruxelles. Réalisée à partir des archives personnelles du cinéaste données à La Cinémathèque française en 2007, cette exposition est présentée du 17 septembre 2014 au 4 janvier 2015. Réunissant pour la première fois de nombreux documents rares, extraits de films et photographies, elle traite des thèmes chers à l’artiste tels que les frontières, l’architecture, l’histoire et la mythologie. La visite de l’exposition est une occasion unique d’étudier l’œuvre du cinéaste israélien et de retracer ses 40 années de création. Notre dossier pédagogique vise à rendre son contenu plus accessible. Il propose des outils didactiques et des activités destinés aux élèves. L'approche est axée sur des objectifs d’apprentissage définis, la vulgarisation de l’information et des propositions pédagogiques adaptées. Nous vous proposons donc un dossier qui contient les informations essentielles concernant le cinéaste et sa démarche ainsi que les thèmes développés dans l’exposition. Pour compléter l’expérience pédagogique, nous avons inclus des pistes pédagogiques à proposer avant la visite ainsi qu’une activité pédagogique à proposer lors du retour en classe. Afin de préparer une visite guidée ou une visite libre pour vos élèves, nous vous encourageons à prendre contact avec la médiation culturelle du Musée de l’Elysée au 021 316 9913 et venir visiter les expositions gratuitement, en vous annonçant à l’avance au Département médiation culturelle. Toutes les informations concernant l’action culturelle sont disponibles sur notre site Internet au www.elysee.ch/mediation-culturelle/. Nous serions ravis de collaborer avec vous et très heureux d’accueillir vos élèves. Bonne visite ! Afshan Heuer Responsable de la médiation culturelle Musée de l’Elysée Tél. : 021 316 9913 [email protected] www.elysee.ch Les contributeurs du dossier pédagogique Rédaction : Afshan Heuer et Sandra Romy Recherches : Afshan Heuer et Sandra Romy Réalisation : Sandra Romy Commissaire de l’exposition : Matthieu Orléan, La Cinémathèque française Coordination de l’exposition pour le Musée de l’Elysée : Anne Lacoste, conservatrice Couverture : Amos Gitai sur le tournage de Kippour d'Amos Gitai, 2000 © Agav Films/ DR Ci-dessus : Dessin réalisé sur papier, 1973 © Amos Gitai Derrière Amos Gitai le rideau Dossier pédagogique Elysée Lausanne Amos Gitai Architecte de la mémoire Table des matières 1. Préparation de la visite • • Présentation de l’artiste Présentation de l’exposition 2. Pistes pédagogiques à proposer avant la visite • • 9 Réflexion et discussion autour du film documentaire et du film de fiction Réflexion et discussion autour du plan-séquence 3. Activité pédagogique à proposer après la visite • 4 11 Ecriture d’un scénario et réalisation d’un court-métrage de fiction tourné en un plan-séquence 4. Filmographie d'Amos Gitai 5. Le Musée de l'Elysée, informations pratiques 14 16 Photographie de plateau de Désengagement d'Amos Gitai, 2007 © Agav Films / Ziv Koren Avec Juliette Binoche 3/16 Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Dossier pédagogique 1. Préparation de la visite • Présentation de l’artiste Amos Gitai, cinéaste engagé, est né en 1950 à Haïfa en Israël. Inspiré par son père, architecte du Bauhaus, il étudie au Technion de Haïfa puis à l’Université de Berkeley en Californie où il obtient, en 1986, un doctorat en architecture vernaculaire. En 1973, alors âgé de 23 ans, Gitai est envoyé au front pendant la guerre du Kippour, où il est brancardier. Avec la caméra Super 8 que sa mère lui a offerte, il filme ce que la guerre du Kippour lui met sous les yeux. L’hélicoptère qui transportait Gitai et ses camarades est bombardé par un missile syrien, décapitant, sous ses yeux, l’officier assis sur le siège devant lui. L’engin s’écrase, laissant Gitai, un des deux seuls survivants de l’équipe, gravement blessé. L’expérience de la guerre du jeune étudiant sera à la fois traumatisante et décisive pour sa carrière. « De retour à la vie civile, cette chute n’aura de cesse de hanter Gitai, et c’est le cinéma qui va s’imposer comme art de mémoire. »1 L’artiste explique : « Le cinéma est plutôt une sorte de protection, ça nous aide à installer des perspectives dans un contexte d’événements qui se déroulent devant nous, et mentalement ça m’a beaucoup aidé. C’est-à-dire cette