Tout le monde me déteste

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Tout le monde me déteste
Tout le monde me déteste
Pendant une adolescence quelque peu difficile, j’avais coutume de me balader l’air renfrogné en
disant à haute voix « Personne ne m’aime », ce qui mettait ma pauvre mère dans un état second.
C’était probablement pour ça que je le faisais. Arrivé à l’âge adulte, je suis assez rapidement
devenu libéral ce qui est à l’évidence et surtout en France la façon la plus rapide de se faire
détester par tout le monde. D’où j’en déduis que je dois avoir des problèmes psychologiques très
profonds et que je devrais aller voir un psy pour corriger ce besoin incoercible de me faire
détester par tout le monde.
Parce qu’enfin, si je regarde la télévision (assez rarement) ou si je lis des articles ou des livres
(plus fréquemment), s’il y a une constante en France, c’est que tout auteur, tout journaliste aussi
intéressant ou rasoir qu’il puisse être introduit toujours dans son discours à un moment ou à un
autre la phrase : « Vous savez, moi, je suis profondément anti libéral»
Par exemple, j’aime bien Onfray qui dît des choses raisonnables assez fréquemment. Or il n’y a
pas d’émission où il passe où il ne prononce pas la phrase sacramentelle et où il proclame son
antilibéralisme.Même remarque pour Zemmour, dont nous avons dit du bien sur ce site au
moment de la sortie de son livre « Le suicide Français» et qui lui aussi tire à boulets rouges
chaque fois qu’il le peut sur le libéralisme.De même de grands incompétents tels Chirac, le roi
fainéant ou Sarkozy, l’agité du bonnet, n’ont cessé soit de dire du mal du libéralisme (Chirac), soit
de faire le contraire de ce qu’ils avaient annoncé dans leurs campagnes électorales où ils avaient
entonné un chant plutôt libéral (Sarkozy).
Et je ne parle pas de la communauté de pensée entre l’extrême gauche et l’extrême droite sur le
sujet, tant l’antilibéralisme semble être le fond de sauce qui permet à tous les extrémistes de
dîner à la même table. Et du coup je me pose la question : mais pourquoi tant de haine ?
Et pour répondre, il faut une fois encore revenir à la phrase d’ Albert Camus «Ne pas nommer les
choses, c’est ajouter au malheur du monde».
Et quand les ennemis du libéralisme se déclarent « antilibéraux» nous ne sommes guère plus
avancées pour discuter avec eux puisque nous ne savons pas de quoi ils parlent, et eux non plus
probablement.Je vais donc me livrer à une petite typologie de ceux qui emploient le mot anti
libéral pour essayer de mettre mes idées au clair.
D’après mon analyse-et je peux tout à fait me tromper sur leurs motivations et je les prie de m’en
excuser si c’est le cas- des gens comme Onfray ou Zemmour se disent anti libéraux d’abord parce
qu’ils assimilent le Libéralisme au capitalisme de connivence qui sévit en France depuis bien trop
longtemps.Et sur ce point, je ne saurai être plus d’accord avec eux.Le capitalisme de connivence
est une abomination et l’influence que certaines banques ou certains groupes industriels exerce
en France n’est pas acceptable, pas plus d’ailleurs que le passage de certains personnages de la
haute fonction publique à la direction de certaines grandes affaires qui ne dépendent que des
contrats étatiques. Il s’agit la d’une forme de corruption inacceptable.
Qui plus est, les auteurs cités et bien d’autres détestent le libéralisme parce qu’ils l’assimilent à la
prise de contrôle du débat démocratique par ceux que j’ai appelé « les hommes de Davos » ou les
« Oints du Seigneur » les Attali, Minc, BHL et sans doute aujourd’hui Macron.Pour ces hommes, la
France ne représente plus rien, l’avenir appartient à un gouvernement mondial, conseillé par eux
bien sur. Là encore, je ne saurai être plus d’accord avec ceux qui ne veulent pas de cette forme
de libéralisme.
Le mondialisme n’est pas le libéralisme mais une forme, une fois encore, du capitalisme de
connivence. Un certain nombre de grands groupes mondiaux ont pris des positions dominantes ici
ou là et entendent les conserver en s’appuyant sur des lois de circonstance qu’ils auraient fait
passer en catimini en s’appuyant sur des gens que personne n’a élu et souvent ces lois cherchent
à empêcher l’émergence de toute concurrence. Par exemple l’hypertrophie légale et
réglementaire dont j’ai parlé récemment et qui touche tous les secteurs n’est qu’une façon de
favoriser les gros au détriment des petits qui ne peuvent se payer des services juridiques
pléthoriques et qui donc ne peuvent se lancer et faire concurrence aux gros.
On étouffe la concurrence par l’hypertrophie des lois ou par quelque chose comme « le principe
de précaution », abomination contre la liberté s’il en fut.
