D`une vie à l`autre (Zwei Leben) - CANOPÉ

Transcription

D`une vie à l`autre (Zwei Leben) - CANOPÉ
Cycle Cinéma Européen 2015
Pour les lycées et 3èmes de collèges
Organisé par l’association Cin’Ecran
D’une vie à l’autre (Zwei Leben)
Georg Mass - Allemagne/Norvège - 2013
© Sophie Dulac Distribution
1
SOMMAIRE
Fiche détaillée (dossier de presse)
3
Le réalisateur (dossier de presse)
4
Note de réalisation (dossier de presse)
5
Contexte historique (dossier de presse)
6
Entretiens
9
Entretien avec Caroline Moine (Université Versailles)
11
Revue de presse
14
Dossier pédagogique sur le contexte historique
22
Dossier pédagogique Zéro de conduite
27
Dossier de presse en allemand
53
Kritiken
82
Dossier pédagogique allemand
86
2
Fiche détaillée
Fiche technique
Titre original : Zwei Leben
Date de sortie : 7 mai 2014
Genre : Drame, Thriller
Durée : 1h 37 min
Réalisateur : Georg Maas
Scénario : Christoph Tölle, Georg Maas, Judith
Kaufmann
D'après l'œuvre de Hannelore Hippe
Collaboration au scénario : Hannelore Hippe
Producteurs : Axel Helgeland, Dieter Zeppenfeld,
Rudi Teichmann
Montage : Hansjörg Weissbrich
Directeur de la photographie : Judith Kaufmann
Musique : Christoph M. Kaiser, Julian Maas
Distributeur : Sophie Dulac Distribution
Site officiel
© Sophie Dulac Distribution
http://www.sddistribution.fr/fiche.php?id=90
Fiche artistique
Dossier de presse
Katrine Evensen Myrdal
Ase Evensen
Anne Myrdal
Sven Solbach
Hugo
Bjarte Myrdal
Juliane Köhler http://www.sddistribution.fr/telechargement.php?id=1154
Liv Ullmann
Julia Bache-Wiig
Ken Duken
Rainer Bock
Sven Nordin
Niveau
Lycée
© Sophie Dulac Distribution
Synopsis
Europe 1990, le mur de Berlin est tombé.
Katrine a grandi en Allemagne de l’Est, et vit en Norvège depuis 20 ans. Elle est le fruit
d’une relation entre une norvégienne et un soldat allemand pendant la Seconde Guerre
Mondiale. A sa naissance, elle a été placée dans un orphelinat réservé aux enfants aryens.
Elle parvient à s'échapper de la RDA des années plus tard pour rejoindre sa mère.
Mais, quand un avocat lui demande de témoigner dans un procès contre l’Etat norvégien au
nom de ces “enfants de la honte”, curieusement, elle refuse.
Progressivement de lourds secrets refont surface, dévoilant le rôle de la STASI, les
services secrets de la RDA, dans le destin de ces enfants.
Pour elle et ses proches, quel est le plus important ? La vie qu’ils ont construite ensemble,
ou le mensonge sur lequel elle repose ?...
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Le réalisateur
Georg Maas
Réalisateur et scénariste allemand
Né en 1960
Georg Maas commence à travailler comme
charpentier. En 1984, il étudie la mise en
scène à l’Académie allemande du film et de la
télévision de Berlin jusqu’en 1991. Il est
depuis scénariste et réalisateur.
En 1994, il suit les masters classes dirigées
par Istvan Szabo, Tilda Swinton et Krzysztof
Kieslowski à l’European Film Academy. Il
cofonde en 1997 le laboratoire acteursréalisateurs-auteurs (S.R.A.L.) à Berlin.
D’une vie à l’autre est son deuxième long
métrage. Il écrit toujours les scénarios de ses
films en étroite collaboration avec ses coauteurs. En outre, il a réalisé plusieurs films
documentaires et il est également directeur de
la photographie, script doctor et monteur… Il
vit à Aix-la-chapelle et à Berlin.
Filmographie
LONGS MÉTRAGES
2011 D’une vie à l’autre
2003 New Found Land
Prix du public - International Film Festival Würzburg
Grand prix de Genève pour le meilleur scenario
DOCUMENTAIRES
2013 Liv Ullmann en plans rapprochés
2010 The Buddah Walla
2009 The Real World of Peter Gabriel
1998 Pathfinder
1995 Escaped
1994 The Other Universe of Klaus Beyer (Caméra)
Team Work Award - Filmwinter Festival
Mention special du Jury - International Film Festival Brussels
COURTS MÉTRAGES
1986-1988 Trilogy about Work and Daily Routine (3 courts métrages)
Deuxième prix pour la trilogie - Aix La Chapelle Filmtage
Leas a Normal Life
10 3/4 INCH
Prix du jury - International Film Festival de Breslau
Here Comes the Sun
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Note de réalisation
© Sophie Dulac Distribution
CE QUI M’A FASCINÉ
Les multiples facettes des personnages et la complexité de l’histoire me fascinent depuis
de nombreuses années. Les personnages principaux sont à la fois coupables et innocents,
bourreaux et victimes. Ils sont des acteurs lucides de l’Histoire. Ils cherchent le bonheur
dans l’instant présent, mais ils ne peuvent fuir leur passé sombre. C’est le drame de leur
existence. Au fil de l’écriture du scenario, je me suis de plus en plus intéressé à la question
de l’identité : qu’est-ce que la vérité, qu’est-ce qu’un mensonge, qui sommes-nous ? Qu’est
-ce que je sais vraiment des autres ?
LE ROMAN…
... m’a servi de base, puis, en collaboration avec le romancier (Hannelore Hippe) et mes coauteurs (Christoph Tölle, Stale Stein Berg, Judith Kaufmann), nous avons presque entièrement réécrit l’histoire sous un angle totalement différent. Le roman et le film, en fin de
compte, racontent la même histoire mais avec d’autres personnages et des scènes complétement différentes.
LES RECHERCHES…
... ont été faites en grande partie par l’auteur du roman, Hannelore Hippe. En particulier, les
aspects concernant la mort mystérieuse dans la ville norvégienne de Bergen, et le sort des
enfants de Lebensborn en Norvège, ainsi que leur action en justice contre l’État. J’ai effectué des recherches avec mon co-auteur allemand Christoph Tölle sur les enfants allemands
de Lebensborn. J’ai également rencontré des agents de la Stasi, dont le célèbre agent
double Werner Stiller. J’ai passé en revue toute l’histoire dans les détails avec lui.
LA COULEUR DU FILM…
... résulte d’une étroite collaboration avec le directeur artistique Bader El Hindi, la directrice
de la photographie Judith Kaufmann et le costumier Ute Paffendorf. J’ai voulu réduire la palette de couleurs à une ou deux tonalités tout en conservant des couleurs chaudes pour
que l’on se sente bien dans les pièces où vit la famille et ainsi percevoir combien cette famille est merveilleuse. Cela rend la chute de Katrine d’autant plus dramatique. Ute et Bader
ont ensuite décidé d’ajouter de temps à autres des touches de couleurs vives : le rouge
éclatant d’un coussin, le bleu d’un pull ou d’un rideau. En général, j’ai le sentiment que
nous allons dans la bonne direction lorsque les plans s’assemblent bien les uns avec les
autres, spontanément. Quand tout est prévu à l’avance et que c’est logique en théorie, on a
toujours le risque d’avoir quelque chose de monotone. Et nous voulions atteindre le plus
grand naturel possible pour cette histoire particulièrement complexe.
Georg Maas
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Contexte historique
D’une vie à l’autre est fondé sur des faits réels. Le contexte historique remonte à l’année
1935, lorsque le Reichsführer-SS Heinrich Himmler, obsédé par la pureté raciale, a fondé
l’association « Lebensborn E.V. ». Cette association avait pour objectif de sélectionner les «
membres aryens de la race supérieure » et de procréer des enfants correspondant à l’idéal
humain des Nazis. À la fin de la guerre, environ 12 000 enfants de Lebensborn avaient été
procréés pour la plupart par des membres SS.