série de photos et de films tournés pendant la guerre a établi une certaine distance et je crois que la distance a protégé de certains dégâts. »2 Depuis le début des années 70, Gitai réalise des courts-métrages et des films documentaires, dont deux pour la télévision israélienne. Son film La Maison (Bait) (1980), qui retrace les changements de propriétaires et d’occupants d’une maison de Jérusalem-Ouest réunissant les anciens propriétaires palestiniens et les nouveaux habitants israéliens, est trop controversé et sera censuré par la télévision israélienne. La polémique se poursuit avec son documentaire Journal de campagne (1982), tourné dans les territoires occupés avant et pendant l’invasion du Liban. Gitai est contraint de quitter Israël et s’installe à Paris. En 1983, Gitai part voyager autour du monde, et il réalise notamment deux films documentaires : Ananas (1983) qui dénonce les méfaits de la mondialisation en racontant l’histoire d’une boîte d’ananas fabriquée aux Philippines, « Packaged in Honolulu », « Distributed in San Francisco » avec une étiquette « Printed in Japan », et BangkokBahrein (1984) qui traite du trafic d’êtres humains et des relations économiques dans le monde moderne. 1. Dupont, Louise, (2014), Amos Gitai Architecte de la mémoire [reportage], dans à l'affiche. France 24, Repéré sur : http://www.france24.com/fr/20140228-culture-cinema-amos-gitai-israel-exposition-cinematheque-francaise-thaddaeus-ropac/ 2. Ibid Photographie d’Amos Gitai sur le tournage d'House d'Amos Gitai, 1980 © Agav Films / Amos Gitai © DR 4/16 Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Dossier pédagogique En 1993, Israéliens et Palestiniens signent les accords d’Oslo ; Gitai retourne alors vivre à Haïfa, où il réalise une trilogie de fictions autour de trois villes israéliennes : Devarim (Tel-Aviv) (1995), Yom Yom (Haïfa) (1998) et Kadosh (Jérusalem) (1999) qui traitent des thèmes de la religion, de la spiritualité et du conflit entre Arabes et Juifs. Il faudra attendre la fin des années 90 pour que Gitai affronte l’expérience vécue durant la guerre du Kippour. Enfin, en 1997, il réalise Kippour, souvenirs de guerre, film documentaire, et en 2000, Kippour, film de fiction. Le regard documentaire de Gitai sur Israël est unique, son œuvre sert souvent à altérer l’image médiatique simpliste du conflit israélopalestinien. Après Kippour, Gitai réalise un film collectif, Kedma (2002), composé de 11 courts-métrages réalisés par 11 réalisateurs de pays différents, ainsi que quatre films de fiction : Alila (2003), Terre promise (2004), Free Zone (2005) et Désengagement (2007). Amos Gitai impose un style unique et sa prédilection pour le planséquence caractérise son cinéma. Comme l’explique le commissaire de l’exposition, Matthieu Orléan : « Gitai a cette manière de capter du réel, de ne pas monter, de ne pas ajouter de fioriture ou encore de rajouter une voix off et de faire surgir quelque chose qu’il capte aussi bien dans la fiction que dans le documentaire. Certains plans-séquences sont assez emblématiques, on est transportés dans un plan-séquence, parfois dans une réalité paradoxale qui est la réalité du cinéma. Par exemple, dans le dernier plan de Berlin-Jérusalem, on passe des années 30 aux années 80 en quelques mètres où la caméra glisse dans les rues (travelling). »3 Préoccupé par les causes humanitaires, notamment la diaspora et l’antisémitisme, et touché par le conflit israélo-palestinien qu’il traite en filigrane dans presque tous ses films, Gitai choisit de tourner Ana Arabia (2013), son dernier film, en un seul plan-séquence et explique : « Je ne veux pas qu’il y ait une coupe entre Israéliens et Palestiniens. Je crois qu’il faut qu’on trouve un modus vivendi issu de coexistence et si je traduis cette phrase en syntaxe cinématographique, c’est-àdire que je ne coupe pas, alors c’est un plan de 81 minutes. »4 3. Matthieu Orléan, (2014, 20 février), Amos Gitai architecte de la mémoire.Repéré sur http://www.cinematheque.fr/fr/expositions-cinema/precedentes-expositions/amosgitai-architecte-me/exposition.html 4. Dupont, Louise, (2014), Amos Gitai Architecte de la mémoire [reportage], dans à l'affiche. France 24, Repéré sur : http://www.france24.com/fr/20140228-culture-cinema-amos-gitai-israel-exposition-cinematheque-francaise-thaddaeus-ropac/ Photographie de plateau de Devarim, 1995 Avec Veronica Gottlieb, Maya Kadishman, Assi Dayan, Amos Gitai © Agav Films / DR 5/16 Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Dossier pédagogique Gitai se sent aussi concerné par le statut de la femme dans la société. Sa mère, femme indépendante et cosmopolite, très tôt engagée dans le mouvement sioniste, lui parlait souvent de la condition féminine. La place des femmes est capitale dans son œuvre. Comme il l’explique : « On a tous été créés par une femme, ce sont les femmes qui donnent naissance, alors il faut leur rendre hommage. Toute cette série d’interlocutrices (Juliette Binoche, Jeanne Moreau, Natalie Portman, etc.), j’ai trouvé fascinant que chacune, à sa façon, a essayé de trouver dans le projet qu’on était en train de faire un prétexte pour apprendre quelque chose. Moi, je trouve que c’est la bonne démarche, c’est-à-dire que le projet cinématographique ou artistique doit servir comme un prétexte à apprendre quelque chose sur le monde et élargir notre connaissance. »5 Amos Gitai a réalisé près de 80 films, allant du court-métrage au documentaire en passant par la fiction, dans des formats et supports différents, mais il s’exprime aussi à travers d’autres médiums comme le dessin, la photographie, le théâtre, la télévision, des installations vidéo et autres supports. • Présentation de l’exposition L’exposition aborde thématiquement l’œuvre du cinéaste. Elle est divisée en quatre sections : « Kippour, naissance d’un cinéaste », « Réalités et frontières », « L’exil et le monde » et « Mythologies ». La première section, « Kippour, naissance d’un cinéaste », se focalise sur les éléments biographiques de l’artiste. Elle débute avec une double projection des images tournées par Gitai pendant la guerre du Kippour en caméra Super 8 et un extrait de son film Kippour (2000), présentant en parallèle réalité et fiction. La première salle est consacrée à son grave accident, notamment à travers les dessins ou portraits déformés qu’il réalise pendant sa convalescence. La visite de la deuxième salle commence avec une photographie de Gitai dans son unité de secouristes, publiée en couverture de L’Express le 15 octobre 1973, et se poursuit avec une sélection de photographies de plateau et de tournage (par Ziv Koren) du film Kippour. A travers des photographies de famille personnelles, des extraits de Lullaby to My Father (2011) et Ahare (1973) et ses dessins d’architecture, l’exposition montre l’influence de la vie privée de Gitai ainsi que de sa formation sur son œuvre cinématographique. Enfin, des photographies de tournage et un extrait de Carmel (2009), un de ses films les plus personnels, nous permet d’explorer les premières sources d’inspiration du cinéaste et son processus de création. 5. Dupont, Louise, (2014), Amos Gitai Architecte de la mémoire [reportage], dans à l'affiche. France 24, Repéré sur : http://www.france24.com/fr/20140228-culture-cinema-amos-gitai-israel-exposition-cinematheque-francaise-thaddaeus-ropac/ Photographie de tournage de Free Zone d'Amos Gitai, 2004 © Agav Films / Ziv Koren Avec Amos Gitai, Natalie Portman, Hana Laslo 6/16 Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne La deuxième section, « Réalités et frontières », est consacrée au cinéma engagé de Gitai à travers ses grands films, notamment ses trilogies qui interrogent à la fois l’identité d’Israël et les paradoxes de son pays natal. Cette partie met également en évidence la « frontière perméable » entre documentaire et fiction qui crée une certaine ambiguïté palpable dans l’œuvre du cinéaste. Bien que le documentaire soit toujours présent dans son travail, Gitai se dirige vers la fiction, où la réalité laisse place à l’imagination. Ainsi, le hasard et l’improvisation prennent vie. Le cinéaste ne se laisse jamais enfermer dans le schéma du scénario type, ni dans un style trop figé. Sa méthode de travail étant anticonformiste et radicale, Gitai filme dans des zones en marge de la société et dans des circuits inhabituels. Le commissaire de l’exposition explique : « Architecte de formation, Gitai a gardé de cet enseignement une aptitude à faire d’un territoire l’état des lieux. Il est un topographe du sensible. Ses histoires prennent place dans des sites