Les innovations introduites dans l`Acte uniforme portant organisation
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Les innovations introduites dans l`Acte uniforme portant organisation
• Dr Boubacar S. DIARRAH ~ Maoisrrac Enseigna nt à /' Unirersité de Bamako Jia rrahboubacar@yahoojr INTRODUCTION L'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) est une organisation communautaire destinée à harmoniser le droit des affaires en Afrique et à assurer la sécurité juridique et judiciaire. Elle se propose de mettre en place un droit des affaires harmonisé, simple, moderne et adapté. Elle vise à encourager l'investissement et promouvoir l'arbitrage tout en améliorant la formation des magistrats et des auxiliaires de justice. L'harmonisation du droit des affaires dans l'espace OHADA s'opère par le biais de textes dénommés<<Actes uniformes>>. Ces Instruments Juridiques qui ont une valeur supranationale sont préparés et élaborés par le Secrétariat Permanent, et soumis à l'approbation du Conseil des Ministres de I'OHADA. t.:OHADA s'affirme aujourd'hui comme un acteur important dans le développement économique en Afrique. En effet, l'introduction d'un nouveau droit harmonisé en Afrique suscite un grand intérêt de part et d'autre et a réussi à redonner confiance aux investisseurs. L'OHADA, disait le Président Keba MBAYE, est un bel exemple d'intégration africaine. De nos jours, l'organisation fait face à de nombreux défis et ceux-ci l'ont amené à entreprendre ces dernières années une série de reformes qui a consisté à engager un processus d'évaluation systématique et exhaustive des Actes uniformes en vigueur et à procéder à la révision du traité. La finalité de cette action est d'identifier les insuffisances et prendre en compte les contingences pertinentes. C'est dans cette perspective que l'Organisation a entrepris une vaste reforme qui a, non seulement consisté, en l'adoption du neuvième Acte uniforme, en l'occurrence, celui relatif au droit des sociétés coopératives, mais à la refonte de l'Acte uniforme portant sur le droit commercial général (AUDCG) et l'Acte uniforme portant Organisation des Sûretés qui fait l'objet de la présente communication. Une sûreté est l'affectation au bénéfice d'un créancier, d'un bien, d'un ensemble de biens ou d'un patrimoine afin de garantir l'exécution d'une obligation ou d'un ensemble d'obligations, quelle que soit la nature juridique de celles-ct et notamment qu'elles soient présentes ou futures, déterminées ou déterminables, conditionnelles ou inconditionnelles, et que leur montant soit fixe ou fluctuant'. Il ressort de cette définition que tous les créanciers ont la faculté de poursuivre la réalisation des biens du débiteur qui constituent leur droit de gage général'. La sûreté est destinée à garantir le crédit que consent un créancier ; elle est toujours attachée à une opération de crédit, que celui-ci ait été consenti ab initio (prix payable à terme) par le créancier ou subi par lui a posteriori (non respect du terme ou du paiement comptant et prise d'une sûreté) 3 • Le crédit est au cœur des sûretés quelle que soit l'obligation garantie. Ainsi, au même titre que l'ensemble de l'Acte uniforme portant sur le Droit Commercial Général (AUDCG), l'Acte uniforme portant Organisation des Sûretés a fait l'objet d'une modernisation dans les perspectives de présenter un nouveau texte fidèle aux orientations de I'OHADA et adapté aux besoins des agents économiques des Etats-parties. Il a été décidé de procéder à une réécriture de l'ensemble du texte. La reforme a aussi pour objectif de moderniser les concepts en respectant leur originalité tout en facilitant leur compréhension ce qui a consisté à faire des options de politique législative (1) qui ont abouti à des amendements de !:Acte uniforme portant Organisation des Sûretés (11) . 