Lien de Téléchargement

Transcription

Lien de Téléchargement
Tiré à part
NodusSciendi.net Volume 15 ième Décembre 2015
Volume 15 ième Décembre 2015
Étude Réunie par
Dr. GAHÉ-GOHOUN Rosine Cinthia
Maître-Assistant
ISSN 2308-7676
Comité scientifique de Revue
BEGENAT-NEUSCHÄFER, Anne, Professeur des Universités, Université d'Aix-la-chapelle
BLÉDÉ, Logbo, Professeur des Universités, U. Félix Houphouët Boigny, de Cocody-Abidjan
BOA, Thiémélé L. Ramsès, Professeur des Universités, Université Félix Houphouët Boigny
BOHUI, Djédjé Hilaire, Professeur des Universités, Université Félix Houphouët Boigny
DJIMAN, Kasimi, Maître de Conférences, Université Félix Houphouët Boigny
KONÉ, Amadou, Professeur des Universités, Georgetown University, Washington DC
MADÉBÉ, Georice Berthin, Professeur des Universités, CENAREST-IRSH/UOB
SISSAO, Alain Joseph, Professeur des Universités, INSS/CNRST, Ouagadougou
TRAORÉ, François Bruno, Professeur des Universités, Université Félix Houphouët Boigny
VION-DURY, Juliette, Professeur des Universités, Université Paris XIII
VOISIN, Patrick, Professeur de chaire supérieure en hypokhâgne et khâgne A/L ULM, Pau
WESTPHAL, Bertrand, Professeur des Universités, Université de Limoges
Organisation
Publication / DIANDUÉ Bi Kacou Parfait,
Professeur des Universités, Université Félix Houphouët Boigny, de Cocody-Abidjan
Rédaction / KONANDRI Affoué Virgine,
Professeur des Universités, Université Félix Houphouët Boigny, de Cocody-Abidjan
Production / SYLLA Abdoulaye,
Maître de Conférences, Université Félix Houphouët Boigny, de Cocody-Abidjan
2
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
Sommaire
1- Pr SYLLA Abdoulaye, « Compendieusement vôtre, poétique de l’infiniment
petit chez Clément Marot »
2- Dr AKREGBOU Boua Sylvain, « Usages du langage SMS en milieu universitaire
ivoirien »
3- Dr ACHIÉ Arthur Modeste, « Espace, altérité et publicité : regard croisé sur
Kibibi de Roro »
4- Dr KOUACOU Jacques Raymond Koffi, « Origines, formes et significations de
la violence { l’égard des enfants dans l’univers des contes africains de
l’orphelin »
5- Dr KOUAME Yao Emmanuel, « Morphologie compositionnelle et sémantique
du Gouro »
6- Dr BONI Assié Jean-Baptiste, « Le personnage, un caractère non fondamental
dans les scenarii de Honore N’zue »
7- Dr KANAZOE Sénon, « Etude de quelques faits d’appropriation du français en
milieu scolaire au Burkina : le cas de l’argot du collégien »
8- Dr DEDOMON Claude, « Du fait divers à la fiction ou la réappropriation du réel
dans Nagasaki d’Éric Faye »
9- Dr KPANYAWNE Thadée Balouhib Somda, « L’œuvre littéraire comme école »
10- Dr KADJA Pascal Nambo et Dr KONE Bassémory, « Etude des principaux
déterminants de la prévalence du VIH/SIDA en Côte d’Ivoire, enjeux et défis {
l’horizon 2020 »
11- Dr DOUA Edmond, « Approche socioculturelle et communicationnelle des
médias »
3
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
12- Dr. YAMEOGO Kandayinga Landry Guy Gabriel, « Analyse stylistique de
Kareme, pas de caramel ni de caresse de gombo.com »
13- Dr KONAN Richmond Alain, « Agota Kristof ou l’expérience exilique en
partage »
14- ANDOBLÉ Marcel, « Représentation de la femme et le mythe de l’amazone :
exemple de Assia Djebar, de Calixthe Beyala, de Fatou Keita et de Mariama
Bâ »
15- Dr. ZÉBIÉ Yao Constant, « L’intermédialité dans le paradis français de Maurice
Bandaman : une écriture « écranique »
16- Dr. KOMENAN Casimir, « The poetics of extreme poverty in John-Maxwell
Coetzee’s The Master of Petersburg »
17- Dr. GAHÉ-GOHOUN Rosine Cinthia, « La cosmogonie dans le Timée de Platon,
projection contemporaine d’un monde globalisé »
4
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
ESPACE, ALTERITE ET PUBLICITE : REGARD CROISE SUR KIBIBI DE RORO
Dr ACHIE Arthur Modeste
Université Peleforo Gon Coulibaly de Korhogo (Côte d’Ivoire)
INTRODUCTION
La littérature comparée, briseuse de barrières et de frontières, plonge ses
pieds en sociologie et explore les épineuses questions du genre et du sexe. A travers
les études sur le genre (gender studies) et les minorités sexuelles (queer studies), les
réalités socio-culturelles sont abordées et lues sous tous les angles possibles. Des
réalités en perpétuelle mutation dans un monde lui même mouvant. Chaque espace,
dans sa traversée du temps, construit ou déconstruit son mode de vie. Les migrations
d’un point { un autre sont facteurs de transport de mœurs, de civilisation, d’un
espace à un autre. Il y a un véritable commerce entre les mondes, source d’influence
et aussi de conflit culturel. L’autre, ce grand étranger est espace, espace ambulant. Il
va et vient avec son univers, le conjugue ou non avec ceux qu’il rencontre. La notion
d’altérité, dans cette logique prend la dimension d’un rapport de promotion, de
publicité des valeurs entre les individus, entre les peuples.
