Conférence-débat sur l`avenir de la pomme de terre
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Conférence-débat sur l`avenir de la pomme de terre
ACTUALITÉS Ath, 1er avril Conférence-débat sur l’avenir de la pomme de terre M ercredi 1er avril, au soir, la direction Développement et Vulgarisation à Ath, la Fugea, avec l’aide du Carah, avaient invité les planteurs de pommes de terre à une conférence-débat dans les locaux de l’institut agricole. Une centaine de planteurs avaient répondu à l’appel. Après une brève introduction de la part de MM. Delwarte (Fugea) et Papeians (Direction Développement et Vulgarisation), la parole est donnée M. Pierre Lebrun, de la Fiwap. Depuis cette année, les droits au paiement unique peuvent être activés pour la pomme de terre, comme c’est le cas pour les céréales, le colza ou les betteraves. C’est nouveau, et cela risque de changer beaucoup de choses. Les planteurs ne peuvent pas rester inactifs devant cette situation. D’où cette conférencedébat menée le 1er avril, à Ath, (et ce n’était pas un poisson). A l’issue de cette longue soirée, on se rend compte que les planteurs sont indécis, même s’ils se rendent compte qu’ils risquent gros. Il y a du potentiel Des 4 orateurs de la soirée, Pierre Lebrun s’est montré le plus optimiste. Lorsqu’on analyse le secteur au niveau européen, on se rend compte que 5 pays sont importants: Allemagne, Belgique, France, Pays-Bas, Royaume-Uni. Les pays NEPG produisent entre 50 et 55% de la production de l’Union européenne. La production régresse dans les autres pays, même en Pologne. La production globale (frais, industrie, amidonnerie…) des 5 pays tourne autour de 31 millions de tonnes, et c’est le seuil critique. Des opportunités existent vers le Sud (Allemagne, Italie…) mais également à l’Est (Pologne, Tchéquie, pays baltes…). En Belgique, le premier marché est celui de la transformation. Et on constate une croissance quasi continue depuis 25 ans, comme en Allemagne. La transformation en France et au Royaume-Uni est stable. Les Pays-Bas sont les champions de la transformation. Ils plafonnent et pourraient se faire dépasser par les Allemands. Tout cela veut dire que la transformation belge est compétitive. Par ailleurs, la Belgique se démarque des autres pays par la prédominance de la variété Bintje qui représente entre 85 et 90% de l’approvisionnement en variétés de conservation. Elle se fait tailler peu à peu des croupières par d’autres variétés sous monopole comme Astérix, Fontane, Ramos, Innovator, Agria ou Victoria. Amoureux de la Bintje, les planteurs belges sont également fiers de leur liberté. C’est en Belgique que le marché libre s’exprime le mieux. Il est directement influencé par les accidents climatiques. Il y a évolution des contrats avec un an de décalage. Selon P. Lebrun, les moyennes de 1996 à 2007 montrent un prix de 8,94 euros/100 kg pour le marché libre, Combien d’ha de pommes de terre seront-ils plantés cette année? Une question qui taraude nombre de planteurs d’autant plus que de nouveaux planteurs pourraient se manifester, vu les changements en matière de DPU. contre 7,51 euros/100 kg pour les contrats d’avant-saison, hors primes de qualité. Par ailleurs, d’autres phénomènes interviennent: les surfaces augmentent par exploitaiton, mais également les coûts de production. Quand on calcule, il ne faut rien oublier. P. Lebrun présente quelques calculs de coûts de production. Selon le PCA à Kruishoutem, en 2008, le coût de production était de 3.020 euros par ha. A quoi il convient d’ajouter la main-d’œuvre et la marge de risque de 15%, ce qui donne un total de 3.835 euros/ha. Si le rendement net payé est de 44 tonnes par ha, le coût à la sortie du champ est de 8,83 euros/100 kg. L’Algemeen Boerensyndikaat (ABS) est en grande partie d’accord sur le calcul. Toutefois, les amortissements (hors stockage) seraient trop faibles, ce qui donne un coût de production de 9,47 euros/100 kg, toujours pour 44 tonnes par ha. Le pronostic de l’ABS pour 2009 est en nette hausse: 10,63 euros/100 kg. Pour le stockage, il faut rajouter 4,17 euros/100 kg. Malgré cela, Pierre Lebrun semble optimiste pour l’avenir. Evidemment, la crise actuelle peut jouer des tours, comme ce fut le cas fin 2008. Il faut gérer l’offre et la demande, notamment par la prévision des marchés… Point de vue néerlandais Mme Hanny Van Beek, présidente du syndicat