1- OPTIONS DE POLITIQUE LÉGISLATIVE L'objectif général du projet de réforme du droit OH ADA des sûretés vise principalement à améliorer l'environnement du droit des affaires dans l'espace OHADA pa r le biais de l'actualisation et de la ·modernisation de l'Acte uniforme • Cette contribution a été présentée lo rs des jo urnées annuelles de l'Associati o n pro fessionnelle des Juristes de Banques et Etablissements Fin anc iers ( APJ BEF ) Bamako du 27 au 29 Avril 20 Il 1 JO OHADA du 15 février 20 Il t 1 Article ler de l'Acte uniforme portant sûretés Jo urnal offic iel de l'O HAOA en date du 15 février 20 ll 2 Art. 2093 Code civil. 3 OHADA sûretés François Anouhaka , François Cissé Niang, aUili colL dro it uniforme africain pl REVUE DE DROIT UNIFORME AFRICAIN 1 AC TUALITE TRIMESTRIELLE DE DROI T ET DE JURISPRUDENCE W 00!5 20 11 3 OHADA du 17 Avril 1997 portant Organisation des Sûretés. Le soutien des établissements de crédit dans les financements apportés aux opérateurs économiques pour leurs investissements et aux particuliers pour soutenir la consommation des ménages, constitue une des conditions essentielles du développement économique du secteur privé dans la zone OHADA 4 • Il convient d'indiquer qu'il est constant que l'accès au financement et le développement du crédit sont déterminés en grande partie par la capacité d'un débiteur à offrir librement une garantie fiable aux prêteurs. Aussi, le droit OHADA des sûretés doit-il édicter des règles de nature à favoriser la confiance, << Clé de voûte » des activités de crédit, et à susciter, plus généralement, l'attractivité du Droit des affaires 5 . La réforme a comme objectif spécifique la formulation de solutions novatrices et équilibrées, de nature à renforcer davantage les qualités de souplesse, de lisibilité et d'accessibilité du droit OHADA des sûretés, nécessaires au développement du crédit. C'est dans cette perspective que les amendements sont destinés à améliorer le régime des sûretés personnelles et réelles, tout en renforçant le régime de publicité. En ce qui concerne les sûretés, il a été procédé à une redéfinition des notions de gage et de nantissement; à la simplification des conditions de constitution du gage et du nantissement. Aussi, l'assiette des sûretés mobilières a été étendue et celles existantes améliorées. Enfin en ce qui concerne les hypothèques, il a été tenu compte des principes de souplesse au niveau de leur constitution et d'efficacité quant à leur exécution. Les amendements apportés à l'Acte uniforme portant sûreté ont été rédigés dans le respect des normes de qualité fixées par les techniques de la légistique, sous le contrôle des experts habilités à cet effet. t:Acte uniforme répond à l'exigence fixée par le Traité relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique posant l'exigence d'un droit<< simple, moderne et adapté, afin de faciliter l'activité des entreprises">>. Les innovations ont été introduites à l'aune des normes et des bonnes pratiques en matière de sûretés. Il - CADRE DES AMENDEMENTS DE LJ\CTE UNIFORME PORTANT ORGANISATION DES SÛRETÉS Le souci d'amélioration de la qualité formelle de la présentation et de la rédaction par la prise en compte de l'introduction des nouvelles sûretés, a conduit à ajouter de nouvelles dispositions pour préciser un régime juridique ou prévoir un nouveau régime. A/ SÛRETÉS PERSONNELLES Il a été décidé relativement aux sûretés personnelles, que seules le cautionnement et la lettre de garantie soient retenus à l'exclusion de la lettre d'intention. Pour ce qui est 4 Rapport Pr Pierre Crocq sur les Sûretés 2010, SP inédit. 5 Rapport pour le Secrétariat permanent de l'OHADA l 5/ll /09 AUS, inédit. 6 Préambule et article premier Traité relatif à l'harmonisation du droit des affaires en Afrique 4 du cautionnement, la définition et le régime juridique ont été précisés. Les règles de constitution ainsi que les effets ont été amendées dans le sens de la souplesse et de la simplicité. Cette élucidation a permis de réexaminer les formalités prescrites, l'étendue du cautionnement et la périodicité de l'obligation d'information de la caution. Quant à la lettre de garantie, les orientations ont trait à la forme, aux modalités ainsi qu'à la question de sa révocabilité et de sa transmissibilité. 