Planche 3 - Musée des Confluences

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Planche 3 - Musée des Confluences
Les cahiers du Musée des Confluences - Études scientifiques n°3, 2012 : 57-64
Conservation, manipulation
et conditionnement des éléments
humains, l'expérience
du musée des Confluences
Par Nelly CHAREYRON1 (en collaboration avec Isabelle GEORGE et François VIGOUROUX)
Résumé : En 2011, plusieurs études sur les éléments
humains du musée des Confluences ont donné lieu à une
campagne d'amélioration de leurs conditions de conservation dans les réserves du musée des Confluences. Des
nouveaux conditionnements répondant aux exigences de
conservation préventive et de dignité des éléments
humains ont été élaborés pour les momies péruviennes
et égyptiennes et la réserve qui les accueille a été
réaménagée.
Mots-clés : Elément humain, momie péruvienne, momie
égyptienne, conditionnement, conservation, conservation
préventive, matériaux de conservation.
Introduction
S’il existe un débat autour des éléments humains dans les collections du musée des Confluences, en particulier autour de leur
restitution, ils sont actuellement dans nos réserves et nous
avons le devoir de les préserver, quels que soient leurs destination et usages futurs. Dans ce cadre, il est essentiel d’évaluer et
de faire évoluer nos pratiques régulièrement pour répondre au
mieux aux besoins de ce type de collection.
Les études documentaires récemment menées au service des
collections sur les momies égyptiennes et péruviennes ont été
l’occasion, pour le service Régie des collections, d’amorcer une
nouvelle réflexion sur le sujet. En se basant sur les grands principes de conservation et sur l’état des éléments humains qui se
trouvent dans l’ancien bâtiment Guimet du Muséum situé 28
boulevard des Belges, nous avons tenté d’améliorer les condi-
1
Abstract: In 2011, a number of studies on the human elements in the musée des Confluences gave rise to a campaign to improve their conservation conditions in the
storage areas of the musée des Confluences. New management approaches meeting the requirements of preventive
conservation and dignity of human elements have been produced for Peruvian and Egyptian mummies, and the storage
space housing them has been refurbished.
Keywords: Human elements, Peruvian mummy, Egyptian
mummy, management, conservation, preventive conservation, conservation materials.
tions de conservation en intervenant sur le conditionnement des
momies et leur stockage en réserve. Trois exemples illustrent
cette démarche.
1 - Prérequis et cadre d’étude
1.1 - Grands principes de conservation
des éléments humains
Comme la plupart des éléments organiques, les éléments
humains sont particulièrement sensibles aux variations climatiques ainsi qu’à la lumière, facteurs qui entraînent des dégradations physico-chimiques irréversibles des tissus biologiques.
D’une façon générale, une atmosphère trop humide favorise le
développement de moisissures et le risque d’infestation alors
qu’une atmosphère trop sèche provoque une déshydratation et
des altérations structurelles des tissus organiques. Ce sont les
Musée des Confluences, 28 boulevard des Belges, 69006 Lyon. [email protected].
LES CAHIERS DU MUSÉE DES CONFLUENCES
ÉTUDES SCIENTIFIQUES N°3
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phénomènes de dilatation et de rétractation successives de la
matière qui occasionnent le plus de dégradations. On recommande généralement une atmosphère de 50 % d’humidité relative pour une température de 18-20°C. La stabilité climatique
est indispensable à une bonne conservation.
L’exposition prolongée et répétée au rayonnement ultraviolet
provoque, quant à elle, des réactions de photo-oxydation (décoloration et destruction des tissus organiques).
Afin d’éviter au maximum la venue des insectes nuisibles, les
réserves doivent être propres et ventilées. Une inspection régulière ainsi que la pose de pièges doivent être envisagées.
L’intervention humaine enfin est souvent le premier facteur de
dégradation. Les mauvaises conditions de stockage peuvent
générer des accidents mais également être à l’origine d’un
empoussièrement accru qui favorise le développement des moisissures et le risque d’infestations. Le mobilier revêt donc une
double fonction d’organisation et de protection des collections
visant à limiter les manipulations inutiles tout en offrant des
conditions de consultation facilitées. La sensibilisation des
agents à la manipulation, au conditionnement, au stockage et à
la veille se révèle également indispensable.
pas optimales en raison de la vétusté de celui-ci. La réserve
« Momies » n’est pas équipée de système de climatisation. Elle
présente une température de 20°C en moyenne, pour une hygrométrie de 40 % d’humidité relative mais ces conditions sont stables. Elle possède un éclairage néon sans UV, mis en route
ponctuellement lors des visites.