transitoires et authentiques, que le réalisateur repère lui-même : no man’s lands, hôtels, bidonvilles, ruines, frontières. » Plusieurs extraits de films engagés du cinéaste y figurent. La visite débute avec la trilogie House/La Maison/Bait (1980), Une maison à Jérusalem/Bait be Yerushalayim (1998) et News from Home, News from House (2005). Elle se poursuit avec une présentation consacrée au tournage de Free Zone (2005), Terre promise (2004), Désengagement (2007), Yom Yom (1998), Devarim (1995) et Ana Arabia (2013). Les photographies de plateau, de repérage et de tournage de plusieurs films occupent ici une place de choix. Afin de mettre de nouveau l’accent sur la méthode de travail de l’artiste et de contextualiser son œuvre, différentes versions de scénarios manuscrits ainsi que son travail de recherches (notes, documentation, articles de presse, journaux, etc.) sont présentés. Enfin, des photographies noir et blanc emblématiques prises par Gitai à Wadi Rushmia et Kfar Shalem, réalisées en 1975 pour l’exposition « Recyclage » au musée d’Israël de Jérusalem, y sont présentées. La troisième section de l’exposition, « L’exil et le monde », met l’accent sur le caractère international des films de Gitai. Tout au long de sa carrière, le réalisateur se nourrira de ses rencontres et des différentes cultures qu’il côtoie (allemande, italienne, française, africaine ou anglosaxonne), traitant ainsi de sujets plus vastes et globaux. A travers ses multiples voyages, Gitai nous révèle ses préoccupations pour les questions relatives à l’environnement et à la mondialisation ainsi que sa réflexion sur l’identité des pays qu’il parcourt. Le thème de l’exil a une résonance toute particulière car, durant sa vie, le cinéaste l’a vécu deux fois. Cette section présente de nombreux documents, des archives, des photographies et des extraits de films. Elle débute avec le thème Haïfa/Berkeley, portant sur les études d’architecture de Gitai et de son père et se poursuit avec Paris/Prague, traitant le thème de l’exil à travers les films Golem, l’esprit de l’exil (1992) et Roses à crédit (2010). Photographie de tournage de Wadi, dix ans après d'Amos Gitai, 1991 © Agav Films / DR Dossier pédagogique 7/16 Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Dossier pédagogique La visite continue avec Berlin-Jérusalem (1989), son film de fiction sur le voyage de deux femmes vers Jérusalem dans les années 30 construit à partir des biographies d’Else Lasker-Schüler, poétesse expressionniste allemande qui observe la montée du nazisme, et de Mania Shohat, femme russe qui s’installe dans une communauté sioniste en Palestine. Ensuite, l’exposition aborde Bangkok-Bahrein (1984), son film documentaire consacré au trafic d’êtres humains et aux relations économiques (dont un extrait est présenté). Il est suivi par le thème USA-URSS à travers une présentation de son film Ananas (1985), une réflexion sur la société de consommation de masse, ainsi que Le jardin pétrifié (1993), dernier volet de sa trilogie sur le Golem tourné en Russie après la chute de l’URSS. La dernière section, « Mythologies », se penche sur les réflexions métaphysiques de l’artiste ainsi que sur les enjeux temporels, confrontant les époques. Gitai est un des premiers cinéastes à avoir essayé de mettre en scène des textes sacrés et mythologiques dans un cinéma contemporain. Le commissaire de l’exposition explique : « La prédilection de Gitai pour la poésie l’amène à adapter à la lettre des textes bibliques, dans un style que tout oppose aux machines spectaculaires d’Hollywood. » La Bible ou la Kabbale sont souvent citées dans l’œuvre de Gitai, par exemple dans Kadosh (1999), Naissance d’un Golem (1990), et notamment dans Esther (1985), film clé de sa carrière. Dans ce dernier, la Bible est présente de façon implicite et tisse des liens avec l’histoire du monde contemporain. Gitai insiste également sur la dualité des personnages. Afin de démontrer un contexte politique où « tout est paradoxe », il choisit un acteur palestinien dans le rôle du héros juif. Cette section se concentre sur le film Esther, premier long-métrage de fiction de Gitai, à travers une présentation de maquettes de costumes et dessins préparatoires au maquillage des personnages, un cahier de repérage de décors et un découpage