1. Cautionnement a. Définition Dans le cadre de la définition du cautionnement (article 13 nouveau), une précision a été apportée concernant l'obligation principale qui peut être présente ou future (al. 1 ). Par ailleurs, le cautionnement peut être contracté sans ordre du débiteur et même à son insu (al. 2). b. Formation du cautionnement: - Formalités : Le nouvel article 14 introduit une modification substantielle qui tend à faire de la mention manuscrite de la somme en lettres et en chiffres par la caution, une simple condition de preuve de la reconnaissance de son engagement. Toutefois. la signature de l'acte qui exprime la volonté de celui qui s'engage demeure une condition de validité du cautionnement, même si cela n'a pas été expressément précisé. -Etendue: Le nouvel article 18 introduit certains assouplissements en ce qui concerne la détermination de l'étendue du cautionnement. L'alinéa 1 a fait l'objet d'une récriture par l'introduction de la formule << sauf clause contraire >>, pour mieux mettre en exergue le caractère supplétif qui n'était rendu que par l'usage du verbe pouvoir. L'expression << à la demande de la caution >> a été placée au début du deuxième alinéa qui imposait d'annexer l'acte constitutif de l'obligation principale à la convention de cautionnement. Désormais, la caution devra en faire la demande. Dans le nouvel article 19, l'expression « les intérêts >> a été ajoutée entre<< incluant le principal>> et<< et tous accessoires>>. c. Effets du cautionnement: La plupart des modifications sont purement formelles, sans effet sur la substance des dispositions modifiées. Seules quelques dispositions font exception. Ainsi dans le nouvel article 23, la référence à l'obligation d'informer la caution de toute défaillance du débiteur principal a été supprimée (l'expression<< doit aviser la caution de toute défaillance du débiteur principal>> a été supprimée). N'est maintenue, dans ce texte, que l'exigence d'une mise en demeure du débiteur antérieurement à toute action contre la caution. C'est le nouvel article 24 qui traite désormais de l'obligation d'informer la caution de toute défaillance du débiteur principal, dans le mois de la mise en demeure de payer REVUE DE DROIT UNIFORME AFRICAIN 1 ACTUALITE TRJMESTRIEUE DE DROIT ET DE JURISPRUDENCE W 005 2011 adressée au débiteur principal et restée sans effet. Cette obligation vise à permettre à la caution de payer le créancier le plus rapidement possible et d'éviter ainsi l'accumulation à son détriment des pénalités et intérêts de retard. L'information doit porter sur le montant restant dû par le débiteur en principal, intérêts et autres accessoires à la date de cet incident de paiement. Par conséquent, en cas de violation de cette obligation par le créancier, la caution ne peut être tenue des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de cet incident et la date à laquelle elle en a été informée. Par ailleurs, la périodicité de l'obligation d'information de la caution (en dehors de tout incident de paiement) a été allongée, passant à six mois dans le nouvel article 25. Le manquement à cette obligation d'information périodique est sanctionné par la déchéance, vis-à-vis de la caution, des intérêts contractuels échus depuis la date de la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. 2. Garantie autonome a. Formation de la garantie - Définition Les définitions des garantie et contre garantie autonomes ont été modifiées (article 39 no uv) en précisant que le garant ou le contre garant s'engagent, « en considération d'une obligation souscrite par le donneur d'ordre et sur instruction de ce donneur d'ordre ... à première demande ou suivant des modalités convenues >>. L'interdiction des garantie et contregarantie autonomes souscrites par des personnes physiques a été maintenue avec une légère reformulation (article 40 al. 1 nouv)._ -Forme: Les conditions de forme de la lettre de garantie n'ont pas subi de modifications substantielles. Seules quelques reformulations ont été retenues (article. 