Avant réaménagement, les momies étaient disposées sur des
étagères en métal époxy où elles reposaient sur des matériaux
isolants (papier de soie neutre ou papier barrière), ou bien sur
des plateaux en bois couverts de Melinex®. Pour la plupart, elles
étaient protégées de la poussière par du Mylar®, du Tyvek® ou
du papier de soie neutre (pl. 1, fig. 1). Certaines d’entre elles
étaient restées dans les anciennes vitrines de présentation du
début du XXe siècle, en bois et verre, posées sur les étagères
(pl. 1, fig. 3). Seule la momie dite « l’Égyptien de Lyon » (momie
débandelettée) était conservée à part dans sa vitrine de présentation des années 1970 (cloche sur pied) (pl. 1, fig. 2).
Ces momies n’étaient à l’abri ni des agressions extérieures, ni
des regards.
Enfin, cette réserve était extrêmement exiguë de par la disposition des étagères. Les dimensions et les poids importants des
momies, associés à ce manque de place, rendaient leurs mouvements difficiles (pl. 1, fig. 4).
1.2 - Premières réalisations dans l’ancien bâtiment
Guimet et au CCEC (pl. 1, fig. 5-8)
Un premier travail de reconditionnement et d’amélioration des
conditions de stockage des éléments humains a été réalisé au
moment du transfert des collections de sciences naturelles (dont
l’ostéologie et des éléments humains en alcool) au Centre de
Conservation et d’Étude des Collections (CCEC) en 2002. Le
déménagement des collections de l’ancien bâtiment du
Muséum vers le CCEC a nécessité un conditionnement adapté
pour leur transport. La majorité des crânes, par exemple, a été
placée dans des boîtes de manipulation individuelle qui sont
encore d’usage aujourd’hui en réserve (pl. 1, fig. 5-6)..
En 2003, dans l’ancien bâtiment Guimet, les momies ont été
déplacées pour être réunies dans une seule et même réserve.
Des conditionnements temporaires ont été façonnés à cette
occasion pour faciliter leur déplacement. Une anoxie dynamique
a été effectuée sur l’ensemble des momies (Alain Renard). Lors
de ces mouvements, des opérations de consolidation et de restauration des matériaux périphériques tels que les textiles et les
pièces de cartonnage posées sur les corps (Madeleine Fabre,
Patricia Dal Pra et Frédérique Vincent) ainsi que quelques structures de maintien (Benoit Coignard) ont également été réalisées
(pl. 1, fig. 7-8)..
Il faut souligner enfin le travail de sensibilisation du personnel
ces dernières années, en termes de conservation préventive, de
manipulation et de conditionnement, lors du « chantier des collections ». A cette occasion, des bilans sanitaires des réserves
et des cahiers des charges pour des restaurations futures ont
également été établis.
1.4 - Bilan sanitaire des momies
(d’après Cartel Collections, 2007)
En vue de leur passage au chantier des collections, un bilan
sanitaire des momies a été réalisé en 2007 par l’équipe de
Cartel Collections, agence spécialisée dans le conseil et l’assistance des biens culturels.
Les textiles, les bandelettages ou l’habillement ont subi une oxydation plus ou moins importante selon les cas, à l’origine d’une
fragilisation des fibres, des déchirures et des pertes de matière.
Certains débandelettages complets ont causé une perte d’information irrémédiable allant jusqu’à la disparition totale du textile.
Les nombreuses variations des conditions climatiques qu’ont
subi les momies par le passé ont entraîné des déchirures et des
cassures ainsi que des zones de desquamations. Certaines
momies égyptiennes, notamment celles d’époque tardive
(Fouilles Gayet à Antinoé), ont perdu des fragments de feuilles
d’or qui les recouvraient.
Certaines connexions anatomiques ont été rompues lors de
l’embaumement ou de l’inhumation, ou bien lors de leur transport ou de manipulations au sein du musée.