La Norvège a joué un rôle particulier dans la folie de Himmler. En effet, Himmler a estimé
que, les Norvégiens étant les descendants directs des Vikings, ils avaient nécessairement
de la bravoure, de la force et détenaient des gènes tenaces - idéals pour le plan de reproduction germanique. On estime que 11 000 enfants sont issus de liaisons entre des
femmes norvégiennes et des soldats allemands, pendant l’occupation allemande de 1940 à
1945. Environ 250 de ces « enfants de la honte » furent déportés en Allemagne par les Nazis entre 43 et 45. La plupart étaient logés au Lebensborn « Sonnenwiese », un orphelinat
de SS, en Saxe, sur le futur territoire de la RDA. À la fin de la guerre, les enfants d’aryen de
type « idéal » des foyers de Lebensborn sont devenus « des vauriens SS » dont personne
ne voulait plus. Le sort de nombreux Lebensborn s’est perdu dans la tourmente d’aprèsguerre.
Mais dans les années 1960, les anciens enfants de Lebensborn commencent à attirer l’attention de la sécurité de l’Etat de la RDA, la Stasi. Étant donné la manière dont ces enfants
avaient été mis au monde, il était difficile de reconstruire leurs parcours de vie. Et comme
ils étaient nés en Norvège, ils possédaient la double nationalité. Ils ont ainsi confié des informations très précieuses à la Stasi, qui a ensuite tenté de recruter des espions parmi les
jeunes citoyens de la RDA dans les foyers de Lebensborn.
Mais la Stasi est allée encore plus loin : elle a cherché les identités d’enfants de Lebensborn et les a attribuée à ses espions qui, grâce à des récits parfaits, infiltraient la zone
ouest. Le cas Heinz Hempel, agent de la Stasi, est particulièrement documenté : il a endossé l’identité d’un enfant de Lebensborn prénommé Ludwig Bergmann. Hempel alias Bergmann a été missionné par l’intermédiaire de Berlin-Ouest comme espion en Norvège, où il
a retrouvé « sa famille » et a été reconnu comme leur fils. Alors que le véritable Ludwig
Bergmann n’appartenait à aucun parti et menait une vie banale en Saxe, le faux Ludwig
Bergmann a travaillé pendant plus de 20 ans comme espion en Norvège, et plus tard en
Allemagne de l’Ouest. Peu de temps avant d’être démasqué, en 1983, la Stasi l’a récupéré
lors d’une opération et l’a ramené en RDA. Depuis lors, l’ex-agent a vécu et travaillé en
Saxe, non loin du véritable Ludwig Bergmann. On ne sait pas combien d’espions estallemands avec des identités dérobées aux enfants du Lebensborn ont émigré en Norvège
et en Europe occidentale. La plupart des documents concernant les espions étrangers ont
été détruits par la Stasi lors de la chute du mur de Berlin. Mais ce qui est certain, c’est
qu’en Norvège, dans les autres pays européens et en Allemagne il y a encore des agents
qui ont dérobé des identités aux enfants du Lebensborn. Ils vivent parmi nous, incognito, et
ont un double quelque part.
L’IDEOLOGIE DU « LEBENSBORN » DES NAZIS
Afin d’augmenter le taux de naissance d’enfants « Aryens » et de cultiver la « race des
maîtres » le Reich führer-SS Heinrich Himmler fonda l’association enregistrée « Lebensborn », en 1935. Ceci afin de mettre assez de « matériel humain » à disposition du « Führer
» Adolf Hitler pour la guerre à venir et la conquête du monde envisagée. Pour ce faire les
SS avaient construisit, dans toute l’Allemagne, des maisons du Lebensborn avec des maternités et des foyers d’enfants. Ces « surhommes aryens » devaient se caractériser par
des traits spécifiques, tels que : une chevelure blonde, une forme particulière de crâne, une
certaine couleur de peau et d’yeux. Des « Schémas aryens » donnaient des précisions sur
les critères importants. Des généticiens humains et des médecins essayaient de définir la
hiérarchie des races et leur propre « valeur » à l’aide d’outils spécifiques, tels que le compas, différents instruments craniométriques et des tableaux pour déterminer la couleur des
yeux, des cheveux ou de la peau.
6
La direction du Lebensborn s’efforçait de tenir les activités de l’association secrètes. Cette
stratégie de conservation du secret était particulièrement avantageuse pour les femmes
enceintes célibataires. Le Lebensborn leur offrit en effet, la possibilité de donner naissance
à leurs enfants discrètement dans les maternités bien équipées de l’association, où elles
pouvaient jouir d’une médicalisation moderne et d’une bonne alimentation. Ainsi, les
femmes pouvaient également échapper à l’ostracisme social qu’engendrait une grossesse
hors mariage à l’époque. Pour une hospitalisation dans une maternité du Lebensborn, il fallait que les femmes soient d’origine « Aryenne », impératif qui excluait essentiellement les
juifs. De plus, on refusait les femmes affectées d’une maladie héréditaire. Les femmes célibataires n’étaient pas obligées de confier leur bébé au service d’adoption ou au foyer, mais
l’association du Lebensborn prenait la tutelle légale de l’enfant en charge. En outre, on inscrivit les noms des nouveau-nés dans un registre de naissance secret. Ainsi, environ
11.000 enfants naquirent dans l’esprit de l’idéologie du Lebensborn, entre 1936 et 1945.
Dès le début de la guerre, l’association commença également à travailler dans les nations
étrangères occupées. La SS se mit à enlever des enfants des pays d’Europe centrale et
occidentale, dont le Danemark, la France, la Belgique, la Hollande, le Luxembourg, la Tchécoslovaquie, la Pologne et la Roumanie, et à les « germaniser » dans les foyers du Lebensborn. Si ces enfants représentaient des « caractéristiques raciales de grande valeur » ils
étaient arrachés à leurs familles, déplacés en Allemagne et examinés de près pour déceler
leur « utilité raciale et biologique » (s’ils ne correspondaient pas aux standards visés, ils furent souvent immédiatement stérilisés).
D’après l’idéologie raciale nationale-socialiste, les Norvégiens correspondaient à la conception idéale de l’homme germanique et étaient ainsi disposés à « affiner le sang allemand ».
Le commandement allemand incitait ainsi ses soldats à multiplier les liaisons de quelque
nature que ce soit avec des femmes norvégiennes afin d’augmenter le nombre de naissances. Entre 10 000 et 12 000 enfants furent ainsi issus des liaisons entre des femmes
norvégiennes et des soldats allemands pendant l’occupation allemande en Norvège de
1940 à 1945. Jusqu’à la fin de la guerre, les allemands fondèrent neuf maisons, nommées
Lebensbornheime, en Norvège qui faisaient office de maternités et de foyers d’enfants et
devaient seconder cette « biopolitique ». Environ 250 de ces « enfants de la honte » dont
les mères étaient souvent méprisées dans leur pays furent directement transposés dans
des foyers allemands, entre 1943 et 1945. La plupart étaient logés au foyer « Sonnenwiese » en Saxe près d’Altenbourg, et par conséquent dans le futur territoire de la RDA. Ils
furent également inscrits au registre de naissance, pour la majorité des cas, avec un nouveau nom et un nouveau lieu de naissance allemand, ce qui rendit très difficile la recherche
de leurs véritables identités après la guerre.
HYGIÈNE RACIALE ET EUGÉNISME
L’eugénisme peut être défini comme l’intégralité des méthodes et pratiques visant à transformer le patrimoine héréditaire humain vers un idéal déterminé, alors que l’hygiène raciale
est un concept raciste faisant avant tout partie de l’idéologie nationale-socialiste. Déjà à la
fin du XIXème siècle, des idées et des institutions qui avaient pour but de modifier les traits
raciaux humains selon des conceptions souvent racistes et antisémites sont apparues en
Allemagne et dans le reste de l’Europe. Outre la diminution des maladies génétiques, on
voulait promouvoir un certain idéal racial à l’aide d’interventions politiques et médicales. La
première conférence d’hygiène raciale en Allemagne s’est tenue à l’université de Munich,
en 1923. Depuis leur arrivée au pouvoir, en 1933, les nazis prenaient peu à peu des mesures racistes et eugénistes, comme la stérilisation des malades par exemple et les Lois de
Nuremberg qui avaient entre autres pour but d’interdire les mariages entre Juifs et citoyens
« de sang allemand ». Ces mesures racistes atteignirent leur point culminant avec le
meurtre des handicapés dans les hôpitaux, et le génocide des Juifs et d’autres populations
indésirables aux yeux des nationaux-socialistes. En plus de ces atrocités qui résultaient de
l’idéologie de l’hygiène raciale, cette pseudoscience mettait plus en avant le bien-être d’une
population que celui de l’individu.