NAV, part du principe qu’il faut gagner de l’argent avec les pommes de terre. Or, les coûts de production sont en constante augmentation, peu de producteurs connaissent les coûts réels de production et finalement, c’est l’acheteur qui décide du prix. Aux PaysBas, les prix sont structurellement en dessous des coûts de production, ditelle, mais ce n’est pas mieux ailleurs. Le prix aux producteurs dépend de l’offre et de la demande. C’est pourquoi il faut songer à se réunir pour jouer un rôle actif au niveau de la commercialisation. En s’unissant, on a une position plus forte vis-à-vis des acheteurs. On sait, en ce qui concerne la pomme de terre de conservation, que l’équilibre se situe vers 21 millions de tonnes. Le prix est alors de l’ordre de 12-13 euros/100 kg. A 23 millions de tonnes, on est plutôt à 6 euros. Point de vue de l’ABS Guy Depraetere, de l’ABS, est luimême planteur de pommes de terre et il emboîte le pas à Hanny Van Beek: le fermier n’est plus protégé par la pac; les prix sont en dents de scie. Il est donc nécessaire d’adapter l’offre à la demande. Pour cela, il faut se rassembler, s’informer et maîtriser l’offre par le conseil sur l’emblavement (actuellement, il faut réduire); l’échelonnement des ventes, et le retrait des surplus du marché. Il existe des exemples, comme la CBB en betteraves, Ingro pour les légumes. Pour les pommes de terre, on devrait pouvoir arriver à une coordination européenne, réparties selon les régions ou les Etats, toujours dans l’objectif de maîtrisr l’offre, car 1% de trop, c’est une baisse de 6% en prix. Le marché des 5 pays doit être pris en compte car les aléas climatiques se compensent partiellement ou totalement entre les régions de production. Dans le cadre du bilan de santé, l’Union européenne a accepté les organisations de producteurs (avant, ce n’était possible que pour les fruits et légumes) pour autant qu’elles soient fondées par les producteurs en vue d’organiser et d’adapter la production à la demande au nveau du volume et de la qualité, de concentrer l’offre et la mise en marché des produits des membres, d’optimaliser les coûts de production et de stabiliser les prix des producteurs. Au vu des analyses, il faudrait réduire les emblavements de 5 à 7% pour obtenir de bons prix. Un exemple: l’UPGA Guy Depraetere pense qu’on devrait pouvoir arriver à s’organiser. Il prend comme exemple ce qui se passe aux Etats-Unis. L’Etat de l’Idaho produit le plus de pommes de terre. En 2005, l’Union des producteurs de pommes de terre de l’Idaho (UPG) a été créée. On a copié un système en vigueur en Inde (e-Choupal) qui est destinée à contrecarrer l’emprise des intermédiaires sur les paysans, tout ACTUALITÉS en leur apportant des éléments de négociations sur les prix. En 2006, l’UPG a été étendu à tout le pays est devenu UPGA. Depuis 2005, les prix ont augmenté d’au moins 30% et les contrats ont doublé. Pendant plusieurs années, il a été conseillé de réduire les plantations. En 2008, une hausse de 5% a été proposée. Il faut savoir que le prix de base est situé au niveau de prix où on fait encore du bénéfice. Les planteurs américains veulent: – une indication de la production: ce qui demande une transparence volontaire des membres sur les emblavements, l’évolution de la culture, le rendement final, les stocks, les prix de vente, contrats; – une indication de la demande: les autorités publiques demandent aux transformateurs les volumes entrés, importations, exportations, et l’UPGA a accès à cette information. Les planteurs se prêtent assez volontiers aux décisions d’emblavement, puisqu’ils en bénéficient. Le coût de production Avant toute décision pour se lancer dans la maîtrise de l’offre, Guy Depraetere estime qu’il faut connaître son prix de revient. Ce n’est pas facile, mais une chose est sûre: la culture de la pomme de terre coûte cher. On ne peut la cultiver que dans les bonnes terres. Il faut bien considérer le revenu que la pomme de terre doit procurer. Si c’est inférieur aux autres cultures, il vaut mieux ne pas commencer cette culture car elle comporte des risques supérieurs à ceux des autres cultures. Selon l’ABS, le coût de production est de l’ordre de 8,03 euros/100 kg pour un rendement de 44 tonnes commercialisées par ha, départ champ; 12,19 euros pour les pommes de terre livrées après stockage. Pour 2009, G. Depraetere pronostique un prix de revient