Conseil Économique et Social

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Conseil Économique et Social
NATIONS
UNIES
E
Conseil Économique
et Social
Distr.
GÉNÉRALE
E/CN.4/2002/SR.8
16 septembre 2002
Original: FRANÇAIS
COMMISSION DES DROITS DE L’HOMME
Cinquante-huitième session
COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 8e SÉANCE
tenue au Palais des Nations, à Genève,
le jeudi 21 mars 2002, à 15 heures
Président: M. JAKUBOWSKI (Pologne)
SOMMAIRE
LE DROIT DES PEUPLES À DISPOSER D’EUX-MÊMES ET SON APPLICATION AUX PEUPLES
ASSUJETTIS À UNE DOMINATION COLONIALE OU ÉTRANGÈRE, OU À L’OCCUPATION
ÉTRANGÈRE (suite)
LE RACISME, LA DISCRIMINATION RACIALE, LA XÉNOPHOBIE ET TOUTES LES FORMES
DE DISCRIMINATION
______________
Le présent compte rendu est sujet à rectifications.
Les rectifications doivent être rédigées dans l’une des langues de travail. Elles doivent être
présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il
convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section
d’édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.
Les rectifications aux comptes rendus des séances du Comité seront groupées dans un rectificatif
unique qui sera publié peu après la session.
GE.02-11994 (EXT)
E/CN.4/2002/SR.8
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La séance est ouverte à 15 h 10.
LE DROIT DES PEUPLES À DISPOSER D’EUX-MÊMES ET SON APPLICATION AUX PEUPLES
ASSUJETTIS À UNE DOMINATION COLONIALE OU ÉTRANGÈRE, OU À L’OCCUPATION
ÉTRANGÈRE (point 5 de l’ordre du jour) (suite) (E/CN.4/2002/19 et 20 ; E/CN.4/2002/NGO/31, 47, 107,
113, 125, 128, 161, 198 et 199)
1.
M. AIDEED (Observateur d’Oman), rappelant que le droit à l’autodétermination est un pilier du
système international des droits de l'homme, déplore que le Gouvernement israélien refuse de respecter ce
droit et continue de recourir à des pratiques inhumaines dans les territoires palestiniens, contrairement aux
multiples résolutions adoptées par la communauté internationale. Le droit de résister à l’occupation
étrangère est un droit sacré et Oman a exprimé son appui au peuple palestinien dans sa lutte légitime pour
recouvrer son droit à disposer de lui-même. La communauté internationale doit agir rapidement avant
qu’il ne soit trop tard et la résolution 1397 (2002) du Conseil de sécurité constitue à cet égard une bonne
base. Le dialogue doit être à double sens si l’on veut permettre à toute la région de retrouver la stabilité et
aux Palestiniens d’exercer leur droit légitime à l’autodétermination.
2.
M. SCHURTI (Observateur du Liechtenstein), soulignant l’importance que continue de revêtir le
droit à l’autodétermination pour l’ensemble des questions relatives aux droits de l’homme, est convaincu
qu’une reconsidération de ce droit dans une optique plus large et novatrice permettrait d’apporter des
solutions nouvelles aux problèmes persistants dans le domaine des droits de l'homme. L’initiative sur
l’autodétermination qu’a présentée le Liechtenstein une dizaine d’années auparavant prône précisément
une approche plus ouverte et plus souple de la question, en constatant qu’il existe d’autres modèles
d’autodétermination que le schéma classique, qui sont fondés par exemple sur des formes d’autonomie ou
d’administration autonomes et qui ont tous en commun de ne pas aller jusqu’à la sécession et, en
permettant des degrés satisfaisants d’auto-expression, d’apaiser les revendications d’indépendance. Le
droit à l’autodétermination peut s’exercer, selon les circonstances et la situation historique données, dans
le cadre d’élections régulières et libres ou par la participation de la population au processus de prise de
décisions.
3.
L’initiative du Liechtenstein sur l’autodétermination est essentiellement un instrument de
prévention puisqu’en s’efforçant de remédier à des tensions internes par le dialogue compte tenu des
aspirations et des intérêts de toutes les parties concernées, on peut dans bien des cas empêcher que ces
tensions ne dégénèrent en conflit violent. Le droit à l’autodétermination a joué un rôle central dans le
processus de décolonisation. Ce processus, à quelques rares exceptions près, étant à présent terminé,
l’autodétermination ne devrait plus équivaloir automatiquement à l’indépendance. Mais ce droit demeure
fondamental et il doit être adapté à la période postcoloniale pour pouvoir contribuer plus utilement à la
protection de tous les autres droits de l'homme.
4.
M. BEN SALEM (Observateur de la Tunisie), s’associant pleinement à la déclaration faite au titre
du point 5 de l’ordre du jour par la délégation égyptienne au nom du Groupe arabe, souligne la persistance
du déni du droit fondamental à l’autodétermination du peuple palestinien, encore assujetti à l’occupation
étrangère en dépit des nombreuses résolutions internationales adoptées sur la question. Le mépris total de
ce droit par Israël est attesté par les événements tragiques qui se produisent dans les territoires
palestiniens, lesquels sont le théâtre d’atteintes quotidiennes aux droits les plus fondamentaux. La Tunisie
tient à réaffirmer son soutien indéfectible à la lutte du peuple palestinien pour le recouvrement de tous ses
droits, y compris le droit de créer un État indépendant et souverain, avec pour capitale Al Qods. Elle est
déterminée à appuyer tous les efforts de paix dans la région, sachant qu’une paix juste, durable et globale
implique qu’Israël se retire totalement et inconditionnellement de tous les territoires occupés illégalement.
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5.
La délégation tunisienne espère que les récentes démarches pour sortir de l’impasse seront
couronnées de succès et qu’une suite concrète sera donnée à la résolution 1397 (2002) du Conseil de
sécurité, qui pour la première fois a évoqué le principe de la création d’un État palestinien. La
communauté internationale se doit d’assumer ses responsabilités pour que le peuple palestinien puisse
enfin réaliser ses aspirations.
6.
M. AL-THANI (Observateur du Qatar) souscrit à la déclaration faite par l’Égypte au nom du
Groupe arabe et souligne que l’atteinte au droit à l’autodétermination est une atteinte à tous les autres
droits de l'homme. Le Qatar est extrêmement préoccupé par les violations et les destructions que les forces
israéliennes continuent de commettre dans les territoires occupés, au mépris flagrant des instruments
internationaux, en particulier de la quatrième Convention de Genève de 1949, des résolutions de l’ONU et
des accords conclus.
7.
La résistance palestinienne à l’occupation ne saurait être considérée comme du terrorisme : il s’agit
d’une lutte légitime pour la dignité de la personne humaine et la défense des libertés fondamentales. Israël
doit comprendre que le peuple palestinien a le droit d’exister sur son territoire à l’intérieur des frontières
d’un État indépendant ayant pour capitale Al Qods, et il doit prendre des mesures concrètes pour appliquer
les différentes résolutions sur la question et accepter les principes de la terre contre la paix et du retour des
réfugiés. Il n’y aura pas de paix tant que les Palestiniens n’auront pas recouvré tous leurs droits.
8.
M. HASSAM (Observateur du Yémen) souscrit également à la déclaration de l’Égypte.
L’occupation des territoires palestiniens par Israël, qui recourt aux pires méthodes militaires, interpelle la
conscience de l’humanité. Au mépris de toutes les règles du droit international, Israël poursuit sa politique
de colonisation afin de modifier la situation dans la région. Ainsi que l’a déclaré devant la Commission le
Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne l’occupation ne doit pas être récompensée, mais doit être
punie à l’instar du terrorisme. Il faut amener Israël à obtempérer aux injonctions de la communauté
internationale et à appliquer les résolutions adoptées en commençant par mettre fin à son occupation et en
permettant au peuple palestinien de disposer de lui-même.
9.
M. MADI (Observateur de la Jordanie) s’associe à la déclaration faite par l’Égypte au nom du
Groupe arabe et souligne que la dangereuse escalade de la violence au Moyen-Orient découle directement
de l’occupation militaire israélienne. En privant le peuple palestinien de son droit à l’autodétermination,
Israël a automatiquement amené celui-ci à défendre son droit internationalement reconnu à la résistance.
