Pok P.-R. P. Analyse de trois cas de soumission chimique au GBL et

Transcription

Pok P.-R. P. Analyse de trois cas de soumission chimique au GBL et
Pratique médico-militaire
Analyse de trois cas de soumission chimique à la
gammabutyrolactone (GBL) et à l’acide
gammahydroxybutyrique (GHB).
P.-R. P. Poka, T. Salmon, C. Navarette, E. Kuhlmann, P. De Meo.
a INPS, Laboratoire de police scientifique de Marseille, Section toxicologie, BP 30 – 13245 Marseille Cedex 04.
Article reçu le 8 décembre 2009, accepté le 30 avril 2010.
Résumé
À la fois amnésiants et euphorisants, la gammabutyrolactone (GBL) et l'acide gammahydroxybutyrique (GHB) sont très
souvent mis en cause lors d'agressions sexuelles. La GBL, un précurseur du GHB possède un effet progressif et une durée
d'action plus longue. Dans l'organisme, la GBL et le GHB agissent comme une seule et même drogue. Leur analyse a été
réalisée par chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse (CPG-SM). La méthode a été
appliquée dans trois cas médico-légaux. Dans le cas n° 1, il s'agit d'une intoxication aiguë due à l'ingestion de la
GBL/GHB. La victime présente des vomissements et un syndrome cardiaque sérieux avec une perte de connaissance.
Dans les prélèvements de sang et d'urine réalises 3 heures après les faits la GBL n'a pas été détectée mais le GHB est
présent dans tous les échantillons : 68 mg/L dans le sang total et 942 mg/L dans l'urine. Dans deux autres cas de viol (cas
n° 2 et 3), les prélèvements biologiques ont été effectués 3 jours et 15 heures après les faits. Les concentrations du GHB
dans le sang total et l'urine, sont respectivement de 8 mg/L et 1 mg/L pour le cas n° 2 et de 0,96 mg/L et 0,60 mg/L pour
le cas n° 3 : ces résultats reflètent des concentrations physiologiques. Ces trois cas mettent en évidence la difficulté de
prouver l'absorption de GBL ou GHB dans le cas de suspicion de viol et la nécessité d'une prise en charge rapide des
échantillons biologiques pour l'expertise en présence d'un officier de police judiciaire.
Mots-clés : CPG-SM. GBL. GHB. Sang total. Urine. Viol.
Abstract
ANALYSIS OF THREE CASES OF SUSPECTED GBL AND GHB DRUG-FACILITATED.
Gamma butyrolactone (GBL) and gamma hydroxy butyric acid (GHB) are amnesia and euphoric drugs; they are frequently
involved in cases of sexual agression. GBL is the precursor of GHB having progress and long-acting effect. In vivo GBL
and GHB are commonly known as the same drug. Their analysis realised by gas chromatography-mass spectrometry (CGMS) has been applied in three medico-legal cases. The case n° 1, is an acute intoxication due to ingestion of GBL/GHB.
The victim suffered a vomiting and cardiac syndrome with loss of consciousness. In the blood and urine samples drawn
from the subject 3 hours after the fact, GBL is not detected. GHB is present in all samples: the concentrations are 68 mg/L
in the whole blood and 942 mg/L in the urine. In the others two cases of rape (cases n° 2 and 3), the samples are taken 3
days and 15 hours after the facts. The concentrations of GHB in whole blood and urine are respectively 8 mg/L and 1 mg/L
for the case n° 2, and 0,96 mg/L and 0,60 mg/L for the case n° 3 : these results reflect the physiological concentrations.
These three cases show evidence of difficulty to prove absorption of GBL or GHB in the suspicion cases of rape and
necessity to cover immediately the biological samples for expertise with the assistance of a police officer.
Keyword: GBL. GC-MS. GHB. Rape. Urine. Whole Blood.
Introduction.
L’acide gammahydroxybutyrique (GHB) est une
substance endogène présente chez l'homme dans le
P.-R. P. POK, ingénieur en chef. T. SALMON, ingénieur. C. NAVARETTE, technicien
principal. E. KUHLMANN, ingénieur en chef. P. DE MEO, ingénieur en chef.
