Catherine Sauvage - Le Hall de la chanson
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Catherine Sauvage - Le Hall de la chanson
Catherine Sauvage (1929-1998) Interprète, comédienne Catherine Sauvage, née Janine Saunier, voit le jour à Nancy le 26 mai 1929. Très tôt, elle décide malgré le veto de son père qui est comptable, de devenir comédienne. Pendant la guerre, elle est renvoyée de son lycée pour avoir chanté « Y’a d’la joie » de Charles Trenet lors d’un gala d’amateurs. Elle dira d’ailleurs plus tard : « …Je dois tout à Charles Trenet. En l’écoutant à douze ans, j’ai compris que le grand art c’était ça ! ». Elle arrive à Paris à dix-huit ans. Elle s’inscrit au cours d’art dramatique de Jean-Louis Barrault. Elle commence à chanter pour le plaisir aux Lorientais, le lundi soir, jour de relâche. Présentée à Louis Moysès, directeur du Bœuf sur le Toit, elle lui interprète quelques chansons et poèmes. Elle y est engagée dès le lendemain en janvier 1948. Elle prend le pseudonyme de Catherine Sauvage, un nom qu’elle emprunte à une amie de lycée. Son tour de chant comprend des chansons du répertoire de Marianne Oswald, ainsi que « Cornet de frites » (Francis Lemarque), « Grand-papa laboureur » (Jean Broussole/André Popp) et « Han Coolie », poème allemand de Fritz Hoff adapté par Louis Aragon et mis en musique par Paul Arma. Elle se présente sur scène, les pieds chaussés de spartiates, habillée en robe de bure, serrée à la taille par une cordelette. Elle découvre Léo Ferré, sur la scène du Caveau de la Huchette. Pour elle c’est un choc : « …Immédiatement, j’ai senti que ce qu’il écrivait était pour moi ». Ils partagent la même affiche au Quod Libet puis aux Trois Mailletz en 1949. Leur collaboration débute à cette date. Ils chantent tous deux « Paris Canaille », Léo Ferré au début de son tour de chant, Catherine Sauvage à la fin du sien. Elle continue de se produire dans les cabarets tels l’Ecluse en 1951 et l’Arlequin en 1952. Jacques Canetti la remarque, la fait signer chez Philips et l’engage dans son théâtre les Trois Baudets. Elle s’y produit dès le 20 février 1953 dans le spectacle Ne tirez pas sur le pianiste, en même temps que Georges Brassens. Elle y reste près de deux ans. Catherine Sauvage enregistre en 1953 « Paris canaille » de Léo Ferré. C’est un énorme succès. La chanson sera traduite dans de nombreuses langues. Catherine Sauvage contribue avec cette interprétation à faire connaître Léo Ferré du grand public. Elle enregistrera jusqu’en 1970, plus d’une soixantaine de chansons de Léo Ferré (« Le piano du pauvre », « Graine d’ananar », « Mon p’tit voyou », « Le guinche », « Le temps du plastique », « La fortune », « Pauvre Rutebeuf », « Le temps du tango », « La belle amour », « La maffia », « La poisse », « L’âge d’or », « Paname », « Jolie môme », « Les rupins », « Vingt ans », « Mister Georgina », « Les bonnes manières », « L'Ile Saint-Louis », « Monsieur Wiliam »… jusqu’à « Avec le temps » qu’elle grave trois mois avant lui). En 1954, lui est décerné le Grand Prix du Disque pour « L’homme », toujours de Léo Ferré. Ce dernier dira d’elle : « ….C'est elle qui chante mes chansons avec la plus grande conviction. Je la préfère à toutes les autres ». En juillet 1954, elle joue à Lyon sous la direction de Roger Planchon dans La bonne âme du Se Tchouan de Bertolt Brecht. En décembre 1954, elle se produit sur la scène de l’Olympia en première partie de Dario Moreno. En février 1955, elle chante à Bobino. La même année, elle fait partie des tournées organisées par Jacques Canetti, en compagnie de Jacques Brel. Le 28 septembre 1957, elle revient aux Trois Baudets, cette fois-ci en tête d’affiche, aux côtés de Guy Béart, Raymond Devos et Jacques Brel. En 1958, elle reçoit un deuxième Grand Prix du Disque pour ses enregistrements de chansons de Bertolt