L’ensemble des sujets semble sain même si certains présentent
des traces d’anciennes infestations (galeries et exuvies) inactive
aujourd’hui.
2 - Réalisations menées dans l’ancien bâtiment
Guimet
2.1 - Plan d’intervention
1.3 - Conditions de conservation de la réserve
“Momies”, avant réaménagement (pl. 1, fig. 1-4)
Les momies égyptiennes et péruviennes sont conservées dans
une réserve du bâtiment Guimet (sis 28 boulevard des Belges),
dévolue aux seules momies, dite réserve « Momies ». Les conditions climatiques et de stockage du bâtiment Guimet ne sont
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En réserve, malgré l’absence de système de climatisation, les
conditions de conservation sont convenables et il est possible
de veiller à la stabilité des paramètres climatiques. Afin d’obtenir une accessibilité plus grande et sans risque pour les momies,
une réflexion sur le système de stockage a été lancée et un
réaménagement de la réserve a été entrepris.
Pour améliorer la manipulation et la protection des momies qui
présentent une grande fragilité, une campagne de conditionnement a été mise en œuvre avec des matériaux de conservation
idoines dans un souci d’innocuité et de pérennité. Ces conditionnements assurent une protection optimale face à la lumière
et à la poussière et facilitent la manipulation. Les matériaux utilisés sont les suivants : Tyvek®, papier de soie neutre, papier
barrière, Melinex siliconé®, sangles en coton, rivets plastiques,
fil de coton, Mylar®, polypropylène cannelé (de différentes densités), colliers de serrage plastique, bandes auto-agrippantes
autocollantes.
Mais c’est également pour protéger la dignité de la personne et
du corps humain que nous avons créé des conditionnements
adaptés à ces corps ou éléments humains. Outre une préservation évidente contre les agressions extérieures, ces conditionnements permettent de leur donner une nouvelle “intimité”.
Enfin, l’ensemble du personnel du service des collections a été
sensibilisé à la manipulation des momies lors d’interventions de
restaurateurs mais également sur le chantier des collections.
L’étude récente menée sur les momies coptes a permis d’approfondir ce savoir-faire au contact de Laure Cadot, restauratrice
d’objets ethnographiques spécialisée dans les restes humains.
2.2 - Opérations récentes
En 2011, plusieurs études ont permis de redynamiser cette
réflexion sur les éléments humains et sur l’amélioration de leurs
conditions de conservation. Il s’agit ici de présenter un état des
lieux des pratiques actuelles à travers trois opérations concernant les momies péruviennes, les momies coptes récolées et
étudiées par le musée du Louvre et les têtes de momies péruviennes.
Ces différents travaux ont été réalisés en équipe avec des
agents d’horizons professionnels différents : Olivier Bathellier,
Isabelle George, François Vigouroux, Patrice Ourdouillie, Richard
Boyer, Philippe Lorain, Karine Madrigal, Nelly Chareyron,
Emmanuelle Barbe, Laure Cadot, Magali Coudert, Marie-Paule
Imberti, Leonid Velarde et Sonia Guillén.
2.2.1 - Momies péruviennes (pl. 2, fig. 1-6)
Le musée des Confluences possède trois momies péruviennes
dont deux ont été exposées jusqu’en 2007 avant de rejoindre les
autres momies en réserve. Elles ont été placées sur des étagères, enveloppées de Tyvek®, lequel a été dégradé par des
manipulations successives. L’étude menée par IMBERTI & VELARDE
(2012) a donné lieu à l’élaboration d’un conditionnement adapté.
Ces momies sont en position accroupie (genoux contre menton)
et ne sont pas bandelettées. Elles présentent une dessiccation
générale importante qui a provoqué des soulèvements et des
craquelures de la peau dus en partie aux variations climatiques
qu’elles ont subies par le passé.
Trois boîtes en polypropylène cannelé gris de densité moyenne,
assemblées par des rivets plastiques, ont été confectionnées à
leur dimension. Pour faciliter leur mouvement, elles sont munies
de poignées en sangle en coton. L’intérieur est capitonné par
des plaques de mousse couvertes de Tyvek® sur le fond et les
parois latérales. Les momies sont placées couchées dans du
papier de soie neutre entouré de sangles en coton pour faciliter
la préhension (pl. 2, fig. 1-2).
