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page 7 “MATh.en.JEANS” au Palais de la Découverte — 1992 La numération “l'histoire des mathématiques” par Cécile Arnaud, Benjamin Letellier, Cécil Tirard, Isabelle de Azevedo, Corine Liard, Bruno Mathieu, Michaël Cormont du Lycée Alfred Kastler de Cergy-Pontoise et du Lycée Fragonard de l'Isle-Adam Avertissement au lecteur : A cet emplacement, et tout au long de la brochure, vous trouverez les lois émises par les écoliers de l'école Frédéric Mireur de Draguignan, qui ont travaillé en relation avec M. Marc Hindry, mathématicien, Jussieu. E n raison de leur caractère sacré, les 13 jours fondamentaux étaient mis en relation avec des div inités ou des enseignantes : Mmes Annick Boisseau, Anne objets sacrés. Chaque division (jours, mois, Kérharo et Annie Soismier. années, périodes plus longues) du calendrier chercheur : Mme Michèle Vergne, Départe- maya était des fardeaux que portaient sur leur ment de Mathématiques et d'Informatique de dos les dieux, favorables ou malveillants : ils étaient les divins gardiens du temps. l'Ecole Normale Supérieure. A u tout début de l'année scolaire, avant le 1er séminaire, nous avons essayé de co mparer les différentes f açons d'écrire les nombres, suivant les civilisations. Nous avions alors pour objectif de savoir quelles étaient les civilisations dont l'écriture mathématique était la plus rapide, afin de découvrir le peuple dont le mode d'écriture était le plus intéressant et que nous choisirions d'étudier ultérieurement. Les résultats de cette étude (nous avons chronométré le temps mis pour écrire un même nombre par différents systèmes) ont alors montré que le système chinois était plus rapide et plus facile à écrire que le maya, celui-ci étant lui-même plus simple que l'égyptien. Les autres civilisations ne nous ont pas paru moins intéressantes, mais nous avons décidé de pousser plus loin nos recherches sur ces trois-là. L es seules mentions numériques que nous possédons aujourd'hui de l'arithmétique des Mayas ne se rapportent qu'à l'astronomie ou au comptage du temps. Les Mayas, en effet, possédaient deux calendriers dont ils usaient simultanément : le premier, dit “Tzolkin”, de caractère religieux (calendrier magique) et le second, dit “Haab” qui fut un calendrier solaire. L'année liturgique se composait de 20 cycles de 13 jours : elle comptait donc 260 jours. M alheureusement, nous ne savons pas si les Mayas utilisaient les mathématiques pour d'autres choses que les calendriers ou l'astronomie. On ne sait pas s'ils faisaient des opérations. C'est pour cette raison que nous avons laissé cette civilisation un peu de côté et que nous avons décidé de concentrer nos recherches sur la civilisation chinoise ou égyptienne. D'autre part, nous avons voulu, ultérieurement, inventer un boulier maya en base 20, à la suite d'une proposition d'un chercheur. Les Egyptiens. L e système de numération utilisé par les Egyptiens depuis la fin du 4ème millénaire av. J.C., et qui fut intégré à l'écriture hiéroglyphique, permettait la représentation des nombres entiers pouvant atteindre et même dépasser le million. Cette numération écrite repose sur une base décimale et use essentiellement du principe de l'addition. Il s'agit d'un système qui possède un signe spécial pour indiquer chacune des 7 premières puissances consécutives de dix. Les chiffres changent généralement de sens selon la direction de la lecture des hiéroglyphes (voir page suivante). page 8 “MATh.en.JEANS” au Palais de la Découverte — 1992 1 10 100 1 000 10 000 100 000 1 000 000 2324 1231215 Les chiffres égyptiens (Hiéroglyphes) Vers -3 000 av. J.C., les Egyptiens utilisent 7 signes pour écrire les nombres dans un système à base 