LES TUMEURS OSSEUSES CHEZ L`ENFANT

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LES TUMEURS OSSEUSES CHEZ L`ENFANT
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LES TUMEURS OSSEUSES
CHEZ L’ENFANT
INTRODUCTION
Le praticien est souvent désorienté, voire
angoissé devant une tumeur osseuse, et à
juste raison, car le droit à l’erreur
n’existe guère : c’est de la conservation
du membre et de la vie qu’il peut être
question. Heureusement, la majorité des
tumeurs primitives sont bénignes.
Apprendre les tumeurs, c’est avant tout
écouter le patient et regarder les
radiographies.
APHORISMES
- Jamais de traitement sans diagnostic,
c'est-à-dire pas de traitement sans
biopsie.
- Ne pas entreprendre de traitement sans
la certitude de pouvoir assurer la suite
techniquement,
intellectuellement,
psychologiquement,
quelque
soit
l'évolution.
- Ne pas considérer l'anatomopathologie
comme une science divinatoire.
Donner des renseignements cliniques.
Joindre
une
radiographie
au
prélèvement.
- Ne pas assimiler la réponse de
l'anapath à un oracle incontestable : la
confronter au contexte, la discuter avec
son auteur, recommencer si nécessaire la
biopsie.
1) CLASSIFICATION
On distingue 3 grands groupes : tumeurs
primitives bénignes et malignes, lésions
pseudo-tumorales
et
tumeurs
secondaires.
1.A - TUMEURS PRIMITIVES
La classification tient compte également
de la différenciation tissulaire.
- os :
tumeurs bénignes : ostéomes ostéoïdes,
ostéoblastomes ;
tumeurs malignes : ostéosarcomes.
- cartilages :
tumeurs
bénignes
:
chondromes,
exostoses
ostéogéniques,
chondroblastomes,
fibromes
chondromyxoïdes;
tumeurs malignes : chondrosarcomes
- tissus conjonctifs :
tumeurs bénignes : fibromes nonossifiants ;
tumeurs malignes : fibromes desmoïdes
et fibrosarcomes.
- moelle osseuse :
tumeurs malignes : sarcomes d' Ewing,
lymphomes
dit
de
Parker,
myéloplasmocytaire et lymphosarcome.
- vaisseaux :
tumeurs
bénignes
:
hémangiome,
lymphangiomes, tumeurs glomiques ;
tumeurs malignes : hémangios péricito,
angiosarcome
- graisse :
tumeurs bénignes : lipomes ;
tumeurs malignes : liposarcomes
- tissu nerveux
tumeur bénigne : neurofibrome
- tumeurs à cellules géantes :
grade 1 bénin, grade 2 à 4 malin.
2
1.B - LESIONS PSEUDO-TUMORALES :
ostéites, ostéomyélites
1.C - BASE DE LA CLASSIFICATION DE
ENNEKING
1- Le grade
G0:
- histologie bénigne
- radiologiquement bien limitée par un
liseré de condensation
- cliniquement « encapsulée »
Figure 1 abcès chronique de l’aile iliaque
infarctus,
Figure 2 Infarctus osseux
kyste,
G1 :
- faible malignité histologique
- radiologiquement limites irrégulières,
mais encore nettes, non cernées par un
liseré de condensation
- cliniquement,
croissance
lente,
persistance d’une capsulé réactionnelle
G2 :
- histologiquement, haute malignité
- radiologiquement, lésion destructrice
invasive, à limites floues
- cliniquement diffusion métastatique.
2- La topographie
T 0,
0 capsule intacte : intra capsulaire et
intracompartimentale,
T1
extra
capsulaire
mais
intracompartimentale,
T2
extra
capsulaire,
et
extracompartimentale,
3- Diffusion
Diffusion métastatique
M 0 pas de diffusion,
M1 diffusion métastatique.
Figure 3 hydatidose
hydatidose humérale
histocytoses x,...
3
2) TUMEURS BENIGNES
2.1 L'OSTEOME OSTEOIDE
L'OSTEOBLASTOME :
ET
ET
histologiquement
zone
centrale
condensante : nidus,
touche l'enfant et l'adulte jeune, 3
hommes pour 1 femme,
siège dans 2/3 des cas sur les grands os
des membres pour l’ostéome ostéoïde et
l'ostéoblastome à 40% sur le rachis.
C'est une douleur à paroxysme nocturne,
calmée par l'aspirine, attitude fréquente
de scoliose antalgique, sans rotation ou
lombo-sciatique et névralgie cervicobrachiale.
Figure 5 Exostose isolée en fin de croissance
Traitement : n'opérer que les exostoses
mal tolérées avec préjudice esthétique,
gêne du jeu articulaire, troubles de
compression.
