un lac immense et blanc

Transcription

un lac immense et blanc
MICHÈLE LESBRE
UN LAC IMMENSE ET BLANC
« Je réinvente ma vie dans le désordre en mélangeant les
temps, les lieux, les êtres chers, mais c’est tout de même ma
vraie vie. Peut-être que cette journée est un cadeau plutôt
qu’un empêchement et un rendez-vous manqué. J’attendais
l’Italien, c’est Antoine qui est venu, dans le silence de la ville
qui est une autre ville, lointaine et familière à la fois ».
Michèle Lesbre parle ainsi de son travail et sa novella
est bien dans la continuité de son travail : dans la lente
dérive d’une journée de neige, des époques, des lieux et des
hommes se superposent. Une narratrice s’en va attendre sur
un quai de gare un homme qu’elle ne connaît pas : elle a
envie de nouer une conversation plus intime avec lui qui, le
mercredi, dans ce Café lunaire proche du Jardin des Plantes,
évoque inlassablement Ferrare. Elle a pris sa journée, mais
l’homme n’arrive pas.
Dès lors, le temps s’étire, en autant de fondus
enchaînés que favorise la blancheur environnante : la ville
s’estompe, peu à peu remplacée par des images d’enfance,
par d’autres lieux et d’autres villes. Au détour d’une rêverie
va surgir, figure centrale de ses souvenirs, « le lac immense
et blanc », noyé sous la neige des montagnes du centre de
la France, où Édith Arnaud a vécu ses premières amours et
ses premiers combats politiques. Elle n’a jamais revu
Antoine, le jeune homme en colère qui, à l’aube des années
soixante, voulait changer le monde. Sa silhouette traverse
pourtant le récit et bientôt se superpose à celle de l’Italien
de Ferrare, dont les brumes hantent le paysage mental de la
narratrice.
Mais peu importe le temps qui passe, la perte des
illusions et les rendez-vous manqués. Dans le silence et la
lumineuse blancheur de cette journée particulière, la
solitude de cette femme qui a tant vécu n’a pas le goût des
renoncements. Ses dialogues
extravagants avec le corbeau du Jardin des Plantes vont
bien avec la mélancolie joyeuse de son existence.
Michèle Lesbre tend ici avec une bouleversante
justesse le fil d’une vie minuscule à laquelle ses mots
donnent tout son sens.
NOVELLA
98 pages
14,95$
Michèle Lesbre vit à Paris.
Après avoir écrit des romans noirs,
c’est avec Nina par hasard, publié
pour la première fois aux éditions
du Seuil en 2001, et réédité chez
Sabine Wespieser éditeur en mars
2010, qu’elle est passée à la littérature
générale.
Tous ses romans ont paru chez
Sabine Wespieser éditeur, notamment
son plus grand succès à ce jour,
Le Canapé rouge
(prix Millepages 2007,
prix Pierre-Mac-Orlan,
finaliste du prix Goncourt 2007).
Depuis Sur le sable (2009),
elle est publiée au Québec chez
Héliotrope. La publication
d’Un lac immense et blanc est prévue
en France au mois d’avril. Il nous a
cependant semblé plus judicieux
pour le Québec d’anticiper la sortie
de ce titre étant donné le caractère
pour ainsi dire non-intemporel de
la neige dans notre belle province.