7
LES ENFANTS DU LEBENSBORN ET LA RDA
Après la guerre, le Ministère de la Sécurité d’Etat de la RDA profitait du fait que les parcours des « enfants du Lebensborn » étaient difficiles à reconstruire. Pour la Stasi, l’intérêt
était que les concernés, qui avaient été déplacés dans diverses nations, avaient grandi en
tant qu’apatride et avaient ainsi droit à un passeport de leur pays natal. En outre, les biographies des enfants du Lebensborn étaient également très difficiles à déceler par les services
de renseignement occidentaux. L’idée émergea de recruter les anciens enfants du Lebensborn pour des missions d’espionnage à l’étranger. Ce plan original fut finalement abandonné en faveur d’un plan encore plus perfide : des espions sélectionnés devinrent les doubles
des enfants du Lebensborn. Ils s’approprièrent leur identité et furent missionnés à l’étranger. Cette méthode trouva son acmé à la fin des années 60 et fut mise en pratique jusqu’au
milieu des années 70. Le service de renseignement soviétique KGB utilisait également les
identités d’orphelins d’Allemagne de l’Est pour son compte. Ceux-ci étaient rigoureusement
surveillés toute leur vie, souvent sans qu’ils ne s’aperçoivent de rien. Ceux qui tentèrent de
se renseigner sur leur origine, de se faire délivrer un passeport de leur pays natal - auquel
ils avaient droit selon le droit international - ou de prendre contact avec leurs familles à
l’étranger, furent entravés par la bureaucratie ou la répression massive de la RDA.
En même temps, la Stasi envoyait au nom des enfants du Lebensborn des demandes de
passeports étrangers à des ambassades et des bureaux des Passeports afin de pouvoir
partir à l’étranger. Les prétendus enfants du Lebensborn arguaient de leur triste passé, de
leur désir nostalgique d’une rencontre avec leur mère, ainsi que de leur prétendu (et cependant si vrai) sentiment d’être tyrannisés par les autorités de la RDA. Munis d’un passeport,
les espions effectuaient leur mission avec méticulosité : ils apprirent la vie de leur double
par coeur et infiltrèrent les pays d’Europe de l’Ouest, dont la Norvège. C’est ainsi que les
véritables enfants du Lebensborn vécurent une nouvelle injustice existentielle, sans en
avoir la moindre idée. On les a coupés de leurs racines et volé leur identité.
Lors du tournant politique de 1989/90, la Stasi détruisit la plupart des dossiers qui auraient
pu prouver ses activités. Ainsi, seule une minorité d’espions fut démasquée. Ce n’est qu’en
1997, sept ans après la réunification allemande, que commença une enquête laborieuse.
Au sein des archives de la Stasi, on analysa les registres des foyers du Lebensborn qui
s’étaient trouvés sur le territoire de l’ancienne RDA. On invita aussi publiquement les enfants du Lebensborn à se manifester.
LA STASI
« Stasi » est l’abréviation officieuse pour le Ministère de la Sécurité d’Etat (en allemand :
Ministerium für Staatssicherheit, MfS) de la RDA. La Stasi comprenait les services de renseignement intérieur et extérieur. Ses agents travaillants à l’étranger, avaient pour vocation
de recueillir clandestinement des informations gouvernementales et militaires d’autres pays,
tandis que les agents du département intérieur prenaient en charge la surveillance des habitants de la RDA afin de détecter de possibles adversaires du gouvernement. Pour ce
faire, la Stasi utilisait diverses méthodes d’interception : non seulement elle surveillait le réseau téléphonique et le courrier et remplissait des maisons privées de micros, mais elle enrôlait également des « collaborateurs officieux » qui devaient moucharder leurs collègues,
amis et mêmes leurs conjoints. A l’aide de ces moyens de renseignement, la Stasi pouvait
constituer des milliers de dossiers sur une multitude de citoyens de l’Allemagne de l’Est. Le
Ministère de la Sécurité d’Etat était ainsi l’un des instruments de pouvoir oppressifs de la
dictature communiste en RDA.
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Entretiens
Entretien avec Liv Ullman
Madame Ullmann, dans le film vous jouez la mère de Katrine, une allemande qui habite en Norvège et qui vit avec sa famille sous une fausse identité. Pourquoi avezvous choisi de faire ce film ?
L’histoire m’a immédiatement fascinée. Elle est extraordinaire, mais authentique. Le destin
subit par les enfants du Lebensborn pendant la Seconde Guerre Mondiale et aussi en partie après la guerre, n’est pas assez abordé encore aujourd’hui, en Norvège non plus. Ces
enfants ont eu un destin horrible, et je pense qu’il est important et juste qu’un film aborde ce
sujet. Je suis convaincue que le film suscitera beaucoup d’intérêt en Allemagne et à l’étranger. C’est autant un film d’espionnage qu’un drame familial.
Avez-vous un lien personnel avec le film ?
Pendant la guerre, j’ai perdu deux hommes de ma famille particulièrement importants pour
moi. Mon père a été tué au combat quand j’avais six ans, et mon grand-père est mort dans
le camp de concentration de Dachau. Ma tante s’était mariée avec un médecin allemand
longtemps avant la guerre. Quand veuve, elle est rentrée en Norvège après la guerre, elle
nous a expliqué que notre mère nous interdisait de parler allemand avec nos cousins car
elle haïssait les allemands. Rétrospectivement, je trouve que la réaction de ma mère était
bornée : même si on ne peut pas oublier, il faut pardonner.
Vous avez réalisé plusieurs films ces dernières années, et un nouveau projet est en
développement. A-t-il été difficile de redevenir une actrice ?
Je suis les deux : actrice et metteur en scène. Pendant le tournage de D’une vie à l'autre je
me suis sentie très à l’aise. Mais il y a longtemps que je n’ai plus joué de rôle dans un longmétrage et j’avoue que je ne suis pas toujours à l’aise devant la caméra. Peut-être qu’une
époque est révolue, car je remarque que la mise en scène m’attire de plus en plus. Je
pense que nous, comédiens, sommes très créatifs. Je sais écouter et suis très attentive.
Quand je réalise un projet, j’essaie de laisser les acteurs s’investir autant que possible sans
les manipuler.
« La manière dont Liv Ullmann porte son regard » – Georg Maas à
propos de son film D’une vie à l’autre
Georg Maas, 53 ans, est à la fois charpentier et travailleur social. Il a en tout cas obtenu
son brevet d’apprentissage et œuvré avec des adolescents sans abri – raconter des histoires, c’est ce qu’il a toujours voulu faire. C’est ainsi que cet homme originaire d’Aix-laChapelle réalise des films depuis les années 1980, écrit des scénarios, et ce avec beaucoup de succès. Son film D’une vie à l’autre parle de la double vie de l’espionne de la Stasi
Katrine Evensen Myrdal. De la même façon que dans certains de ses précédents films, il
est ici question de l’identité. Mais il en va aussi de l’héritage de deux dictatures allemandes
et des effets qu’elles peuvent avoir encore aujourd’hui sur la vie des gens. Une raison pour
laquelle D’une vie à l’autre a longtemps été considéré comme favori dans la course aux Oscars.
9
Monsieur Maas, pourquoi ne dites-vous pas dans le film pourquoi Katrine fait de l’espionnage en Suède ?
Pour la Stasi, l’enjeu consistait à espionner à l’intérieur de l’OTAN. Le cas le mieux documenté est celui de Heinz Hempel, sur lequel se fonde aussi notre film. Dans celui-ci, nous
nous sommes limités à montrer comment Kathrine espionne au sein de l’armée – elle fait
des photos avec un appareil de poche – et nous mettons cet aspect en lien avec la scène
où elle fait la connaissance de son mari. Nous nous en sommes tenus à cela.