Kibibi de Roro est une œuvre musicale qui aborde le thème de l’altérité ainsi
que ceux du gender et du queer dans une perspective poétique. Il s’agit d’une
chanson qui se veut l’écho d’un amoureux qui sacrifie des années { l’attente d’une
femme qui en fin de compte s’avère être un homme. Son auteur Eric Didia alias
Robert Levi Provençal ou encore Roro, est d’origine ivoirienne et animateur radio à
5
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
Radio Nostalgie Abidjan. Il fait son entrée en musique en 20091 avec Kenini act 1,
album produit par Africabox production. Soutenu par un fond musical Rumba, le
texte est déclamé sous forme de slam intercalé par un refrain chanté en lingala,
reprenant la mélodie du refrain du titre « Belle » extrait de notre dame de Paris de
Garou2.
Ce texte sera donc abordé dans une approche comparatiste qui consistera à
établir un rapport entre les espaces évoqués et le fonctionnement du genre tout en
mettant en exergue la dimension littéraire de l’œuvre musicale. La notion d’altérité
qui implique celles du regard et de l’identité s’invitent aussi au cœur du débat. En
outre, il y a intérêt { voir comment la création de Roro en temps que média s’érige en
canal de publicité ou contre publicité d’idéologies et de valeurs.
Cette étude qui imbrique interdisciplinarité (musique-littérature) et culturals
studies se fera { partir d’une démarche basée sur l’intergénérecité et la géocritique.
La géocritique étant «la science des espaces littéraires »3, « [l’] art d’interpréter les
espaces imaginaires »4 et de créer un rapport entre espace imaginaire, fictif, textuel
et l’espace réel, afin d’étudier « les interactions entre espace humains et
littérature »5. Ainsi en sillonnant les différents lieux du texte de Roro, l’on pourra faire
la lumière sur le fonctionnement de la question du genre dans une société bien
donnée théâtre de l’histoire chantée.
1
http://roroshowtime.blogspot.com/p/biographie.html
GAROU, Daniel LAVOIE, Patrick FIORI, « Belle » in Notre Dame de Paris, Acte 1, 1998, Label : Sony
3
Jean-Marie GRASSIN, « Pour une science des espaces littéraires » dans Bertrand WESTPHAL (dir.), La
Géocritique mode d’emploi, Limoges, Presse Universitaire de Limoges, 2000, p. II
4
Jean-Marie GRASSIN, « Pour une science des espaces littéraires » dans Bertrand WESTPHAL (dir.), La
Géocritique mode d’emploi, op.cit, p. XIII
5
Bertrand WESTPHAL, « Pour une approche géocritique des textes », dans Bertrand WESTPHAL (dir.),
La Géocritique mode d’emploi, op.cit, p. 17
2
6
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
La réflexion sera bâtie sur une logique tripartite. Le premier volet de l’analyse
traitera de la littérarité du texte musical en se focalisant sur sa dimension
intergénérique. Quant au second, il sera consacré à une étude géocritique qui
permettra de repérer les différents espaces évoqués par l’auteur, les analyser et de
les mettre ensuite en rapport dans la troisième partie du travail, avec les réalités de
gender et queer telles que apparaissant dans le texte de Roro.
I. LITTERARITE ET INTERGENERICITE
La littérature dans sa définition puise son fondement dans la dimension
esthétique de l’œuvre produite. Aussi le littéraire se distingue-t-il de l’utilitaire
essentiellement par la touche artistique qui permet d’aller au delà de l’usage habituel
fait des matériaux du langage. A ce propos, Georges Mounin dans son Dictionnaire de
la linguistique dira que la « littérarité serait à la littérature ce que la langue est à la
parole chez Saussure, c'est-à-dire ce que toutes les œuvres de la littérature ont en
commun, dans l’abstrait, comme système»6. Et le dominateur commun des œuvres
littéraires reste bien entendu l’esthétique. Celle-ci prend forme dans les ruptures que
crée l’écrivain avec les règles classiques du langage. A travers une manipulation
particulière des signes linguistiques et la convocation, l’invocation de thèmes et
termes de toutes origines, il crée des symboles qui encodent son discours et
l’expulsent du registre utilitaire normatif. Le discours qui entre en littérature devient
une banque de données soumise à lectures diverses, la forme, la structure étant
désormais la clé de lecture du fond. La littérature s’avère être langage d’une autre
6
Georges MOUNIN, Dictionnaire de la linguistique, Paris, P.U.F, 1974, pp 205-206
7
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
dimension, « actualisation de la puissance du langage »7 échappant à toute juridiction.