41 nouv). b. Effets de la garantie Le principe de l'incessibilité de la garantie a été maintenu (article 42 nouv) en apportant une précision. Ainsi, la référence au rapport de base pour la cessibilité prévue à titre supplétif, source d'ambiguïté, a été remplacée par l'exigence de la présentation d'une demande conforme au titre. Concernant la révocabilité (ou l'irrévocabilité) de la garantie, il est précisé à l'article 43 nouveau, que les instructions du donneur d'ordre, la garantie et la contre garantie sont irrévocables dans le cas d'une garantie ou d'tine contre-garantie à durée déterminée (alinéa 2) et révocables dans le cas de garantie ou contre-garantie à durée indéterminée (al. 3 introduit à cet effet). La modification est essentielle par rapport à la rédaction du texte en vigueur qui prévoit la possibilité d'une stipulation de révocabilité sans autre précision sur la catégorie de contrat. Les dispositions actuelles, plutôt ambiguës, concernant les garanties et contre-garanties ont été davantage précisées (article 44 nouv). Ainsi, la réduction du montant du paiement se fait conformément aux termes de l'engagement et suivant les délais et modalités prévues par cet engagement. Pour ce qui est des dispositions de l'art. 34 de l'AUS, devenu l'art. 45 du nouvel Acte concernant la demande de paiement, elles ont été maintenues en introduisant, des amendements consistant en des reformulations pour clarifier et simplifier les conditions et modalités de présentation de la demande de paiement au titre tant de la garantie que de la contre garantie autonomes. Les dispositions de l'article 46 ont subi d'importantes modifications destinées à renforcer l'efficacité de la garantie. Ainsi, dans l'alinéa 1, le <<délai raisonnable» a été remplacé par un délai fixe et précis de « cinq jours ouvrés >> pour l'examen de la conformité de la demande en paiement aux termes de .la garantie ou de la contre garantie. Il a également été instituée une obligation de notification, dans ce délai, au bénéficiaire ou au garant, de toute décision de rejet du paiement précisant les irrégularités motivant le rejet. Dans l'alinéa 2, l'obligation de transmission de la demande et des documents l'accompagnant au donneur d'ordre ou au contre-garant, en cas de contre-garantie, a été maintenue mais en supprimant le caractère préalable à tout paiement d'une telle transmission. Enfin, l'alinéa 3 impose au garant d'aviser le donneur d'ordre ou, le cas échéant, le contre garant, de toute réduction du montant de la garantie et de toute cause d'extinction de la garantie autre qu'une date de fin de validité. L'article 47 a été maintenu avec de légères précisions terminologiques. Mais un alinéa 2 a été ajouté pour traiter des moyens de défense du donneur d'ordre à l'égard du contre-garant. Ainsi, << le donneur d'ordre ne peut faire défense de payer au contre-garant que si le garant savait ou aurait dû savoir que la demande de paiement du bénéficiaire avait un caractère manifestement abusif ou frauduleux>>. De même, l'article 48 a subi un amendement important. En effet, les recours de la caution contre le donneur d'ordre sont ouverts au garant ou contre garant ayant fait un paiement << conformément aux termes de la garantie ou de la contre garantie autonomes >> et non plus << utile au bénéficiaire >>, formule quelque peu ambiguë. L'article 49 nouveau, consacrant les causes d'extinction de la garantie et la contre-garantie autonomes a quelque peu modifié l'article 38 actuel, en distinguant entre la déclaration écrite du bénéficiaire libérant le garant de son obligation au titre de la garantie et la déclaration écrite du garant libérant le contre-garant de son obligation au titre de la contregarantie. B/ SÛRETÉS MOBILIÈRES Les modifications les plus importantes concernent le Titre 2 de l'Acte uniforme portant Organisation des Sûretés. Il a été profondément amendé afin d'accueillir de nouvelles sûretés et sa structure en a été modifiée. 