Correspondance : P.-R. P. POK, INPS, Laboratoire de police scientifique de
Marseille, Section toxicologie, BP 30 – 13245 Marseille Cedex 04.
E-mail : [email protected]
médecine et armées, 2010, 38, 5, 409-416
cerveau et les tissus (1). Le GHB agit notamment sur le
système nerveux par une action sur le comportement :
alarme, sommeil, peur, anxiété, éveil (2). Il agit aussi sur
la production d'hormone de croissance de la glande
pituitaire, ce qui lui donne des propriétés nutritionnelles
intéressantes pour les culturistes et les sportifs (3, 4). Pour
le cas de soumission chimique ses propriétés
« intéressantes » sont une relaxation musculaire
(paralysie), une désinhibition, une ivresse, un état
hypnotique et des troubles de la mémoire. La conséquence
409
clinique liée à son usage se manifeste principalement par
une perte de connaissance suivie d'un sommeil profond
(4). Des comas mortels peuvent survenir lorsque la dose
dépasse la tolérance individuelle ou en cas de
consommation concomitante d'alcool (4).
Le GHB est synthétisé pour la première fois au début
des années 1920, ne rencontre aucune application
scientifique ni pharmaceutique. En 1960, un médecin
militaire français, Henri Laborit, l'utilise comme
anesthésique et hypnotique (2). Le GHB est depuis utilisé
en chirurgie et en obstétrique sous forme de sel de sodium
(gammahydroxybutyrate de sodium, Gamma-OHR) en
solution injectable intraveineuse à 20 % (5). Du fait de ses
propriétés euphorisantes et amnésiantes, le GHB est
détourné de son usage initial pour des tentatives de
soumission chimique à l'insu d'une personne à des fins
délictueuses et criminelles. Cette drogue est utilisée sous
forme de poudre blanche microcristalline de GHB pure
en sel sodique, ou sous forme de liquide insipide, inodore,
incolore ou orange contenant des proportions variées en
GHB (6-8). En France, le GHB a été classé comme
stupéfiant en 1999, à l'exception de ses préparations
injectables (arrêté du 28 avril, JO du 5 mai 1999).
Le gammabutyrolactone (GBL) est un solvant
industriel possédant le même profil toxicologique et
pharmacologique que celui de GHB (4, 9). La GBL est un
précurseur chimique destiné à la synthèse de GHB : en
présence de soude, la GBL se transforme facilement en
GHB (3). La GBL est instable in vitro et in vivo, elle s'y
transforme aussi en GHB (6, 9). La GBL est un produit
courant sans aucun classement juridique, facile à se
procurer par internet ou détourné de l'industrie. Depuis
l'interdiction de vente du GHB en dehors d'une
prescription médicale, l'usage de la GBL dans les
milieux festifs notamment homosexuels a remplacé
progressivement celui du GHB du fait d'un approvisionnement facile (4). Sur le marché illicite, il est
difficile de savoir quel produit circule réellement, car le
nom usuel donné à la drogue reste souvent le GHB ou le
GBL/GHB. En réalité la GBL et le GHB sont une seule et
même drogue. La GBL, liquide plus lourd que l'eau
(d = 1,129), incolore et inodore entre dans la composition
de nombreux produits de nettoyage (4,7). Le GBL/GHB
ou « ecstasy liquide » est utilisé par voie orale (4). Les
effets de la GBL, plus progressifs que ceux du GHB,
s'échelonnent entre 30 et 45 minutes et durent un peu plus
longtemps, de 3 à 5 heures (4) versus 2-4 heures (10).
Après l'ingestion, la GBL s'élimine rapidement de
l'organisme après transformation en GHB. En raison de
l'instabilité in vitro et in vivo de la GBL, la plupart des
études montrent que la détermination du seul GHB
apparait suffisante pour mettre en évidence la prise de
GBL/GHB. Le GHB n'est plus détectable en 6 à 8 heures
seulement dans le sang et 12 à 18 heures dans l'urine
(11, 12) ; il s'oxyde par la suite en gaz carbonique (6, 13).
