Une épée de Damoclès menace-t-elle la coopération universitaire ?

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Une épée de Damoclès menace-t-elle la coopération universitaire ?
Une épée de Damoclès menace-t-elle
la coopération universitaire ?
Les projets et les programmes de coopération menés par les universités et les hautes écoles1
francophones et flamandes en partenariat avec les universités des pays en développement à travers
les coupoles universitaires francophone (CIUF-CUD) et flamande (VLIR-UOS) sont aujourd’hui
menacés. Pour l’année 2012, une enveloppe d’environ 65 millions d’euros est actuellement réservée
pour la coopération universitaire au sein du budget fédéral de la coopération belge au
développement. Certains considèrent toutefois la coopération universitaire comme une compétence
injustement financée par le gouvernement fédéral et qualifiable à ce titre de « compétence
usurpée ». Il reviendrait, selon ce point de vue, aux communautés de prévoir les moyens nécessaires
à l’exercice de cette compétence au sein de leur propre budget, dès l’exercice budgétaire 2012. Étant
entendu que les Communautés, comme d’ailleurs les Régions, souffrent aujourd’hui de déficits à
résorber, il est évident qu’un transfert de la compétence en question sans moyens financiers
signerait la fin de la coopération universitaire.
Les universités de la Communauté française, ensemble avec les universités et les hautes écoles
flamandes, sont convaincues de ce qu’il n’existe aucun argument décisif permettant d’affirmer que la
coopération universitaire soit indûment financée par le gouvernement fédéral. Les institutions de la
connaissance que sont les universités et les hautes écoles impliquées dans les actions de coopération
concernées agissent en effet dans ce cadre davantage comme acteurs de développement
qu’uniquement comme acteurs purement académiques. La coopération au développement n’est, par
ailleurs, pas une compétence exclusive, mais bien une compétence parallèle, avec toutefois la
compétence principale au niveau fédéral. Ni dans l’accord communautaire ni dans l’accord fédéral de
gouvernement, il n’est en outre question de défédéralisation de la coopération au développement,
et encore moins de démantèlement des efforts jusqu’ici consentis en la matière.
Par l’intermédiaire de le leurs commissions chargées des questions de coopération au
développement, les coupoles universitaires que sont le CIUF et le VLIR plaident non seulement le
respect par le gouvernement fédéral des engagements pluriannuels conclus, mais également le
maintien des moyens correspondants. Un transfert de compétence sans moyens proportionnés et
sans une préparation politique et administrative réfléchie et coordonnée, est en tout état de cause
impensable et inacceptable.
Le 22 avril 2010, les universités ont conclu avec le ministre fédéral de la Coopération au
développement un accord politique sur la réforme de la coopération universitaire au développement
par lequel le gouvernement s’est engagé à assurer aux universités une garantie budgétaire et un
schéma de croissance budgétaire annuelle de 3 %, de même qu’une simplification administrative. Le
CIUF-CUD et le VLIR-UOS travaillent à la concrétisation de cet accord depuis plus d’un an dans le but
de lancer les réformes dès 2013. Il s’agit d’un processus très intense au terme duquel l’organisation
et le fonctionnement de la coopération universitaire au développement connaîtront un changement
profond. La concentration géographique, des stratégies pays et des plans d’action triennaux en
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La collaboration avec les hautes écoles n’est effective que pour le VLIR-UOS.
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seront les fondements de demain. L’objectif est d’aligner les partenariats universitaires sur les
agendas nationaux du développement et de les mettre en lien avec les actions réalisées par d’autres
acteurs, belges et internationaux, dans un pays donné et ce afin d’aboutir à des programmes
davantage intégrés.
Toutefois, depuis décembre 2011, le CIUF-CUD et le VLIR-UOS sont dans le flou et dans l’incertitude
quant à leur avenir. Ils se trouvent actuellement dans une situation de vide juridico-budgétaire total
et extrêmement incertaine, au cœur d’une année budgétaire en cours où, dans un souci de
continuité, des activités entamées se poursuivent, et où des dépenses sont préfinancées par les
universités, mais sans la moindre garantie du gouvernement que les dépenses réalisées pourront
être récupérées en totalité. La situation s’accentue progressivement à un point tel que les dépenses
courantes comme, par exemple, les paiements aux étudiants étrangers (bourses, logement, visa,
billets d’avion,…) et les autres dépenses récurrentes réalisées dans le cadre des projets en cours ou
pour le personnel en Belgique pourraient ne plus être poursuivies. Les universités réclament par
conséquent d’urgence une base formelle pour ces dépenses courantes. À défaut, elles seront
contraintes de mettre définitivement fin à toutes les dépenses effectuées dans le cadre des projets
de coopération universitaire ainsi qu’aux paiements faits aux étudiants étrangers, aux académiques
et à leur propre personnel à charge des budgets dont il est question.
Bertrand Losson, Président du CIUF-CUD
15 février 2012
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