de l’ordre de 4.000 euros par ha, départ champ; de 6.000 euros par ha, en cas de livraison fin avril. Et tout cela, dit-il, c’est sans compter le risque de la culture, estimé à 15% du prix de revient. Une UPGB? La hausse des coûts est telle qu’il n’est plus possible de poursuivre comme avant, estime G. Depraetere. C’est la raison pour laquelle il faut sensibiliser les planteurs en Belgique, mais également dans les pays voisins. Une Union des planteurs de de Belgique (UPGB) n’est possible que si elle est portée par les associations agricoles existantes, avec des personnes relais par région, du financement, une communication par internet… Il y a déjà 350 planteurs intéressés en Flandre… Les objectifs, c’est d’obtenir un prix raisonnable apportant un revenu raisonnable, le flux de quantité et qualité demandé par les acheteurs, des prix de vente stables, ds contrats équilibrés, des conditions de réception équilibrées. Le Gappi En France, explique Eric Delacour, président du Groupement d’Agriculteurs Producteurs de Pommes de terre pour l’Industrie (Gappi), le groupement rassemble 800 producteurs fournissant 550.000 tonnes de pommes de terre à Mc Cain, toute l’année. Il y a 3 usines: Harnes, Beaumarais (Pas-de-Calais) et Matougues (Marne). En 1997, deux syndicats de planteurs se sont regroupés pour ne pas se faire concurrence. En 2000, l’ouverture de Matougues a renforcé le Gappi. Le conseil d’administration compte 23 membres, représentatifs des régions de production. Le bureau compte 8 membres et il dirige 6 commissions: prix; plant, contrôle, technique, irrigation, litiges. Chaque semaine, un membre de la commission contrôle effcectue un contrôle à la réception des usines, chaque semaine, la commission prix discute les prix mini et maxi. Il y a 2 personnes pour le travail administratif, l’animation et le rapport entre les producteurs et les usines. Le groupement se veut à l’écoute des planteurs, négocie les prix et le cahier des charges des contrats, informe les producteurs sur la rentabilité de la production, défend l’intérêt général, s’implique dans la technique (essais, etc), participe dans l’Union des planteurs français (UNPT), rencontre des décideurs, les banques, les associations des autres pays… Un site internet a été créé pour faciliter les échanges. Le fait d’avoir 800 producteurs derrière soi permet au Gappi d’avoir une certaine assurance face à l’industriel. M. Delacour ne pense pas que cette création a été négative pour l’industriel. Celui-ci connaît ses besoins et ses possibilités. L’objectif n’est pas d’écraser l’industriel, mais de se faire respecter. Si on vous propose un prix qui ne vous permet pas de faire de la qualité, il faut faire comprendre qu’à ce prixlà, il ne peut avoir que de la m… Ce n’est que dans un rapport de force équilibré qu’on se fait respecter., dit-il. Débats La soirée se termina (tard) par un débat à l’issue duquel Christian Ducattillon, du Carah, résuma: deux convictions majeures se sont dégagées. D’une part, une mise en marché collective dans le secteur de la pomme de terre est très souhaitable. Renforcer la position des producteurs et de l’offre est indispensable si l’on veut que les agriculteurs et les autres acteurs de la filière vivent correctement de leur travail, qu’il s’agisse d’obtenir des prix minima rémunérateurs (couvrant les coûts de production) en réduisant les emblavements, ou de conserver la maîtrise des variétés commercialisées et donc de garder la Bintje au détriment des variétés monopoles prônées par l’industrie, deux exigences fortes du secteur. D’autre part, une mise en marché collective est possible. Mais à une condition essentielle: que les producteurs de pommes de terre en assument la responsabilité en faisant preuve d’une solidarité sans faille. Cette solidarité est capitale. Sans elle, l’Union ne pourra faire la force. Cette conférence-débat n’est qu’une première étape, dit Stéphane Parmentier, de la FUGEA. A l’image de ce qui se fait en Flandre, en France, aux Pays-Bas, la démarche est collective et tous les producteurs et leurs associations (syndicales ou non) sont invités à s’y joindre et à nous contacter. Au final, il appartient aux agriculteurs et aux autres acteurs de la filière de savoir ce qu’ils veulent: continuer à subir individuellement les pratiques d’approvisionnement du marché ou y résister collectivement et durablement! J. F.