Nous nous sommes demandés : si l’on se représentait la totalité du film comme un puzzle,
combien de pièces pourrions-nous laisser de côté tout en laissant la possibilité de reconnaître l’image. Je voulais que le spectateur reste actif et que, dans le même temps, il
prenne part lui-même à la réflexion. C’est en connaissance de cause que nous avons pris
le risque de laisser un certain nombre de questions ouvertes. Chacun pourra ensuite chercher des réponses sur Internet ou interroger un voisin qui aura également vu le film.
Le chef de Katrine est le type même du fonctionnaire de la Stasi. Avez-vous rencontré d’anciens IM (informateurs non officiels) ?
Un collaborateur de la Stasi oui, le blond qui est joué par Thomas Lawinky. Lorsque nous
étions à la recherche d’un acteur pour ce rôle, celui-ci m’a dit en aparté : « Georg, je dois
d’abord te dire quelque chose. » Il m’apprit alors qu’il avait lui-même travaillé pour la Stasi,
puis il m’a raconté son histoire. Thomas s’est empêtré là-dedans d’une façon aussi compliquée que Katrine dans le film.
Auparavant, j’avais rencontré deux autres anciens agents de la Stasi. L’un d’entre eux est
assez connu sous le nom de Werner Stiller. Il fut l’agent le plus recherché qui fût sur le sol
allemand – un double agent de la Stasi et du BND (Agence fédérale du renseignement en
Allemagne). Il a vu le film avant qu’il ne soit complètement monté. J’ai parlé avec deux employés de l’institution dirigée par Roland Jahn (en charge des archives de la Stasi au niveau
fédéral) qui connaissent bien ce type de dossiers. Tous ont lu le scénario et m’ont dit ce qui
était crédible et à quoi cela pouvait à peu près ressembler.
Qu’ont apporté à votre histoire les entretiens que vous avez menés en amont avec
des enfants du Lebensborn ?
Pour le dire sans détours : la manière dont Liv Ullmann porte son regard. Elle joue un personnage qui a vécu cet épisode. Les entretiens ont donc surtout contribué à l’émotionalité.
J’ai été impressionné par l’histoire d’Arno Kaube, qui entre-temps a repris son nom norvégien. En 1990, il est allé en Norvège sur les traces de sa mère. Il a retrouvé sa maison, a
sonné. Elle lui a ouvert, l’a reconnu et lui a claqué la porte au nez. Arno s’était mis à pleurer
en le racontant. Ce comportement de la mère s’explique par le fait que ces femmes, considérées comme des « coureuses d’Allemands », ont été exclues de la société et ont beaucoup souffert.
Marieke Reimann a réalisé l’interview. Elle est journaliste indépendante, spécialisée dans
les domaines du sport, des médias et de la femme. Elle a fait l’École de journalisme de Munich.
Copyright : Goethe-Institut e. V., Internet-Redaktion
Mars 2014
Traduction : Nathalie Huet
http://www.goethe.de/ins/fr/lp/kul/mag/flm/ksf/fr12564285.htm
Entretien video avec la co-scénariste du film
http://www.sddistribution.fr/fiche.php?id=90
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Caroline Moine est maître de conférence en histoire à l'Université de Versailles SaintQuentin-en-Yvelines, spécialiste des relations culturelles internationales et du cinéma allemand. Elle a notamment travaillé sur les films de la DEFA (les studios de la RDA) ainsi que
sur les festivals de cinéma en Europe du temps de la guerre froide. Parmi ses publications :
« Le renouveau du cinéma allemand dans les années 60. Entre modernité et reconnaissance internationale », au sein de l’ouvrage Allemagne, 1961-1974. De la construction du
Mur à l'Ostpolitik, dirigé par Jean-Paul Cahn et Ulrich Pfeil (Septentrion, 2009) ; « La douce
euphorie du cinéma allemand. Mécanismes et enjeux institutionnels d'une industrie culturelle en mutation » dans la Revue d’Allemagne et des Pays de langue allemande (3/2010),
"La Vie des autres (2006) : espion de la Stasi ou héros ordinaire?" dans la revue Le Temps
des Médias (2011/1, n°16). Elle a accepté de répondre aux questions de Zérodeconduite.net autour du film D’une vie à l’autre de Georg Maas.
Zérodeconduite.net : Le film traite d’un sujet méconnu : le Lebensborn. Pouvez-vous
nous rappeler ce que ce terme signifie ?
Caroline Moine : Il désigne une association créée en 1935 par l'Allemagne nationalesocialiste. Gérée par la milice du parti nazi, la SS, son but était d'augmenter le taux de naissance d'enfants « aryens ». Des filles-mères accouchaient anonymement avant de confier
leur bébé à la SS qui en assurait la charge puis l'adoption. Des maternités et orphelinats
ont ainsi été liés au Lebensborn dans différents pays d’Europe, notamment en Norvège et,
plus tard, en France. A la fin de la guerre, quand les Alliés sont arrivés dans les orphelinats
Lebensborn en Allemagne, ils ne savaient pas quoi faire de ces enfants, tellement liés à la
politique raciale nazie. Ils ont été dispersés au gré des adoptions ou redistribués dans
d’autres orphelinats.
Le film nous fait voyager entre deux mondes (Est et Ouest) et deux moments historiques (nazisme et RDA).
C.M. : Je n’avais jamais vu de film sur la question du Lebensborn et en particulier de sa relation avec la politique de la Stasi. Il est intéressant que ce soit au cœur de l’intrigue d’une
fiction allemande contemporaine. Le cinéaste Georg Maas montre que les frontières ne
sont pas évidentes entre les victimes et les bourreaux, à l’instar du personnage de Vera,
interprétée par Juliane Köhler. De père allemand et de mère norvégienne, on suppose au
début du film qu’elle est l’une de ces orphelins du Lebensborn, ces enfants issus des relations entre occupants et occupés pendant la seconde guerre mondiale. Par la suite, on
comprend qu’elle est, en réalité, un agent de la Stasi qui a usurpé l’identité d’un orphelin du
Lebensborn, avant de simuler une fuite hors de la RDA pour aller retrouver sa mère supposée. Quelques décennies plus tard, alors que la RDA s’effondre, le secret s’évente.
Ces "enfants de la guerre" norvégiens seraient de 10 000 à 12 000. Une centaine
d’entre eux accusent les autorités de leur pays de les avoir traités de manière discriminatoire et de n'avoir rien fait pour réparer le préjudice qu'ils ont subi.
C.M. : Ils ont été deux fois victimes des dictatures allemandes : séparés de leurs mères norvégiennes, arrachés à leur pays de naissance pour aller en Allemagne, puis privés de toute
information (par les autorités allemandes) pour pouvoir retrouver leur identité et se reconstruire. Cette sombre partie de l’histoire allemande révèle la continuité absurde d’une dictature à l’autre et une logique de destruction de l’individu et de son identité pour des raisons
idéologiques et politiques. Au cours de la série de procès de Nuremberg (1945-46), il n’y a
pas eu véritablement de condamnation du lebensborn. Le procès lié à la question des médecins et de la politique hygiéniste nazie a seulement traité la question des enlèvements
d’enfants correspondant à l’image du bon petit aryen en Pologne et dans les territoires de
l’est qui devaient être adoptés par des familles aryennes. Quatorze personnes ont été présentées à la barre mais aucune n’a été condamnée. Le Lebensborn a longtemps été perçu
comme un lieu d’action caritative, pour aider des orphelins, des filles mères et des enfants
nés hors mariage. On n’a pas voulu voir ou comprendre ce qui se cachait derrière ces institutions nazies. Ce qui a laissé libre cours à de nombreux fantasmes dont celui de maisons
closes supposées où des SS rencontraient de jeunes femmes blondes, appelées les fiancées d'Hitler. Rien de venait contredire ces fantasmes car les travaux d’historiens sur la politique hygiéniste nazie n’ont commencé à être publiés qu’à partir des années 80.
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© Sophie Dulac Distribution
Le sujet reste relativement peu traité par le cinéma allemand...