10. Les chiffres sont représentés par des dessins : un bâtonnet pour 1, un anse pour 10, une spirale pour 100, une fleur de lotus pour 1 000, un doigt pour 10 000, un tétard pour 100 000, un dieu les bras levés au ciel pour 1 000 000. Ci-dessus, écriture de deux nombres : 2 324 et 1 231 215. Il faut ajouter les valeurs des chiffres pour trouver les nombres. Pour écrire un nombre entier donné. D 9 999 essiner les unités du plus grand ordre décimal contenu dans ce nombre, puis celles de l'ordre immédiatement i n f é r i e u r, jusqu 'aux unités. Ex emples : 4 0 0 000 = 4 x 1 00 0 00 soit 4 tétard s, 1 422 000 = 1 000 000 + 400 000 + (10 000 x 2 + 1 000 x 2) soit 1 génie + 4 tétards + 2 doigts + 2 lotus. Les fractions de nombres. 10 000 P our exprimer les fractions de nombres : utilisation du hiéroglyphe de la bouche. 1/3 1/10 1/100 1/269 Les Egyptiens ne connaissaient que les fractions de numérateur 1. Exemples : 3/5 = 1/5 + 1/5 + 1/5 ; 3/5 = 1/2 + 1/10 ; 47/60 = 1/3 + 1/4 + 1/5. page 9 “MATh.en.JEANS” au Palais de la Découverte — 1992 La Chine. L Loi de Rahmouna 1 Pour savoir si un assemblage de chiffres est un nombre ou pas, on regarde si on peut faire des opérations avec et si ces opérations ont un sens. ex : les numéros de téléphone ne so nt p as des nombres, parce que si on ajoute deux numéros de téléphone, le résultat n'est pas un numéro de téléphone. e premier moyen employé par les Chinois pour noter les nombres remonte au 14ème siècle av. J.C. avec les os divinatoires permettant de tirer les oracles. Ceuxci tenaient plus d'une spéculation mystique et douteuse que d'une affirmation rigoureuse et scientifique comme les mathématiques. Or peu à peu, la pensée chinoise évolua vers une numération, certes simple sinon primaire, mais qui avait l'avantage d'être compréhensible et utilisable par tous (notamment par les marchands, les fonctionnaires, …). Ainsi, dès le 3ème siècle av. J.C., on trouve la représentation suivante : 1 2 3 4 5 6 100 200 300 400 500 600 10 000 20000 30000 40000 50000 60000 3x3 + 9x2 + 12x + 7 donne . On note que l'inconnue n'apparaît qu'une fois dans l'équation (cette inconnue est écrite ) ; tous les coefficients qui se trouvent avant cette inconnue sont de degrés supérieurs et ceux qui se trouvent après n'ont pas d'inconnue. Introduisons maintenant le zéro et les nombres négatifs (qui sont “barrés”) dans une équation : 29 x4 - 55 x2 + 19 x - 15 donne . 7 8 9 10 700 800 900 1000 70000 80000 90000 20 2000 30 3000 P 40 4000 80 8000 90 9000 50 5000 60 6000 70 7000 assons maintenant à un autre concept, celui de la division. Celle-ci se résume au principe suivant : soustraire un maximum de fois possible le diviseur au dividen de afin d 'ob tenir le quo tien t. D a n s l'exemple proposé, nous allons diviser 3 531 par 13 : dividende diviseur reste quotient ← quotient ( ) ← dividende (3531) ← diviseur (13) 1992 donne 2107 donne C omme on peut le constater, même si la base est de 10, le zéro n'est signalé que par un espace, ce qui occasionne le problème suivant : dans notre exemple, première étape : l'opération consiste à soustraire le diviseur au dividende : 35 -13 = 22. On ne s'occupe pour l'instant que des deux premiers chiffres du dividende. Une fois l'opération accomplie, on marque 1 à hauteur du quotient puisque la soustraction a été faite une fois seulement. ← quotient (1) 210 700 s'écrit mais cette écriture ← dividende (2231) ← diviseur (13) peut aussi signifier 2 107. Avec l'apparition du zéro écrit tel que nous le connaissons, vers le 8ème siècle, les ennuis des Chinois dispa- deuxième étape : raissent. Avec eux, la formulation d'équations on recommence à soustraire le diviseur au didevient possible : vidende : 22 - 13 = 9. Comme nous