La demi-vie du GHB est rapide, elle varie de 20 min à
137 min (6, 7, 14). Le tableau I illustre les données de
littérature sur la demi-vie, le temps d'apparition d'effet, la
durée d'action et la durée de détection de GBL et GHB.
In vitro sous certaines conditions chimiques ou in vivo,
par conversion enzymatique, le GHB peut se convertir
en GBL (6, 8) : la GBL peut être retrouvée suite à la
410
Tableau I. Temps d'apparition des effets, demie-vie, durée d'action et durée de
détection de la GBL et du GHB.
Temps
Composé d'apparition
des effets
Demie-vie
Durée
d'action
Durée de
détection
GBL
30-45 minutes
3-5 heures en quelques
45-60 min* (7)
(4)
(4)
minutes (7)
GHB
20-40 minutes
sang :
(6)
6-8 heures
15-30 minutes 30-45 minutes 2-4 heures
(11,12)
(6)
(7)
(10)
urine :
49-137 min
8-12 heures
(14)
(11,12)
* sous forme de GHB
prise de GHB ou de GBL. Cependant des études
récentes ont montré que des concentrations significatives
de GBL n'étaient pas systématiquement retrouvées
dans le sang, le plasma et les tissus suite à la prise du GHB
(8). Il est cependant utile d'essayer de chercher la GBL,
car si sa présence dans l'organisme est avérée, celle-ci
est plutôt issue de la prise de GBL elle-même. Tout
d'abord, il est primordial de savoir si la GBL reste
intacte sous les conditions analytiques de la méthode
utilisée. Si la GBL est intacte, la méthode peut alors
être applicable à différents types d'échantillons. Pour le
GHB, le problème analytique de sa quantification a été
résolu mais demeure la difficulté de l'interprétation
des résultats. En effet, son origine peut être la prise de
GHB un produit stupéfiant ou celle de GBL un produit
courant sans classification juridique. Les conditions de
recueil et de conservation des échantillons jouent un rôle
majeur dans l'analyse de ces deux composés du fait de
l'instabilité de la GBL et du GHB.
L'interprétation de la présence de GHB dans les
milieux biologiques a préoccupé les toxicologues
aussi bien en médecine d'urgence qu'en médecine
légale. Les techniques mises en œuvre aux fins d’analyse
toxicologique sont souvent la chromatographie en phase
gazeuse ou en phase liquide couplée à la spectrométrie de
masse (14-18). Pour certaines méthodes, le dosage du
GHB ne se fait qu'après la dérivation du GHB en GBL (6,
10), dans cette condition le GHB est exprimé sous forme
de GBL. Dans le cadre juridique, l'analyse de GHB est
effectuée seulement par des laboratoires agréés par la
justice, sous contrôle d'experts. Dans ce travail, nous
avons fait appel à l'analyse par chromatographie en
phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse pour
la quantification du GHB et la recherche du GBL dans
le sang et l'urine.
Matériels et méthodes.
Cas médico-légaux.
Nous décrivons trois cas de suspicion de soumission
chimique où la recherche de GHB a été demandée par les
autorités requérantes et pour lesquels des analyses dans le
sang total et dans l'urine ont été réalisées.
p.-r. p. pok
Le cas n° 1, est celui d'un garçon, âgé de seize ans,
retrouvé sans connaissance dans une boite de nuit ou il a
passé sa soirée. Selon les renseignements fournis, vingt
minutes environ avant l'apparition des malaises, il avait
consommé volontairement un cocktail de jus de fruit
mélangé avec un liquide de nettoyage selon les
déclarations de la victime. Ainsi, les symptômes apparus
peuvent être associés à l'absorption de la GBL. Des
vomissements ont été observés. Le service médical
d'urgence a été présent sur les lieux à la suite d'une
demande d'intervention en sa faveur. Des soins intensifs
prodigués lors de son admission à l'hôpital ont permis une
reprise de connaissance. Le sang et l'urine ainsi que les
vomissures, prélevés sur la victime trois heures environ
après les faits, feront l'objet d'un examen toxicologique
complet. Deux jours après l'admission, l'évolution
clinique étant favorable, la victime sort de l'hôpital.
