Etats-Unis : l`heure du bilan - Etudes économiques du Crédit Agricole

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Etats-Unis : l`heure du bilan - Etudes économiques du Crédit Agricole
N° 132 – 18 septembre 2009
Etats-Unis : l’heure du bilan

Voilà un an que Lehman Brothers a fait faillite. A
cette occasion, MM. Bernanke et Obama dressent, dans
deux discours qui se font écho, un tableau de ce qui s’est
passé, ce qui a été fait et ce qu’il reste à faire.

Grâce à l’agressivité, la nouveauté et la coordination
des actions de l’ensemble des autorités mondiales, le pire
a été évité. Mais les signes actuels de reprise ne doivent
pas faire oublier l’impératif de la réforme, rappellent-ils à
l’unisson.

Le président Obama a lancé trois appels, à
l’attention à la fois du secteur financier, du Congrès et
des membres du G20, afin de réformer de manière
« énergique » et profonde les règles du système financier
mondial.
Une date symbolique
Le lundi 15 septembre 2008, l’effondrement de l’une des
quatre plus prestigieuses banques d’affaires américaines
a failli emporter dans sa chute l’ensemble du système
financier, n’eût été l’intervention agressive des autorités
monétaires et financières de par le monde. La panique
financière qui a suivi jusqu’en octobre n’en a pas moins
entraîné une récession historiquement sévère. La plus
sévère depuis la Grande Dépression en ce qui concerne
les Etats-Unis, et la référence n’est pas anodine.
Un an plus tard, deux figures emblématiques des EtatsUnis, le président Barack Obama et le gouverneur de la
Fed Ben Bernanke, reviennent sur le déroulement de cette
crise, pour en rappeler non seulement la sévérité, mais
aussi le fait que, si l’intervention des gouvernements et
des banques centrales a permis d’éviter le pire, il reste
encore beaucoup à faire pour ne pas reproduire les
erreurs qui ont conduit à cette crise. Les deux discours se
font écho. Lorsque Ben Bernanke salue la rapidité de la
réponse à l’échelle mondiale, Barack Obama rappelle
haut et fort qu’il n’est pas encore l’heure des
réjouissances, bien au contraire.
La situation économique mondiale, et américaine en
particulier, malgré ses signes récents d’embellie, reste
fragile et nombreux sont les défis à relever pour garantir
une croissance durable. Aussi, afin d’éviter de se
retrouver une nouvelle fois au bord du précipice, le
président Obama a lancé trois appels. Le premier
concerne le secteur financier afin qu’il n’entrave pas la
réforme de la régulation mise en œuvre par
l’administration. Le second s’adresse au Congrès pour
qu’il adopte, avant la fin de l’année, ces projets de loi. Le
troisième appel invite les dirigeants du G20 à réformer de
manière « énergique » et commune les règles du système
financier mondial.
Une année de crise
Dans son discours, délivré le 15 septembre à la Brookings
Institution et identique à celui de Jackson Hole du 21
août, Ben Bernanke revient sur la rapidité et la brutalité
avec laquelle les évènements se sont enchaînés, et
notamment les conséquences de la faillite de Lehman
Brothers. Le 15 septembre 2008, cette célèbre banque
d’affaires américaine annonce en effet sa faillite,
entraînant une panique financière sans précédent qui
pétrifia le système financier. Depuis, plus de cent banques
américaines ont mis la clef sous la porte et le nombre ne
cesse de grossir. Au tournant 2008-2009, la tourmente
s’abat sur la sphère réelle : le krach boursier, le
resserrement brutal et généralisé des conditions de crédit
et la chute de confiance de l’ensemble des agents
économiques entraînent une contraction de l’activité
particulièrement sévère partout dans le monde.
Rapidité, agressivité et coordination des actions : un
gage d’efficacité
Pour faire face à l’intensification de la crise, les autorités
américaines et mondiales se sont rapidement mobilisées.
La liste n’est pas exhaustive mais Ben Bernanke retient les
dates suivantes. Le 19 septembre 2008, afin de restaurer
les fonctions basiques et vitales des segments critiques du
système financier, en particulier le marché interbancaire,
la Réserve Fédérale instaure de nouvelles facilités de
financement et étend ses lignes de swaps avec les autres
banques centrales. Le 3 octobre, la faillite de Lehman
ayant mis en exergue le manque de liquidités des
banques pour faire face aux crises, le Congrès américain
débloque 700 milliards de dollars pour le Troubled Asset
Relief Program, (TARP). Le 8 octobre, dans une action
coordonnée, la Réserve fédérale et cinq des principales
banques centrales mondiales abaissent leur taux directeur
de 50 points de base. Le 10 octobre, les pays du G7
annoncent qu’ils s’engagent à travailler ensemble et de
manière coordonnée afin de garantir la stabilité du
système financier international. Les jours suivants,
l’ensemble des pays mettent en place des plans de
relance.