Ce qui lui confère un statut que Christine Baron caractérise d’exception. Le critérium
de littérarité qui est donc intrinsèquement lié à la capacité de ré-fabrication du
langage dans le discours, s’applique { tous les genres littéraires. Démontrer comment
le texte musical de Roro répond aux caractéristiques littéraires et ce en prenant la
forme de genres divers est l’exercice auquel répond l’analyse qui va suivre.
1 – L’AUTOBIOGRAPHIE OU LA PUBLICITE DE SOI AU CŒUR DU CHANT
L’autobiographe est auteur, narrateur et personnage de son texte. En
remplissant simultanément ces trois fonctions, il décide de se dire, ou de re-créer son
moi { travers sa plume. Il s’introduit dans le monde fictionnel de l’écriture { travers le
paradoxal désir de préserver son identité référentielle. Sur cette base le texte de
Roro nous invite à revivre un épisode de sa vie. Les personnages principaux de son
récit sont, Kibibi la femme de ses rêves et Roro, le narrateur autodiégétique. En
réalité Roro est le diminutif de Robert Levi Provençal pseudonyme de l’animateur
radio ERIC DIDIA, auteur de « Kibibi ». Une étude numérique du pronom personnel
sujet « je », permet de relever cent quatre (104) fois le mot-outil, marque de la
première personne du singulier. Quant au diminutif Roro il apparaît 10 fois et le
pseudonyme Robert Levi Provençal une seule fois. Tous les critères du récit
autobiographique tels que confinés dans le « pacte autobiographique »8 de Lejeune
Philippe sont réunis dans le texte:
1- Au niveau de la mise en forme du langage : il s’agit d’un récit en prose
relatant une histoire.
7
Cédric CHAUVIN, « Jean Bessière, Quel statut pour la littérature ? (2001) et Le Roman contemporain ou
la Problématicité du monde (2010) », ReS Futurae [En ligne], 1 | 2012, mis en ligne le 02 octobre 2012,
consulté le 01 octobre 2015. URL : http://resf.revues.org/184
8
Philippe LEJEUNE, Le pacte autobiographique, Paris, Seuil, 1975, P. 15
8
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
2- Au niveau du sujet traité : l’histoire relatée concerne la vie personnelle d’un
individu existant, Eric Didia
3- Au niveau de la situation de l’auteur : l’auteur Roro est aussi narrateur
4- Au niveau de la position du narrateur : le narrateur Roro est aussi
personnage principal
Le lien entre le « je », le narrateur, le personnage principal de l’espace fictionnel et le
pseudonyme de l’auteur ainsi que son réel nom, éléments référentiels, est établit. Il
se dégage { chaque niveau d’identification, une sorte de trinité qui consolide l’idée de
l’auteur-narrateur-objet.
AUTEUR
NOM
PSEUDONYME
AUTEUR
JE
NARRATEUR
AUTEUR
NARRATEUR
PERSONNAGE
En plus de ces éléments identitaires, il ya convocation d’espaces réels
(Villeurbanne, Paris, Rue de la Pompe, Ecole supérieure des arts modernes…) dans le
récit de Roro. Ces espaces introduits en fiction par l’auteur sont en partie des lieux
fréquentés et visités en réalité par celui-ci à une époque bien donnée de sa vie, selon
les informations inscrites dans sa biographie citée plus haut. L’auteur retrace donc {
travers une visite fictionnelle de ces lieux un épisode de son existence. Quant à
l’authenticité de l’histoire racontée, appelée « pacte référentiel »9 par Lejeune, elle
9
Philippe LEJEUNE, Le pacte autobiographique, Op.cit, P.35
9
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
prend source déjà dans celle de l’identité (auteur=pseudonyme=narrateur=
personnage=je).Sur cette base naît la confiance entre l’auteur et le lecteur qui
considère le récit comme un pan de la vie réelle de celui-ci. Ici il ne s’agit pas de vérité
au sens de reprise strictement conforme d’un instant de la vie de l’auteur. Il est plus
question d’une « authenticité en tant qu’elle est la vérité du texte, de l’image du
narrateur en train de se peindre et de l’image qu’il veut donner de ce qu’il était { telle
ou telle époque de sa vie. »10La "fictionnalisation" née du discours, réécriture et de
l’imaginaire qui refaçonne ce moment de l’histoire de l’auteur, ne peuvent rompre ce
pacte.