1. Dispositions liminaires Le nouvel article 50 de l'Acte Uniforme portant Organisation des Sûretés a procédé à l'élargissement de la catégorie des sûretés mobilières traitées par l'Acte uniforme portant Organisation des Sûretés. Sont retenus le droit de rétention, la propriété retenue ou cédée à titre de garantie, le gage de meubles corporels, le nantissement de meubles incorporels et les privilèges. L'alinéa 2 de cet article prévoit, sauf disposition contraire, REVUE OE DROIT UNIFORME AFRICAIN 1 ACTUALITE TRIMESTRIELLE DE DROIT ET DE JURISPRUDENCE W 005 201 f 5 l'inscription des sûretés mobilières soumises à publicité. Concernant les sûretés mobilières, les modifications les plus importantes concernent l'introduction de nouvelles sûretés, d'où la modification de la structure formelle de l'Acte uniforme portant organisation des Sûretés. Au titre de l'élargissement de la catégorie des sûretés mobilières traitées, l'on retient le droit de rétention, la propriété retenue ou cédée à titre de garantie, le gage de meubles corporels, les privilèges et le nantissement de meubles incorporels. Concernant cette dernière catégorie, il est prévu la possibilité de nantir les créances, le compte bancaire, les droits d'associés, les valeurs mobilières et le compte de valeurs mobilières, le fonds de commerce et les propriétés intellectuelles. Une section est consacrée à chaque catégorie. Les nouvelles sûretés sont organisées dans tous les aspects relatifs à leur nature (définitions) et leur régime (formalités, effets) juridiques. zo) Gage d'une somme d'argent Il apparaît paradoxal que le droit des sûretés de l'OHADA ne contienne aucune disposition relative au gage ayant pour objet une somme d'argent. En effet, la nature d'une telle sûreté prête souvent à discussion alors qu'elle est très utilisée en pratique. Ce gage portant sur une somme d'argent peut prendre trois formes différentes : a. Il peut être, tout d'abord, constitué par le nantissement du solde d'un compte bancaire dont est titulaire le constituant de la sûreté, celui-ci conservant la libre disponibilité des fonds placés sur ce compte. b. Il convient de noter à ce propos que, compte tenu de l'objet de cette sûreté, les autorités de l'OHADA ont opportunément consulté l'UEMOA et la CE MAC qui ont compétence à légiférer en matière de réglementation bancaire, tout en veillant à ce que les principes fondamentaux des gages et nantissements prévus par le droit OHADA soient respectés. Cette sûreté a la même nature qu'un nantissement de créance, il a été judicieux, suivant l'exemple du droit français, que l'Acte uniforme portant Organisation des Sûretés prévoit que<< la créance nantie s'entend du solde créditeur, provisoire ou définitit au jour de la réalisation de la sûreté » et que << au cas d'ouverture d'une procédure collective à l'encontre du constituant, les droits du créancier nanti portent sur Je solde du compte à la date du jugement>>. Cette sûreté peut également être constituée par le nantissement d'une somme d'argent placée sur un compte ouvert au nom du constituant mais bloqué au profit du créancier jusqu'à l'échéance de la créance garantie. Cette forme de sûreté est particulièrement intéressante en pratique dans la mesure où elle permet de bien protéger à la fois les intérêts du constituant et du bénéficiaire de la sûreté. C'est donc à bon droit qu'elle a été expressément introduite dans l'Acte uniforme portant Organisation des Sûretés. Enfin, une sûreté sur somme d'argent peut être également constituée par la remise, par le constituant de cette somme d'argent au créancier; lequel peut alors en disposer librement à charge de la restituer à l'échéance de l'obligation garantie si 6 celle-ci est exécutée. Cette forme de sûreté est communément appelée <<gage-espèces>> mais elle constitue en réalité un transfert de propriété à titre de garantie. Il est salutaire que l'existence et le régime juridique de cette sûreté, très utilisée en pratique, aient été clairement reconnus dans l'Acte uniforme portant Organisation des Sûretés. 