C.M. : Un film intitulé Lebensborn est sorti en 1961 en Allemagne de l’Ouest, produit par un
survivant polonais de la Seconde Guerre mondiale. Il raconte une histoire d’amour grandiloquente dans une institution du Lebensborn. Le film fut mal accueilli, pas tant pour son sujet
que pour la manière dont il était traité. Il y a eu quelques reportages sur les principales
chaînes allemandes mais pas de documentaires de fond. D’une vie à l’autre et Lebensborn
sont les seules fictions qui abordent cette question. Des témoignages de la quête de ces
orphelins du lebensborn pour retrouver leurs parents ont commencé à faire surface dans
les années 80-90. Mais il reste peu de traces…
La Stasi a fait disparaître un maximum de preuves.
C.M. : Certains enfants du Lebensborn ne sont même pas au courant qu’ils ont été conçus
ou enlevés puis élevés dans des institutions nazies. Tous n’ont pas eu le droit et l’accès à
l’information. La RDA a même fait pression sur eux. Au sortir de la guerre, la Norvège, pays
le plus concerné, avait essayé de négocier le retour de ces enfants mais l’Allemagne de
l’Est a rendu la recherche de leurs traces impossible. C’était la Guerre Froide et il n’y avait
pas de relation diplomatique entre Oslo et Berlin-Est. Une tentative pour créer un fond d’archives avait bien eu lieu mais tout a été détruit durant la RDA. La Stasi a même procédé à
une deuxième vague de destruction de documents après la chute du Mur de Berlin. La marine norvégienne, qu’infiltre Vera dans le film D’une vie à l’autre, intéressait particulièrement
la Stasi pour les enjeux liés à l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN). De ce
pays, les autres pays de l’Ouest étaient facilement accessibles pour les espions. En 2007,
l’enquête d’une journaliste norvégienne et une journaliste allemande permet de retrouver la
trace d'un agent de la Stasi dont s’est inspiré le cinéaste Georg Maas. En 1983, cet espion
avait dû quitter précipitamment la Norvège, vraisemblablement repéré par les services secrets norvégiens. C’est par la presse que l’orphelin du Lebensborn apprend que son identité a été utilisée par un agent secret pour infiltrer la Norvège en prétextant rejoindre sa famille.
Qu’avez-vous pensé du traitement cinématographique de cette séquence historique ?
C.M. : La question du Lebensborn est le point de départ du film mais n’est pas développé.
Ce qui est au cœur du récit, c’est la façon dont la Stasi a manipulé cette histoire nazie. Par
ailleurs, représenter la Stasi au moment de sa chute est inédit. Il s’agit de l’écroulement
d’un système tandis que dans le film La Vie des autres de Florian Henckel von Donnersmarck, la Stasi apparaît toute-puissante. Le cinéaste Georg Maas a également fait un travail sur la couleur, en privilégiant les tons bleutés et froids pour montrer la mer et la ville
norvégienne de Bergen et les couleurs jaunes, marrons et orange pour montrer l’Allemagne
de l’Est dans les années 70-80. Tout y est : les façades qui s’écroulent, les imperméables
beiges, les lunettes, les visages peu amènes, à l’instar de l’ancienne infirmière du Lebensborn qui travaille dans un pressing. Le spectateur bascule ainsi d’un univers à l’autre.
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Etablissez-vous des parallèles entre D'une vie à l'autre et d’autres films allemands ?
Vous évoquiez La vie des autres...
C.M. : Le personnage de Vera fait écho avec le film Barbara, de Christian Petzold. Dans le
film La vie des autres, la RDA est un prétexte pour un tout autre type de discours. Cette
idée, qu’au sein de la Stasi, quelqu’un aurait pu être touché par ses victimes et connaître
une métamorphose grâce à l’art est illusoire. Le personnage de Vera est plus complexe et
réaliste. Il reflète l’ambivalence de tous ces jeunes enrôlés par la Stasi pour qui la RDA était
le seul univers. Dès le départ, Vera se retrouve dans une situation qu’elle ne maîtrise pas.
Orpheline de la Seconde Guerre Mondiale, et non du Lebensborn, elle apparaît comme une
victime. Accueillie et formée par la Stasi, elle devient ensuite un bourreau en usurpant
l’identité d’une orpheline du Lebensborn. L’officier de la Stasi, Hugo (Rainer Bock), est
comme son père. L’amour de son mari, l’officier de la marine norvégienne, lui permet de
rester un être humain. Toute sa vie n’est pas qu’un mensonge. Lors d’un flash back, Hugo
ordonne à Vera de ne pas se marier, prétextant que ce n’est pas pour cela qu’elle a été envoyée à l’Ouest. L’amour n’a pas sa place au sein de la Stasi. Vera est un petit soldat. Puis,
tandis que la RDA s’effondre, Hugo la somme de quitter sa famille pour toujours en partant
à Cuba. Vera comprend que sa famille n’était pas la Stasi et qu’elle est une de ses victimes. Cette figure de ces agents officieux qui ont gangréné toute la société est-allemande
est peu commune. Leur conviction était née de l’illusion de trouver un peu d’amour et de
compréhension dans une société allemande qui, après guerre, avait explosé.
Qu’en est-il du personnage de Barbara, interprétée par Nina Hoss dans le film de
Christian Petzold ?
C.M. : C’est l’histoire d’une femme qui doute de plus en plus du système est-allemand et
décide de passer à l’ouest où vit son amant. Elle doit s’échapper par la mer, comme la vraie
fille du Lebensborn qui s’enfuit dans le film D’une vie à l’autre. Visuellement, la symbolique
est forte. Il faut quitter les frontières, ne plus être entre quatre murs, surveillé. Ces personnages féminins risquent leur vie en prenant la mer et leur destin en main. Barbara (Nina
Hoss) rencontre finalement l’amour en Allemagne de l’Est et aide quelqu’un d’autre à
s’échapper. Elle se pense trop âgée pour recommencer sa vie. La Stasi y est montrée
comme extrêmement intrusive puisqu’on voit Barbara fouillée dans sa plus profonde intimité. L’instant est vécu comme un viol. Nina Hoss et Juliane Köhler sont deux actrices quinquagénaires très en vogue en Allemagne, connues pour jouer des personnages de femmes
fortes. Cela s’inscrit dans un courant du cinéma allemand actuel où les figures féminines
sont riches et ne dissimulent pas leurs rides.
Propos recueillis par Magali Bourrel, avril 2014
http://www.zerodeconduite.net/duneviealautre/entretien.html
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© Sophie Dulac Distribution
Revue de presse
Libération - Gérard Lefort
Par le prisme du drame familial induit par cette révélation, le récit entend instruire l’épais
dossier de la double peine allemande : nazisme et communisme. Mais ne décolle pas d’un
mélo trop psy (ma mère n’est pas mère, ma femme est une menteuse), surligné par une
overdose de violonneries à hurler.
Positif - Eric Derobert
"D'une vie à l'autre" imagine que les destins des vrais et des faux enfants ont pu
s'entrecroiser, et se constitue en drame familial avec acteurs pétrifiés, envahi par un
commentaire musical peu subtil.
Les Fiches du cinéma - Michel Berjon
Deux pays, deux vies, font par conséquent deux films : un drame familial peu banal et un
film d'espionnage efficace. Mais la mise en scène ne tire pas parti de cette potentielle
schizophrénie.
Le Figaro - Marie-Noëlle Tranchant
De bons comédiens apportent à l'épisode historique ses tragiques résonances intimes.
Reste du Lebensborn un amer désastre humain.
Le Journal du Dimanche - Danielle Attali
Georg Maas réveille habilement les classiques ambiances de guerre froide, de paranoïa, de
manipulation à travers un scénario qui n'en reste pas moins efficace. En prime, on retrouve
la grande Liv Ullmann.
Télérama - Frédéric Strauss
En brodant sur la réalité historique, le film de Georg Maas crée un univers de mensonges et
de complots qui voudrait rappeler La Vie des autres. Mais l'atmosphère est moins forte et
l'usage excessif des flash-back accentue la banalité de ce drame, honnête film
d'espionnage à l'ancienne.
