Nuits-Saint-Georges - Bourgogne Aujourd`hui

Transcription

Nuits-Saint-Georges - Bourgogne Aujourd`hui
Dégustation
22
23
BOURGOGNE AUJOURD’HUI n° 50
Une A.O.C.
Passionnante
Simplicité des hommes,
qualité des vins (rouges à 98%)
et douceur des prix font de nuits-saint-georges,
en côte de Nuits, l’une des appellations
les plus passionnantes de Bourgogne.
N
uits-saint-georges est
une appellation passionnante. L’un de
ces endroits où le
consommateur peut
se rendre décontracté. Il ne fera pas
agresser par les prix ; on trouve de 16 à
25 € la bouteille d’excellents nuits premiers crus (cf. sélection). Il y rencontrera, à Nuits et Premeaux-Prissey
(les deux communes de l’appellation),
des vignerons et des négociants qui
dans leur immense majorité ne jouent
pas un rôle : “gentleman farmer”,
trench coat, pantalon velours, chaussure Weston, chapeau en feutre et
mercedes ou “paysan du Larzac”, gilet
en mouton retourné, chemise écossaise, jean et 4x4 ; des gens qui ne se
prennent pas pour des prix Nobel de
médecine et entre lesquels semble
régner une saine émulation. Un village
ou les “leaders” –Pierre et Christian
Gouges, Alain Michelot, François
Faiveley, Robert Chevillon- sont des
gens “normaux”, simples, “natures”
qui ne font pas n’importe quoi pour
avoir leur photo dans les magazines ;
si la valeur d’exemple vaut encore
quelque chose, il est plus que probable
que ces gens là y soient pour quelque
chose dans la mentalité des producteurs de l’appellation.
Quant à la qualité : sur les 140 nuitssaint-georges, villages et premiers
crus, rouges et blancs (4 vins) dégustés
dans le cadre de ce numéro, 77 sont
sélectionnés, soit 55% ce qui constitue
le meilleur résultat jamais obtenu par
une appellation village rouge dans nos
dégustations. Pour confirmer tout
cela nous avons simplement posé la
question suivante à trois négociants
bourguignons et à Al Hotchkin, de la
Burgundy Wine Company, à NewYork : “quelle est à votre avis l’appellation rouge la plus homogène de la côte
de Nuits”. Tous, sans la moindre hésitation, ont répondu : “nuits-saint-georges”.
“Ce bon résultat ne m’étonne pas.
Beaucoup de gens ont changé de mentalité au cours des dix dernières
années, se sont remis en question,
ont évolué dans leurs pratiques culturales pour aller vers une maîtrise
globale des rendements. Je crois que la
meilleure illustration de tout cela reste
ces 55% de vins sélectionnés dans
votre dégustation sur le millésime
2000. Si les vignerons n’avaient pas
fait ce qu’il fallait en amont en 2000,
un millésime délicat à cause des pluies
de l’été et des forts rendements naturels,
ils n’auraient jamais produits autant
de bons vins”, explique Pierre
Gouges, le très posé, réfléchi et objectif président du syndicat viticole de
Nuits-Saint-Georges.
D’autres explications peuvent être
avancées. L’œnologie moderne, dans
le bon sens du terme (égrappage,
élevage en fût maîtrisé…), permet
aujourd’hui d’avoir des nuits aussi
concentrés, mais moins durs que par
le passé ; les rencontres régulières
entre vignerons, surtout sur Premeaux
où elles sont systématiques, etc.
Peu importe finalement les causes !
Le constat est là : celui d’une appellation leader et passionnante !
Christophe Tupinier
Photographies : Lionel Georgeot
BOURGOGNE AUJOURD’HUI n° 50
Nuits-Saint-Georges
Dégustation
Les terroirs de Nuits-Saint-Georges
UNE GRANDE DIVERSITÉ
Retrouvez notre sélection des meilleurs vins
dans la version papier du magazine
Carte extraite du livre les Vins de Bourgogne, de Sylvain Pitiot et Jean-Charles Servant, collection Pierre Poupon.
À Nuits-Saint-Georges,
les différences des sols,
des orientations
et des situations
entraînent une grande
diversité de terroirs.
Le tout coupé en deux
par la vallée du Meuzin
et par le village
BOURGOGNE AUJOURD’HUI n° 50
A
u nord du village, le coteau
est homogène avec une
altitude assez élevée (250
à 310 m d’altitude). On y
trouve de nombreux
affleurements de calcaire bajocien et
des traces d’alluvions comme sur la
Richemone dont le sol léger apporte
beaucoup de finesse au vin. Dans la
partie centrale, on retrouve également
les Boudots, les Damodes, les Champs
Perdrix où les différents niveaux marneux sous-jacents confèrent aux vins
un caractère plus robuste. Plus bas,
à partir des Chaignots, le sol contient
davantage d’argile, mais reste très
caillouteux. Plus l’on se dirige vers le
village plus cette tendance s’affirme.