Roro a donc trouvé le canal du dévoilement de son être, de ses sentiments,
de ses rêves et aussi de ses choix. A travers l’autobiographie il trouve la voie idéale de
la mise en public sans masque de ses profondeurs. Il y a désir ardent de publicité chez
l’auteur. Et ce { travers trois canaux en un.
-
La chanson
-
La forme autobiographique
-
Et tous les autres espaces médiatiques classiques de diffusion que sont la
radio, la télé, internet…
Par le medium principal qui est la chanson, il atteint les autres médias. Il en est
conscient, lui le professionnel de la communication. Son domaine d’activité est la
radio, un média chaud, espace vivant et mouvant.
Par ce jeu d’intermédialité,
l’auteur se lance dans la promotion de son œuvre qui implique celle de sa personne {
travers la forme autobiographique de son chant. Le texte a souvent pris des allures
de spot publicitaire présentant des marques de voitures de luxe : « la couleur de sa
10
Jean-Philippe Miraux, L’autobiographie (Ecriture de soi et sincérité), Nathan, Paris1996, p.20
10
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
peau rappelait le cuir coloris des Rolls-Royces Sylver Shadow », « Quelques minutes
plus tard, une Rolls-Royce Camargue blanche se gare sur la rue de la pompe », « et
puis soudain, gare une Lamborghini diablo orange, couleur d’origine ». Il se met en
valeur { travers l’énumération de vêtements de grande marque dont il fait par
ricochet la publicité : « Alors ce jour là, je porte un pantalon velours de chez Ralph
Lauren, des Mocassins de chez Alden en corps de daim, avec un petit Pull-over de
chez Charles de Castelbajac ». En faisant de son chant un espace publicitaire, l’artiste
s’inspire des méthodes congolaises de publicité par le chant. Les grands noms de
cette musique de propagande sont Papa Wemba à travers particulièrement son
œuvre { succès « proclamation »11 et Koffi Olomidé12. Cette stratégie de
communication correspond à celle du sponsoring qui consiste à associer l’image d’un
produit, d’une entreprise, d’une institution, d’une entité { un événement, une œuvre
ou une célébrité afin d’en assurer une vaste visibilité. Roro semble clairement s’être
adonné à cet exercice. Et il le dit sans retenue : « Alors elle me dit : qu’est-ce que tu
veux boire ? C’est l{ que j’appelle les sponsors mais il n’y a pas de sponsor donc, je ne
veux pas dire ce que j’ai bu ce jour l{… ». Son œuvre, son chant est un espace
publicitaire à vendre. Son récit et lui deviennent un support de promotion dans lequel
il insère artistement les annonceurs souscripteurs. Pour respecter les principes de la
création publicitaire, l’auteur rappelle son pseudonyme en fin de chanson en guise de
signature, comme cela se fait dans les messages publicitaires : « Attente trois années
durant, résultat oko zéro à la ligne ! Ça vous apprendra… ROBERT LEVI
PROVENÇAL ». C’est la formule de conclusion qui ferme le message. Son utilité est
d’ordre mnémotechnique. En effet la signature vient s’imposer en fin de message
11
Papa WEMBA, Proclamation (1984, à Paris avec Ngashie Niarchos ), album fille de sion, maningo
Koffi OLOMIDE, la chicotte à papa skoll mandra manda, Sortie Décembre 2009, Enregistrement Juin
et Aout 2009, Genre Musique du Monde, Producteur Sonima Music. Ce titre est une chanson dans
laquelle l’artiste fait la publicité de la bière Skoll faite de vodka et d’agrumes
12
11
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
comme la dernière chose à retenir par le prospect, la cible. En général, il s’agit du
nom de la marque ou celui du produit présenté. Ici, l’auteur préfère signer son
pseudonyme. Comme pour rappeler une dernière fois que c’est de lui qui s’est agi
dans le récit chanté, ou encore pour dire qu’il en est l’auteur. Dans tous les cas,
l’auteur apparaît dans la configuration de son message comme la marque et le
produit en même temps. Cette logique publicitaire est similaire à celle de
l’autobiographie dans laquelle l’auteur est simultanément sujet et objet.