Le Monde - Sandrine Marques
Ce thriller politique lève le voile sur la condition douloureuse d'enfants issus de ces amours
réprouvées avec l'occupant. Il est regrettable, au vu de son puissant sujet, que le
réalisateur se laisse submerger par sa propension à esthétiser outre mesure son film.
Elle - Florence Ben Sadoun
Les souvenirs remontent à la surface, les non-dits aussi. D'autant que les anciens membres
de la Stasi veillent... Les acteurs - Juliane Kohler en tête - sont formidables, et le suspense
est fort bien alimenté.
Les Inrockuptibles - Vincent Ostria
Une fiction emberlificotée sur deux époques, années 60 et 90, traitée avec une lourdeur
académique et une gravité papale. Le pseudo-thriller haletant tourne vite au mélo
harassant.
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Critikat.com - Eva Markovits
Cours, Katrine, cours
Efficacité et rigueur sont les deux mamelles du deuxième long métrage de Georg Maas,
réalisateur plus versé dans le cinéma documentaire. Outre le sujet troublant du récit, c’est
également la présence de Liv Ullmann qui interpelle. Depuis Saraband, onze ans auparavant,
le dernier film d’Ingmar Bergman, son réalisateur fétiche, Liv Ullmann s’est presque
exclusivement consacrée à la mise en scène dans son pays d’origine, la Norvège. Mais le récit
tragique des « enfants Lebensborn » semble avoir convaincu l’actrice de revenir devant la
caméra pour ce qui « sera probablement son dernier rôle ». Elle est impeccable comme toujours,
alliant grâce et caractère, même si le gros du boulot revient plutôt à l’excellente Juliane Köhler,
vue dans Nowhere in Africa (2001) de Caroline Link ou La Chute (2008) d’Oliver
Hirschbiegel, et qui semble habitée par le personnage qu’elle incarne, traqué mais insoumis.
Classique
Le cinéma allemand a connu bien des remous et si, de prime abord, les noms de Wim
Wenders et Michael Haneke nous viennent à l’esprit, la production allemande depuis les
années 2000 est constituée de plusieurs strates. Un regain d’intérêt pour ce territoire
cinématographique s’illustre dans la rétrospective très complète du Forum des Images à
Paris qui a lieu en mars-avril 2014, « Berlin Magnétique » qui, bien que concentrée sur la
fascinante capitale allemande, proposait un panel varié des différentes mouvances du
cinéma allemand de ses débuts à aujourd’hui. Elle nous révélait en particulier la diversité
des vingt dernières années. Car si les années 1980 ont été monopolisées par la figure de
Wim Wenders, les années 1990 et surtout 2000 voient l’essor d’une nouvelle génération
enthousiaste de cinéastes qui continuent à œuvrer aujourd’hui (Petzold, Arslan, Tykwer).
Lors d’une conférence au Forum consacrée au cinéma allemand contemporain, Pierre
Gras, journaliste et écrivain spécialiste du cinéma allemand, dégageait trois tendances du
cinéma contemporain : un cinéma à la dramaturgie et à la mise en scène classique, à
vocation grand public, abordant des sujets historiques et politiques à l’instar de La Vie des
autres, grand succès international en 2006 ; un cinéma plus post-moderne à l’image de
Cours, Lola, cours (1998) de Tom Tykwer ou plus récemment de Fatih Akin dans sa version
« multikulti » [Terme familier allemand signifiant « multiculturel »] (Head-On, 2004, Soul
Kitchen, 2009) et enfin l’école de la sobriété que représenteraient les films de cinéastes tels
que Christian Petzold (auteur de Barbara, 2013) ou Thomas Arslan (auteur de Gold, 2013).
D’une vie à l’autre se réclame sans aucun doute de la première catégorie (c’est d’ailleurs
assumé puisque sur l’affiche française du film, il est écrit que le film est « un croisement
réussi entre La Vie des autres et la série Borgen » et le titre français choisi est très familier)
jouant d’une mise en scène solide mais fort classique, d’un scénario honnête mais fort
prévisible.
Révélations et reconstruction
Georg Maas surfe ici sur la vague des scénarios à sensation, échafaudés sur la révélation
des actions de la Stasi, la police politique de la République démocrate allemande (RDA)
active entre 1950 et 1990. Si celle-ci exerça pendant ces années-là une censure
incessante, elle constitue à présent un véritable vivier d’inspiration pour les cinéastes
allemands soucieux de mettre à jour leurs pratiques.
Il s’agit ici du destin de Katrine, fruit des amours entre un soldat allemand et une femme
norvégienne pendant la Seconde Guerre mondiale. Dès sa naissance, elle est enlevée à sa
mère pour être placée dans un orphelinat surnommé « Lebensborn », réservé aux enfants
aryens. Une idée de pureté raciale portée par Himmler, qui mit à contribution les
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Norvégiens car il estimait qu’ils étaient une race noble du fait de leur descendance des
Vikings. Katrine grandit donc en Allemagne de l’Est mais part ensuite retrouver sa mère en
Norvège où elle s’installe et fonde une famille. Vingt ans après, lorsqu’un jeune avocat lui
demande d’apporter son témoignage contre l’État norvégien au nom de ces « enfants de la
honte », elle refuse. Katrine se retrouve alors prise dans un étau qui se resserre et qui la
force aux aveux. Doit-on toujours dire la vérité ? Connaît-on vraiment la personne que l’on
aime ? Est-il nécessaire de se souvenir ? Peut-on pardonner ?
Autant de questions qui alimentent la réflexion sur la notion de reconstruction, au cœur de
la culture allemande. Si Georg Maas l’exploite, il ne parvient pas à la transcender afin de
nous livrer un récit plus subtil. Il semble s’en satisfaire comme si la complexité de ces
questionnements suffisait à nourrir la pensée du spectateur. Si le récit est entraînant et le
sujet peu connu et passionnant, Maas reste engoncé dans des problématiques peu
approfondies sans vraiment nous surprendre alors que le récit se veut à suspense. Dès la
première demi-heure du film, nous pouvons à peu près deviner le parcours de l’héroïne et
l’utilisation d’images Super 8 pour les séquences de flash-back n’aide en rien à améliorer le
parti pris déjà assez ordinaire du film. Un salut à la directrice de la photographie du film,
Judith Kaufmann, qui capture à merveille les paysages sauvages et secs de la Norvège en
incorporant ça et là des touches de couleurs chaudes qui étoffent les plans.
Si les Français semblent être assez friands des films portant sur le passé trouble de leur
voisin allemand (on pense au succès en salles de Goodbye Lenin ou de La Vie des autres),
il leur faudra se contenter de ce remâchement certes divertissant et bien joué mais peu
stimulant.
http://www.critikat.com/actualite-cine/critique/d-une-vie-a-l-autre.html
© Sophie Dulac Distribution
Le Figaro - Marie-Noëlle Tranchant
Le film de Georg Maas, met en scène l'histoire vraie d'enfants élevés dans des orphelinats
allemands et recrutés comme espions.
Film d'espionnage, enquête historique et drame psychologique, D'une vie à l'autre, du réalisateur allemand Georg Maas, traite sous des angles différents un même sujet, d'autant plus
passionnant qu'il est inédit. Quelques rares documentaires existent, mais c'est la première
fois que le cinéma de fiction s'empare de l'histoire longtemps occultée des Lebensborn.
Inventés par Himmler en 1935, ces foyers dont le nom signifie «source de vie», étaient des
centres d'élevage et de dressage pour petits aryens purs, procréés par des nazis et des
femmes de bonne composition génétique, souvent mères célibataires. Ainsi devait se propager la race des seigneurs - les enfants qui n'y correspondaient pas étant liquidés. Pendant la guerre, l'expérience se poursuivit hors des frontières allemandes, notamment en
Norvège, où les liaisons entre des SS et des filles de Vikings pouvaient faire espérer des
produits humains particulièrement performants, aux yeux des idolâtres de la force blonde.
Les mères étaient regroupées dans des camps, et les enfants, au bout de quelque temps,
envoyés dans des orphelinats en Allemagne.