Réitérant son appui sans réserve à la réalisation par le peuple palestinien de son droit à l’autodétermination
et à l’établissement d’un État palestinien indépendant avec Jérusalem pour capitale, la Jordanie se félicite
de la récente initiative saoudienne ainsi que de l’adoption de la résolution 1397 (2002) du Conseil de
sécurité. Elle demande au Gouvernement israélien de prendre les mesures nécessaires pour mettre fin à la
violence et de reprendre les pourparlers de paix sur la base des résolutions 242 (1967) et 338 (1993) du
Conseil de sécurité et des principes de la terre contre la paix ainsi que de la Conférence de Madrid de
1991, étant entendu que la relance du processus de paix exigera aussi la mise en œuvre de l’Accord Tenet
et des recommandations de la Commission Mitchell.
10. M. KASHMIRI (Union européenne de relations publiques) fait observer que l’État de Jammu-etCachemire, dont l’existence en tant qu’entité politique distincte remonte au moins au VIIe siècle, était
jusqu’en octobre 1947, un État souverain multiethnique et multireligieux, et que sa politique présente
toutes les caractéristiques requises pour prétendre à exercer son droit à l’autodétermination tel qu’il est
défini par les résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité et par les Pactes
internationaux relatifs aux droits de l'homme. Ce droit lui est d’ailleurs conféré par la résolution en date du
13 août 1948 de la Commission des Nations Unies pour l’Inde et le Pakistan, dans laquelle le
Gouvernement indien et le Gouvernement pakistanais ont réaffirmé leur souhait que le statut futur de
l’État de Jammu-et-Cachemire soit déterminé conformément aux vœux de la population. Or, le Pakistan
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n’a pas appliqué les dispositions de cette résolution et le peuple cachemirien demeure privé de son droit
légitime à l’autodétermination, faisant les frais du différend interminable et meurtrier qui oppose l’Inde et
le Pakistan.
11. Mme SONG (Libération) appelle l’attention de la Commission sur trois régions dans lesquelles la
population est privée de son droit à l’autodétermination. La Papouasie occidentale, tout d’abord, où le déni
de ce droit demeure la cause des violations des droits de l'homme que commettent impunément depuis
plus de trois décennies les forces de sécurité indonésiennes. L’échec catastrophique du processus de
décolonisation, qui n’a pas permis à la population de la Papouasie occidentale d’exercer comme prévu son
droit à l’autodétermination en 1969, a été récemment reconnu par l’ONU et une campagne internationale
se déroule actuellement à New York pour convaincre le Secrétaire général de l’ONU d’examiner le rôle
joué par l’Organisation dans le transfert de la Papouasie occidentale à l’Indonésie. Libération prie la
Commission de soutenir cette initiative.
12. Libération se félicite ensuite de l’accord de cessez-le-feu conclu entre le Gouvernement sri-lankais
et les Tigres de libération de l’Eelam tamoul, qui jette une lueur d’espoir dans un cycle de violences
meurtrier pour les deux parties au conflit. Enfin elle déplore que l’Inde continue de rejeter, en les
qualifiant d’actions terroristes pour justifier sa répression, les demandes du peuple cachemirien qui
souhaite exercer son droit à l’autodétermination conformément à la résolution pertinente du Conseil de
sécurité, montrant par là son mépris pour le soutien international croissant en faveur de
l’autodétermination des Cachemiriens. Ainsi que l’a observé le Ministre des affaires étrangères de la
Slovénie, les normes relatives aux droits de l'homme transcendent les frontières nationales, et la
communauté internationale doit conjuguer ses efforts pour protéger tous ceux dont les droits sont bafoués
de façon flagrante et qui ne souhaitent rien de plus que de pouvoir exercer leur droit à l’autodétermination.
13. M. AHMAD (Congrès du monde islamique) rappelle que le droit à l’autodétermination est défini
dans la Charte des Nations Unies comme un droit de l’homme fondamental depuis plus de 56 ans. Or ce
droit continue d’être dénié à des peuples encore sous le joug d’une domination étrangère comme les
peuples tchétchène, palestinien ou cachemirien.
14. L’annexe illégale par l’Inde de l’État de Jammu-et-Cachemire et la lutte pour la liberté qui en a
résulté ont souvent été portés à l’attention de la Commission des droits de l'homme. Dans ce territoire, le
déni de la démocratie a été institutionnalisé et s’est accompagné de violations systématiques des droits de
l'homme, d’effusions de sang et de destructions. Toutes les élections qui s’y sont déroulées ont été
manipulées en faveur des candidats désignés par l’Inde tandis que ceux de l’opposition étaient arrêtés et
emprisonnés sans inculpation formelle. Les prisons sont bondées alors que de source officielle elles
comptent moins de 500 détenus, ce qui donne une idée de l’ampleur des arrestations et des détentions
arbitraires, pour lesquelles il n’existe aucun chiffre officiel. L’autorité mise en place par l’Inde au
Cachemire aurait d’ailleurs fait procéder à des exécutions extrajudiciaires pour libérer des cellules dans les
prisons. À Srinagar, on s’interroge ainsi sur le sort de 35 000 Cachemiriens officiellement arrêtés et
détenus depuis des années mais que l’on n’a jamais revus. Le Cachemire est présenté comme faisant
« partie intégrante » de l’Inde, mais en réalité son statut est celui d’un territoire occupé. Depuis le
11 septembre, sous couvert de la lutte antiterroriste, l’Inde y a intensifié sa politique de répression et de
violence. Les instruments internationaux, notamment les dispositions relatives au droit à
l’autodétermination et au droit inhérent à la résistance à l’occupation sont ainsi bafoués, ce qui dans le
contexte de l’évolution des droits de l'homme est alarmant, car cela voudrait dire que l’on est revenu à la
situation qui régnait avant la Charte, où la loi du plus fort l’emportait. C’est pourquoi le peuple de Jammuet-Cachemire appelle la communauté internationale à rompre le silence qui entoure le refus de l’Inde
d’honorer l’engagement international qu’elle a pris de le laisser décider de son avenir et les violations
généralisées de ses droits. Le peuple cachemirien ne veut pas voir ses droits sacrifiés sur l’autel de la
géopolitique.
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15. M. PANDITA (Commission africaine des promoteurs de la santé et des droits de l'homme) prend
note avec satisfaction du rapport présenté par le Rapporteur spécial sur la question de l’utilisation de
mercenaires comme moyen de violer les droits de l'homme et d’empêcher l’exercice du droit des peuples à
disposer d’eux-mêmes (E/CN.4/2002/20). Le rapport décrit notamment les violations alarmantes des droits
de l'homme commises par des mercenaires dans un certain nombre de pays africains (par. 32). Dans ces
pays, les conflits liés à l’exercice du droit à l’autodétermination ont pris la forme d’une lutte pour le
contrôle des ressources naturelles. La recherche de gains matériels porte un sérieux coup au droit à
l’autodétermination. Les profits tirés du commerce illicite de diamants en particulier permettent de
constituer un véritable arsenal destiné à empêcher l’exercice de ce droit. Les 3 à 4 milliards de dollars des
É.-U. que ce trafic a rapportés à l’Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola (UNITA) lui ont
permis de renforcer ses unités armées et sa position sur la ligne de front en recrutant des mercenaires. La
situation est aggravée lorsque les gouvernements locaux adoptent une attitude complaisante face aux
violations du droit international humanitaire. Les bénéfices engrangés grâce à ce commerce illicite
contribuent à déstabiliser les gouvernements et les sociétés civiles.
16. En Asie, on a recours au trafic de drogues, au trafic d’armes et au blanchiment d’argent pour
financer le recrutement de mercenaires en vue de promouvoir des intérêts politiques. Il existe un lien étroit
entre le mercenariat et le terrorisme, notamment le terrorisme transfrontière, qui constitue aujourd’hui l’un
des principaux obstacles à l’exercice du droit à l’autodétermination. Dans son rapport, le Rapporteur
spécial fait référence à la combinaison fatale de l’extrémisme religieux et du terrorisme, qui implique un
soutien financier et logistique de certains États à des réseaux terroristes, et ce parfois sous couvert d’appui
à des « mouvements de libération » ou d’aide à des membres de la même religion ou origine ethnique.