L’extraction des boîtes restait toutefois difficile et à l’occasion
de l’opération de récolement et d’étude des momies coptes par
le Louvre (cf. MADRIGAL & EMMONS, 2012), le système a encore
été amélioré avec la réalisation de boîtes à quatre pans rabattables avec un plateau amovible à l’intérieur. Les boîtes des
momies péruviennes ont suivi cette évolution dans un second
temps (pl. 2, fig. 3).
Enfin, suite à la venue de Sonia Guillén, spécialiste des momies
péruviennes, de nouvelles améliorations pourraient être apportées en remplaçant le Tyvek® et le papier de soie par de la toile
de coton. Ce matériau absorbe les sucs en présence et évite
l’adhérence du corps. Des matelas en toile de coton remplis de
microbilles épousant parfaitement la forme des momies permettraient un meilleur calage. Il serait enfin nécessaire d’appliquer
une coiffe de maintien (type “charlotte”) sur les cheveux. Ces
modifications ont été testées et seront apportées prochainement sur les trois momies (pl. 2, fig. 4-6).
2.2.2 - Momies égyptiennes (pl. 3, fig. 1-12)
Les momies égyptiennes se trouvaient dans des anciennes
vitrines de présentation du début du XXe siècle. Ces vitrines en
bois et en verre, contenaient une à deux momies ainsi que de
nombreux textiles remplissant entièrement les plateaux bois qui
les supportent (pl. 1, fig. 3).
C’est à l’occasion de l’opération de récolement et d’étude des
momies provenant des fouilles de Gayet à Antinoé, par le
Louvre, qu’il a fallu réfléchir à un conditionnement plus adapté
(cf. MADRIGAL & EMMONS, 2012). Les neufs momies concernées
devaient être accessibles aux chercheurs mais également transportables facilement pour être scannées à l’Hôpital Édouard
Herriot à Lyon.
Il s’agit de momies non bandelettées (à l’origine) accompagnées
de nombreux textiles. Ces ensembles sont extrêmement fragiles
et présentent un aspect cassant avec pulvérulence de certains
textiles et des problèmes de démembrement et de mobilité de
certains éléments (têtes, pieds, jambes, bras).
Sortir les momies des vitrines
La première étape a consisté à extraire les momies de leur
vitrine. Le mouvement des plateaux supérieurs était assez aisé,
contrairement aux plateaux inférieurs, cloués aux montants en
bois. Certains plateaux présentaient des fragments de verre et
de mastic provenant des vitrines.
Les plateaux extraits ont ensuite été placés sur des pièces de
Tyvek®, puis posés sur des étagères dans l’atelier de restauration. Elles ont ensuite été étudiées l’une après l’autre sur des
tréteaux en bois.
L’élaboration d’un conditionnement adapté
Afin de répondre aux contraintes évoquées plus haut, des boîtes
à quatre pans rabattables avec plateau de manipulation amovible à l’intérieur ont été réalisées. Du polypropylène cannelé gris
de haute densité a été utilisé, renforcé par des baguettes de
bois traité autoclave, vissées sur les plateaux et les boîtes afin
de rigidifier l’ensemble (pl. 3, fig. 3).
Les boîtes sont maintenues fermées par de larges bandes autoagrippantes autocollantes renforcées par des coutures et des
colliers de serrage en plastique. Les plateaux sont facilement
manipulables lorsque les boîtes sont totalement ouvertes et
donc l’accès à la momie est simplifié (pl. 3, fig. 2-3).
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Les boîtes sont refermées par des couvercles à rebords façonnés dans le même matériau, sans charnière pour les dissocier
complètement des boîtes et limiter les problèmes d’encombrement. Ces couvercles amovibles peuvent être enlevés et stockés
en dehors de la réserve au besoin (pl. 3, fig. 1).
Afin de faciliter la manipulation, des poignées en bande de
coton ont été ajoutées sur les plateaux et les boîtes. Les numéros d’inventaire ont été inscrits sur les boîtes et sur les couvercles de manière uniforme (pl. 3, fig. 1).