scénaristique du Livre de 1986. De nouveau, des photographies de tournage et de plateau de nombreux films sont présentées. Le point culminant de l’exposition est la projection d’un extrait d’Esther, tourné à Wadi Salib, près de Haïfa. Ce film est conçu comme un immense tableau vivant. Selon le commissaire de l’exposition, ce film : « … met en place un dispositif minimaliste, centré sur des symétries de couleurs et de sons, qui ritualisent l’espace et font du film une merveille d’arte povera. » Dans la Salle Lumière sont diffusés des plans-séquences de six films réalisés par Amos Gitai : American Mythologies (1981), Journal de campagne/Yoman Sade (1982), Berlin-Jérusalem (1989), Kadosh (1999), Kedma (2002) et Alila (2003). L’exposition est accompagnée d’un catalogue publié par Gallimard et La Cinémathèque française. Photographie de plateau d’Esther d'Amos Gitai, 1986 © Agav Films / DR Avec Simone Benyamini 8/16 Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Dossier pédagogique 9/16 2. Pistes pédagogiques à proposer avant la visite En raison de l’âge conseillé des films de Gitai, qui va de 14 à 16 ans, les activités proposées dans le dossier pédagogique sont destinées aux élèves à partir de 14 ans. Pour que l’expérience pédagogique soit complète, cette partie du dossier fixe un cadre pour concevoir, élaborer et mener des activités qui peuvent se dérouler aussi bien à l’école que dans les centres parascolaires, avant ou après la visite de l’exposition. Chaque activité est basée sur des objectifs d’apprentissage définis. • Réflexion et discussion autour du film documentaire et du film de fiction Afin de mieux comprendre la complexité des genres cinématographiques qui s’appliquent au travail d’Amos Gitai, nous vous proposons une réflexion autour du film documentaire et du film de fiction. Le film documentaire Le cinéma documentaire se définit souvent par son rapport à la réalité et au monde réel. Le Dictionnaire théorique et critique du cinéma décrit ce genre ainsi : « (…) un montage cinématographique d’images visuelles et sonores données comme réelles et non fictives. Le film documentaire présente presque toujours un caractère didactique ou informatif qui vise principalement à restituer les apparences de la réalité, à donner à voir les choses et le monde tels qu’ils sont. »6 Le film de fiction Le Dictionnaire théorique et critique du cinéma décrit le film de fiction comme ceci : « La fiction est une forme de discours qui fait référence à des personnages ou à des actions qui n’existent que dans l’imaginaire de leur auteur, et par la suite dans celle du lecteur/spectateur. Plus généralement, est fiction (…) tout ce qui est inventé à titre de simulacre. »7 6. Aumont, Jacques et Marie, Michel, 2001, Dictionnaire théorique et critique du cinéma, Nathan 7. Jacquinot, Geneviève, 1994, Le documentaire, une fiction (pas) comme les autres, Cinémas, revue d’études cinématographiques, vol. 4, n° 2, Université de Montréal Photographie de plateau de Berlin Jérusalem d'Amos Gitai, 1989 © Thierry Nouel Amos Gitai (à droite) dans son unité de secouristes, pendant la guerre de Kippour. Cette photographie fut publiée en couverture de L’Express, le 15 octobre 1973 © Agav Films / DR Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Dossier pédagogique Le croisement entre fiction et documentaire La distinction entre fiction et documentaire repose sur le rapport à la réalité. Selon Geneviève Jacquinot-Delaunay : « … ce qui différencie le documentaire de la fiction, ce n’est pas la nature des objets rapportés mais la nature de l’acte de s’y rapporter, fictif dans un cas, réel dans l’autre. »8 Cependant, délimiter les territoires respectifs de la fiction et du documentaire n’est pas aisé. Les frontières se chevauchent et s’effacent. A ce propos, Jean-Luc Godard dit: « Qu’est-ce que le documentaire, qu’est-ce que la fiction ? Je sais bien, mais c’est pas si simple. »9 Objectifs pédagogiques 1. Sensibiliser les élèves aux genres cinématographiques. 2. Encourager une réflexion sur le film documentaire et le film de fiction. 3. Susciter une comparaison entre les deux genres cinématographiques. 