Tant que le recrutement de mercenaires et de terroristes se poursuivra, les peuples ne pourront jouir de leur
droit à l’autodétermination. Lorsque l’intégrité même d’un État est mise à mal par la subversion, la
première chose à faire est de protéger le droit à la vie qui est le plus fondamental de tous les droits de
l'homme.
17. M. BARNES (Association du monde indigène) appelle l’attention de la Commission sur la situation
des peuples autochtones de l’Alaska, territoire sur lequel les États-Unis prétendent avoir un droit de regard
en vertu de la prétendue doctrine des « pleins pouvoirs ». Cette doctrine est fondée, d’une part, sur le
Traité de cession de 1967 conclu entre les États-Unis et la Russie tsariste, qui violait en fait le droit des
nations et, d’autre part, sur la clause relative à la réglementation du commerce avec les nations étrangères
et les tribus indiennes qui figure à l’article premier, section 8 de la Constitution des États-Unis. L’Alaska a
été alors classé dans la résolution 66 (I) de l’Assemblée générale, en date du 14 décembre 1946, parmi les
territoires non autonomes au sujet desquels les États responsables devaient communiquer régulièrement
des renseignements au Secrétaire général conformément à l’article 73 e) de la Charte des Nations Unies.
En dépit de plusieurs résolutions de l’Assemblée générale prévoyant l’obligation pour les États membres
d’assurer la pleine participation des populations autochtones aux organes législatif et exécutif du
gouvernement de ces territoires, telles que les résolutions 637 (VII) et 744 (VIII), et en violation des
principes énoncés dans la résolution 742 (VIII) du 27 novembre 1953, les États-Unis ont annexé l’Alaska
par l’intermédiaire du vote du 26 août 1958 auquel ont participé les 41 000 militaires installés sur ce
territoire mais dont a été écartée la majorité des autochtones sous prétexte qu’ils ne savaient ni lire ni
écrire en anglais, condition indispensable pour voter.
18. Les tribus indépendantes et les peuples autochtones de l’Alaska nient tout droit des États-Unis sur
les terres de l’Alaska. C’est l’Assemblée générale qui a demandé à la Commission des droits de l'homme
d’élaborer les principes sur lesquels tous les États Membres auraient dû se fonder pour déterminer si un
peuple avait accédé à l’autonomie ou à l’indépendance. Conformément aux critères mêmes de l’ONU, les
peuples autochtones de l’Alaska n’ont pas encore exercé leur droit à l’autodétermination tel que le prévoit
la Charte des Nations Unies.
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19. M. RAJHUMAR (Pax Romana, Mouvement international des intellectuels catholiques) dit que le
principe de la sécurité de l’humanité et le droit fondamental à l’autodétermination de tous les peuples sont
fermement établis en droit international, y compris le droit des droits de l'homme, et doivent être appliqués
sur la base de l’équité et de l’universalité. Le déni de ce droit est l’une des causes principales de
l’insécurité et institutionnalise la discrimination à l’égard des peuples à tous les niveaux de la société. Afin
de renforcer la sécurité, l’ONU doit veiller au respect des droits de l'homme, et notamment dénoncer les
violations de ces droits et y remédier. Telle doit être la stratégie fondamentale à appliquer pour mettre fin
à des situations de discrimination envers des peuples et prévenir de futurs conflits.
20. Toutefois, les événements du 11 septembre ont écarté la perspective d’une résolution pacifique des
conflits liés à la revendication du droit à l’autodétermination. Les membres du Conseil de sécurité de
l’ONU ont rapidement assimilé les mouvements en faveur de l’autodétermination aux terroristes. Une lutte
contre le terrorisme qui ne tient aucun compte des droits de l'homme et des libertés fondamentales aboutit
aux mêmes résultats que le terrorisme lui-même. Rappelant que les États les plus respectueux des droits de
l'homme et des principes énoncés dans la Charte des Nations Unies sont moins touchés que les autres par
le terrorisme national et international, la Rapporteuse spéciale sur le terrorisme et les droits de l'homme de
la Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme a indiqué dans son rapport
(E/CN.4/Sub.2/2001/31) que la réduction du terrorisme passe à l’évidence par la pleine réalisation des
droits de l'homme, notamment en ce qui concerne l’autodétermination. L’ONU a bien cherché à résoudre
les différends liés au droit à l’autodétermination mais elle n’a jamais inscrit sa démarche dans le cadre
d’une stratégie de prévention des conflits. En effet, elle n’est généralement intervenue que lorsque des
massacres avaient été commis, en établissant des administrations provisoires, comme au Timor oriental et
au Kosovo. Dans bien d’autres cas, au mieux, elle a apporté des solutions insuffisantes.
21. Il convient de relever le rôle des organes conventionnels, comme le Comité des droits de l'homme,
qui a récemment donné une nouvelle dimension à la souveraineté des peuples autochtones sur leurs
ressources naturelles, en tant qu’élément intrinsèque à de leur droit à l’autodétermination. L’Instance
permanente sur les questions autochtones et le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme et
des libertés fondamentales des populations autochtones sont aussi des mécanismes essentiels pour la
recherche de solutions au problème de la violation du droit à l’autodétermination des peuples autochtones.
22. L’ONU devrait instaurer un cadre approprié pour régler pacifiquement les revendications relatives
au droit à l’autodétermination sur la base de la primauté du droit. Cela permettrait de concilier l’exercice
du droit à l’autodétermination et le respect des autres droits de l’homme. C’est pourquoi Pax Romana
recommande à la Commission des droits de l'homme de prier la Sous-Commission de la promotion et de la
protection des droits de l'homme d’élaborer un document de travail sur la mise en œuvre du droit à
l’autodétermination en tant que facteur contribuant à la paix et la sécurité internationales. Ce document
devrait examiner la question de savoir si les procédures et mécanismes existants de l’ONU s’occupent
suffisamment des plaintes pour violation du droit à l’autodétermination.
23. M. M’HAMED (Mouvement international des jeunes et des étudiants pour les Nations Unies –
ISMUN) dit que son organisation est profondément préoccupée par la question du Sahara occidental. La
Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, adoptée par l’Assemblée
générale en 1960, qui prévoit le droit à la libre détermination de tous les peuples, n’est pas encore
appliquée au Sahara occidental. En dépit de toutes les mesures qui ont été prises, à savoir l’inscription de
cette question à l’ordre du jour de l’ONU depuis 1966, l’avis émis en 1975 par la Cour internationale de
justice, l’adoption d’un Plan de règlement par l’ONU en 1991, dont les modalités de mise en œuvre ont été
approuvées par le Front Polisario et le Royaume du Maroc, et les Accords de Houston adoptés en 1997,
aucun référendum qui permettrait au peuple sahraoui d’exercer enfin son droit à l’autodétermination n’a
encore été organisé.
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24. Compte tenu d’éléments indiquant que l’ONU serait sur le point d’abandonner les engagements
qu’elle a pris à cet égard, ce qui nuirait à sa crédibilité, le représentant de l’ISMUN lance un appel à la
Commission pour qu’elle continue à promouvoir l’organisation du référendum tel qu’il a été accepté par
les deux parties en cause, car c’est le seul moyen d’instaurer une paix juste et durable dans la région. Il
faudrait que tous les organes compétents de l’ONU, y compris le Conseil de sécurité et la Commission des
droits de l'homme, tiennent un débat ouvert sur la question et mettent également sur pied un mécanisme
contraignant à l’égard du Maroc, qui entrave la tenue du référendum afin de l’inciter à respecter ses
engagements. En outre, l’ONU devrait fournir les ressources humaines, économiques, politiques et
diplomatiques nécessaires pour que le référendum puisse se tenir sans plus de retard. L’ISMUN appelle la
communauté internationale, et en particulier la Commission des droits de l'homme, à accorder une priorité
élevée à la réalisation du droit à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental, laquelle est
impossible sans l’organisation d’un référendum libre et impartial.
25. M. BANDETTINI DI POGGIO (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples –
LIDLIP) rappelle que l’attitude des gouvernements successifs de Sri Lanka, qui ont constamment favorisé
la communauté ethnique majoritaire du pays, a entraîné une division de la société et de nombreuses
violations des droits de l'homme dont les Tamouls ont été les principales victimes. C’est ainsi qu’est né et
s’est développé le mouvement des Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE) et que le conflit s’est
radicalisé. Comme l’a reconnu implicitement l’Assemblée générale dans sa résolution 2625 (XXV), les
peuples ont le droit de lutter contre un gouvernement injuste et de revendiquer leur droit à
l’autodétermination. C’est pourquoi les LTTE ne sauraient être qualifiés de terroristes, et ce d’autant plus
qu’ils sont reconnus par les Tamouls comme leur seul représentant dans le cadre des négociations avec le
gouvernement.