Deux autres cas (n° 2 et 3) de suspicion d'agression
sexuelle sur deux jeunes filles de 17 ans et 19 ans ont fait
l'objet d'une investigation pour rechercher des substances
susceptibles d'être utilisées à des fins de viol, notamment
le GHB. La fille, âgée de 17 ans, avait déclaré avoir été
victime de viols par des copains sur un camping ou elle a
été invitée pour un apéritif. Elle était dans un sommeil
profond au moment des faits et il lui a fallu un délai pour
reprendre ses esprits et surtout aller porter plainte. La
fille, âgée de 19 ans, aurait été droguée et violée par le
compagnon de son amie, à leur domicile, selon sa version.
Elle était dans un sommeil profond au moment des faits.
Les recherches sont effectuées sur le sang total et l'urine
prélevés sur les victimes trois jours après les faits pour la
victime n° 2 et 15 heures après les faits pour la victime
n° 3. Dans ces deux cas, les prélèvements étaient tardifs, si
l'absorption de la GBL ou du GHB a bien eu lieu, la
concentration en GHB dans le sang et l'urine devrait déjà
être revenue au niveau physiologique.
Réactifs et solvants.
Le méthanol, l'acétonitrile, le chloroforme, le
dichlorométhane, l'acide acétique, l'isopropanol et le
phosphate dipotassique ont été fournis par les laboratoires
Carlo Erba (France) et le triméthylchlorosilane (TMS)
par le laboratoire Macherey Nagel (France). L'acide
gammahydroxybutyrique (GHB) et son composé deutéré
(GHB-d6) ont été fournis par la société LGC Standards
(France), la gammabutyrolactone (GBL) par la société
Aldrich (France).
Préparation des solutions étalons.
Les solutions mères de GHB, GHB-d6 et de GBL à
1 mg/mL dans le méthanol ont été conservées à -10 °C et à
l'abri de la lumière. Les solutions filles à 0,1 mg/mL,
0,01 mg/mL et 0,001 mg/mL ont été préparées
extemporanément par dilutions successives de la solution
mère avec le même solvant.
Couplage chromatographie en phase
gazeuse-spectrométrie de masse (CPG-SM).
Le système utilisé était un appareillage de marque
Agilent Technologies. La séparation a été effectuée à
l'aide d'un chromatographe modèle 7890N, équipé d'une
colonne capillaire FactorFourTM type VF-5ms, greffée
(5 % phényle-95 % méthyl siloxane, 10 m x 0,15 mm d.i ;
0,15 μm d'épaisseur de film) de marque Varian, utilisant
de l'hélium comme gaz vecteur. La détection a été assurée
par un spectromètre de masse modèle 5975C. L'ionisation
des molécules par impact électronique a été faite à 70 eV
pour une gamme de masse m/z de 40 à 800. Le débit
d'hélium était de 0,4 ml/min. La température du four a été
programmée à 50 °C au début, puis de 15 °C/min jusqu'à
120 °C, 20 °C/min jusqu'à 220 °C et maintenue pendant
4 minutes à ce niveau, puis 9 °C/min jusqu'à 260 °C,
40 °C/min jusqu'à 325 °C et maintenue pendant 8 min
à ce niveau. Les températures de l'injecteur et de
l'interface étaient réglées à 250 °C et à 300 °C
respectivement. Les spectres de masses de composés
obtenus ont été comparés à ceux existant dans la
bibliothèque NIST fournie avec l'appareillage utilisé.
L'ensemble était piloté par un ordinateur équipé de
logiciel MSDCHEM® pour Windows XP.
Recherche de la GBL et du GHB.
Les échantillons (sang total et urine) ont été extraits par
la méthode rapide (18) utilisant la déprotéinisation à
l'acétonitrile. La prise d'essai (100 μL) a été prélevée dans
un tube à extraction puis 1 mL d'acétonitrile a été ajouté
dans le tube. Après agitation au vortex (1min) et
centrifugation (3 minutes, à 3 000 tours/min), le
surnageant a été soumis à l'analyse.