En partie haute du coteau (nuits
villages), la faible épaisseur et la légèreté du sol apportent beaucoup de
délicatesse aux vins. Dans certains cas,
la roche a été concassée pour qu’on
puisse y installer de la vigne.
On notera en bout de coteau l’exposition plein sud des Argillats.
Au sud du village, l’altitude est plus
basse : 220 à 270 m. Le sol est surtout
composé de marnes associées à
du sable et à des cailloux provenant du
sommet du coteau. On y retrouve les
vins les plus robustes de l’A.O.C.
Certaines nuances sont à considérer.
Contigus au village, les Pruliers,
les Procès et les Roncières donnent
des vins aimables qui se rapprochent
de ceux de la partie nord. Plus loin,
LES CHIFFRES
Superficie en production
Nuits-st-georges rouge : 160 ha
Nuits-st-georges blanc : 1 ha
Nuits-st-georges 1er cru rouge :
140 ha
Nuits-st-georges 1er cru blanc : 3 ha
Production annuelle
Nuits-st-georges rouge :
960 000 bout.
Nuits-st-georges blanc :
6 500 bout.
Nuits-st-georges 1er cru rouge :
840 000 bout.
Nuits-st-georges 1er cru blanc :
20 000 bout.
assis sur du calcaire rose, les Porrets et
le Clos des Porrets développent toujours des notes fauves à l’évolution,
typiques de leur terroir. C’est à mipente, où s’associent les éboulis et le
limon sur fond marneux que l’on
retrouve les meilleurs vins : Vaucrains,
Cailles et St-Georges. La situation y
est idéale : pente douce, mi-coteau,
exposition à l’est et altitude entre 240
et 260 m ; les vins paraissent stricts
dans leur jeunesse, mais ils ont une
réelle aptitude au vieillissement. Situés
plus haut, Perrières et Poulettes sont
directement installés sur des affleurements calcaires qui leur donnent une
certaine droiture et beaucoup de
finesse. Ils demandent une bonne
maturité pour ne pas paraître chétifs.
Plus au sud, arrive la commune de
Premeaux-Prissey. On y distingue
notamment le Clos des Corvées, le Clos
Saint-Marc, le Clos des Argillières qui
évoluent sur un sous-sol de calcaire
Bathonien avec des affleurements de
calcaire Bajocien recouverts d’une
couche d’argile. À noter la situation
particulière du Clos de l’Arlot, situé en
plein cœur de Premeaux, protégé par
les maisons et jouissant d’une forte
inclinaison. Complètement au sud,
le Clos de la Maréchale ferme la marche
avec une altitude assez faible de 230 m
et un sol argileux très profond.
François Laborier
25
BOURGOGNE AUJOURD’HUI n° 50
24
Degustation
27
Saint-Véran
BOURGOGNEAUJOURD’HUI
AUJOURD’HUIn°
n°50
50
BOURGOGNE
Tout
d’une grande
L’appellation saint-véran
a vraiment tout d’une grande :
les terroirs, les hommes, le succès et l’ambition.
Pour ne rien gâcher, les prix des vins restent sages...
S
aint-véran, au sud de la
Saône-et-Loire, c’est un peu
le rayon bonnes affaires du
grand magasin Bourgogne.
Les prix de ses vins blancs
sont restés sages, alors que la qualité
n’a cessé de progresser depuis une
quinzaine d’années.
47% des vins présentés ont passé avec
succès l’épreuve de notre dégustation.
Ce score ne doit rien au hasard. L’appellation dispose en effet de terroirs
de qualité, mis en valeur par un
nombre croissant de producteurs
sérieux et ambitieux. “Les meilleurs
climats du saint-véran supportent la
comparaison avec leurs voisins de
pouilly-fuissé”, estime Daniel Barraud,
viticulteur à Vergisson, et propriétaire
de vignes dans les deux appellations.
Michel Paquet, président du syndicat,
aurait bien aimé voir les meilleurs
lieux-dits élevés au rang de premier
cru. Mais la proposition n’a pas soulevé l’enthousiasme de ses collègues,
et le débat est resté au point mort.
“Pour l’instant, c’est le statu quo,
les gens ne sont pas prêts. Selon moi,
c’est dommage...”
Privés de premiers crus, beaucoup
de vignerons ne se gênent pas pour
mettre en avant leurs lieux-dits,
vinifiant séparément leurs plus belles
parcelles. Le résultat est édifiant.
Démonstration, chez Michel Paquet.
Les Cras 2001, issu d’une vigne au sol
très calcaire, exposée sud-est, exhibe
un nez minéral et épicé et une bouche
ferme, tendue, qui incite à un peu de
patience. La cuvée Hors Classe du
même millésime, assemblage de lieuxdits Crèches et Terres Noires révèle
quant à elle des arômes exotiques et
briochés, dans une enveloppe plus
grasse. “Le terroir, j’y crois”, ajoute
Jacques Saumaize, vigneron à Vergisson, qui compare chaque année
ses Poncetys et ses vieilles vignes
de Crèches.