26. Il y a lieu de se féliciter à cet égard de la signature, le 22 février 2002, par les dirigeants des LTTE
et le premier Ministre sri-lankais du nouveau gouvernement en place d’un mémorandum d’accord
prévoyant l’instauration d’un cessez-le-feu permanent. Il reste encore beaucoup à faire pour parvenir à la
paix. Le gouvernement doit notamment faire adopter une nouvelle constitution qui réponde aux aspirations
des Tamouls et l’opposition demeure très forte. La recherche d’une paix juste dépendra assurément de
l’appui apporté par la communauté internationale, ce qui implique également que les LTTE ne soient plus
considérés comme une organisation terroriste, mais reconnus comme des participants à part entière en
pleine égalité avec le gouvernement aux pourparlers de paix. La LIDLIP garde l’espoir que l’on trouvera
une solution politique au problème qui reconnaisse pleinement le droit du peuple tamoul à déterminer
librement son statut politique.
27. L’orateur passe ensuite la parole à un autre représentant de la LIDLIP, qui traitera dans son
intervention des atteintes au droit à l’autodétermination du peuple paraguayen.
28. M. ARZUAGA (Ligue internationale pour les droits et la libération des peuples – LIDLIP) appelle
l’attention de la Commission sur la situation de la commune de Puerto Casado au Paraguay dont le
territoire et les habitants ont fait l’objet d’un contrat de vente entre deux entreprises transnationales, en
violation flagrante du principe de la souveraineté du Paraguay sur son propre territoire et du droit à
l’autodétermination du peuple paraguayen. Les autorités locales se sont adressées au Congrès paraguayen
pour demander l’expropriation de 150 000 hectares correspondant à la localité et aux terres adjacentes.
Leur demande a été transmise au Sénat, mais aucune décision n’a encore été prise. En faisant droit aux
revendications légitimes des habitants de Puerto Casado, le Sénat démontrerait que, contrairement à ce qui
est dit dans un rapport du PNUD du 3 décembre 2001, l’état de droit existe bien au Paraguay et que des
mesures sont prises pour défendre la souveraineté du pays face aux intérêts économiques étrangers et
respecter ainsi les décisions exprimées démocratiquement par le peuple.
29. M. BENNOT (Organisation de la solidarité des peuples afro-asiatiques) dit que l’organisation
qu’il représente a toujours cru dans le principe fondamental selon lequel tous les hommes naissent libres et
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égaux en droits, droits que seule la démocratie peut garantir. Ils doivent donc pouvoir exprimer librement
leurs aspirations et engager les actions nécessaires pour atteindre leurs objectifs.
30. Les événements qui se sont déroulés en Asie du Sud depuis les attaques terroristes du 11 septembre
sont préoccupants. Le Pakistan illustre la façon dont le droit d’un peuple à décider librement de son statut
politique continue d’être bafoué par une dictature militaire. Le Pakistan doit faire respecter les libertés
fondamentales pour pouvoir mettre un terme à la pauvreté, encourager la modernisation et le
développement et éliminer les pratiques régressives favorisées par des dictatures successives. Le Général
Pervez Musharraf, Président du Pakistan, n’est pourtant guère préoccupé par la démocratie, comme l’ont
montré ses récentes déclarations. Il exploite en fait les événements du 11 septembre pour se maintenir au
pouvoir. En déniant le droit du peuple pakistanais à choisir ses dirigeants et à déterminer la structure
politique de son État, il lui dénie tout simplement son droit à l’autodétermination.
31. Aussi imparfait soit-il, seul un régime démocratique permet aux individus d’exprimer leurs
aspirations et garantit leurs droits. C’est peut-être le seul système qui accorde aux peuples un droit
fondamental, celui d’être maîtres de leur propre destin. Lorsque les dictateurs en uniforme commencent à
manipuler la démocratie, ils privent avant tout les peuples de leur droit à l’autodétermination.
32. L’Organisation de la solidarité des peuples afro-asiatiques est convaincue que le débat sur
l’autodétermination doit aller au-delà des vieilles définitions des luttes contre le colonialisme et porter sur
la question de savoir si les nations créent les structures constitutionnelles et institutionnelles qui
garantissent la participation de tous les citoyens, sur un plan d’égalité, à la direction des affaires publiques.
La Commission des droits de l'homme doit veiller à ce que les dirigeants, partout dans le monde, soient
portés à la tête de leur pays par la volonté du peuple et non par les armes et rendent compte de leurs actes.
33. M. WAIDANDEY (Fédération syndicale mondiale) dit que la revendication du droit à
l’autodétermination constitue le principal moyen des groupes de population appartenant à une culture
donnée de résister à l’imposition d’une culture étrangère. Il faut distinguer entre le droit à
l’autodétermination des individus, qui correspond au droit de chacun de prendre en main son destin, et le
droit à l’autodétermination nationale, qui correspond au droit des nations et des groupes culturels soumis à
l’occupation étrangère de déterminer librement leur système politique.
34. Les Cachemiriens des deux parties du Cachemire que se disputent le Pakistan et l’Inde veulent eux
aussi exercer leur droit à l’autodétermination. Le Pakistan, qui ne cesse d’exiger l’application des
résolutions de l’ONU concernant l’État de Jammu-et-Cachemire et de réclamer le croit à
l’autodétermination des Cachemiriens, viole en fait lui-même ces résolutions et ce droit. En effet il est dit
clairement dans les résolutions de l’ONU que le Pakistan doit retirer toutes ses forces nationales
paramilitaires et militaires du territoire occupé avant que l’Inde ne retire ses propres forces et que la
population du Jammu-et-Cachemire est libre de choisir entre l’Inde et le Pakistan. Or le Pakistan refuse de
retirer ses forces de ce territoire si l’Inde ne se retire pas en même temps et, au lieu de protéger et de
préserver l’intégrité des deux parties du Jammu-et-Cachemire qu’il contrôle, il les a divisées en deux
zones différentes, l’Azad Cachemire, d’une part, et le Gilgit Baltistan, d’autre part, en supprimant tous les
liens économiques, culturels, politiques et historiques qui les unissaient depuis des siècles. En outre, il a
imposé des restrictions aux communications et aux contacts politiques entre les deux parties, cédé
plusieurs milliers de kilomètres carrés de territoire à la Chine sans mandat et privé la population du Gilgit
Baltistan de tous ses droits démocratiques fondamentaux comme le droit de vote et le droit à la liberté
d’expression.
35. Les actes du Pakistan ne correspondent donc pas à ses paroles, qui visent simplement à détourner
l’attention de ses agissements qui violent le droit à l’autodétermination. Le Pakistan est même allé
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jusqu’à infiltrer de prétendus combattants de la liberté, qui sont en fait des extrémistes religieux, dans la
partie du Cachemire occupée par l’Inde, où ils ont réduit à néant l’harmonie qui régnait entre les
différentes confessions religieuses et détruit le tissu social. Le Pakistan a intensifié ses efforts pour
exacerber les tensions religieuses en installant des Afghans sunnites et des Pachtounes au Gilgit Baltistan
afin de marginaliser les chiites majoritaires, de même qu’il encourage l’extrémisme religieux dans l’Azad
Cachemire pour marginaliser les militants du mouvement pro-indépendance. Quoiqu’il le prétende, le
Pakistan n’a aucune intention de libérer le Cachemire; il cherche plutôt à fanatiser la société et à attiser la
haine entre les diverses communautés ethniques et religieuses qui y vivent.
Déclarations dans l’exercice du droit de réponse
36. M. NAJAFOV (Observateur de l’Azerbaïdjan) invite la délégation de l’Arménie, pays qui occupe
20% du territoire de l’Azerbaïdjan, à consulter les résolutions du Conseil de sécurité qui exigent le retrait
de toutes les forces d’occupation arméniennes qui se trouvent sur le territoire azerbaïdjanais. Il rappelle
également qu’aucun État ni aucune organisation internationale n’a reconnu la légitimité du référendum et
des élections organisées par l’Arménie dans le Haut-Karabakh. Le discours que tient l’Arménie vise à en
fait à dissimuler l’annexion de facto de ce territoire par l’Arménie. La délégation arménienne devrait
indiquer pourquoi le Gouvernement arménien refuse le règlement de ce conflit, notamment l’octroi d’une
autonomie au Haut-Karabakh dans le cadre de l’Azerbaïdjan ainsi que des garanties de sécurité pour les
deux communautés.
