BIOLOGIE THERMIQUE DES LARVES ET JUVENILES DU

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BIOLOGIE THERMIQUE DES LARVES ET JUVENILES DU
DEUXIEMES JOURNEES RECHERCHE FILIERE PISCICOLE
1 & 2 Juillet 2009 – PARIS
BIOLOGIE THERMIQUE DES LARVES ET JUVENILES
DU POISSON-CHAT PANGASIANODON HYPOPHTHALMUS (SAUVAGE, 1878)
Baras Etienne, Raynaud Thomas, Slembrouck Jacques, Cochet Christophe,
Caruso Domenico, Legendre Marc
IRD, UR 175, 361 Rue J.F. Breton, BP 5095, 34196 Montpellier cedex 05, France
Résumé
La température de l’eau est probablement le facteur environnemental le plus déterminant pour
les espèces poïkilothermes. Elle affecte toutes les réactions physiologiques, et donc la
croissance, mais aussi le comportement et la survie. Les preferenda vis-à-vis de la température
varient non seulement entre espèces et populations, mais aussi en fonction de l’âge et surtout
de la taille des individus. La biologie thermique des poissons et son évolution au cours de
l’ontogenèse sont méconnues chez la plupart des espèces tropicales, même chez celles qui
font déjà l’objet d’une production massive. La présente étude a pour objectif d’analyser les
variations ontogénétiques des interactions entre température, survie, croissance et
hétérogénéité de tailles chez les larves et juvéniles du poisson-chat Pangasianodon
hypophthalmus (Pangasiidae), une des espèces-phares de l’aquaculture tropicale d’eau douce.
Des groupes de 300 individus ont été élevés en bacs de 30 L en circuit fermé, sous une
photopériode de 12L :12N, à des températures (T°) de 23.0, 25.5, 28.0, 30.5 et 33.0°C (deux
réplicats par traitement). Les poissons étaient alimentés en léger excès, exclusivement pendant
les heures de lumière, à raison de six repas par jour, avec des nauplii d’Artemia puis des
aliments composés (56 % protéines) à partir de 100 mg de poids corporel moyen (Pm). Deux
expériences ont été réalisées, une ciblée sur les 4 premiers jours d’alimentation exogène,
pendant lesquels la mortalité par « cannibalisme » peut être très élevée (contrôle quotidien de
la croissance), et la seconde sur des poissons de Pm > 2 mg, ayant dépassé le stade de
développement associé à cette mortalité (contrôle de survie et de croissance tous les 4 jours,
jusqu’à un Pm de 500 mg à 1 g). Pour chaque T°, un modèle de croissance SGR versus Pm a
été élaboré à partir de la relation entre Pm et âge. La comparaison des SGR de poissons de Pm
identique aux différentes T° a permis de déterminer l’optimum thermique de croissance
(T°opt) associé à ce Pm, et l’analyse des variations de T°opt au cours de l’ontogenèse.
La T°opt de P. hypophthalmus augmente rapidement de 31°C à 1 mg jusqu’à environ 34°C à
4 mg, puis elle décroît d’environ 1°C pour chaque augmentation du Pm d’un facteur 10.
L’hétérogénéité de tailles (coefficient de variation du poids moyen, CVPm) est d’autant plus
élevée, et la survie d’autant plus basse, que la température s’écarte de T°opt. À 25.5°C, la
croissance de 2 mg à 1 g requiert 31 jours, s’accompagne d’une mortalité de 50 % et d’un
CVPm de 36 %. À 30.5 et 33.0°C, cette croissance s’accomplit en 17-18 jours, la mortalité est
inférieure à 12 % et le CVPm inférieur à 25 %. L’effet de la température sur la survie est plus
marqué au cours des premiers stades de vie, en raison d’une plus forte sensibilité intrinsèque
des jeunes larves aux basses températures (létales en dessous de 23°C), et du fait que la
croissance plus lente à basse température prolonge la phase à risque de « cannibalisme ».
Ces résultats mettent en évidence que la température optimale pour la croissance permet
également de minimiser la mortalité et l’hétérogénéité de tailles chez P. hypophthalmus,
comme chez les autres modèles biologiques où ces interactions ont été étudiées, ce qui
renforce l’intérêt de réaliser les élevages à une température aussi proche possible de T°opt.