3°) Nantissement de compte d'instruments financiers. tl est également possible de regretter l'absence, dans l'Acte uniforme portant organisation des Sûretés, d'une réglementation du nantissement de compte d'instruments financiers, qui est également une sûreté très fréquemment utilisée en pratique. En effet, l'Acte uniforme ne réglemente dans ses articles 61 à 65 que le nantissement des droits sociaux et des valeurs mobilières et ce, d'une manière similaire à ce qui constituait l'état du droit français avant la réforme du 1er juillet 1996. Certes, il existe des dispositions spéciales relatives au nantissement de valeurs mobilières émises par des sociétés anonymes (actions ou obligations) à l'article 747 de l'Acte uniforme relatif au droit des Sociétés Commerciales et du Groupement d'Intérêt Economique. tl y est prévu que << Sous réserve des dispositions prévues aux articles 772 et 773 du présent Acte uniforme -articles relatifs aux effets de l'agrément donné par la société au projet de nantissement-, la constitution en gage de valeurs mobilières inscrites en compte est réalisée tant à l'égard de la personne morale émettrice qu'à l'égard des tiers, par une déclaration datée et signée par le titulaire. Cette déclaration contient le montant de la somme due ainsi que le montant et la nature des titres constitués en gage. Les titres nantis sont virés sur un compte spécial ouvert au nom du titulaire et tenu par la personne morale émettrice ou l'intermédiaire financier selon le cas. Une attestation de constitution du gage est délivrée au créancier gagiste.[ ... ]>>. Ceci n'est pas sans rappeler le régime juridique du nantissement de compte d'instruments financiers en droit français. 4°) Nantissement de propriétés intellectuelles La modernisation du droit des sûretés de I'OHADA est attestée également par l'adoption d'une véritable réglementation spécifique du nantissement de propriétés intellectuelles (lequel n'a été envisagé que comme un complément facultatif d'un nantissement de fonds de commerce). Certes, l'article 53 de l'Acte uniforme portant Organisation des Sûretés renvoie aux textes particuliers relatifs aux propriétés incorporelles; mais les textes de l'Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (OAPI) ne prévoient presque rien à ce propos. 5°) Nantissement des stocks Le droit de I'OHADA a fait preuve d'œuvre contemporaine en admettant de manière généralisée l'existence d'un nantissement des stocks, présentant l'avantage de conférer un droit de suite à son bénéficiaire. Ce nantissement est d'autant plus nécessaire pour le crédit qu'il est applicable aux matières premières, particulièrement importantes en REVUE DE DROIT UNIFORME AFRICAIN 1 ACTUALITE TRIMESTRIELLE DE DROIT ET DE JURISPRUDENCE W 005 201 f Afrique, aux produits d'une exploitation et aux marchandises destinées à la vente, c'est-à-dire à des biens constituant un ensemble déterminé de choses fongibles (articles 101 et 102 de 1:4.cte Uniforme portant Organisation des Sûretés). L'article 101 énonce que << le nantissement des stocks est constitué par un acte authentique ou sous seing privé dûment enregistré ...