37. M. HUSSAIN (Pakistan) dit que l’Inde, qui prétend être la plus grande démocratie du monde, est en
fait gouvernée par un parti qui incite la population à la haine contre les Pakistanais et contre les
musulmans. Ce pays occupe depuis 50 ans le Jammu-et-Cachemire et dénie à la population de ce territoire,
au mépris du droit international et des résolutions de l’ONU, son droit à l’autodétermination.
38. Le bilan de la répression exercée par les forces d’occupation indiennes au Jammu-et-Cachemire au
cours des 12 années écoulées est parlant : plus de 80 000 morts, 8 000 femmes violées et des milliers de
Cachemiriens innocents qui croupissent dans des prisons indiennes. S’il existe un terrorisme au Jammu-etCachemire, c’est bien le terrorisme d’État exercé par l’Inde. La délégation pakistanaise demande à la
Commission d’aider les Cachemiris à exercer leur droit à l’autodétermination.
39. M. REYES RODRIGUEZ (Cuba) dit que dans l’intervention qu’elle a faite au titre du point 5 de
l’ordre du jour, la délégation cubaine n’a mentionné le Panama qu’à propos du dixième Sommet ibéroaméricain qui s’est tenu dans ce pays en novembre 2000. C’est précisément à cette date que des terroristes
d’origine cubaine ont été arrêtés. À aucun moment, la délégation cubaine n’a laissé entendre que les
autorités panaméennes portaient une quelconque responsabilité dans l’affaire qui était évoquée. Les faits
mentionnés par la délégation cubaine dans cette intervention proviennent des sources suivantes : la presse
du Panama, des populations sociales panaméennes amies de Cuba et des documents déclassifiés de la CIA.
40. Cuba estime que des terroristes et des mercenaires tels que ceux qui ont fait exploser un avion de
ligne en plein vol doivent être jugés et condamnés. La délégation cubaine ne doute pas que les autorités
panaméennes démontreront dans la pratique leur volonté de faire en sorte que justice soit faite.
41. M. KHABBAZ-HAMOUI (République arabe syrienne) dit qu’Israël mène une politique d’agression
contre des pays arabes depuis 1948. Ainsi, en 1967, Israël a attaqué les postes frontières sur le Golan afin
de conquérir un nouveau territoire où elle puisse installer des colons. La vérité est qu’Israël ne veut tout
simplement pas se retirer du Golan.
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42. La Syrie avait pourtant fait preuve de bonne volonté en participant activement à la Conférence de
Madrid en 1991 mais Israël a systématiquement refusé un règlement pacifique. En fait, Israël a assassiné
le processus de paix.
43. M. DARRAR (Observateur de l’Égypte) se réjouit d’avoir entendu l’ambassadeur d’Israël affirmer
que son pays acceptait que le peuple palestinien et les Israéliens exercent leur droit à l’autodétermination.
Il souhaiterait que la délégation précise comment le Gouvernement israélien entend mettre en œuvre ce
droit. Israël devrait faire preuve de responsabilité face à la destruction de biens et aux pertes en vies
humaines subies par les Palestiniens, les Syriens et les Libanais.
44. Pour conclure, l’observateur de l’Égypte invite Israël à appliquer les résolutions adoptées à sa
session précédente par la Commission des droits de l'homme.
45. M. LEVY (Observateur d’Israël) dit que les actions d’Israël, que critiquent à tour de rôle les
délégations des pays arabes, relèvent en fait de la légitime défense.
46. Dans la lettre qu’il avait adressée le 9 septembre 1993 à Yitzhak Rabin, Yasser Arafat avait renoncé
totalement au terrorisme et s’était engagé à résoudre par la négociation toutes les questions restées en
suspens. Or le Fatah, qui est la principale composante de l’OLP, a revendiqué l’attentat qui a été commis
en plein centre de Jérusalem une demi-heure auparavant et qui a fait deux morts et 41 blessés. Il est donc
évident que les terroristes qui commettent ces attentats suicides sont soutenus par des organisations et des
dirigeants palestiniens qui les qualifient de martyrs. L’Iraq de son côté verse une récompense de 15 000
dollars aux familles de ces terroristes.
47. Si Israël se voit contraint de prendre les mesures qu’il prend actuellement c’est parce que Arafat ne
fait pas arrêter et juger les terroristes et ne confisque par les armes illégales. En outre, si l’armée
israélienne pénètre dans les camps de réfugiés c’est parce qu’ils abritent des laboratoires où sont fabriqués
des explosifs.
48. M. BARREIRO PERROTA (Observateur du Paraguay), répondant à la Ligue internationale pour
les droits et la libération des peuples, dit que le contrat de vente passé entre deux entreprises et portant sur
400 000 hectares ne constitue pas une atteinte à la souveraineté du Paraguay puisque les autorités de la
localité de Puerto Casado qui se trouve sur ce territoire ont demandé officiellement au Congrès, avec
l‘appui de la population, que 150 000 hectares correspondant à la localité et aux terres adjacentes soient
expropriés.
49. Il convient d’indiquer à l’intention de ceux qui affirment qu’il n’existe pas d’état de droit au
Paraguay que le peuple et le gouvernement paraguayens savent mieux que quiconque combien difficile a
été la longue transition vers la démocratie engagée en 1989, démocratie qu’ils s’efforcent de renforcer
chaque jour.
50. M. BELIZE (Observateur du Panama) rappelle que dans l’intervention qu’elle a faite à la 7e séance,
la délégation cubaine a affirmé que la mafia terroriste cubano-américaine et le Gouvernement des ÉtatsUnis exerçaient des pressions pour faire avorter la procédure judiciaire engagée contre un certain nombre
de terroristes, notamment Posada Carriles, et que des préparatifs étaient en cours pour organiser la fuite de
ce dernier et de ses complices. La délégation cubaine mettait ainsi en doute la capacité du système
judiciaire et des institutions panaméennes à s’acquitter de leur tâche, ce qui est totalement inacceptable.
En effet, le Panama est un pays démocratique, doté d’institutions solides et d’un pouvoir judiciaire
indépendant et le procès pénal visant les personnes susmentionnées ira à son terme.
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51. M. SABHARWAL (Inde) dit qu’il n’est pas surpris que le Pakistan mette le droit à
l’autodétermination au service de ses ambitions territoriales. Aucun pays ne devrait être autorisé à utiliser
ce droit pour dissimuler ses activités terroristes. Il convient également de rappeler que le Pakistan occupe
illégalement depuis plus de 50 ans une partie de l’État indien de Jammu-et-Cachemire. Enfin on
s’étonnera qu’un État qui est gouverné la plupart du temps par des dictatures militaires se permette de
critiquer le parti qui est actuellement au pouvoir en Inde et qui a été élu démocratiquement.
52. M. al KHALIFA (Bahreïn) dit que contrairement à ce qu’a affirmé son représentant, Israël ne s’est
pas totalement retiré du Liban-Sud puisque les fermes de Shaba sont toujours occupées. La délégation
bahreïnite demande à Israël de se retirer de tous les territoires occupés, d’œuvrer en faveur du processus
de paix et de répondre aux aspirations légitimes des peuples de la région.
53. M. HUSSAIN (Observateur de l’Iraq) dit que les sommes versées par l’Iraq aux Palestiniens ont
pour but d’aider les familles dont les logements ont été détruits ou qui ont été expulsées par les forces
israéliennes. Il ajoute qu’Israël reçoit lui aussi une aide financière considérable.
54. La délégation iraquienne s’étonne que les descendants de victimes du nazisme puissent se
comporter de manière aussi abominable à l’égard des enfants palestiniens. Les forces israéliennes en ont
tué un grand nombre, dont certains étaient parfois très jeunes, ce qui est révoltant et n’a rien à voir avec les
valeurs que prétend défendre Israël.