Pour la recherche de la GBL, 1 μL de surnageant a été
injecté directement dans le chromatographe.
Pour la recherche du GHB, une dérivation chimique
étant nécessaire, le surnageant a été évaporé à sec
sous courant d'azote, puis le résidu repris par de
triméthylchlorosilane TMS (50 μL) et chauffé pendant
20 minutes à 70 °C aux fins de silylation de la molécule.
Après refroidissement, 1 μL a été injectée dans le
chromatographe. Dans ces conditions de dérivation, la
GBL ne présente pas de réponse.
Dosage du GHB.
À 100 μL de sang total ou d'urine est ajouté 250 ng
d'étalon interne, le GHB-d6 (25 μL de la solution à
0,01 mg/L dans méthanol). La précipitation se fait par
1 mL d'acétonitrile. Après agitation 10 minutes et
centrifugation 3 000 trs/min pendant 3 minutes, le
surnageant est prélevé puis évaporé sous courant d'azote.
Le résidu obtenu subit un traitement identique à celui
décrit ci-dessus. Les ions de quantification sont m/z 233
pour le GHB et 239 pour le GHB-d6.
Validation de la méthode.
La GBL est identifiée par son temps de rétention à
2,272 min et ses ions : m/z 86, 42 (fig.1a et 1b).
Le GHB est identif ie par son temps de rétention à
4,827 min et ses ions : m/z 233, 204 (fig. 2a).
Le GHB-d6 (étalon interne) est identif ie par son
temps de rétention à 4,807 min et ses ions : m/z 239, 206
(fig. 2b).
En raison de la présence du GHB physiologique dans
le sang et l'urine humaines, l'eau distillée est utilisée
analyse de trois cas de soumission chimique à la gammabutyrolactone (GBL) et à l’acide gammahydroxybutyrique (GHB).
411
a
b
Figure 1. Analyse de la GBL par CPG-SM : a) Chromatogramme d'ion parent de la GBL m/Z 86 : GBL (2,272 min). b) Spectres de masse de la GBL
(ion parent : m/z 86, ion fils : m/z 42).
412
p.-r. p. pok
Figure 2. Analyse du GHB dans le sang total par CPG-SM (sang du cas n° 2, analyse après dérivation) : a) Chromatogramme du GHB (4,827 min) et spectre de masse
correspondant (ion parent : m/z 233 ; ions fils : m/z 204). La concentration de GHB trouvée est de 8 mg/L.
b) Chromatogramme du GHB-d6 (4,807 min) et spectre de masse correspondant (ion parent : m/z 239 ; ions fils : m/z 206).
comme échantillon blanc standard pour les deux
milieux analyses.
L'ensemble des résultats concernant les paramètres de
validation ont été satisfaisants : la méthode permet de
quantifier spécifiquement le GHB dans le sang total et
l'urine. La limite de quantif ication de GHB est de
0,5 mg/L dans la matrice blanche ; celle-ci était suffisante
pour la détermination des concentrations de GHB
endogène dans le sang et l'urine. La droite de calibration
a été effectuée pour le couple d'ions parents (233-239)
de GHB et GHB-d6 (étalon interne), où l'ordonnée
représente le rapport en aire GHB/GHB-d6 et l'abscisse
représente la concentration de l'ion. La méthode est
linéaire pour les concentrations en GHB allant de 0,5 à
200 mg/L, avec un coefficient de corrélation r2 = 0,99.
Pour les concentrations supérieures à 200 mg/L,
l'échantillon à analyser doit être dilué. Entre les
concentrations de 0,5 et 200 mg/L, la méthode est
reproductible. Les coefficients de variation obtenus après
les essais de répétabilité intra-journée (n = 6) et les essais
de reproductibilité inter-journée (n = 6), sont inferieurs à
10 %. Les figures 2a et 2b illustrent les chromatogrammes
analyse de trois cas de soumission chimique à la gammabutyrolactone (GBL) et à l’acide gammahydroxybutyrique (GHB).