Le transfert des momies
L’étape suivante a consisté à transférer les corps des anciens
plateaux vers les nouveaux plateaux de manipulation, opération
réalisée dans l’atelier de restauration avec l’assistance de Laure
Cadot.
À l’aide de cinq spatules glissées sous le corps, la momie a légèrement été soulevée et « décollée » si nécessaire de son ancien
support. Cinq feuilles de papier barrière, de 50x70 cm environ,
ont été glissées les unes après les autres sous le corps, à l’aide
d’un carton rigide amovible de 50x50 cm. Cette interface temporaire permet d’isoler le corps du plateau et constitue une sorte
de civière qui facilitera son glissement sur une interface permanente supportant l’intégralité du corps et de ses parures vestimentaires (pl. 3, fig. 4-6).
Sur le nouveau plateau, une feuille de papier barrière de même
longueur, faisant office d’interface neutre permanente, a été
placée sur une grande pièce de Tyvek ® . Certaines momies
recouvertes de baumes pégueux à température ambiante ont
nécessité une feuille de Melinex siliconé® entre le papier et la
momie, afin de limiter les risques d’adhérence (pl. 3, fig. 7).
L’ancien et le nouveau plateau ont ensuite été placés côte à côte
sur des tréteaux afin de réaliser le transfert des momies par glissement, grâce aux feuilles de papier barrière temporaires. Après
avoir retiré ces dernières une à une, la momie repose sur son
nouveau plateau, directement sur le papier barrière permanent
et le Tyvek® (pl. 3, fig. 8-9).
Enfin, après d’éventuels calages en papier de soie, elle est
recouverte de papier de soie puis par les pans du Tyvek®. Le
numéro d’inventaire est reporté sur le Tyvek® ainsi qu’une indication précisant la localisation de la tête et des pieds (pl. 3, fig.
10). Les plateaux ont ensuite été placés dans les boîtes
ouvertes.
Le déplacement des momies pour le scanner
Pour des raisons d’hygiène évidentes en milieu hospitalier,
chaque momie, avec son plateau de manipulation, a temporairement été placée dans un « body bag », housse en plastique hermétique fermée par une fermeture éclair, avant d’être posée
dans sa boîte (pl. 3, fig. 2).
Les boîtes ont été transportées manuellement sur des chariots,
et en camion jusqu’à l’hôpital. Sur place, la manipulation a été
simple et rapide, les boîtes étant totalement ouvertes le long de
la table de scanner sur laquelle les plateaux ont été placés
directement. L’opération inverse a été réalisée sans difficulté.
L’aménagement de la réserve
Les nouvelles boîtes de manipulation ont nécessité une réorganisation de la réserve qui nous a permis d’optimiser l’accessibilité.
L’ « Égyptien de Lyon » a été conditionné dans une boîte à quatre
pans rabattables, libérant ainsi l’espace pris par sa vitrine. Deux
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travées d’étagères de la profondeur des boîtes ont été installées
sur quatre niveaux pouvant accueillir jusqu’à 8 boîtes par travée
(pl. 3, fig. 11-12).
Cette installation a permis de libérer un grand espace devant les
étagères permettant l’accès aux momies avec un transpalette
électrique ou une table roulante.
Si les couvercles offrent une protection évidente, le choix a été
fait de ne pas les conserver en réserve pour l’instant afin de ne
pas créer d’espace confiné autour de ces momies. A terme, la
réalisation de petites ouvertures masquées par un matériau
poreux (de type tarlatane) dans la boîte ou le couvercle est envisagé, ce qui permettrait d’éviter le confinement même avec les
couvercles.
2.2.3- Têtes de momies péruviennes (pl. 2, fig. 7-10)
Suite aux essais concluants des boîtes à pans rabattables sur
les momies coptes, nous avons adapté ce procédé aux têtes de
momies péruviennes.
Il s’agit de petites boîtes en polypropylène cannelé, de faible
densité en raison de leur poids, qui s’ouvrent sur les quatre côtés
et se referment à l’aide de bandes auto-agrippantes autocollantes (pl. 2, fig. 10). Un plateau mobile dans le même matériau,
couvert d’une mousse rivetée (rivets plastiques), prend place à
l’intérieur (pl. 2, fig. 7 et 8). En fonction de chaque morphologie,
des calages en mousse sont thermocollés sur le plateau (pl. 2,
fig. 7). La tête, enveloppée de papier de soie neutre est posée
sur ce plateau ajusté, puis mis dans la boîte (pl. 2, fig. 9). A
terme, la réalisation de couvercles avec ouvertures occultées par
un matériau poreux (de type tarlatane) est envisagée.