4. Faciliter une discussion sur ces genres à travers des films que les élèves connaissent. • Réflexion et discussion autour du plan-séquence La réalisation d’un plan-séquence consiste à laisser tourner la caméra en continu pendant toute la séquence et cela sans interruption. Le réalisateur peut faire un plan fixe ou tourner autour des acteurs avec la caméra, selon le rythme et la dynamique voulus. Une chose importante à faire avant le tournage du plan-séquence est de tout préparer en amont : les mouvements de caméra, le positionnement des protagonistes et du réalisateur, afin que son ombre n’apparaisse pas à l’écran… Tout cela afin d’éviter des problèmes pendant le tournage et de devoir tout recommencer. Le plan-séquence Bien que le plan-séquence soit l’une des techniques les plus difficiles à maîtriser pour un réalisateur, depuis le début du cinéma, nombreux sont ceux qui l’utilisent. « Un plan-séquence est donc une séquence composée d’un seul et unique plan, restitué tel qu’il a été filmé, sans aucun montage, plan de coupe, fondu ou champ-contrechamp. »10 Intégrant dans son œuvre des scènes filmées en un seul plan sans montage et sans retouche, Amos Gitai prône le recours à cette technique. 8. Jacquinot, Geneviève, 1994, Le documentaire, une fiction (pas) comme les autres, Cinémas, revue d’études cinématographiques, vol. 4, n° 2, Université de Montréal 9. Jean-Luc Godard, Introduction à une véritable histoire du cinéma (Albatros, t. 1, 1980, p. 125) 10. Devenir réalisateur, (2011). Plan séquence. Repéré à http://devenir-realisateur. com/mouvement/plan-sequence. Yaël Abecassis jouant le rôle d’Efratia Gitai dans Lullaby to my father, d'Amos Gitai, 2012 © Agav Films / Dan Bronfeld 10/16 Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Parlant de l’importance du plan-séquence dans son travail, l’artiste explique : « Je crois que la question du plan-séquence touche la question du rythme et de la perception. Je trouve que le Moyen-Orient est très intoxiqué par l’image médiatique – on pourrait dire qu’il y a là le plus grand nombre de caméras par mètre carré – et je trouve que c’est une situation particulière qui demande réflexion. Si le cinéma veut y apporter son regard, il doit changer son registre, et l’utilisation du plan-séquence est une manière de modifier cette perception. Les films se composent d’éléments thématiques et formels. Les bons films présentent toujours un dialogue entre ces deux zones de discours. »11 Avec Ana Arabia (2013), son 21e long-métrage de fiction, le cinéaste porte sa préconisation pour le plan-séquence à l’extrême et réalise une véritable prouesse technique. Ce film est tourné en un unique plan-séquence d’une heure et demie. Objectifs pédagogiques 1. Aider les élèves à comprendre la signification du plan-séquence. 2. Approfondir leur compréhension de l’emploi de cette technique et de l’intérêt qu’elle suscite chez le réalisateur. 3. Encourager une discussion autour de la notion de temps à travers le plan-séquence et l’effet qu’il produit chez le spectateur. 3. Activités pédagogiques à proposer après la visite • Ecriture d’un scénario et réalisation d’un court-métrage de fiction tourné en un plan-séquence Objectifs pédagogiques 1. Faciliter l’écriture d’un scénario de court-métrage de fiction par groupes de trois élèves. 2. Inciter les élèves à prendre conscience des apports et des contraintes du plan-séquence. 3. Faciliter la réalisation d’un court-métrage tourné en un planséquence. 4. Encourager les élèves à s’exprimer à travers la création. 11. Panorama Cinéma, (2011) entrevue avec Amos Gitai. Repéré sur http://www.panorama-cinema.com/V2/article.php?categorie=1&id=184 Photographie prise à Wadi Rushmia, circa 1975 © Amos Gitai Dossier pédagogique 11/16 Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Dossier pédagogique 12/16 • Ecriture d’un scénario Questions clés 1. Quel genre de film est-ce ? (thriller, comédie…) 2. Quel est le thème du film ? Son message ? Sa morale ? 3. Quelle est l’identité du héros (âge, caractère, famille, travail…) et des éventuels autres protagonistes ? 4. Comment faire évoluer le héros ? Quels sont les changements entre le début, le milieu et la fin de l’histoire ? 5. Comment structurer le récit ? Durée recommandée de l’activité 2 heures Matériel requis Feuilles de papier, stylos. Déroulement de l’activité 1. Former des groupes de trois élèves. 2. Entamer une réflexion au sein de chaque groupe sur l’histoire qu’il souhaite raconter. 