413
et les spectres des composés analysés obtenus après
analyse du sang total. Sur le chromatogramme de la figure
2a, le pic à 4,827 min est attribué, grâce à son spectre de
masse (ion parent m/z 233, ion fils m/z 204) au GHB. Sur
le chromatogramme de la figure 2b, le pic à 4,807 min est
attribué, grâce à son spectre de masse (ion parent m/z 239,
ion fils m/z 206) au GHB-d6, l'étalon interne.
Résultats et discussion.
La méthode appliquée dans les trois cas médico-légaux
décrits a donné les résultats sanguins et urinaires illustrés
dans le tableau II.
Tableau II. Résultats des cas médico-légaux en référence à la littérature.
Cas
Cas étudiés
n° 1 (masculin, 16 ans)
n° 2 (féminin, 17 ans)
n° 3 (féminin, 19 ans)
Concentration (mg/L) en GHB
Sang total
Urine
68
8
0,96
942
1
0,60
Données bibliographiques :
- physiologique (26,27,28) :
- en thérapeutique (11)
- sommeil léger (19) :
- sommeil modéré, profond
(11, 20) :
- coma, décès (6, 8)
- intoxication mortelle due à
l'association avec d'autres
substances (8)
< 5 (vivant)
< 10 (vivant)
< 50 (post mortem) < 10 (post mortem)
24-88 *
52-156 *
156-260 *
250 - > 500*
300 (ante mortem)
309 (post mortem)
27-121
* : sérum
Selon les données bibliographiques, des concentrations
sériques comprises entre 24 et 88 mg/L (11) sont
retrouvées chez les patients traités (25 mg/Kg) avec le
GHB, des valeurs comprises entre 52 et 156 mg/L sont
associées à un sommeil léger (19), entre 156 et 260 mg/L
à un sommeil modéré voire à un sommeil profond (20)
(tab. II). Les intoxications par le GHB sont très fréquentes,
mais les cas graves semblent rares. Les concentrations de
GHB retrouvées dans le sang après intoxications aigues
sont très variées, mais souvent identiques à celles
retrouvées en thérapeutique (19, 21-25). Dans une
intoxication mortelle due à l'ingestion de GHB, les
concentrations sanguines de GHB trouvées étaient de
300 mg/L dans le sang ante mortem et 309 mg/L celui post
mortem (8) ; en général des concentrations sériques de
250 à > 500 mg/L sont associées aux comas ou aux décès
(6). En cas d'intoxications mortelles en relation avec le
GHB, les concentrations de GHB dans le sang peuvent
être faibles, comprises entre 27 et 121 mg/L (8). Dans le
cadre de la toxicologie médicolégale, les concentrations
trouvées en GHB doivent être supérieures à celles des
concentrations physiologiques pour prouver l'absorption
de ce produit. In vitro, les concentrations physiologiques
du GHB peuvent augmenter au cours du temps et
notamment lors de la conservation des échantillons à
température ambiante. Les concentrations de GHB
414
susceptibles d'être interprétables dans les cas vivants,
sont fixées au minimum à 5 mg/L pour le sang et 10 mg/L
pour l'urine (6, 26-28). En ce qui concerne la concentration
de GHB après la mort, il faut tenir compte du phénomène
de néoformation post mortem du GHB (29,30) ; les
concentrations de GHB interprétables dans ces cas post
mortem, sont fixées au minimum à 50 mg/L pour le sang
et 10 mg/L pour l'urine (26-28).
Dans le cas n° 1, la recherche de la GBL a été négative
dans le sang, l'urine et les vomissures.