2- POESIE LYRIQUE ET ECRITURE DE L’ALTERITE
Le récit chanté de l’animateur prend une forme testimoniale. Il rend témoignage de
sa vie. Sa vie amoureuse. Le lyrisme qui caractérise son écriture en est la preuve. La
réitération du pronom personnel « je» évoquée plus haut (104 fois) est le premier
indice de l’épanchement du poète chanteur. A la musicalité des notes des
instruments, il mêle celle des mots afin de faire de sa parole une mélodie qui
transporte celui qui l’écoute dans la quête idéaliste qui sous-tend sa création. Ici Roro
fait cohabiter deux rythmes en faisant le choix de la déclamation. Il y a de prime
abord le rythme support. Produit par les instruments il impose la gamme et plante le
décor ainsi que le feeling. Ainsi la cadence langoureuse et le genre rumba qui se
dégagent laissent subodorer déjà le thème et les épanchements que peut susciter
l’œuvre. Ensuite, vient la partie déclamée. Le poète-chanteur, en fonction du rythme
et de la mélodie suggérés par l’orchestre, donne un rythme { sa parole. Ce rythme
discursif qui épouse celui de la musique insuffle une densité { l’émotion, au sentiment
exprimé par l’auteur. Comme les griots africains ou encore les troubadours
d’Occident, qui en dialoguant avec les instruments tels que le balafon, la cora ou
encore la vielle et la lyre, partageaient leur profondeur, Roro crée la symbiose entre
ses mots et les notes musicales pour produire un seul et même discours : poésie. Il
convoque les mots en se laissant guider par ses émotions. Les exclamations et les
12
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
interjections qui abondent en témoignent : « ya ! Kibibi ! », « hé ! hé ! Quand vais-je
voir Kibibi ? », « Kibibi je t’aime oh ! ». Il se laisse emporter quelque fois pour se perdre
dans l’oralité : « Qui appelle là? Qui appelle là? Qui appelle là? », « Ha bon! Ce soir ? Ce
soir? ». Ainsi, il fait vaciller son texte entre poésie symbolique pleine d’images et
oralité foyer d’émotions. Son discours est aussi profondément marqué par la
diglossie. Il entremêle le lingala à la langue française : « Ya ba pleures nini! ya ba
larmes! », « Tout doucement, ya ba déhanchements nini… Oké linguissa! oké
linguissa! ah! Kibibi nayê! ». L’artiste se sert de cette technique langagière dans un
premier temps pour respecter l’esprit du genre musical rumba qui est une musique
d’origine congolaise. Dans une autre perspective, le poète retrouve en ses mots,
toute la substance émotionnelle recherchée. Et il les emploie avec une diction qui les
rend plus mélodieux que les mots français. Est-ce une affirmation et une valorisation
de la langue africaine ou une simple fantaisie artistique ? La première hypothèse n’est
pas à écarter. Si Roro fait un usage abondant des éléments de la culture française
notamment, la langue (le français), la mélodie du refrain (Notre Dame de Paris) et
l’espace de son récit (Paris), il ne renie cependant pas ses origines africaines. Il
aborde la question de l’altérité, tel que vue par les comparatistes, en valorisant sa
culture { travers celle de l’autre. Il met fin à la phobie qui inspire une attitude de rejet
de l’autre ainsi qu’{ la manie qui elle met au devant les acquis culturels de l’autre au
détriment du nôtre. Il ya dans l’œuvre de Robert Levi Provençal un dialogue, une
symbiose des richesses, des valeurs occidentales et africaines qui crée la symphonie
poétique. Nous sommes dans la philie qui caractérise l’écriture de l’altérité selon la
vision comparatiste. En réalité l’artiste s’est inscrit dans cette perspective
dès
l’instant où il a décidé, en tant qu’artiste ivoirien de se lancer dans une aventure
musicale congolaise. Dans sa déclamation, il épouse l’accent congolais. La
convocation des éléments de l’oralité ivoirienne « coagulation !» permet néanmoins
13
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
de retracer ses origines. Roro est un poète ivoirien qui tombe amoureux d’une
femme à Paris. A voir de près, il n’est pas amoureux que de Kibibi à Paris, mais plutôt
de Kikibi et Paris. Roro dans sa création musicale jette un regard à double sens. Un
premier, sur la culture congolaise, et un autre rivé sur la société française. Il aborde
l’altérité sous un angle binoculaire. Et rapproche dans sa démarche deux espaces,
deux cultures historiquement opposés sur diverses questions.
II. ESPACE REFERENTIEL ET CREATION ARTISTIQUE
L’espace référentiel est l’espace réel, existant dans la sphère sociale. Il est
donc le reflet concret de l’espace fictionnel, imaginaire que convoque l’auteur dans
son œuvre. Dans le texte musical de Roro, le récit chanté répond aux critères de la
construction fictionnelle qui en narratologie se fonde sur les trois catégories que sont
l’espace, le temps et les personnages. L’espace ici est tissé { partir de
toponymes13(nom de lieu) ramenant essentiellement à un repère locatif occidental.
Le narrateur fait mention des endroits bien connus dans le plan topographique
français. Il s’agit de : « France, Paris, Rue la Pompe, Villeurbanne, Ecole supérieure des
arts modernes, 16 ème Avenue Malakoff, 25 Avenue des Champs Elysée, Charles De
Gaulle et Avenue Foch ». Les actions de son récit se déroulent exclusivement dans ce
pays de l’Europe de l’ouest qui n’est pas le sien. L’essentiel des sèmes
caractéristiques de la topolèxemie14 sont présents. Les sèmes désigno-nominatifs
(France, Paris, Rue la Pompe, Villeurbanne, Ecole supérieure des arts modernes, 16
ème Avenue Malakoff, 25 Avenue des Champs Elysée, Charles De Gaulle et Avenue
Foch) qui nomment les endroits évoqués le démontrent. Il ya un sème historique
important qui permet d’établir la référentialité entre tous les espaces fictionnels du
13
Bi Kacou DIANDUE, Topolectes 1, Paris, Publibook, 2005, P.18
Bi Kacou DIANDUE, Topolecte 1, Op. cit, P. 22, (Le topolexème est un toponyme dont la
fonctionnalité renvoie à un espace extratextuel précis.)