>>,cet acte devant comporter un certain nombre de mentions obligatoires relatives, notamment, à la détermination des parties, de la créance garantie et des biens engagés. L'article 102 ajoute que << le nantissement des stocks ne produit effet que s'il est inscrit au Registre du Commerce et du Crédit Mobilier, dans les conditions prévues par les dispositions réglementant ce registre». C/ LES SÛRETÉS RÉELLES IMMOBILIÈRES: il faut noter en matière de sûretés immobilières, que le droit de l'OHADA ne connaît que l'hypothèque et les privilèges. Bien qu'inspiré du droit français, ce droit ne comporte aucune disposition consacrée à l'antichrèse. En effet, selon l'article 127 de 1:4.cte uniforme portant Organisation des Sûretés, l'hypothèque<< doit être consentie pour la garantie de créances individualisées par leur cause et par leur origine, représentant une somme déterminée et portée à la connaissance des tiers par l'inscription de l'acte». Il convient d'indiquer que le droit de l'OHADA exige non seulement l'indication de la cause de la créance mais aussi celle de l'origine de celle-ci. Cette stricte application du principe de spécialité interdit de constituer une hypothèque pour garantir une créance future et, a fortiori, qu'une hypothèque constituée pour garantir une créance puisse être ultérieurement réutilisée pour garantir d'autres créances. Cette affirmation a été édulcorée par la nouvelle disposition de 1:4.cte uniforme dans le but d'assurer le développement du crédit qui admet la possibilité de garantir une créance future dès lors que celle-ci peut être déterminée dans l'acte constitutif. Cette reforme est utile afin de diminuer les coûts du crédit hypothécaire, qu'une telle initiative puisse, sans pour autant abandonner complètement le principe de spécialité de l'hypothèque quant à la créance garantie, créer une sûreté comparable à l'hypothèque rechargeable du droit français, à la Grundschuld du droit allemand ou à la cédule hypothécaire du droit suisse qui puisse survivre à l'extinction de la créance qu'elle garantit et être réutilisée par la suite pour garantir d'autres créances. Il a été utile d'assouplir l'interdiction d'hypothéquer un immeuble futur énoncée par l'article 120 de l'Acte uniforme, notamment, de garantir le remboursement du financement de la construction d'un immeuble par la constitution d'une garantie sur cet immeuble en dépit du fait qu'il ne soit pas encore bâti. Il a été judicieux de revoir la rédaction de l'article 123 qui pouvait donner à penser que l'hypothèque doit nécessairement avoir une durée déterminée. Il a été utile de distinguer la durée de l'hypothèque, qui peut être indéterminée, et la durée de l'efficacité de son inscription, qui doit être nécessairement limitée pour la protection de la sécurité des tiers, mais qui peut être renouvelée avant que l'inscription ne soit périmée. Ainsi, certains amendements substantiels ont été apportés concernant la définition de l'hypothèque, la limitation de son objet aux immeubles présents et déterminés, la possibilité, pour un copropriétaire, de consentir une hypothèque sur un bien indivis. Certaines nouveautés ont été introduites et concernent la réalisation de l'hypothèque. Relativement au classement des sûretés, les modifications visent quelques changements au niveau du rang. Ainsi pour ce qui est principalement des sommes dues aux organismes de sécurité et de prévoyances sociales, ces créances ont été maintenues et classées au cinquième rang au détriment des créances fiscales et douanières classées au 6 ème rang dans la rubrique des privilèges sans publicité'. CONCLUSION Enfin, Il convient comme l'a fait remarquer Philippe Tiger, <<de faire évoluer. dans l'avenir, les règles de l'OHADA dans le sens d'une autonomie africaine plus marquée, à la quelle les opérateurs économiques de la région seraient sensibles, tout en préservant l'indispensable cohérence avec des objectifs économiques de portée internationale. Il appartiendra au législateur communautaire de donner corps progressivement à cette vision d'un droit des affaires africain original » 8.t 7 A ce sujet, voir aussi les observations du Pr Pierre CRO CQ à la page 17 du présent dossier 8 1 Philippe Ti ger LA.frique subsaharienne - De la crise à une croi ssance durable Que sai s-je ? Je droit des affaires en Afrique OHADA PUF 2000 REVUEOEOROITUNIFOAMEAFRICAIN 1 AC TUAUTE TRIMES TRIEUEOE DROITETDE JURISPRUDENCEN·oos 2011 7