Les numéros d’inventaire sont marqués sur le devant de la boîte.
Conclusion
Ces trois exemples ont permis d’illustrer l’évolution des pratiques en matière de conservation avec l’utilisation de matériaux neutres adaptés. Les systèmes utilisés, lorsqu’ils sont
performants, sont améliorés et nous souhaitons poursuivre ces
perfectionnements. Les opérations menées sur les momies
coptes et péruviennes nous ont permis de tester avec efficacité
l’emploi de boîtes à pans rabattables faites sur-mesure et qui se
sont révélées efficace aussi bien en termes de conservation, de
manipulation, de transport et d’optimisation dans le stockage en
réserve. Des améliorations seront encore à prévoir et il est envisagé d’étendre ce système aux autres momies, à d’autres éléments humains voire à d’autres types d’objets ethnographiques
de nos collections.
Il est important de mettre en avant la réflexion collective qui
s’est mise en place lors de ces opérations. C’est par la réunion
de savoir-faire de professions différentes, conservateurs, régisseurs, techniciens et restaurateurs, que nous avons pu proposer
des solutions adaptées aux éléments humains. Il faut rappeler
aussi le nombre de personnes mobilisées ainsi que le temps
considérable que ces opérations ont représenté, de la conception à la réalisation.
Enfin, la place singulière qu’occupent les éléments humains
dans les collections d’ethnologie nous oblige à les traiter de
manière particulière. A la question de conservation s’ajoute
celle du respect des éléments humains. Ces conditionnements
offrent une protection optimale tout en respectant la dignité
humaine.
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Planche 1
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Fig. 1-4 : Réserve "Momies" avant réaménagement. 1 – Des manipulations délicates. 2 – L'Égyptien de Lyon dans sa
vitrine de présentation. 3 – Momie dans une vitrine de présentation au début du XIXe siècle. 4 – Momies sur plateaux, sans ou
avec protection de Mylar®. ©Régie des Collections
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Fig. 5-8 : Premières réalisations au Muséum et au CCEC. 5-6. – Conservation des crânes au CCEC. 7 – Déplacement des
momies au Muséum en 2003. 8 – Anoxie dynamique réalisée au Muséum en 2003.
©Régie des Collections, François Vigouroux, Isabelle George, Marie-Paule Imberti
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Planche 2
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Fig. 1-6 : Momies péruviennes. 1-2 – Premières boîtes réalisées. 3 – Boîte à quatre pans rabattables. 4-5 – Coussin rempli
de microbilles. 6 – Coiffe de maintien. ©Marie-Paule Imberti, Nelly Chareyron.
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Fig. 7-10 : Têtes de momies péruviennes. 7-8. – Plateau en polypropylène avec mousse rivetée et mousse thermocollée à
la forme du crâne. 9 – Le crâne est emballé dans du papier de soie neutre. 10 – Boîte à quatre pans rabattables maintenus par
des bandes auto-agrippantes. ©Isabelle George, François Vigouroux, Emmanuelle Barbe.
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Planche 3
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Fig. 1-12 – Momies égyptiennes. 1-3. – Boîte à quatre pans rabattables. 4-5 – Des feuilles de papier barrière temporaire
sont glissées sous la momie à l'aide de spatules. 6 – La momie est maintenant sur une interface temporaire permettant de la
faire glisser d'un plateau à l'autre. 7 – Le nouveau plateau est installé parallèlement à l'ancien plateau. 8 – À l'aide de l'interface temporaire, la momie est glissée sur le nouveau plateau. 9 – L'interface temporaire est enlevée. 10 – La momie est recouverte de papier de soie neutre puis du Tyvek® sur lequel elle repose. 11-12 – Aménagement de la Réserve.
©Isabelle George, Karine Madrigal, Nelly Chareyron.
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LES CAHIERS DU MUSÉE DES CONFLUENCES
ÉTUDES SCIENTIFIQUES N°3

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