14
14
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
récit de Roro et leurs équivalents réels. Il ressort en substance des premiers mots de
son texte : « Printemps 1985 Villeurbanne, jeune étudiant en France ». En effet cette
date et l’école évoquées correspondent à des aspects réels de la vie de l’homme des
médias, selon les informations contenues dans son autobiographie15. Roro parle
effectivement de la France et plus précisément de Paris et de ses secteurs. Ces
espaces sont avant tout des topomorphèmes16 caractérisés pour la plupart par le
luxe. Le 16 ème, les champs Elisée, le Fouquet pour ne citer que ces endroits, sont des
lieux réputés pour leur classe et leur prestige. Le Fouquet demeure l’un des plus
grands restaurants français dont la renommée va au-delà des frontières du pays.
L’auteur dans sa description spatiale semble privilégier de tels topomorphèmes. « Là
où passaient les princes, les souverains et les présidents, elle était toujours là ». Le
locatif « là où » est un topomorphème qui puise son caractère dans la présence des
princes, souverains et présidents à ces endroits. Vu la qualité de ces personnalités,
l’on peut aussi imaginer celle des lieux qu’elles fréquentent. Le personnage de Kibibi
qui fascine le poète évolue donc dans ce biotope feutré. Elle côtoie des endroits
raffinés et habite un appartement de la même envergure.
Bon écoute, viens on va manger dans un grand restaurant, on va aller au Fouquet et
puis après on va aller chez moi. Je vais te montrer ce qu'on appelle maison ici!
Roro!… nous sommes bien sûr dans le parking de l'immeuble de la résidence de
KIBIBI, avenue Foch… Eh bien! On rentre comme ça, on prend l'ascenseur, on rentre
dans la maison et je m'assoie sur le fauteuil. Canapé croco éza! KIBIBI! L'argent est
trop, l'argent est beaucoup, l'argent est nécessaire!
15
http://roroshowtime.blogspot.com/p/biographie.html, Op. cit
Bi Kacou DIANDUE, Topolecte 1, Op. cit, P.23, (Le topomorphème est la désignation caractérielle de la
spatialité dans un actant d’un texte donné. Il met en avant le caractère de l’espace qu’il désigne)
16
15
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
Même les espaces mobiles qui assurent son déplacement sont des véhicules de luxe :
« Quelques minutes plus tard, une Rolls-Royce Camargue blanche se gare sur la rue
de la pompe. La portière s'ouvre et j'aperçois un pied de Mocassin Chanel en peau de
lézard. C'est magnifique! Et quand je regarde ce pied je suis terrifié! Soudain elle sort
de la voiture. Eh Seigneur! C'est Kibibi! »
A sa première apparition elle est identifiée à bord d’une Rolls-Royce et la seconde fois
{ l’intérieur d’une autre voiture aussi somptueuse que la première, une Lamborghini
diablo.
« Et puis soudain, gare une Lamborghini diablo orange, couleur d'origine. Trop kitoko!
Je la vois descendre. »
Les données topolectales repérées dans le récit permettent d’établir un lien
entre le caractère des espaces, des environnements vitaux de nos personnages et
leur nature. En d’autres termes comment le texte de Roro aborde t-il la question du
genre et du queer, à travers un encodage de l’espace ? Tel est le point auquel sera
consacrée la dernière partie de ce travail.
III. TRANSGRESSIVITE SPATIALE, HOMOSEXUALITE ET LUXURE
Gender et queer studies sont les études sur le genre et les minorités sexuelles.
A travers ces questions qui relèvent de prime abord de la sociologie, la littérature
comparée vient confirmer l’inexistence de barrières dans son champ d’action. Pour
rappel, la question du genre a considérablement évolué aujourd’hui. Le système
patriarcal qui a pendant longtemps régné au cœur de la majorité des sociétés a
toujours soutenu que la détermination du genre est liée à la nature du sexe et
demeure un phénomène purement biologique. La vision patriarcale fait de l’homme
le maître du couple et lui confère des pouvoirs liés à un certain statut de « sexe fort »
16
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
qui prend appui sur des croyances religieuses et des aprioris physiques et
psychologiques. Ce système qui se veut hétérosexuel milite pour le mariage mixte
source de procréation et de perpétuation de l’espèce humaine. A l’opposé de cette
logique, s’élèvent des voix d’une autre tonalité, celles des minorités sexuelles qui ont
une lecture différente de la question du genre et de la sexualité. Pour ces derniers, si
le sexe est biologique, le genre quant { lui s’acquiert. Devenir femme ou homme
n’est donc pas lié { l’organe génital féminin (vagin) ou masculin (pénis). Tout est une
question de volonté, de choix et d’état d’esprit. Vivre comme un homme, se vêtir
dans les tenues du genre, s’adonner { des habitudes qui y sont liées et les assumer,
suffit pour l’être. Au nom de cette liberté générique ceux-ci prônent une liberté dans
le choix du partenaire sexuel d’où la revendication du mariage homosexuel. Dans
l’œuvre de Roro la question est abordée sous divers angles : transgenrisme
homosexualité
et
transgressivité
spatiale,
classe
socio-économique
et
homosexualité.