De même, je suis à peu prés persuadé que le traité de libre échange Nord Atlantique n’est qu’une
tentative par des groupes dominants de consolider leurs positions de monopole, ce qui est
inacceptable.Au début du XX eme aux Etats-Unis, les « robber-barrons » c’est-à-dire ceux qui
avaient réussi à établir pour leurs groupes des positions de monopole ont vu leurs dominations
cassées par l’arrivée des lois anti Trust et c’était très bien.La capture des Etats par des groupes
monopolistiques est l’une des maladies mortelles du libéralisme et elle a souvent été décrite
comme telle par nombre d’auteurs libéraux.Et donc je n’ai aucun problème autre que sémantique
avec ceux qui ont parfaitement raison dans le fond, mais n’utilisent pas les mêmes mots que les
miens pour décrire ce qui est malheureusement une réalité que je déplore tout autant qu’eux.
Il peut y avoir des nuances sur le rôle de l’Etat, mais en les écoutant, je n’ai jamais le moindre
doute qu’ils aiment leur pays et qu’ils aiment la liberté.Avec eux, cela ne doit pas être difficile
d’avoir des échanges intéressants.Ce qui m’amène au deuxième groupe que j’ai appelé dans une
chronique précédente les Maurassiens, qui sont anti capitalistes parce qu’ils sont Malthusiens,
détestent le progrès technique, le monde Anglo-Saxon, sont antisémites en ayant remplacé la
haine des juifs par la haine d’Israël…
On les trouve beaucoup à la gauche de la gauche en France et curieusement aussi à la droite de
la droite et bien sûr partout dans le monde musulman. A ceux là, je n’ai pas grand-chose à dire
puisque leur pensée est une pensée magique ou religieuse et non pas rationnelle et la tâche dans
leur cas est compliquée par le fait qu’ils n’ont pas la moindre intention de discuter avec ceux qui
ne sont pas d’accord avec eux puisqu’ils ont la vérité. Par construction, ces gens ne sont
intéressés ni par leur pays ou leurs concitoyens ni par l’idée même de liberté comme l’Histoire l’a
abondamment montré avec Mao par exemple. Leur but partout et toujours est de créer un
homme nouveau, et pour cela de massacrer allègrement les hommes actuels si par malheur ils
prennent le pouvoir, ce qu’ils font à chaque fois qu’ils y arrivent.
Venons- en au troisième groupe et ici je vais devoir faire référence encore une fois à Schumpeter.
Dans son grand livre « Capitalisme, Socialisme et Démocratie », il fait une remarque
extraordinairement profonde : Le capitalisme grâce à la « destruction créatrice » va être à
l’origine d’une extraordinaire hausse du niveau de vie. Cette hausse va permettre d’éduquer les
populations comme jamais dans l’histoire. A la place d’être un privilège réservé à l’élite,
l’enseignement va devenir une possibilité ouverte à l’ensemble de la population. De ce fait, va
naître aussi une classe de « faux intellectuels » qui vont manifester une hostilité constante au
processus même de destruction créatrice, dont ils ne supportent pas le côté Darwinien. Et donc ils
se lanceront en politique pour essayer de capturer le pouvoir et se servir de ce pouvoir pour
empêcher tout changement.
On pense bien sur au Parti Socialiste Français, mais aussi à toutes les structures de pouvoir
truffées d’énarques ou d’économiste du type Piketty.
Et ils arriveront à leurs fins comme tout le montre aujourd’hui en se servant de la double force de
la taxation et de la réglementation.
La capture de l’Etat par cette classe amènera donc inéluctablement à un ralentissement de la
croissance et à la stagnation économique, ce qui induira paradoxalement un renforcement de
leurs pouvoirs.
On voit la différence avec Milton Friedman qui lui pensait que la Démocratie et le Capitalisme
étaient l’envers et l’endroit de la même pièce de monnaie, mais on voit la similitude avec
Tocqueville qui craignait l’avènement d’une espèce de « dictature molle ». Nous y sommes.
Hélas, tout semble indiquer que Schumpeter avait vu juste. Ces forces hostiles au capitalisme se
maintiennent au pouvoir en « achetant » les voix d’une majorité de la population, en distribuant
des prébendes, non pas avec de l’argent gagné mais avec de l’argent emprunté, ce qui ralenti
encore la croissance et accentue la dépendance de la population vis-à-vis de l’Etat et donc de
cette classe prédatrice.
Et donc ces ennemis du libéralisme sont les seuls qui soient vraiment dangereux et pour notre
niveau de vie et pour nos libertés, dont on voit bien qu’elles sont de plus en plus attaquées.
Bien entendu, laissées à leurs propres forces ces tendances amènent à une faillite inéluctable du
style de celle de l’Union Soviétique.
Le choix devient de plus en plus clair donc : d’un coté la faillite, de l’autre le sursaut.
Mais le moins que l’on puisse dire c’est que l’offre politique dans notre pays ne semble pas avoir
pris conscience de l’importance de l’enjeu.
Grace à Dieu, le futur est inconnaissable, et le pire n’est jamais sur.
Mais il est légitime d’être inquiet.