Brecht et Kurt Weill sur des adaptations de Boris Vian : « Nanna’s lied », « Alabama song », « Bilbao song », « Surabaya Johnny »… Elle en grave d’autres en 1961 : « La chanson de Mandalay », « La chanson de Barbara », « La fiancée du pirate ». Le 30 octobre 1961, elle donne son premier récital Chansons de cœur… chansons de tête, accompagnée par Jacques Loussier, sur la scène de la Gaîté-Montparnasse. Elle y interprète trente-huit chansons sur des textes de François Villon, Bertolt Brecht, Maurice Fombeure, Robert Desnos, Guillaume Apollinaire, Francis Carco, Mac Orlan, Lorca, Caussimon et Ferré. Catherine Sauvage retourne un temps à sa première passion, le théâtre. Elle joue dans Frank V de Friedrich Dürrenmatt au Théâtre de l’Atelier en 1962, puis l’année suivante dans Divines paroles de Ramón María del Valle-Inclán au Théâtre de l’Odéon. Elle partage alors la vie du comédien Pierre Brasseur. En 1962, elle contribue à faire connaître au grand public Serge Gainsbourg en enregistrant : « Black trombone », « L’assassinat de Franz Léhar », « Les goémons » et « Baudelaire ». Elle consacre en 1963, un disque entier à Louis Aragon. Elle est un peu éclipsée par la vague yé-yé. Ce qui ne l’empêche pas de continuer à enregistrer (« Comme à Ostende », Caussimon/Ferré, 1965) et à se produire dans les cabarets. Elle chante également à l’étranger, notamment au Québec où après un récital un professeur de mathématiques vient lui proposer ses chansons. Il s’agit de Gilles Vigneault, alors totalement inconnu en France. Elle enregistre en 1966 un album entier de ses compositions parmi lesquelles « Mon pays », « Les corbeaux », « Les vieux mots », « Le livre »… Le 20 avril 1968, elle fait son grand retour sur la scène de Bobino. Ce récital paraît sur disque quelques mois plus tard sous le titre Bobino 68, le bonheur. Le 13 mai 1969, elle chante au Théâtre de La ville, avant de revenir à deux reprises à Bobino (avril 1970 et novembre 1971). Elle sort l’album Le miroir aux alouettes en 1968, puis Chansons libertines l’année suivante, Larguez les amarres en 1970. Un album studio, sans titre, paraît en 1973. Elle y interprète, entre autres, « Tendresse » de Bernard Lavilliers, alors inconnu. Au cours des années 70, Catherine Sauvage s’adonne à la peinture, passe dans divers cabarets parisiens tels le Don Camilo, la Tête de l’Art ou la Pizza du Marais. Elle participe en octobre 1974 à la comédie musicale Comme la neige en été de Jacques Lanzmann et Dov Seltzer au Théâtre des Variétés. Elle y remplace Régine au pied levé à huit jours du début des représentations. Elle y joue et chante aux côtés de Mouloudji et de Nicole Croisille. Le spectacle est un échec. De 1982 à 1986, Catherine Sauvage se produit à l’étranger : plusieurs fois au Japon, au Canada, en Amérique Centrale, en Amérique du Sud et en Asie. Elle n’a été que très peu sollicitée par le cinéma. Elle fait une apparition dans Mémoires d’un flic (Pierre Foucaud et André Hunebelle, 1956) et dans Paris canaille (Pierre Gaspard-Huit, 1956). Elle joue aux côtés de Pierre Brasseur et de son ami Jean-Roger Caussimon dans Deux heures à tuer (Ivan Govar, 1966). En 1983, elle tourne dans La fiancée qui venait du froid (Charles Nemes). Elle apparaît également dans quelques téléfilms. En 1991, Jacques Canetti la convainc d’enregistrer un album entier dédié à Jacques Prévert, sous le titre Démons et merveilles. Elle se produit pour la dernière fois en public à l’invitation de Jean Guidoni lors des Francofolies de La Rochelle en 1994. Chanteuse de scène, elle y déploie une hargne raffinée, ce qui inspira ce commentaire à Georges Brassens : « elle ne chante pas, elle mord ». Catherine Sauvage qui disait d’elle-même : « Je suis plutôt une comédienne qui chante, qu’une chanteuse proprement dite » est décédée le 20 mars 1998. © Le Hall de la Chanson