Roro est étudiant africain, ivoirien à Paris. Il y est envoyé par ses parents :
« Printemps 1985 Villeurbanne, jeune étudiant en France ». En tant qu’entité sociale, il
est le représentant d’une culture, de toute une civilisation et de ses réalités. Il est
donc contenant d’une somme d’idéologies, d’habitudes, de croyances et de normes
acquises depuis sa naissance. Roro est donc espace. Par son accession au monde
occidental, il passe d’un espace A { un espace B, différent du premier. Il y a donc
hétérogénéité des espaces marquée par les différences toponymiques et surtout par
leur fonctionnalité. Même si le texte ne nomme pas explicitement les origines de
Roro, des indices tels que les sèmes historiques évoqués plus haut le montrent. Il est
donc ambassadeur de sa terre d’origine et charrie ses grandes valeurs. Roro dans
cette optique décode certains signes de ce monde qui l’accueille pour une initiation
nouvelle, avec les clés acquises dans une initiation originelle précédente. Il découvre
17
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
Kibibi dans les grands médias et lui voue presqu’un culte sans la connaître réellement.
Pour lui c’est une femme, et une femme d’un physique exceptionnel. Rien que par la
description qu’il fait d’elle, l’on peut mesurer sa fascination.
« Mais ceux qui l'ont vue ont forcement été cristallisés. Kibibi! Son visage était
magnifique. La couleur de sa peau rappelait le cuir coloris des Rolls-Royces sylver
Shadow. Et son corps était dessiné telle une guitare venue d'ailleurs. J'ai rêvé d'elle,
au point où toutes les filles que je rencontrais, oh! bien, je les appelais: ya! Kibibi ».
C’est bel et bien d’une femme et non des moindres qu’il s’agit dans la description de
l’auteur-narrateur-personnage, « C'était la plus belle femme du monde ». Il utilise
vingt sept (27) fois le pronom personnel féminin de la troisième personne du singulier
« elle », pour désigner Kibibi. Des adjectifs qualificatifs tels que « belle » et
« magnifique » lui serve quand il veut la dépeindre. Le détail morphologique du
personnage de Kibibi la présente comme l’une des meilleures créatures
esthétiquement structurées du genre féminin. « Je regarde son corps, elle était trop
belle. Je me demande si DIEU a dessiné toutes les femmes de la même façon, de la
même manière». Kibibi avait tout d’une femme mais en réalité, c’était un être
transidentitaire, un transgenre selon le modèle « MTF », male to female c'est-à-dire
homme vers femme. Un homme devenu femme. Il l’assume et le vit pleinement. Les
milieux qu’il fréquente sont instruits de sont statut. « Là où passaient les princes, les
souverains et les présidents, elle était toujours là. Je me demandais ce qu'elle faisait
là bas … Les gens ont même dit qu'elle était péripatéticienne. Elle sortait avec tout le
monde, elle se donnait aux riches mais jamais à ceux qui n'avaient rien».
18
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
Kibibi évolue dans une société occidentale où les minorités sont intégrées et
vivent librement leur différence. Le coming out
17
comme le conçoit Eve Kosofsky
Sedgwick dans sa théorie sur « la sortie du placard » est donc admis. Il peut afficher
son choix et le vivre pleinement. Il se refait donc un genre à sa convenance et se
comporte selon. Sur le plan physiologique, vestimentaire, etc., il épouse les normes
du genre féminin. Pour Kibibi se faire désirer comme une femme est en effet naturel,
il exige même la chasteté et la fidélité à Roro comme conditions pour céder à ses
avances.
« Tu vois, je vais te faire une fleur, eh! Te faire une faveur même. Je prends ton
numéro de téléphone, mais je vais te demander de faire une chose, me rester fidèle
pendant trois ans sans toucher aucune femme de la terre. Penser, penser, penser à
moi. Et si tu réussis à faire ça et bien, je te ferai une magnifique surprise mon petit.
Sois patient, tu verras, la chance fera le reste ».
Quand il accepte de passer { l’acte avec son admirateur, il y va comme une femme. Se
laisse découvrir comme une femme. Et pousse Roro à explorer son corps et à se
convaincre de sa féminité.