3. Définir le rôle de chacun dans l’histoire (attention, une personne aura le rôle de cameraman). 4. Définir le lieu de tournage (dans la rue, au café, à la maison, au sein de l’école, dans les transports publics…). 5. Résumer l’histoire du film en quelques lignes tout en restant le plus simple et clair possible (synopsis). 6. Entamer l’écriture du scénario en s’appuyant sur les questions cidessus, mais sans écrire de dialogues. 7. Bien s’imprégner du thème du film et du message que l’on veut faire passer. 8. Prendre en compte la durée du plan-séquence (durée conseillée: 10 min). Synopsis du film Ana Arabia «Filmé en un plan-séquence de 81 minutes, Ana Arabia est un moment dans la vie d’une petite communauté de marginaux, juifs et arabes, qui cohabitent dans une enclave oubliée de la « frontière » entre Jaffa et Bat Yam, en Israël. Un jour, Yaël, une jeune journaliste, leur rend visite. Sur ce terrain vague entouré d’H.L.M., avec ses baraques déglinguées, son verger rempli de citronniers, Yaël découvre les visages et les mots de Youssouf et de Sarah, de Miriam et de Walid, delrus amis, de leurs voisins… Ils disent la vie et ses aléas, avec ses rêves, ses espoirs, ses histoires d’amour, ses désirs et ses déceptions. Yaël observe, écoute…Leur rapport au temps est différent de celui de la ville qui les entoure. Dans ce lieu bricolé et fragile, la coexistence est possible. Une métaphore universelle»12 Photographie de plateau de Kedma d'Amos Gitai, 2002 © Agav Films / Ziv Koren Avec Veronica Nicole, Menachem Lang Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Dossier pédagogique • Réalisation du court-métrage tourné en un plan-séquence de 10 minutes Questions clés 1. Quel sera le rôle de chaque élève lors du tournage ? (acteur, cameraman…) 2. Combien faut-il de prises pour avoir la bonne séquence ? 3. Comment choisir le bon plan-séquence ? Durée recommandée de l’activité 2 heures Matériel requis Caméras, appareils photographiques numériques, ou téléphones portables dotés de la fonction caméra vidéo.12 Déroulement de l’activité 1. Désigner dans chaque groupe de trois élèves un réalisateur et deux acteurs-trices. 2. Par groupes, relire le scénario et le répéter plusieurs fois en improvisant. 3. Se rendre sur le lieu de tournage choisi avec les protagonistes, caméra en main. 4. Sur le lieu de tournage, répéter en improvisant une dernière fois le scénario avant de filmer. 5. Filmer les acteurs en laissant tourner la caméra pendant 10 minutes (filmer à nouveau si besoin). 6. Choisir le plan-séquence le plus représentatif du scénario. 7. Montrer les films au retour en classe. 12. Amos Gitai, (2013), Ana Arabia. Repéré à http://www.amosgitai.com/html/film. asp?docid=84&lang=0 Photographie de plateau de Terre promise d'Amos Gitai, 2004 © Agav Films / DR Avec Diana Bespechni, Anne Parillaud 13/16 Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Dossier pédagogique 4. Filmographie d'Amos Gitai Fictions 2013 Ana Arabia 2011 Lullaby to My Father 2010 Roses à crédit 2009 La Guerre des fils de lumière contre les fils des ténèbres Carmel 2008 Plus tard tu comprendras 2007 Désengagement 2005 Free Zone 2004 Terre promise/Promised Land 2003 Alila 2002 Kedma 2001 Eden 2000 Kippour 1999 Kadosh 1998 Yom Yom 1995 Devarim 1993 Jardin pétrifié 1991 Golem, l'esprit de l'exil 1989 Berlin Jérusalem 1985 Esther Documentaires 2012 Architecture en Israël/Conversations avec Amos Gitai 2005 News from Home, News from House 2001 Wadi Grand Canyon 1998 Zion, auto-émancipation Une maison à Jérusalem/Bait be Yerushalayim Tapuz/Orange 1997 Guerre et paix à Vesoul (documentaire d’Amos Gitai et Elia Suleiman) 1996 Milim/Mots L’Arène du meurtre 1994 Kippour, souvenirs de guerre Donnons une chance à la paix/Give Peace a Chance Au nom du Duce/Naples-Rome 1993 Queen Mary '87 La Guerre des fils de lumière contre les fils des ténèbres Dans la vallée de la Wupper 1992 Métamorphose d’une mélodie/Gibellina, metamorfosi di una melodia 1991 Wadi, dix ans après 1990 Naissance d’un Golem. Carnet de Notes 1987 Brand New Day 1984 Reagan : Image for Sale Bangkok-Bahrein/Travail à vendre 1983 Ananas/Pineapple 1982 Journal de campagne/Yoman Sade 1981 Wadi American Mythologies 1980 In Search of Identity House/La Maison/Bait Photographies de plateau de