Précisons que les vomissures ont été traitées comme le
sang et urine par la procédure décrite. Le résultat obtenu
confirme la transformation totale de GBL en GHB, si
l'absorption de la GBL a eu lieu. Ce phénomène est dû à
l'instabilité in vivo ou in vitro de la GBL. Cependant, sous
les conditions analytiques utilisées, la GBL est pourtant
stable (fig. 1) ; ce résultat montre que la méthode pourrait
être appliquée à d'autres types échantillons, notamment le
liquide incriminé sous réserve qu'il soit conservé dans de
bonnes conditions. Dans le cas présent, le liquide
incriminé n'a pas été à notre disposition. La recherche du
GHB, a mis en évidence cette molécule dans tous les
milieux analysés (sang, urine, vomissures). Les dosages
du GHB réalisés ont donné les résultats suivants : 68 mg/L
dans le sang et 942 mg/L dans l'urine. Il s'agit des
concentrations du GHB au moment ou les prélèvements
biologiques ont été effectués. C'est pour cette raison que
les prélèvements à analyser doivent être conservés
immédiatement au congélateur af in d'empêcher
l'évolution du GHB endogène due à la température
ambiante et la dégradation de la GBL due à l'instabilité
in vitro. En comparant avec les données bibliographiques,
la concentration sanguine de GHB trouvée (68 mg/L)
correspond à celles trouvées en thérapeutique ou
seulement associée à une intoxication légère (tab. II).
Au cours des trois heures écoulées entre les faits et le
recueil des échantillons, le GHB a pu être éliminé en
une partie du compartiment sanguin en raison de sa
courte demi-vie, de 20 min à 137 min (6, 7, 14). Au
moment des faits où l'absorption était maximale (20 min
après la consommation), la concentration sanguine
en GHB pouvait être alors supérieure à 68 mg/L.
La concentration trouvée correspond seulement au
moment du prélèvement (3 heures après les faits) où le
GHB était en voie d'élimination sanguine. Dans ce cas
n° 1, il n'a pas été détecté d'éthanol ou d'autres toxiques
organiques dans le sang et l'urine.
Dans le cas n° 2, les analyses toxicologiques effectuées
dans le sang total et l'urine prélevés sur la victime, trois
jours environ après les faits, mettent en évidence du GHB
dans les deux milieux analysés à des concentrations
respectives de 8 mg/L et 1 mg/L. En principe, le délai de
trois jours écoulé entre les prélèvements et le moment des
faits, était suff isant pour permettre l'élimination
complète du compartiment sanguin de GHB exogène
ainsi que ceux d'autres toxiques tels que l'éthanol, des
stupéfiants et des substances médicamenteuses actifs à
faible concentration et à demi-vie courte. La
concentration sanguine de 8 mg/L en GHB, légèrement
supérieure au seuil moyen physiologique (5 mg/L), peut
théoriquement être associée à la prise exogène de GHB,
mais cependant la concentration urinaire en GHB
p.-r. p. pok
(1 mg/L), inferieure au seuil moyen physiologique
(10 mg/L) ne permet pas de confirmer une prise exogène
de GBL/GHB. En raison des variations interindividuelles
des concentrations physiologiques de GHB, la
concentration sanguine trouvée ne peut être attribuée à
une prise exogène. Donc les résultats trouvés reflètent
plutôt le GHB endogène de la victime. Aucun autre
toxique n'a été mis en évidence dans le sang et l'urine de la
victime, à l'exclusion de l'acide 11 nor 9 THC
carboxylique (THC-COOH), métabolite inactif du ∆9
tetrahydrocannabinol (THC), principe actif de cannabis,
uniquement dans l'urine.
Dans le cas n° 3, les analyses toxicologiques effectuées
dans le sang total et l'urine prélevés sur la victime,
15 heures après les faits, ont mis en évidence du GHB
dans les deux milieux analysés. Les concentrations du
GHB dans le sang total et dans l'urine de 0,96 mg/L et
0,60 mg/L respectivement, sont inférieures aux valeurs
physiologiques (<5 mg/L et < 10 mg/L). Comme dans le
cas précédent, le délai séparant les prélèvements et les
faits était important (15 heures). Les résultats obtenus ne
permettent pas d'affirmer l'absorption de GBL/GHB, les
concentrations trouvées reflétant des concentrations
physiologiques du GHB dans le sang total et l'urine de la
victime. Précisons que la recherche des autres toxiques
dans le sang et l'urine de la victime a permis de mettre en
évidence à l'exclusion de tout autre toxique, la présence
de la Zopiclone (hypnotique) uniquement dans l'urine. La
GBL n'ayant pas été détectée dans tous les cas, son dosage
n'a pas été effectué.