N'opérer si possible qu'en fin de
croissance.
La dégénérescence est exceptionnelle 1%.
2.3 CHONDROMES
Figure 4 Ostéome ostéoïde cortical du fémur
l'ostéome ostéoïde est de siège cortical ;
l'ostéoblastome siège en zone spongieuse.
Traitement : biopsie et exérèse en bloc.
2.2 EXOSTOSE OSTEOGE
OSTEOGENIQUE
NIQUE :
Tumeur cartilagineuse développée à
partir du cartilage de conjugaison des os
d’ossification enchondrale.
Le chondrome unique est appelé solitaire
Le chondrome multiple est la maladie
d’Ollier.
en général héréditaire,
- formes multiples = maladie exostosante
Tumeur bénigne la plus fréquente : 45%,
apparaît chez l'enfant, la croissance cesse
à l'âge adulte, localisation : zone
métaphysaire des os longs, transmission
dominante : autosomique (50% des
enfants).
Découverte
fortuite,
la
radiologie montre une image bien
délimitée rattachée à l'os voisin.
Figure 6 chondromatose mono mélique
4
Associé à des angiomes cutanés : maladie
de MAFFUCCI
2.5
TUMEURS
A
CELLULES
GEANTES ( tumeur à myéloplaxe)
10 % des tumeurs bénignes
Découverte chez l’enfant et l’adolescent.
85 % os longs.
Déformation des membres, boiterie,
tuméfaction.
Tumeur épiphysaire avec cavité brunchamois histologiquement composée de
cellules volumineuses multinuclées.
7 % des tumeurs primitives des os.
Adulte jeune : 20-40 ans.
Radiologiquement : ostéolyse bien
enclose avec corticale amincie
Traitement, curetage exérèse en cas de
gêne fonctionnelle.
2.4 FIBROME NON OSSIFIANT
Dystrophie osseuse bénigne constituée
par un îlot de tissu conjonctif se
développant dans l’os métaphysaire, de
siège intra ou sous-cortical.
Figure 8 Degré 2 découverte à 24 ans
A la limite entre bénignité et malignité.
Fréquence
des
récidives
et
transformation maligne.
Traitement : curetage comblement,
résection, amputation.
3) LES TUMEURS MALIGNES
3.1 OSTEOSARCOME
Figure 7 découverte radiologique fortuite
Maladie de l’enfant et de l’adolescent
souvent
asymptotique,
découverte
systématique d’un examen radiologique.
Siège métaphyse des os longs.
Radiologie : lacune claire parfois
multiloculaire, au voisinage du cartilage
de conjugaison.
Tumeur
maligne
squelettogène,
produisant de l’os tumoral.
30 % des tumeurs malignes primitives
Essentiellement enfant.
Probablement d’origine virale.
Cliniquement, douleur au voisinage
d’une articulation : genou ou épaule,
parfois discrète tuméfaction, au début,
l’état général est conservé et il n’y a pas
d’adénopathie. La fracture révélatrice est
peu fréquente du fait de l’atteinte
métaphysaire.
Radiologiquement : zone lytique dans le
spongieux
métaphysaire,
réaction
5
périostée lamellaire, rupture de la
corticale, feu d ’herbes et ossification des
parties molles.
Il existe des formes lytiques ou
condensantes.
La RMN recherche les métastases
Traitement
:
chimiothérapie
Adriamycine,
cis-platinium,
méthothrexate, résection et conservation.
La survie à 5 ans est de 50 %. Il faudra
durant cette période dépister les
métastases essentiellement pulmonaires.
3.2 CHONDROSARCOME
Tumeur maligne primitive de l’os
produisant du cartilage tumoral. Il est
primitif dans 90 % des cas.
Elles correspondent à 25 % de l’ensemble
des tumeurs osseuses. Il survient le plus
souvent vers 30 ans.
Dans 50 % des cas, l’atteinte s’effectue
au niveau du tronc et des ceintures, dans
les autres cas, il touche un grand os des
membres et spécialement la métaphyse.
Douleur et tuméfaction inaugurent la
symptomatologie. La tuméfaction est
ferme,
peu
douloureuse
et
peu
volumineuse. Il s’agit parfois d’une
dégénérescence d’une exostose.
Le bilan biologique est normal au début,
notamment la V.S.
RADIOLOGIQUEMENT
le chondrosarcome central comporte des
géodes irrégulières avec atteinte de la
corticale. La réaction périostée est rare.
Le chondrosarcome périphérique se
développe immédiatement dans les
parties molles. La tumeur est plus ou
moins calcifiée avec parfois aspect en
choux-fleurs.