Golem, l’esprit de l’exil d'Amos Gitai, 1992 © Bernard Hébert Avec Hanna Schygulla 14/16 Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne Dossier pédagogique 15/16 1979 Wadi Salib Riots/Meoraot Wadi Salib 1978 Wadi Rushmia Architectura 1977 Public House/Shikun Political Myths aka Charisma 2 Moyens métrages 1979 Cultural Celebrities Carter en visite en Israël/Bikur Carter be’ Israel Courts métrages 2012 The Book of Amos 2007 Le Dibbouk de Haïfa 2002 11’ 09’’ 01 2001 Surgeon General's Warning 1994 Munio Weinraub Gitai Architect (1909-1970) 1977 Under the Water/Betoch Hamain Singing in Afula/Shirim be Afula La Frontière/Hagvul Dimitri 1976 Charisma 19751976 Ma mère au bord de la mer 1974- 1975 Lucie Blowing Glass 1974 The International Orthodontist Congress Pictures in the Exhibition Memphis U.S.A. Suite Memphis U.S.A. Faces Maim/Water Arlington U.S.A. 19731974 Shosh 1973 Images d’après guerre Talking About Ecology/Medabrin al Ecologia Ahare/Après Fire is Paper, Paper is Fire Images de guerre 1, 2, 3 19721974 Souvenirs d'un camarade de la 2e Aliya 19721973 Windows in David Pinsky no5 Vagues/Galim/The Sea Souk/Dialogues de femmes La Géographie selon l'homme moderne et le contrôle de l'environnement 1972 Textures Black Is White Details of Architecture Arts and Crafts and Technology Bibliographie Dupont, Louise, (2014), Amos Gitai Architecte de la mémoire [reportage], dans à l'affiche. France 24, Repéré sur http://www. france24.com/fr/20140228-culture-cinema-amos-gitai-israel-exposition-cinematheque-francaise-thaddaeus-ropac/ Matthieu Orléan, (2014, 20 février), Amos Gitai architecte de la mémoire.Repéré sur http://www.cinematheque.fr/fr/expositionscinema/precedentes-expositions/amos-gitai-architecte-me/ exposition.html Devenir réalisateur, (2011). Plan séquence. Repéré sur http://devenir-realisateur.com/mouvement/plan-sequence. Panorama Cinéma, (2011) entrevue avec Amos Gitai. Repéré sur http://www.panorama-cinema.com/V2/article. php?categorie=1&id=184 Amos Gitai, (2013), Ana Arabia. Repéré sur http://www.amosgitai. com/html/film.asp?docid=84&lang=0 Jacquinot, Geneviève, 1994, Le documentaire, une fiction (pas) comme les autres, Cinémas, revue d’études cinématographiques, vol. 4, n° 2, Université de Montréal Godard, Jean-Luc , 1980, Introduction à une véritable histoire du cinéma, Paris : Albatros Aumont, Jacques et Marie, Michel, 2001, Dictionnaire théorique et critique du cinéma, Nathan Jeanne Moreau et Amos Gitai sur le tournage de Plus tard, tu comprendras d'Amos Gitai, 2008 © Agav Films / Dan Bronfeld Derrière Amos Gitai le rideau Elysée Lausanne 5. Le Musée de l’Elysée Mission Reconnu à l’échelle internationale, le Musée de l’Elysée est l’un des plus importants musées entièrement consacrés à la photographie. Depuis sa création en 1985, il s’interroge sur la photographie et la fait connaître grâce à des publications de référence, des expositions innovantes et des événements ouverts à un large public. Pôle d’excellence dans la conservation et la valorisation du patrimoine visuel, le musée détient une collection unique de plus de 100’000 tirages et plusieurs fonds photographiques, notamment celui de Charlie Chaplin, René Burri ou Nicolas Bouvier. En soutenant la jeune création, en offrant de nouvelles perspectives sur les grands maîtres et en confrontant la photographie à d’autres formes d’art, le Musée de l’Elysée expérimente avec l’image. Basé en Suisse, il présente chaque année trois expositions majeures à Lausanne et une quinzaine d’expositions dans des musées et festivals prestigieux dans le monde entier. De caractère régional et d’envergure internationale, le Musée de l’Elysée est à la recherche constante de façons nouvelles et intéressantes d’interagir avec son public et de collaborer avec d’autres institutions. Informations pratiques Adresse 18, avenue de l’Elysée CH - 1014 Lausanne T + 41 21 316 99 11 F + 41 21 316 99 12 www.elysee.ch Twitter @ElyseeMusee Facebook facebook.com/elysee.lausanne Horaires Ma - Di, 11h - 18h Fermé le lundi, sauf les jours fériés Ouvert le Lundi de Pentecôte Tarifs Adultes CHF 8.00 AVS CHF 6.00 Etudiants/Apprentis/AC/AI CHF 4.00 Enfants jusqu’à 16 ans : entrée libre Entrée libre le premier samedi du mois Musée de l’Elysée © Reto Duriet Café Elise © Reto Duriet Dossier pédagogique 16/16