Avec des prix moyens, départ
propriété, de 6 à 10 € la bouteille,
les saint-véran réussis constituent
donc des affaires à saisir. Le difficile
millésime 2001 a finalement produit
de belles bouteilles. Les cuvées ambitieuses n’ont rien à envier à la famille
des pouilly, mais elles se boiront un
peu plus tôt. Les vins allient le gras,
la profondeur et la minéralité, mis en
valeur par un élevage en fût de chêne
souvent raisonnable. Le reste (80%)
de la production, vinifié en cuve, est
destiné à une consommation relativement rapide. Les meilleurs vins exhibent une fraîcheur séduisante et des
parfums de fleurs et d’agrumes.
Commercialement, les affaires marchent :
le saint-véran est recherché à l’export,
et les vignerons qui vendent en
bouteille n’ont pas de problème de débouchés. Pourtant, l’appellation ne s’endort
pas sur sa notoriété naissante.
“L’Union des Producteurs a mis en
place en 2001 une commission de
contrôle, avec l’aide de l’I.N.A.O.”,
explique Michel Paquet. Le groupe
passe dans les vignes deux fois par an :
au printemps pour vérifier la taille,
l’été pour évaluer la maturité des
raisins et la charge des ceps. Pour
l’instant, il n’est pas question de sanctionner qui que ce soit. Mais quelques
vignerons, qui ne marchaient pas dans
les clous, ont tout de même reçu une
lettre d’avertissement. Un début…
Jean-Philippe Chapelon
Photographies : Lionel Georgeot
et Thierry Gaudillère
BOURGOGNEAUJOURD’HUI
AUJOURD’HUIn°
n°50
50
BOURGOGNE
26
Dégustation
Les terroirs
de Saint-Véran
SUR LES RAILS
Après 30 ans
d’existence,
l’appellation saint-véran
trouve petit à petit
sa place auprès
des pouilly
Retrouvez notre sélection des meilleurs vins
dans la version papier du magazine
N
ée en 1971, l’A.O.C.
saint-véran couvre
près de 600 hectares.
Répartie sur 6 villages
(Davayé, Prissé, Chânes,
Chasselas, Leynes et bien sûr SaintVérand), elle prend ses marques
autour de l’A.O.C. pouilly-fuissé et
se découpe en deux grandes zones.
La première prend naissance au nord,
avec les villages de Davayé et Prissé
qui représentent les deux tiers de l’appellation. Couvrant près de 250 hectares sur Prissé, les vignes reposent sur
des coteaux tourmentés, aux sols à
dominante calcaire mêlés de marnes
en plusieurs endroits. Assis au pied de
la roche de Vergisson, les 120 hectares
de vignes de Davayé trouvent une
situation idéale (est/ouest) à l’abri des
vents dominant. Ce qui assure aux
raisins une bonne maturité. On y
distingue plusieurs types de sols.
Tout d’abord les bas de coteau qui
sont formés de sol argilo-limoneux du
quaternaire et donnent des vins ronds
et flatteurs. À mi-coteau, le terrain
devient plus caillouteux et offre des
vins plus puissants et charpentés.
Les vignes de hauts de coteaux reposent sur des sols très calcaires,
maigres, qui confèrent aux vins
finesse, délicatesse et minéralité.
La seconde zone prend ses marques
plus au sud, après Fuissé. S’inscrivant
dans la continuité de la veine géologique
29
Carte extraite du livre les Vins de Bourgogne, de Sylvain Pitiot et Jean-Charles Servant, collection Pierre Poupon.
de la roche de Solutré on découvre
Leynes sur près de 90 hectares.
Etendu sur plusieurs hameaux le sol
offre différentes nuances : calcaire,
grès, porphyre, bancs argilo-calcaires
mêlés de sable. Les vins présentent
donc différentes facettes… Tantôt
subtils et charmeurs, tantôt avec plus
de corps. À Chasselas seul le versant
est se trouve voué au chardonnay.
Le sol très calcaire offre des vins qui
s’imposent par leur finesse et leur
délicatesse. Chânes ne possèdent que
15 hectares de saint-véran. Issus de
terres assez profondes, les vins s’affirment par leur souplesse. Le village de
Saint-Vérand qui a donné son nom à
l’appellation ne compte que 25 hectares en son sein. Les vignes, qui reposent sur un sol de granite et de
porphyre décomposé, donnent des vins
gras, charmeurs et assez puissants.
Si dans les deux secteurs les cuvées
sont encore souvent issues d’assemblages, la tendance change. On voit
fleurir sur les étiquettes des mentions
de parcelles. C’est le gage que les
producteurs ont pris conscience de
la valeur de leurs terroirs.
François Laborier
LES CHIFFRES
Superficie et production annuelle
5 980 ha
4 784 000 bout.
BOURGOGNE
BOURGOGNEAUJOURD’HUI
AUJOURD’HUI n°
n° 50
50
BOURGOGNE
BOURGOGNEAUJOURD’HUI
AUJOURD’HUI n°
n° 50
50
28