venons à page 10 “MATh.en.JEANS” au Palais de la Découverte — 1992 nouveau d'opérer sur le dividende, on ajoute note : cette méthode de division n'est pas la 1 au quotient. seule existante, mais elle a pour avantage ← quotient (2) d'être facilement applicable sur un boulier. ← dividende (931) ← diviseur (13) troisième étape : puisque l'opération consistant à soustraire le diviseur au dividende n'est plus possible (9 13 < 0), on décale le diviseur d'une colonne vers la droite. Maintenant nous allons soustraire 13 à 93. ← quotient (2) ← dividende (931) N otre groupe s'est intéressé au boulier chinois. Il fonctionne en base 10 et se présente sous forme d'une série de barres parallèles séparées en deux parties : celle du bas contenant 5 boules comptant chacune pour 1 unité, celle du haut avec 2 b oules comptant chacune pour 5 unités. Chaque barre représente une puissance de 10 comme : les unités, les dizaines, les centaines, etc. Ici le nombre 10 536 est représenté : ← diviseur (13) quatrième étape : on soustrait le diviseur au dividende : 93 - 13 = 80. On recommence cette opération autant de fois qu'il est possible, en ajoutant 1 au quotient à chaque fois. On finit par obtenir 2 au dividende et 7 au quotient. 1 0 5 3 6 ← quotient (27) ← dividende (21) ← diviseur (13) l'addition S i l'on ajoute 1 384 à 10 536, nous le plaçons sur le boulier à l'autre extrémité. cinquième étape : Puis nous ajoutons par déplacements de de nouveau, la soustraction (dividende moins diviseur) est irréalisable. On décale donc le boules, dizaines à dizaines, centaines à cendiviseur d'une colonne et on s'occupe du divi- taines, milliers à milliers, etc. Après chaque déplacement un nouveau chiffre du résultat dende en entier. pour enfin nous donner le résultat final qui ← quotient (27) est 11 920. ← dividende (21) ← diviseur (13) sixième étape : on soustrait le diviseur au dividende : 21 - 13 = 8. L'opération est alors terminée, si ce n'est qu'il faut ajouter 1 au quotient puisque nous venons de soustraire le diviseur au dividende. 1 3 8 4 1 0 5 3 6 ← quotient (271) ← reste (8) ← diviseur (13) résultat : 3 531 = 271 x 13 + 8. [NDLR : pour en savoir plus sur la façon de mener les quatre opérations sur le boulier, s'adresser à la société Tien Shian, 5 rue Richepance, 75008 Paris, qui édite des livres sur l'utilisation des bouliers chinois et japonais, par exemple : “La maîtrise du boulier, études et exercices, niveau débutant”, par Li Ching Tang] page 11 “MATh.en.JEANS” au Palais de la Découverte — 1992 M ais, loin d'en rester à des calculs aussi rudimentaires, les Chinois étaient capables d'extraire une racine carrée avec un simple boulier. Loi de Asmahan 1 Si on multiplie un nombre qui se termine par 0 par n'importe quel autre nombre, le résultat se termine toujours par un 0. extraction de racines carrées au boulier chinois B ut : écrire un entier n sous la forme n = r2 + p (0 ≤ n ≤ 99) où n et p sont donc n = 100 r12 + 20 r1 r0 + r02 + p (1) des entiers et p minimum (c'est-à-dire r 2 ≤ n < (r + 1) 2 , ou encore p < 2r + 1). Le nombre n s'écrit : Le problème peut se poser dans les termes : placer le nombre n parmi la suite des carrés n = 100 n1 + n0, parfaits. u0 u1 u2 u3 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 1 3 5 uk k2 uk+1 (k+1)2 où n 1 et n 0 sont d es n omb res d e deux c h i ff r e s . La technique vue précédemment 2k+1 nous permet de trouver les nombres r1 et p1 On remarque que uk = k2 et que uk+1 - uk = tels que n1 = r12 + p1. On a alors 2k + 1, d'où la technique sur le boulier : si n ≥ 1, n - 1 1 n n = 100 r12 + 100 p1 + n0 (2) 1 n-1 si n-1≥ au nom- En combinant les expressions (1) et (2), il apparaît que le problème devient : n-1-3 on ajoute 2 à ce dernier : n-1-3-5 exprimer n-1-3 n-1 bre de gauche, 3 3 5 à gauche à droite … n' = 100 p1 + n0 ainsi de suite sous la forme jusqu'à trouver k tel que le nombre de droite < 2k + 1. 