55. M. RAMLAWI (Observateur de la Palestine) rappelle que dans la lettre qu’il a adressée à M. Rabin,
M. Arafat reconnaissait expressément le droit d’Israël à l’existence. M. Rabin s’est engagé dans le
processus de paix et l’a payé de sa vie. L’histoire de Sharon est elle marquée par des effusions de sang
depuis Sabra et Chatila jusqu’aux massacres récents de centaines de Palestiniens. Israël proclame qu’il
veut la paix et fait exactement le contraire.
56. Chacun sait que les Palestiniens vivent sous l’occupation israélienne et qu’en vertu de l’article 51 de
la Charte et de diverses résolutions de l’Assemblée générale de l’ONU, ils ont le droit, comme tous les
peuples vivant sous occupation étrangère, de résister par tous les moyens à cette occupation, y compris par
l’action militaire. Cela dit, les Palestiniens souhaitent l’instauration d’une paix juste.
57. M. NAZARIAN (Arménie) s’étonne que la délégation azerbaïdjanaise prenne la parole au titre du
point 5 de l’ordre du jour consacré au droit à l’autodétermination puisque l’Azerbaïdjan dénie ce droit à la
population du Haut-Karabakh.
58. Aucune des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU ne dit mot du prétendu conflit armé entre
l’Azerbaïdjan et l’Arménie. Cela dit, c’est l’Azerbaïdjan qui a lancé une attaque armée contre la
population du Haut-Karabakh après que celle-ci eut exprimé pacifiquement sa volonté d’exercer son droit
à l’autodétermination. Ces résolutions ne parlent pas non plus du retrait des forces arméniennes du HautKarabakh pour la simple raison qu’elles n’y sont jamais allées. Par ailleurs, aucune décision sur le HautKarabakh n’a été prise au Sommet de Lisbonne de l’OSCE.
59. En déformant les faits, l’Azerbaïdjan cherche à apparaître comme une victime. Il ne fait que saper le
processus de paix et entraver les efforts déployés dans le cadre de l’OSCE pour répondre aux besoins de la
population du Haut-Karabakh.
60. M. HUSSAIN (Pakistan) dit que l’Inde est le dernier pays à pouvoir parler du droit à
l’autodétermination puisque cela fait plus de 50 ans qu’il refuse aux Cachemiriens le droit de l’exercer. Il
faut savoir qu’en Inde, des millions de membres de minorités (musulmans, chrétiens, jaïns, sikhs, etc.) qui
ont eu le malheur de naître sur le territoire de la soit-disant plus grande démocratie du monde ont été
massacrés. La délégation indienne a accusé le Pakistan de soutenir le terrorisme. Or chacun sait que,
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depuis le 11 septembre, le Pakistan est la pointe de la lutte contre le terrorisme. L’Inde ne peut pas en dire
autant.
61. Pour conclure, M. Hussain donne lecture d’un passage d’un article du Herald Tribune qui dénonce
l’attitude scandaleusement partiale de la police indienne à l’égard de la minorité musulmane dans l’État de
Gujarat.
62. M. LEVY (Observateur d’Israël) se demande comment on pourrait affirmer que l’attentat suicide
commis 45 minutes auparavant au centre de Jérusalem repose sur une quelconque résolution de l’ONU. Il
s’étonne également que l’on puisse dire qu’en 1948, 650 000 juifs, dont beaucoup avaient survécu à
l’holocauste, ont soudainement attaqué sept États arabes. En fait, ce sont ces États qui ont tenté, en vain,
d’empêcher la création d’Israël.
63. S’agissant du droit à l’autodétermination, il y a lieu de rappeler que le peuple juif, exilé par la force
de sa patrie, y est revenu pour y établir une société juste dans un État juif et démocratique, dans des
frontières définies d’un commun accord avec ses voisins. Quant aux Palestiniens, ils peuvent exercer leur
droit à l’autodétermination comme ils l’entendent à condition que ce soit par la négociation et
pacifiquement et que ce ne soit pas aux dépens d’Israël. Cela peut impliquer la création d’un État
palestinien mais pas le retour de millions de Palestiniens dans l’État d’Israël.
64. M. NAJAFOV (Observateur de l’Azerbaïdjan) rappelle qu’en 1918, près d’un demi-million
d’Azerbaïdjanais vivaient sur le territoire actuel de l’Arménie. La délégation arménienne pourrait peutêtre indiquer où ces personnes sont passées. Il faut espérer qu’elle ne prétendra pas que ces personnes sont
parties de leur plein gré.
65. La délégation arménienne devrait également, avant d’intervenir, lire plus attentivement les
résolutions du Conseil de sécurité qui font état de l’occupation de territoires de l’Azerbaïdjan par
l’Arménie. Dans l’une de ses publications, l’Human Rights Watch fait également état de l’intervention des
forces armées arméniennes sur le territoire du Haut-Karabakh.
66. M. SABHARWAL (Inde) dit que le Pakistan n’est peut-être pas l’État le mieux lacé pour donner
des leçons aux autres États sur la manière de traiter leurs minorités. En effet, peu de temps auparavant, un
attentat à la bombe dans un lieu de culte au Pakistan a fait de nombreuses victimes. Chacun sait que le
Gouvernement pakistanais soutient des groupes sectaires qui s’en prennent aux minorités.
67. M. NAZARIAN (Arménie) regrette que l’Azerbaïdjan préfère inventer des chiffres et récrire
l’Histoire plutôt que de rechercher une solution. Le Haut-Karabakh n’a jamais fait partie de l’Azerbaïdjan
indépendant, ni du point de vue historique ni du point de vue géographique. Les hommes, les femmes et
les enfants du Haut-Karabakh ont acquis le droit de vivre pacifiquement sur leurs terres historiques. Enfin,
il convient de rappeler à la délégation azerbaïdjanaise que c’est dans le cadre de l’OSCE et non pas dans le
cadre de la Commission des droits de l'homme que sont examinées les questions relatives au HautKarabakh.
LE RACISME, LA DISCRIMINATION RACIALE, LA XÉNOPHOBIE ET TOUTES LES FORMES
DE DISCRIMINATION (point 6 de l’ordre du jour) (E/CN.4/2002/21, 22, 23 (WP.5), 24 et Add.1, 25
(WP.24), 123, 133, 138 et 140; E/CN.4/2002/NGO/21, 46, 63, 64, 94, 112, 145, 152, 163, 166, 191, 194,
195 et 196; A/CONF.189/12; A/CONF.189/PC.3/5; A/CONF.189/PC.2/21 et Corr.1)
68. M. GLÈLÈ-AHANHANZO (Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de racisme, de
discrimination raciale et de l’intolérance qui y est associée), présentant son rapport (E/CN.4/2002/24 et
Add.1), dit que celui-ci doit être lu conjointement avec l’étude sur la question des programmes
politiques qui incitent à la discrimination raciale ou l’encouragent présentée à la deuxième session du
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Comité préparatoire de la Conférence mondiale contre le racisme (A/CONF.189/PC.2/21). Il rappelle que
cette conférence a permis à la communauté internationale de s’acquitter de son devoir de mémoire en
reconnaissant l’esclavage et la traite négrière comme des crimes contre l’humanité et de réaffirmer que le
respect de tous les êtres humains est l’idéal qui fonde la civilisation contemporaine.
69. Le mandat du Rapporteur spécial a subi les conséquences de la tragédie du 11 septembre en raison
notamment des réactions irrationnelles que cet événement a suscitées ou à cause d’une prétendue « guerre
des civilisations » que les explosions des tours du World Trade Center de New York auraient déclenchée.
Ce contexte préoccupant met plus que jamais en lumière l’importance des mécanismes chargés de faire
respecter les droits de l'homme par un éclairage objectif sur les faits et la dénonciation des atteintes aux
droits de la personne humaine et aux libertés fondamentales.