Cette forte et sans précédente collaboration
internationale a prouvé son efficacité. L’ensemble de ces
actions et la volonté affichée d’agir coûte que coûte ont
fini par enrayer la spirale baissière et rétablir la confiance
qui faisait si cruellement défaut. Cela n’a cependant pas
pu empêcher la crise financière de dégénérer en crise
économique majeure. Aussi, afin d’y faire face, la Réserve
Fédérale, et les autres banques centrales, ont élargi plus
encore leur arsenal de mesures de politique monétaire,
conventionnelles comme non conventionnelles.
Le 10 février 2009, Timothy Geithner, le nouveau
secrétaire d’Etat au Trésor américain, et les régulateurs
concernés, mettent sur pied une ultime stratégie visant à
Internet : http://www.credit-agricole.com - Etudes Economiques
Hélène BAUDCHON
helene.baudchon@ credit-agricole-sa.fr
Cécile DUQUESNAY
[email protected]
traiter de front l’ensemble des problèmes : le Financial
Stability Plan prend ainsi la relève du TARP. Il se décline
en quatre axes d’intervention : le Capital Assistance
Program (CAP) et ses injections de capitaux sous
conditions (les fameux stress tests), le Public Private
Investment Program (PPIP) pour sortir des bilans des
banques leurs actifs toxiques, l’Homeowner Affordability
and Stability Plan pour enrayer la spirale des saisies
immobilières, la Consumer and Business Lending
Initiative pour relancer la titrisation des prêts à la
consommation et aux PME.
Aujourd’hui, où en est-on ?
Aujourd’hui, l’orage semble passé, après deux ans de
crise, celle-ci ayant commencé début 2007 avec les
premiers signes de difficultés du marché du subprime. Les
marchés actions sont repartis à la hausse, les marchés
interbancaires ont retrouvé un fonctionnement en apparence normal (les banques centrales maintenant la
perfusion). Les indicateurs économiques ne sont plus en
chute libre et les rythmes de contraction de l’activité ont
sensiblement ralenti. Certains pays semblent déjà sortis de
récession, d’autres sont en train de s’en extirper.
Les perspectives d’un retour à la croissance à court
terme semblent donc bonnes selon l’expression même de
B. Bernanke. La collaboration internationale et l’ensemble
des mesures adoptées ont évité l’effondrement du système
financier international. Cependant, pour reprendre cette
fois une formule du président Obama, « le retour à la
normalité ne doit pas conduire à la complaisance ». C’est
pourquoi MM. Obama et Bernanke insistent tant sur la
fragilité de la reprise naissante que sur les nombreux défis
qui restent à relever. « On revient de loin. Surtout, ne
l’oublions pas. Tâchons de faire en sorte que cela ne se
reproduise plus » : tel est le message de ces deux
personnages clés en cet anniversaire symbolique.
soutenue ». Et de rappeler les propositions détaillées par
son administration en juin dernier pour mettre fin aux
fragilités, failles et doublons du système. Il souhaite à la
fois le renforcement du contrôle exercé par la Réserve
Fédérale sur les grandes institutions financières, la
création d’une autorité permettant au gouvernement de
reprendre et de disposer des grandes institutions en
difficulté et enfin, la mise en place d’une nouvelle
agence de protection des consommateurs qui
superviserait les crédits immobiliers et à la
consommation. En effet, si M. Obama pointe du doigt les
« excès incontrôlés » de Wall Street, il reconnaît
également que la crise n’est pas du seul fait de la finance.
C’est la « défaillance collective du sens de la
responsabilité à Washington, à Wall Street et dans toute
l’Amérique qui a conduit au quasi effondrement du
système financier il y a un an. »
… mais elle s’annonce difficile…
Si la faillite de Lehman Brothers a exposé les défauts du
système de régulation et de surveillance bancaire
américain, faire adopter cette réforme par le Congrès
s’annonce difficile, alors que déjà, l’autre grande priorité
du moment, la réforme de la santé, se heurte à de
sérieuses résistances parlementaires. Barack Obama
invite ainsi les firmes de Wall Street à un peu d’autodiscipline et à agir dès maintenant : elles ne doivent pas
attendre qu’une loi soit adoptée pour réformer leur
système de rémunération.
…à dix jours du G20
Tout juste un an après la faillite de Lehman, mais aussi dix
jours avant le G20 de Pittsburgh, Barack Obama en a
également profité pour rappeler la nécessité d’un effort
commun « énergique » afin de réformer en profondeur
le système financier mondial, l’objectif étant de conclure
un accord avant fin 2010. L’heure est à la réforme…
A l’occasion de son allocution de ce lundi 14 septembre
au Federal Hall à New York, le président Obama a repris
l’initiative et martelé le caractère impératif de la réforme
financière. « Aujourd’hui, l’heure est à la transition, des
politiques de sauvetage à celles du retour de la croissance
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