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Affronter les mensonges
C'est le sort qu'a connu l'héroïne de D'une vie à l'autre, Katrine (Juliane Köhler). Lorsqu'on
la découvre, en 1990, elle mène une vie de famille tranquille, en Norvège, entre un mari
aimant, Bjarte (Sven Nordin), leurs enfants et petits-enfants, et sa mère, Ase (Liv Ullmann).
Katrine a grandi à l'orphelinat Lebensborn de Sonneweise, en Saxe, qui allait faire partie de
la RDA communiste, au lendemain de la guerre. Dans les années 1970, elle a fui l'Est pour
rejoindre sa mère. Même si les blessures sont loin d'être guéries, les deux femmes ont trouvé, semble-t-il, un modus vivendi équilibré. Mais ce fragile édifice va être ébranlé par un
avocat qui enquête sur les anciens enfants des centres Lebensborn. D'autres secrets vont
apparaître, des mensonges, des dangers qu'elle est seule à connaître et à affronter.
Le titre français rappelle délibérément La Vie des autres, et s'il n'en a pas toutes les qualités de mise en scène, le film explore les sinistres manipulations du système communiste.
Dans les années 1960, la Stasi a recruté des agents secrets parmi les jeunes gens issus du
Lebensborn : leur passé brouillé les rendait difficiles à identifier. Parfois même on volait leur
identité pour servir de couverture à des espions. Ces faits authentiques découverts malgré
la destruction hâtive d'archives par la Stasi, fournissent son intrigue de thriller, habilement
diffusée dans la vie ordinaire. En dépit d'une réalisation sans raffinement, le film a le grand
intérêt de mettre en perspective la destinée tragique des enfants du Lebensborn, à travers
trois époques successives. De bons comédiens apportent à l'épisode historique ses tragiques résonances intimes. Reste du Lebensborn un amer désastre humain.
http://www.lefigaro.fr/cinema/2014/05/06/03002-20140506ARTFIG00258--d-une-vie-a-l-autre-lesenfants-maudits-de-la-stasi.php
© Sophie Dulac Distribution
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Dossier de
présentation du
contexte historique
En téléchargement sur le site officiel
http://www.sddistribution.fr/
telechargement.php?id=1157
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Dossier
Pédagogique
Zéro de conduite
A consulter en ligne :
http://www.zerodeconduite.net/
duneviealautre/dossier_pedagogique.html
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Dossier de presse
allemand
En téléchargement sur le site officiel
http://www.farbfilm-verleih.de/filme/zwei_leben/PH/
pdf.zip
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Kritiken
Deutsche Vergangenheitsbewältigung am Fjord
Der deutsche Film "Zwei Leben" bewirbt sich um einen Oscar. Die Geschichte
eines von den Nazis verschleppten Kindes ist herzzerreißend, leider mangelt es
am Handwerk.
Von Birgit Roschy - 18. September 2013
In Norwegen, in der Nähe von Bergen, lebt eine Bilderbuchfamilie, bestehend
aus dem glücklichen Ehepaar Katrine und Bjarte, ihrer studierenden Tochter mit
Baby und einer fürsorglichen Großmutter. Allein für das kuschelige Holzhaus am
Fjord würde mancher sehr viel geben. Die dramatische Fallhöhe, die in diesem
Film aufgebaut wird, ist beträchtlich.
Der Niedergang dieser heilen Welt beginnt nach dem Fall der Mauer. 1990
taucht an Katrines Arbeitsplatz ein junger deutscher Anwalt auf. Katrine ist die
Tochter eines deutschen Wehrmachtssoldaten und einer Norwegerin; eines der
Besatzungskinder, die in Lebensborn-Heime nach Nazi-Deutschland verschleppt
wurden. Nur wenige fanden Jahrzehnte später wieder zu ihren leiblichen
Müttern zurück. So die Filmfigur Katrine.
Der Anwalt will nun, dass sie als Zeugin bei einer Anhörung aussagt, mit der
eine Klage auf Wiedergutmachung erreicht werden soll. Doch zunächst lehnt
Katrine sein Ansinnen ab – vorgeblich, um ihre Mutter Åse vor neuerlichem
Gerede zu schützen.
Zwei Leben liefert zweifelsfrei einen erneuten Beweis, dass die Wirklichkeit die
ungeheuerlichsten Geschichten schreibt, doch die historische Materie, die der
Regisseur Georg Maas in seinem Drama aufdröselt, ist so verzwickt, dass der
Film wohl nicht nur unter ausländischen Kinogängern manches "Häh?"
hervorrufen wird.
Dennoch geht das Drama als deutscher Kandidat für die AuslandsoscarNominierungen ins Rennen. Die gefeierte Offbeat-Komödie Oh Boy hatte
angesichts der aufwühlenden Vergangenheitsbewältigung in Zwei Leben wohl
keine Chance. Die Einreichung von Filmen, die sich mit der jüngsten deutschen
Geschichte befassen, hat Tradition. In den Vorjahren wurden Barbara, Sophie
Scholl, Der Untergang und Der Baader-Meinhof-Komplex ausgewählt. Das Leben
der Anderen schließlich heimste 2006 den Academy Award für den besten
fremdsprachigen Film ein. Und wer sich von der beklemmenden "Trau-schauwem"-Atmosphäre dieses Stasi-Dramas ergreifen ließ, dürfte an dem
erschütternden Schicksal der Lebensborn-Kinder erst recht Anteil nehmen.
Nach dem Überfall der Wehrmacht auf Norwegen 1940 wurden etwa 250 Kinder
aus Verbindungen zwischen deutschen Soldaten und Norwegerinnen von den
Nazis in Lebensborn-Heime nach Deutschland verschleppt, weil die Nazis die
"Aufnordung der deutschen Rasse" forcierten. In Norwegen wurden die Mütter
als "Deutschenflittchen" geächtet. Nach dem Krieg wurden in der DDR die
Kinder aus Hitlers Lebensborn-Heimen von der Stasi ins Visier genommen.
Mehr soll hier nicht verraten werden von der entsetzlichen Perfidie, mit der die
Kinder auch in der Nachkriegszeit politisch missbraucht wurden.
http://www.zeit.de/kultur/film/2013-09/film-zwei-leben-norwegen-lebensborn
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Juliane Köhler spielt in großer Intensität eine Frau, deren familiäres Glück
zerbricht, als die Stasi-Vergangenheit sie einholt.
Ein fast vergessenes Kapitel greift Georg Maas in seinem zweiten Kinospielfilm
auf, das Schicksal von Kindern deutscher Soldaten und norwegischen Frauen
während der deutschen Besatzung Norwegens von 1940 bis 1945. Von den
Nazis wurden Hunderte dieser Kinder nach Deutschland verschleppt und
größtenteils in Kinderheimen des "Lebensborn"-Vereins der SS untergebracht
auf dem Gebiet der späteren DDR. Vielen wurde ihre Biografie geraubt, um sie
als Stasi-Agenten im Westen einzusetzen.
Vor diesem Hintergrund spielt das Drama "Zwei Leben". Eine der Verschleppten
ist Katrine, die mit ihrer Familie in einem beschaulichen norwegischen
Küstendorf lebt. Als nach dem Fall der Mauer ein junger deutscher Anwalt
Betroffene sucht, um eine Klage auf Wiedergutmachung bei Gericht
einzureichen, soll sie als Zeugin aussagen. Das Glück der Frau gerät in Gefahr,
sie versucht mit Lügen die Stasi-Vergangenheit zu vertuschen und ihre
gestohlene Identität zu schützen. Immer mehr verstrickt sie sich in ein Netz von
Widersprüchen und steht am Ende vor den Scherben ihrer falschen Existenz.