20 r1 r0 + r02 + p, Posons p = n - [1 + 3 + 5 + … + (2k-1)]. On a 1 + 3 + 5 + … + (2k-1) = k2 , donc n = k2 + p. où r est connu, r et p restant à déterminer, 1 0 Comme p < 2k + 1, p est bien minimum et k de sorte que est la racine carrée r de n. Pour faire apparaître r (= k) sur le boulier, il reste à ajouter 1 p < 20 r1 + 2 r0 +1. à gauche et diviser par 2. 2k-1 n-[1+3+ … +(2k-1)] Ou encore : démonstration avec 100 ≤ n ≤ 9 999 Comme 10 ≤ √n < 100, le nombre r cherché est un nombre de deux chiff r e s . Posons : r = 10 r1 + r0. On cherche donc r1, r0 et p tels que : placer le nombre n' parmi la suite vk = 20 r1 k + k2 . On s'aperçoit que : { n=r +p r = 10 r1 + r0 p<2r+1 2 vk+1 - vk = 20 r1 + 2k +1 vk+1 - vk = v1 + 2k page 12 “MATh.en.JEANS” au Palais de la Découverte — 1992 Partant de la position : L e boulier maya ressemble beaucoup au on fait appaboulier chinois. En effet, certaines 2r 1-1 p1 n0 raître à gauche boules représentent 5 unités tandis que le nombre v 1 = 20 r1 + 1 (on ajoute 1, on d'autres valent 1 unité. La différence majeure multiplie par 10 et on ajoute 1). qui existe entre ces deux bouliers est que le chinois utilise la base 10 (comme nous) alors que nous calculons en base 20 sur le maya. puis on procè20r1+1=v 1 n' d e sim ilaire'est pour cette raison que nous avons ment à ce que nous avons vu lors de la preajouté des boules de 0,5 unité chacumière démonstration : ne, permettant de représenter plus fasi c'est possible, on retranche le nombre de cilement les nombres comme dans 50, par gauche au nombre de droite ; si le résultat obtenu à droite est plus grand e x e m p l e : 50 = 2 x 20 1 + 0,5 x 2 0 1 d'au moins deux unités que celui de gauche, (en base 20 : 50 = 2 x 201 + A x 200). on ajoute 2 à gauche ; et on réitère jusqu'à obtenir un nombre à droite, qu'on notera p, inférieur au nombre de gauche v1 + 2(k - 1). Le boulier est alors dans la position : C v1+2(k-1) p où : p = n' - { v1+(v1+2)+(v1+4)+…+(v1+2(k-1))} = n' - { v1+(v2-v1)+(v3-v2)+…+(vk-vk-1) } = vk, avec vk = 20 r1 k + k2 . Posons r0 = k. Nous obtenons n' = vk + p = 20 r1 r0 + r02 + p, avec p minimum. Or nous avions retenu que : d'où n = 100 r12 + 100 p1 + n0 = 100r12 + n' n = 100 r12 + 20 r1 r0 + r02 + p n = (10 r12 + r0)2 + p L 'addition sur le boulier maya : voir l'exemple de 217 + 32 = 249 page suivante ; on additionne unités avec unités, puis dizaines avec dizaines, etc, avec : 217 = 7 x 200 + 0,5 x 201 + 10 x 201 32 = 2 x 20 0 + 1 x 201 + 0,5 x 201 12 x 201 + 9 x 200 = 249 Les nombres r0 et r1 sont donc ceux que nous cherchions. Il reste à faire apparaître r = 10 r1 + r0 sur le boulier, en partant de la position : v1+2(k-1) p v1 + 2(k - 1) = 20 r1 + 1 + 2(k - 1) = 20 r1 + 2 r0 - 1 (k = r0) On ajoute donc 1 à gauche, on divise par 2 et la racine apparaît. r=10r1+r0 n = r2 + p p (minimum) N ou s r emercion s Mm e Bo isseau, M m e Kerh aro, Mm e Soismier et Mme Vergne pour leurs aides multiples et leur soutien moral. page 13 “MATh.en.JEANS” au Palais de la Découverte — 1992 Loi de Bastien 1 Si on prend un nombre qui n'est pas 0 et qu'on le divise par 2 et encore par 2 et encore et encore, on n'arrivera jamais à 0. C'est parce que quand on divise un nombre par 2, on en enlève la moitié, et donc il en reste toujours une moitié. Comme la moitié de quelque chose n'est jamais 0, on n'arrivera jamais à 0. Les élèves de “MATh.en.JEANS” inventent le boulier maya. [Ils en ont même fabriqué un, avec les restes de deux bouliers chinois …] 5 unités Avant … 217 & 32 1 unité 0,5 unité 203 202 201 200 … après 249 … ça marche !