passerelle du pont des arts

Passerelle du pont des arts
de Jean-Louis Vallas
PAS de gavotte, un entrechat :
Le pont des Arts danse et s’en va
Du Louvre en robe de Degas
A la coupole Mazarine.
Ce pont-là, tu m’as dit, Jean-Louis, ça gambille,
Ça gambille, y a pas, ce pont-là ;
Et moi, t’ai-je dit, la gentille
File-monôme, je vois là,
De petits rats faisant des pointes,
Des pointes, tiens, comme voilà :
Un pilier blanc, deux jambes jointes
A mollets ronds de pierre lisse ;
Deux mollets ronds, un petit rat,
Un coup de rein, deux entrechats,
Un entrechat, deux arches-cuisses,
Deux arches-cuisses qu’on devine
Sous la tarlatane de fer
Qui sur chacune se soulève,
Noire et légère.
Bouts de tutus à bouts de doigts,
Sortis d’un tableau de Degas
S’en vont, dansant, les petits rats
A la coupole où ressuscitent
De joie, à voir leurs frais tutus,
Ces beaux messieurs de l’Institut.
Bouts de baisers à bout de bancs,
Passerelles de vos amours,
Bouts de vingt ans !
Essais d’amour, rêves de gloire
C’était trop tôt, est-ce trop tard ?
Passerelle du pont des Arts,
Quand je vous vois, j’ai le cafard.
Extrait du recueil « Pont de Paris », ed. Albin Michel, 1951.