Conditions pratiques et légales des
prélèvements.
Les prélèvements biologiques doivent être effectués
par un médecin ou un biologiste requis dans les conditions
fixées à l'article L.4131-2 du Code de la santé publique.
Ils doivent être réalisés le plus précocement possible (plus
tard 6 à 8 heures pour le sang et 10 à 12 heures pour l'urine)
et congelés immédiatement (-10 °C à l'abri de la lumière)
ou faire réaliser des prélèvements conservatoires par les
services des urgences ou les services médicaux d'unité
dès qu'il y a une suspicion de façon à perdre moins de
temps possible. Ces prélèvements doivent être
impérativement faits en présence d'un officier de police
judiciaire pour avoir une valeur légale.
Conclusion.
Depuis la classification du GHB comme stupéfiant en
France, les forces de l'ordre du pôle police judiciaire
(Police et Gendarmerie) ont été chargées d'assurer la prise
en charge des plaintes relatives à l'usage de GHB et son
précurseur, le GBL. Sur le plan médico-légal, les
laboratoires de la Gendarmerie et de la Police scientifique
ont été requis pour procéder à l'analyses toxicologiques
af in d'aider les enquêtes. Les résultats d'analyse
toxicologique de GBL et GHB ne sont pas toujours faciles
à interpréter. Les trois cas présentés dans ce travail
mettent en évidence la difficulté de prouver l'absorption
de GBL/GHB. La difficulté est liée à l'instabilité et à la
demi-vie courte de la GBL et du GHB mais aussi à la
conversion réversible in vitroetin vivodes deux composés
analysés. La méthode utilisée a permis d'affirmer qu'il est
possible de mettre en évidence la GBL dans l'organisme,
mais le problème réside dans le fait que la GBL devient
vite indétectable. Les résultats des trois cas proposés ont
montré que la GBL n'a pas été détectée dans tous les
milieux analysés. L'absorption de GBL dans le cas n° 1 n'a
pas été confirmée. Quant au GHB, il a été retrouvé dans
tous les échantillons ; mais du fait que les conditions de
prélèvements n'ont pas été adaptées à la drogue, les
résultats (cas n° 2 et 3) ne permettant pas de lever la
suspicion. Pour cela, il est permis de tirer les conclusions
pratiques imposant la nécessité des conditions préanalytiques strictes.
Néanmoins les résultats des analyses peuvent
documenter les concentrations toxiques en GHB dans le
sang total (68 mg/L) et l'urine (942 mg/L), déterminées
3 heures après l'absorption du toxique et celles
physiologiques de GHB dans le sang total (0,96 à 8 mg/L)
et l'urine (0,60 à 1 mg/L).
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INFORMATION
SYMPOSIUM
8 ET 9 AVRIL 2011
ÉTATS DE MAL ÉPILEPTIQUES ET ATTEINTES CENTRALES TOXIQUES
PLACE DE LA KETAMINE ?
Proposition de communication affichée à envoyer par courrier électronique au secrétariat du SAMU 38 et au
département de toxicologie et risques chimiques sous forme d’un résumé de 250 mots maximum AVANT LE 31
JANVIER 2011 accompagné du règlement de l’inscription.
Droit d’inscription : 150 € les 2 jours (8-9 avril) – 50 € pour les étudiants et internes (sur justificatif)
Contacts : SAMU 38 : secré[email protected] Tél. : 04 76 63 42 02
Département de toxicologie et risques chimiques : [email protected] Té. : 04 76 63 69 89
Par courrier : Département de toxicologie et risques chimiques IRBA-CRSSA, 24 avenue des Marquis du
Grésivaudan, BP 87 – 38702 La Tronche Cedex.
SYMPOSIUM du 8 ET 9 AVRIL 2001- UFR de médecine et pharmacie - Domaine de la Merci, place du
Commandant Nal - 38700 La Tronche.
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p.-r. p. pok