70. Dans le chapitre du rapport consacré aux manifestations contemporaines du racisme, de la
discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est associée, le Rapporteur spécial met
l’accent sur les réactions anti-musulmanes/anti-Arabes et contre d’autres populations survenues à la suite
des attentats du 11 septembre dans plusieurs pays. Il examine également les manifestations de
l’antisémitisme en Amérique du Nord, en Europe et en Russie, la violence raciste des organisations
d’extrême droite, néonazies et skinheads en République tchèque, au Royaume-Uni de Grande-Bretagne et
d’Irlande du Nord et en Suisse, et la situation des Roms/Sintis/gens du voyage en Europe de l’Est,
notamment en Bulgarie. Le rapport contient également les réponses de certains pays à des allégations de
racisme ou de discrimination raciale qui leur ont été communiquées, ainsi que les renseignements reçus de
certains gouvernements sur les mesures prises ou envisagées pour donner suite aux recommandations
formulées par le Rapporteur spécial après ses visites dans ces pays. Le Rapporteur spécial note à cet égard
qu’en application de la directive 2000/43 du 29 juin du Conseil de l’Europe, l’Allemagne envisage
d’adopter une loi générale contre la discrimination raciale et que la Suède a adopté un plan national de
lutte contre le racisme, la discrimination raciale et la xénophobie comme l’a d’ailleurs recommandé la
Conférence mondiale contre le racisme. Il reste à trouver une solution concertée au problème du
cyberracisme. L’ONU et le Haut-Commissariat aux droits de l'homme devraient à cet égard encourager et
soutenir l’initiative du Conseil de l’Europe qui, après voir fait adopter une convention internationale sur la
cybercriminalité, élabore actuellement un protocole de lutte contre la haine et le racisme en ligne.
71. Dans l’additif à son rapport (E/CN.4/2002/24/Add.1), qui traite de sa visite en Australie du 22 avril
au 10 mai 2001, le Rapporteur spécial souligne les efforts accomplis par le Gouvernement australien pour
mettre un terme au racisme et à la discrimination raciale, notamment l’adoption de lois spécifiques et la
création au niveau fédéral et dans les États fédérés de commissions antidiscrimination ou commissions de
droits de l'homme et de l’égalité des chances, ainsi que la réalisation de programmes en faveur des
populations autochtones. En ce qui concerne ces dernières, des problèmes demeurent. Pour les aborigènes,
l’État australien apparaît comme un avatar d’une colonisation dont les séquelles perdurent, et la résolution
des conflits doit passer par une négociation d’égal à égal entre les gouvernants de l’Australie et les
détenteurs originels des terres australiennes. Le Gouvernement fédéral pour sa part, tout en envisageant
des possibilités de remédier aux conséquences d’actions passées, veut en réduire les incidences sur la
construction d’une nation nouvelle. Pour favoriser le dialogue entre les différents protagonistes, le
Rapporteur spécial a donc formulé les recommandations qui figurent aux paragraphes 1 à 10 du résumé du
rapport considéré.
72. La persistance du racisme, de la discrimination raciale, de la xénophobie et de l’intolérance qui y est
associée démontre l’importance fondamentale que revêtent la reconnaissance et l’acceptation du principe
de l’égale dignité de la personne humaine, de la justice sociale et du respect de la diversité du genre
humain pour résoudre les problèmes auxquels l’humanité est confrontée. La Déclaration et le Programme
d’action de Durban proposent des mesures pour s’attaquer à ces fléaux et mettent notamment l’accent sur
l’éducation pour transformer les mentalités. Le Rapporteur spécial préconise aussi l’adoption de mesures
législatives permettant de réprimer les actes de discrimination raciale et le racisme, ainsi que des mesures
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économiques et sociales en faveur des populations marginalisées du fait de la discrimination raciale
qu’elles subissent.
73. Dans ses recommandations, le Rapporteur spécial appelle tous les gouvernements à faire preuve de
pondération dans la résolution des problèmes liés au terrorisme de manière à garantir le respect des droits
de l'homme et des libertés fondamentales, tout en adoptant des mesures indispensables de sécurité, et à
prévenir les réactions irrationnelles à l’égard d’individus ou de populations soupçonnés de terrorisme.
74. Enfin, le Rapporteur spécial réitère son souhait de voir ériger par le Haut-Commissariat aux droits
de l'homme un monument à la mémoire de toutes les victimes du racisme et, au terme de son mandat,
exprime sa gratitude à tous les États, aux ONG et aux particuliers qui lui ont apporté leur concours dans
l’accomplissement de sa mission.
75. Mme HUSSAIN (Malaisie), s’exprimant également au nom des États membres de l’Organisation de
la Conférence islamique (OCI), dit que la Conférence mondiale de Durban a fait mieux prendre
conscience à la communauté internationale du problème du racisme. Les États membres de l’OCI, qui ont
contribué aux efforts en vue de la réalisation d’un consensus à l’issue de cette conférence, espèrent
vivement que les recommandations auxquelles elle a abouti, notamment la nomination d’un groupe
d’éminents experts indépendants et la création au sein du Haut-Commissariat aux droits de l'homme d’une
unité de lutte contre la discrimination seront appliquées. Ils assurent à nouveau le Haut-Commissaire de
leur coopération dans leur mise en œuvre.
76. Les efforts déployés pour garantir le succès de la conférence ont été malheureusement réduits à
néant par les événements du 11 septembre qui ont provoqué des réactions racistes contre les musulmans,
les Arabes et d’autres groupes de populations du Moyen-Orient dans un certain nombre de pays
occidentaux, ainsi qu’il ressort du rapport du Rapporteur spécial sur les formes contemporaines de
racisme, de discrimination raciale, de xénophobie et de l’intolérance qui y est associée (E/CN.4/2002/24).
Profondément alarmés par ces atteintes aux droits fondamentaux des adeptes de l’islam, les membres de
l’OCI réitèrent l’appel lancé par le représentant du Pakistan au Haut-Commissariat en vue de la réalisation
d’une étude sur les implications de ces attaques contre des Arabes et des musulmans et les moyens de les
prévenir. Atterrés par ailleurs par la vile propagande qui vise à présenter l’islam comme une religion
préconisant la violence, la vengeance et l’intolérance, ils demandent instamment à tous les auteurs de ces
actes irresponsables d’y mettre fin et de chercher au contraire à encourager le dialogue entre les
civilisations afin de promouvoir l’harmonie et la tolérance entre toutes les religions et toutes les races.
77. Les médias ont aussi leur part de responsabilité dans la représentation déformée qui est donnée de
l’islam et des musulmans, deux termes qui sont constamment assimilés à l’injustice, l’extrémisme, la
violence et la destruction. Les médias sont un instrument puissant de communication et se doivent de
toujours donner des informations justes et équilibrées, en particulier sur de questions sensibles comme la
religion. Ils doivent être toujours conscients du fait que ce qu’ils disent et écrivent peut avoir de graves
conséquences et ne pas oublier que, s’ils ont des droits, ils ont aussi des responsabilités envers l’humanité.
78. La représentante de la Malaisie insiste sur le fait que l’islam est une religion de paix, d’amour et de
tolérance, qui condamne tous les actes de violence et d’agression. La lutte contre le terrorisme ne doit pas
et ne devrait jamais être perçue comme une guerre contre l’islam. Au lendemain du 11 septembre, l’OCI
reconnaît la nécessité de mieux faire connaître au public les valeurs fondamentales de l’islam. C’est à cette
fin qu’elle a organisé un colloque sur les droits de l’homme et l’islam, les 14 et 15 mars, à l’Office des
Nations Unies à Genève, qui, elle l’espère, a contribué à faire passer le véritable message de l’islam. Le
monde appartient à tous, aux musulmans comme aux non-musulmans, et chacun
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doit donc veiller à ce que l’on puisse y vivre en toute sécurité. Il faut donc en éliminer l’intolérance
religieuse et la discrimination fondée sur la couleur, la religion et la croyance. Ce processus a commencé à
Durban. Il faut à présenter le poursuivre sans relâche.
79. M. ATTAR (Arabie saoudite) réaffirme l’attachement du Gouvernement du Royaume d’Arabie
saoudite aux nobles buts et principes que constituent la promotion, la protection et le respect des droits de
l'homme ainsi qu’à la lutte contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et toutes les formes
de discrimination. Il agit ainsi conformément aux valeurs islamiques. L’islam, qui compte plus de 1,2
milliard d’adeptes dans le monde, fait partie des religions qui ont contribué et continuent à contribuer à
enrichir les principes des droits de l'homme notamment ceux qui ont trait au racisme et à la discrimination
raciale. L’islam prône en effet le respect et la protection des droits de la personne humaine quelles que
soient ses origines ou ses convictions.