La biopsie est difficile à interpréter.
La diffusion se fait par voie hématogène
avec notamment localisation au poumon.
La chirurgie d’exérèse est la seule
possibilité thérapeutique. Elle permet 70
% de survie.
3.3 FIBROSARCOME
Le fibrosarcome osseux se développe au
dépend au tissu conjonctif fibreux
interstitiel de l'os sans production d'os ou
de cartilage tumoral. Il représente 5%
des tumeurs malignes primitives, le plus
souvent sur lésion osseuse préexistante,
l'âge moyen de découverte se situe vers
40 ans. Il touche les os longs près du
genou, au niveau de la région
métaphysaire.
La douleur est fréquente d'allure
mécanique. Une tuméfaction sans
adénopathie
peut
apparaître.
Les
fractures
spontanées
inaugurales
surviennent dans 1/3 des cas.
Radiologiquement on note une ostéolyse
médullaire, mono ou poly-géodique avec
un aspect vermoulu.
La diffusion se fait par voie hématogène
avec localisation pulmonaire.
Le traitement chirurgical est le plus
efficace avec résection tumorale large et
amputation
ou désarticulation du
membre. La tumeur est peu radio
sensible.
La
chimiothérapie
est
d'efficacité discutable.
Le pronostic est sévère, la moyenne de
survie est de 2 ans, le taux de survie à 5
ans de 30%.
3.4 HISCIOCYTOFIBROME
Tumeur maligne primitive dont la
prolifération
associe
des
cellules
histiocytaires et fibroblastique. Tumeur
rare apparaissant après 50 ans à point
de départ métaphysaire sur les os longs.
L'extension locale est importante et la
survenue de métastases précoce.
Traitement par exérèse large et
chimiothérapie.
3.5 SARCOME D'EWING
6
Sarcome
à
cellule
ronde
mésenchymateuse primitive. Il survient
dans 90% des cas avant 30 ans, il touche
aussi bien les os plats que les os longs.
Les douleurs sont souvent le seul
symptôme, parfois associés à une
tuméfaction des parties molles. Elévation
de la vitesse de sédimentation.
Radiologiquement ostéolyse, malignité
avec réaction périostée et destruction
irrégulière de la corticale osseuse. Aspect
en bulbe d'oignon. Extension par voie
hématogène au niveau du poumon,
l'envahissement des parties molles péri
osseuse est fréquent. La chimiothérapie
doit intervenir en premier afin de réduire
le
volume
tumoral
primitif.
La
radiothérapie permet un contrôle local.
La chirurgie intervient en dernier.
Actuellement la survie à 5 ans pour les
formes non métastatiques est de 60%.
3.6 MYELOME
Hémopathie maligne à localisation
osseuse avec prolifération de plasmocytes
entraînant une ostéolyse.
Affection rare localisée à la voûte
crânienne, côtes et rachis dans 3/4 des
cas.
Douleur osseuse au niveau de l'ostéolyse
avec parfois irradiation radiculaire.
Douleur
nocturne
rebelle
aux
médicaments classiques. Accélération de
la vitesse de sédimentation, parfois
tuméfaction osseuse superficielle. Au
cours de l'évolution possibilité d'une
altération de l'état général lié au déficit
immunitaire.
Le bilan biologique met en évidence une
immono globuline qui confirme le
diagnostic.
Radiologiquement la lésion la plus
typique est une géode à l'emporte pièce
sur le rachis image d'hyper transparence
osseuse évoquant une ostéoporose sévère.
Le
traitement
repose
sur
la
chimiothérapie
associée à de la
radiothérapie. La chirurgie traite les
fractures
pathologiques
compressions médullaires.
moyenne est de 18 mois.
ou
les
La survie
4) LES LESIONS PSEUDO-TUMORALES
Leur
diagnostic
repose
sur
la
confrontation de l’ensemble des données
cliniques, radiologiques, biologiques et
morphologiques.
4.1
OSTEOMYELITES
OSTEITES :
ET
Attention aux formes chroniques, sans
anomalie de température avec NF et VS
normales.
4.2 DYSPLASIE FIBREUSE
Lésion intra-osseuse bénigne du tissu
osseux, pouvant intéresser os longs et os
plats, refoulant et amincissant les
corticales.
Forme mono ou polyostotique.
Congénitale
rare
dépistée
durant
l’enfance.
Localisation variée, os longs et os plat 90
% fémur
Cliniquement, déformation, tuméfaction,
fracture pathologique. Taches « café au
lait »
Puberté précoce.
Traitement des fractures pathologiques
Dégénérescence exceptionnelle.