Juliane Köhler verkörpert den komplexen Charakter der Frau mit den zwei
Gesichtern, die als Spionin kam und die große Liebe fand, zwischen Schuld und
Unschuld, Gut und Böse. An ihrer Seite Liv Ullmann in der Rolle der
norwegischen "Mutter". Zwei schauspielerische Schwergewichte, denen man
stundenlang zuschauen möchte. Auch wenn der Rückblick auf den Kalten Krieg
und die Spionageaktivitäten anfänglich irritieren, folgt man gespannt der
Handlung mit immer neuen Wendungen, bis sich ein erschreckendes Gesamtbild
ergibt. Sehr frei nach dem Roman "Eiszeiten" von Hannelore Hippe - es wird
quasi dieselbe Geschichte erzählt nur mit anderen Figuren und aus einer
anderen Perspektive - gelingt Maas basierend auf weitreichenden Recherchen
ein sehr authentisches und psychologisch fein gesponnenes Familiendrama, in
dem unter der hellen Sonne Norwegens und in Kontrast zur friedlichen
Landschaft dunkle menschliche Abgründe aufbrechen. Die Betrachtung eines
beschädigten Menschen beim Nachspüren seiner tiefen Einsamkeit und die
diesen Film grundierende Trauer schmerzen. mk.
http://www.kino.de/kinofilm/zwei-leben/73541
Deutscher Oscar-Kandidat
deiner Familie
"Zwei
Leben":
Der
Feind
in
Von Christian Buß
Von den Nazis geraubt, von der Stasi missbraucht: "Zwei Leben" handelt von
einer Norwegerin, die in die NS-Zuchtanstalt Lebensborn kam und später in
DDR-Heimen aufwuchs. Der Film erzählt deutsche Geschichte als Psychothriller
und ist zu Recht für den Auslands-Oscar vornominiert.
Eine Familie, gezeichnet vom Faschismus: Fast drei Jahrzehnte waren Katrine
(Juliane Köhler) und Ase (Liv Ullmann) auseinandergerissen, jetzt leben sie an
einem Fjord in Norwegen, verbunden in inniger Nähe, wie es sie eigentlich nur
zwischen Tochter und Mutter geben kann. Ase hatte das Kind während der
deutschen Besatzung im Zweiten Weltkrieg mit einem deutschen Soldaten
gezeugt, musste es nach der Geburt bei der Nazi-Zuchtanstalt Lebensborn
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abgeben. Die kleine Katrine wurde mit anderen Lebensborn-Babys nach Leipzig
gebracht, ihre Kindheit und Jugend verbrachte sie in DDR-Heimen, erst nach
der Flucht über die Ostsee Ende der sechziger Jahren lernte sie ihre Mutter
kennen. Jetzt scheint die beiden nichts mehr trennen zu können.
Oder doch? Was bedeutet die sonderbare Unruhe, die Katrine immer wieder
befällt? Weshalb freut sie sich nicht darüber, dass ein Anwalt (Ken Duken) eine
Entschädigungsklage für die geraubten Lebensborn-Kinder anstrebt? Warum
erzählt sie ihrem Mann (Sven Nordin), sie habe sich unsterblich in einen
anderen verguckt, obwohl es gar keinen Geliebten gibt? Und vor allem: Wieso
läuft die Frau nach einer Flugreise mit Perücke und Sonnenbrille durchs gerade
wiedervereinigte Deutschland und trifft zwielichtige Gestalten?
Regisseur
Georg
Maas
hat
mit
"Zwei
Leben"
ein
labyrintisches
Zeitgeschichtsdrama geschaffen. Zeitsprünge, Identitätswechsel, schwer zu
durchschauende Verschwörungsszenarien - der Zuschauer muss sich damit
abfinden, über weite Strecken im Unklaren zu bleiben. Identifikation mit der
Hauptfigur, das macht die Sache nicht leichter, fällt schwer: Man kann aufgrund
ihrer offensichtlichen Aufgewühltheit mit ihr leiden - vertrauen aber kann man
ihr nicht. Woran können wir uns bei diesem Psychothriller mit SpionageHintergrund und doppeltem Boden überhaupt halten?
Dein Leben mit den Anderen
Am besten an den realen historischen Hintergrund: Bis Kriegsende wurden rund
250 norwegische Lebensborn-Kinder von den Nazis ins Deutsche Reich geholt,
ein Großteil in die Nähe von Leipzig. Da es später nach dem Krieg zwischen
Norwegen und der DDR eine diplomatische Eiszeit gab, blieben die
verwandtschaftlichen Verhältnisse der Heranwachsenden ungeklärt. Einige
wurden adoptiert, andere lebten in Heimen. Wie 1997 Recherchen des SPIEGEL
ergaben, wurden einige wenige der ehemaligen Lebensborn-Kinder von der
Stasi zu Agenten ausgebildet. Zu Zeiten des Kalten Krieges wurden sie unter
falscher Identität nach Norwegen geschleust, um dort für die DDR zu
spionieren.
Ein
monströses
Thema
verbirgt
sich
also
hinter
dem
zuweilen
kammerspielartigen Identitäten-Thriller "Zwei Leben": wie die Verbrechen des
"Dritten Reiches" in denen der DDR aufgegangen sind; wie beide Systeme die
Familie als Verfügungsmasse ideologisch und strategisch instrumentalisierten.
Ein ungeheuerlicher Stoff - und dabei doch wie geschaffen für ein
internationales Publikum. Beim vom Goethe-Institut und German Films
ausgerichteten deutschen Filmfestival in Australien, auf dem "Zwei Leben" im
April lief, mussten wegen der großen Nachfrage gleich parallel Säle gebucht
werden. Am Ende gab es den Publikumspreis.
Diese Wahrheit müssen wir ertragen: Die düstersten Kapitel der deutschen
Geschichte sind auf dem Kinoweltmarkt sowas wie das Kapital der, weltweit
betrachtet, nicht sonderlich erfolgreichen hiesigen Filmwirtschaft. 1980 wurde
"Die Blechtrommel", Volker Schlöndorffs Verfilmung von Günter Grass'
grotesker NS-Familiengeschichte, als bester fremdsprachiger Film mit dem
Oscar bedacht. 2006 erhielt Florian Henckel von Donnersmarck denselben Preis
für sein Stasi-Melodram "Das Leben der Anderen". Christian Petzolds furiose
Stasi-Liebesgeschichte "Barbara" schaffte es voriges Jahr allerdings nur in die
deutsche Oscar-Vorauswahl, bekam leider keine Academy-Nominierung.
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Ein Schachzug also, dass die deutsche Vor-Jury mit "Zwei Leben" eine Produktion in das aktuelle Rennen schickt, in dem gleich beide verbrecherischen
Systeme der deutschen Geschichte eine Rolle spielen: Das "Dritte Reich" und
die DDR, da muss doch was mit dem Auslands-Oscar gehen.
Dabei könnte, trotz thematischer Nähe, "Zwei Leben" in seiner Inszenierung
und seiner grimmigen gesellschaftspolitischen Stoßrichtung nicht weiter von
"Das Leben der Anderen" entfernt sein. Wo beim Oscar-Gewinner von 2006 klebriges Stasi-Läuterungstheater zur Aufführung gebracht wurde, da geht es beim
Oscar-Anwärter 2013 um die längst abgearbeiteten Spätfolgen des DDRÜberwachungsstaates. Wo in dem einen Film schöne wahrhaftige Musik und
schöne wahrhaftige Gedichte reichen, um den Zersetzungsschergen auf den
Pfad der Menschlichkeit zurückzubringen, da zeigt der andere, wie diese Zersetzungsarbeit auch nach dem Ende der DDR nachwirkt. "Zwei Leben" ist auch eine
Reise ins finstere Herz der Repression.
Dein Leben bei den Anderen: Katrine, die ambivalente Heldin in Maas' Kinodrama, kommt nicht recht an in dem Leben in Norwegen, das sie als das eigene
beansprucht. Vor rau-idyllischer Naturkulisse zeigt "Zwei Leben", wie die Unterdrückungstechniken und der Allmachtsanspruch des untergegangenen Unrechtsstaates in der kleinen Zelle der Familie weiterhin ihre Macht entfalten.
Großes verstörendes Zeitgeschichtskino, dafür bitten wir um einen Oscar.
http://www.spiegel.de/kultur/kino/deutscher-oscar-kandidat-zwei-leben-mit-julianekoehler-a-921216.html
© Sophie Dulac Distribution
Dossier composé par Maud Rossi - Atelier CANOPÉ Morbihan
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Dossier
Pédagogique
allemand
En téléchargement sur le site officiel
http://www.farbfilm-verleih.de/filme/zwei_leben/PH/
Schulmaterial_ZWEILEBEN.pdf.zip
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