« Roro viens! Viens! Touche ma joue! Je touche la joue de Kibibi. Touche mon nez! Je
touche le nez de Kibibi. Touche mes seins! Je touche les seins de Kibibi. Touche mon
ventre! Je touche le ventre de Kibibi. Ya ba plat comme platinium! éhé! nayé! Alors
Roro tu veux de moi? ».
Kibibi n’a pas de complexe, il est dans sa peau et son rôle de femme. Cependant, la
victime ici est Roro. Après deux années de rêve et trois années de chasteté, au total
cinq ans de fantasme, il découvre au moment tant attendu de sa vie, qu’il est tombé
17
Perreau, Bruno, Eve Kosofsky Sedgwick, in gss.revues.org/378. Consulté en juillet
2015.
19
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
amoureux d’un homme. Et ce, seulement { la vue du sexe de Kibibi. C’est un sexe
masculin, pareil au sien. Il est choqué. Il est originaire d’une sphère sociale très
patriarcale où le sexe est le premier critère de détermination du genre. Dans sa
culture d’hétérosexuel, les hommes vont avec les femmes. L’homosexualité encore
moins le transgenrisme n’est admis. La transgressivité spatiale a ici pour
conséquence directe, le conflit des mœurs. Les réalités culturelles et les habitudes
sexuelles s’entrechoquent. Les échanges, les partages prônés par la conception
comparatiste de l’altérité sont ici remises en cause. Si l’auteur dans la description de
l’espace parisiens à travers ses rues et ses sites fait l’apologie, voire la publicité de la
capitale européenne la plus convoitée par les africains, il semble présenter un tableau
plutôt noir, tordu de ses mœurs à travers le thème des minorités sexuelles qu’il
aborde sous forme de choc. Le coming out du personnage de Kibibi qui se vit sans
problème en milieu prestigieux parisiens avec des personnalités d’envergure, ainsi
que le train de vie de celui-ci qui ressort à travers le caractère de ses différents
espaces, sont des éléments qui rangent d’après le texte de Roro, les minorités
sexuelles dans une classe assez selecte de la société française. Une telle peinture
vient jeter les bases d’une étude plus poussée sur les caractères spatiaux et le
fonctionnement du genre et de la sexualité dans les sociétés. L’homosexualité est
elle une pratique qui prolifère plus dans les milieux socio-économiques élevés ? Si oui
quelles pourraient en être les causes et les influences sur les autres franges de la
société ? Telles sont quelques points de réflexions sur lesquels peuvent aboutir les
suggestions de Roro quant { l’emploi qu’il fait des topomorphèmes dans son récit
chanté.
20
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
CONCLUSION
Le texte musical de Roro a été un prétexte pour éplucher quelques grandes
notions de la littérature comparée, notamment l’altérité, les cutural studies,
l’interdisciplinarité et ce par le biais de l’intergénérécité et la géocritique en tant que
démarches. Dans la logique de la formule comparatiste X et Y, il a semblé nécessaire
de repérer des indices littéraires dans la chanson de l’animateur avant d’y étudier
autre chose. Une littérarité qui s’est laissée saisir { travers la dimension
autobiographique du texte et le lyrisme poétique qui ont servi aussi de canaux de
publicité pour l’artiste. En outre, les espaces convoqués par Roro ont permis de voir
comment le genre et la sexualité sont appréhendés dans deux mondes différents qui
sont l’Occident et l’Afrique. Dans un jeu de paradoxe, d’amour et de rejet, de philie et
de phobie l’auteur a présenté les données du fonctionnement non hypocrite de
l’altérité. L’idée d’une homogénéité des cultures et idéologies semble utopique. Les
critères du grand rendez-vous du donner et du recevoir prôné par Senghor restent
donc à redéfinir. Cependant dans une autre perspective, Roro semble vouloir
démontrer que les valeurs n’ont pas la même portée symbolique selon les espaces.
Pour les accepter et les comprendre, il faut un effort d’intégration qui passe
obligatoirement par une initiation préalable qui donne accès aux clés de décryptage
des codes socio-culturels qui se créent et se recréent dans le temps. Au total, la
réponse { toute question sur l’autre se trouve dans l’union sacrée du couple EspaceTemps.
BIBLIOGRAPHIE
DIANDUE Bi Kacou, Topolecte 1, Paris, Publibook, 2005
21
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676
LEJEUNE Philippe, Le pacte autobiographique, Paris, Seuil, 1975
MIRAUX Jean-Philippe, L’autobiographie (Ecriture de soi et sincérité), Paris, Nathan,
1996
MOUNIN Georges, Dictionnaire de la linguistique, Paris, P.U.F, 1974
WESTPHAL Bertrand (dir.), La Géocritique mode d’emploi, Limoges, Presse
Universitaire de Limoges, 2000
22
Volume 15 ième Décembre 2015
ISSN 2308-7676

Documents pareils