4.3 HYPERPARATYROÏDISMES
HYPERPARATYROÏDISMES
Atteinte osseuse dans 30% des cas, type
perte de substance avec corticales
amenuisées.
4.4
TUMEURS
A
CELLULES
CELLULES
GEANTES
Petits os et vertèbres, plutôt chez la
femme jeune : géode, lyse et fracture
pathologique.
7
Le diagnostic sera histologique.
4.5 KYSTES SOUSSOUS-CHONDRAUX
CHONDRAUX
ostéolyses avec amenuisement de la
corticale,
4.6 INFARCTUS OSSEUX
parfois au contact d'un sarcome.
4.7
L'OSTEOSCLEROSE
SEGMENTAIRE
CORPS
S
DES
CORP
VERTEBRAUX
prédominant au niveau de la partie
antéro-inférieure
de
L3-L4,
sans
altération du contour vertébral, et sans
lésion discale.
4.8 LE CAL OSSEUX
4.9 GRANULOME EOSINOPHILE
ET HISTIOCYTOSE X
Le granulome éosinophile est la forme
habituelle de l’histiocytose X
(autres formes Letterer Siwe et Hand
Schuller-Christian)
Maladie de l’enfant aussi fréquente que
le kyste solitaire
Clinique : douleur, cyphose
Radiologiquement,
ostéolyse
avec
effondrement d’un corps vertébral.
L’évolution spontanée est favorable.
La chirurgie s’adresse aux complications
d’effondrement
4.10
KYSTES
ESSENTIELS
OSSEUX
Dystrophie de croissance, la plus
fréquente chez l’enfant.
Pathogénie discutée : traumatique ou
enzymatique à partir du cartilage de
conjugaison.
Figure 9 Kyste essentiel
Traitement
corticoïdes.
:
injection
locale
de
4.11 KYSTE ANEVRISMAL
Dystrophie osseuse, bénigne, solitaire
Adolescente
60 % os longs, 25 % rachis (caractère
extensif et destructeur).
Douleur permanente, scoliose;
Eradication chirurgicale au niveau du
rachis.
5) LES TUMEURS SECONDAIRES OU
METASTASES OSSEUSES
La métastase osseuse ou cancer
secondaire
des
os
est
liée
au
développement dans le squelette de
cellules cancéreuses provenant d'une
tumeur mère. Se sont les tumeurs les
plus fréquentes de l'adulte ; elles sont
exceptionnelles chez l'enfant. Elles
peuvent compliquer un cancer primitif
déjà connu. L'intervalle de temps écoulé
pouvant aller jusqu'à 10 ans, dans 2/3
des cas la métastase osseuse révèle le
cancer primitif.
La douleur par tension intra-osseuse est
très vive, elles sont à recrudescence
nocturne, persistent malgré le repos et
8
résistent aux antalgiques habituels. La
vitesse de sédimentation est les
phosphatases alcalines sériques sont
élevées.
Radiologiquement l'ostéolyse est la plus
fréquente, mais il existe également des
formes condensantes avec aspect d'os de
marbre ou vertèbre ivoire.
La scintigraphie osseuse précise les
localisations.
Le cancer du sein est la cause la plus
fréquente chez la femme et de tumeur
prostatique
chez
l'homme.
Les
métastases osseuses influencent peu le
pronostic vital, mais menace les
fonctions motrices.
6) THERAPEUTIQUE : Les amputations
Confrontation médecin/malade avant
l'amputation :
Psychologiquement le terme amputation
complique sérieusement le terme cancer.
1°) Avant l’amputation :
Il faut bien préciser la perte fonctionnelle
résultant de l'amputation et si possible le
mettre en contact avec d'autres patients
dans la même situation.
2°) Dans le jour qui suit l'amputation :
Apparition de sensation de membre
fantôme et d'irradiation plus ou moins
douloureuse à traiter par chimiothérapie
antidépressive.
Au centre d'appareillage les limites
fonctionnelles de la prothèse sont
rapidement perçues par les patients et
doivent être prévenues pour éviter
l'impression d'être amputé une seconde
fois.
3°) Dans les mois et les années qui
suivent, la préoccupation concerne
essentiellement l'évolution de la maladie
cancéreuse, l'amputation occupant la
seconde place.
9
EN CONCLUSION
- Ne jamais leurrer le malade en lui
faisant croire que la prothèse va
remplacer le membre perdu, lui faire
comprendre qu'on ne pourra lui donner
qu'un outil plus ou moins fonctionnel.
- Etre attentif à l'apparition des
phénomènes
douloureux
de
déafférentation
consécutif
à
l'amputation, et essayé d'en diminuer
l'intensité.
- Etre à l'écoute du patient.

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