80. C’est la raison pour laquelle le Royaume d’Arabie saoudite a adhéré à tous les instruments
internationaux qui visent à combattre le racisme tels que la Convention internationale sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination raciale et la Convention sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination à l’égard des femmes et a adhéré à la Convention relative à l’esclavage de 1926 ainsi
qu’aux Conventions n° 100 (1951) et n° 111 (1958) de l’Organisation internationale du Travail relatives à
la discrimination en matière d’emploi. Les dispositions de ces instruments ont été incorporées dans toutes
les lois et tous les règlements promulgués en Arabie saoudite, où s’applique aussi la charia islamique. Le
Royaume d’Arabie saoudite a par ailleurs participé à la Conférence mondiale contre le racisme de Durban
et, bien que les résultats de cette Conférence n’aient pas été à la hauteur des espoirs placés en elle, il est
déterminé à mettre en œuvre les recommandations qui y ont été formulées.
81. En conclusion, le Représentant de l’Arabie saoudite rappelle que l’islam est une religion qui prêche
la tolérance, la coopération et la solidarité et condamne absolument le terrorisme et le fanatisme. Tout doit
être fait pour empêcher que cette religion ne soit bassement calomniée d’autant plus que ceux qui
cherchent à dénaturer son image et celle des musulmans ne font que poursuivre des objectifs politiques,
qui sont incompatibles avec la recherche du dialogue entre les civilisations auquel l’islam contribue et qui
est nécessaire à la protection des droits de l'homme.
82. M. VEGA (Chili), intervenant au nom du Groupe des États d’Amérique latine et des Caraïbes
(GRULAC), dit que celui-ci se félicite des résultats obtenus par la Conférence mondiale contre le racisme
de Durban auxquels ses membres ont activement contribué, et réitère sa volonté d’appliquer la Déclaration
et le Programme d’action adoptés nonobstant les réserves formulées par certains de ses pays membres
concernant des situations ou des questions particulières. Le GRULAC avait auparavant participé
activement au processus préparatoire de la Conférence mondiale notamment dans le cadre de la
Conférence régionale des Amériques et identifié toutes les victimes de discrimination raciale et de racisme
dans la région.
83. Il appartient à présent aux États, à la communauté internationale, au système des Nations Unies, à la
Commission des droits de l'homme ainsi qu’au Haut-Commissariat aux droits de l'homme et à la société
civile d’instaurer les conditions nécessaires pour concrétiser les engagements pris à Durban. Les textes
adoptés à l’issue de la Conférence font désormais partie des principes et instruments qui constituent le
droit international des droits de l'homme et seront pris en compte dans les résolutions qui seront présentées
par le GRULAC notamment sur les migrants, les enfants, les peuples autochtones et les handicapés. Le
GRULAC appuiera également les efforts faits par le Haut-Commissariat pour mettre en place et assurer le
fonctionnement de l’unité de lutte contre la discrimination et le groupe d’éminents experts. Il insiste à ce
propos sur le fait que ces mécanismes devraient être financés à l’aide du budget ordinaire de l’ONU. Il
faut donner au Haut-Commissariat et à l’Organisation elle-même la possibilité de répondre aux
préoccupations croissantes qu’inspirent au monde social et politique les diverses formes de discrimination
qui sont condamnables dans toute société et toute culture. En ce qui concerne la désignation des cinq
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éminents experts indépendants envisagée au paragraphe 191 b) du Programme d’action de Durban, le
GRULAC attend avec un grand intérêt le rapport qui sera présenté par le Président de la cinquanteseptième session de la Commission, M. Leandro Despouy, sur le résultat de ses consultations à ce sujet
avec les groupes régionaux et le Secrétaire général. Le GRULAc est par ailleurs disposé à collaborer avec
la Commission en vue de la création d’un organe, un groupe de travail par exemple, qui serait chargé
d’étudier les problèmes de discrimination raciale que rencontrent les personnes d’ascendance africaine,
conformément à la recommandation formulée au paragraphe 7 du Programme d’action de Durban.
84. La Déclaration et le Programme d’action de Durban reflètent une volonté collective de lutter contre
le fléau du racisme qui persiste dans diverses régions du monde et il faut à présenter veiller à ce qu’ils
soient suivis d’effet à tous les niveaux des sociétés. C’est là le plus important si l’on veut que la
Conférence de Durban comme les autres conférences mondiales aient un sens et une utilité pour les
victimes du racisme et pour les générations futures.
85. M. de SEIXAS CORREA (Brésil) dit que face à la résurgence de tendances dangereuses dans le
monde, il est plus que jamais indispensable que la communauté internationale utilise efficacement les
instruments dont elle dispose pour mener une action concertée contre la discrimination raciale. Les
instruments principaux à cet égard sont la Déclaration et le Programme d’action adoptés par consensus à
l’issue de la Conférence mondiale de Durban. Deux éléments importants ressortent de ces documents. Ils
reconnaissent pour la première fois que l’esclavage et la traite des esclaves constituent un crime contre
l’humanité et aussi que le colonialisme a engendré le racisme et que ses effets ont contribué au maintien
des inégalités sociales et économiques dans de nombreuses parties du monde contemporain. En outre, la
communauté internationale a pu identifier précisément les victimes de la discrimination raciale et les
groupes qui ne bénéficient pas d’une protection spéciale, parmi lesquels figurent notamment les personnes
d’ascendance africaine, et envisager les moyens de réparation pour les victimes, comme elle ne l’avait
encore jamais fait auparavant. La reconnaissance officielle et la prise en compte des difficultés rencontrées
par les victimes de multiples formes de discrimination est également au cœur de l’élaboration de toute
stratégie efficace de lutte contre la discrimination.
86. Il est indispensable à présent de concrétiser les engagements pris à Durban. Le Gouvernement
brésilien a déjà pris des mesures importantes en ce sens au niveau national, annonçant notamment la mise
en place de programmes d’action positive en vue de remédier aux inégalités historiques dont les personnes
d’ascendance africaine sont victimes au Brésil. Au niveau international, il reste encore beaucoup à faire :
désigner les cinq experts éminents indépendants, créer au sein du Haut-Commissariat l’unité de lutte
contre la discrimination, inclure dans le mandat des rapporteurs spéciaux compétents l’obligation de suivre
l’application de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, toutes tâches auxquelles la
commission devra s’atteler pendant sa cinquante-huitième session.
87. Le représentant du Brésil cède ensuite la parole à un représentant de la Fondation nationale des
autochtones du Brésil pour évoquer la question des communautés autochtones dans ce pays.
88. M. TERENA (Brésil) dit que les peuples autochtones du Brésil qui sont au nombre de 230 ont
toujours lutté pour pouvoir exercer leurs droits à la vie, à la terre, à l’éducation, à la santé et au
développement. Le Gouvernement brésilien leur a reconnu le statut de « peuple » et accordé plus de
100 millions d’hectares de terres, soit 12% du territoire national. La Conférence de Durban, au cours de
laquelle le Gouvernement brésilien a pris des engagements, est la preuve qu’un nouveau dialogue est
possible entre les peuples autochtones et non autochtones. Pour la première fois dans l’histoire du
Brésil, le Gouvernement fédéral a nommé une autochtone, membre de l’ethnie des Parecis au Conseil
national de l’éducation et a créé un Conseil national contre la discrimination chargé de s’occuper des
questions relatives aux peuples autochtones et aux personnes d’ascendance africaine, avec l’appui de
personnalités non autochtones, comme M. Pineheiro, actuel Secrétaire d’État aux droits de l'homme.
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Les peuples autochtones du Brésil qui ont été longtemps considérés comme des êtres sans âme et des
entraves au développement sont prêts à engager le dialogue avec les institutions financières multilatérales,
pour que le développement soit non seulement économique mais aussi social, que les programmes mis en
place soient appliqués non seulement pour les autochtones mais avec eux.
89. Pour conclure, l’intervenant félicite l’ONU, et en particulier le Groupe de travail sur les populations
autochtones de la Commission pour la création de l’Instance permanente sur les questions autochtones et
lance un appel aux États membres pour qu’ils fassent en sorte que la Déclaration sur les droits des peuples
autochtones soit adoptée avant 2004, dernière année de la Décennie internationale des populations
autochtones, dans le cadre de la mise en œuvre des recommandations formulées à la Conférence de
Durban.
La séance est levée à 18h10.
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