Comment définir un programme d`aménagement d`ensemble?
Transcription
Comment définir un programme d`aménagement d`ensemble?
QUESTIONS FINANCIÈRES Comment définir un programme d’aménagement d’ensemble? 1. Programme d’aménagement d’ensemble (art. L. 332-9) Notion Nécessité d’un parti d’aménagement Ensemble de travaux de voirie et d’éclairage et d’adduction d’eau Oui. 2. Non-respect du délai de réalisation des équipements programmés Possibilité de prorogation du délai Non Conséquences Restitution des sommes payées (art. L. 332-11). Résumé 1. Un programme d’aménagement d’ensemble (PAE) peut se limiter à un programme de viabilisation et de construction d’équipements publics comportant des travaux de voirie et d’éclairage public sur plusieurs voies communales, ainsi que des travaux d’assainissement et d’adduction d’eau potable. 2. Le non-respect du délai de réalisation des équipements publics entraîne l’obligation de restitution des sommes versées au titre du PAE. CE (8/3 SSR) 27 janvier 2010, Commune de Carqueiranne, req. n° 308614 – M. Prévost, Rapp. – M. Olléon, Rapp. public – SCP Roger, Sevaux, SCP Boutet, Av. Décision qui sera publiée au Recueil Lebon. Conclusions LAURENT OLLÉON, rapporteur public Par une délibération prise le 29 juin 1990, le conseil municipal de la commune de Carqueiranne (Var) a approuvé, en application de l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme, un programme d’aménagement d’ensemble pour permettre l’urbanisation du quartier dit de La Martine, situé au nord de la commune. Ce programme, qui devait être achevé le 31 décembre 1997, comportait des équipements de voirie, d’assainissement et d’éclairage public, au financement duquel les constructeurs devaient participer. La SCI Les terrasses de Carqueiranne a obtenu, le 8 octobre 1990, un permis de construire dans ce secteur cinq bâtiments représentant une surface hors œuvre nette de 2 129 m2, sur un terrain de 16 296 m2. Le maire de la commune a mis à sa charge, au titre de cette autorisation, une participation d’un montant de 1 104 418 F. L’avancement des travaux de construction des équipements publics ayant pris du retard, le conseil municipal a, par une délibération du 18 décembre 1997, décidé de proroger le délai d’exécution des travaux, de revoir à la baisse les participations relatives au programme d’aménagement d’ensemble et d’établir la proportionnalité de la participation à l’équipement public. p. 28 Au mois de février 1998, la SCI Les terrasses de Carqueiranne a sollicité le remboursement des sommes d’ores et déjà versées au receveur municipal et la décharge des sommes restant à payer, au motif que les travaux n’avaient pas été exécutés dans le délai prévu. Un refus implicite ayant été opposé à sa demande, la société a saisi le tribunal administratif de Nice d’une requête tendant à l’annulation de ce refus, à la restitution de la somme de 552 074 F déjà versée et à la décharge de la somme de 552 074 F restant à recouvrer. Par un jugement rendu le 2 septembre 2004, le tribunal administratif a partiellement fait droit à cette requête en ordonnant la restitution de la participation déjà acquittée, d’un montant de 410 922 F, et en prononçant la décharge de la somme restant à payer. Le tribunal a en effet jugé que la société établissait seulement avoir acquitté cette somme, et non la somme de 552 074 F qu’elle avait allégué avoir réglé. La commune a fait appel de ce jugement devant la cour administrative d’appel de Marseille, suscitant un appel incident de la société. La cour était compétente : la participation litigieuse n’ayant pas un caractère fiscal, elle n’est BULLETIN DE JURISPRUDENCE DE DROIT DE L’URBANISME – 1/2010 QUESTIONS FINANCIÈRES pas un impôt local au sens des dispositions du 5° de l’article R. 222-13 du code de justice administrative 1. Par un arrêt rendu le 31 mai 2006, la cour a rejeté la requête de la commune et fait droit aux conclusions incidentes de la société, en portant de 410 922 à 552 074 F le montant de la restitution ordonnée. C’est cet arrêt que la commune vous demande d’annuler. Vous le savez, en principe, les dépenses d’équipement communales sont supportées par les contribuables. Il est cependant admis que les constructeurs qui tirent un bénéfice particulier des équipements proches, du fait de la valorisation de leurs constructions, puissent se voir imposer des participations spécifiques, dont la liste est fixée limitativement par l’article L. 332-6 du code de l’urbanisme. En 1990, année de la délibération du conseil municipal de la commune de Carqueiranne, la rédaction de l’article L. 332-6, issue de la loi n° 85-129 du 18 juillet 1985 relative à la définition et à la mise en œuvre de principes d’aménagement, disposait que les bénéficiaires d’autorisation de construire ne pouvaient être tenus que du versement de la taxe locale d’équipement, prévue à l’article 1585 A du code général des impôts, « ou de la participation instituée dans les secteurs d’aménagement définis à l’article L. 332-9 », ainsi que du versement des contributions aux dépenses d’équipements publics mentionnées à l’article L. 332-6-1, tels le versement pour dépassement du plafond légal de densité, la taxe départementale des espaces naturels sensibles, ou la participation pour raccordement à l’égout, enfin de la participation aux équipements propres mentionnés à l’article L. 332-15, c’est-à-dire des travaux nécessaires à la viabilité et à l’équipement de la construction. Issu de la même loi de 1985, l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme, dans sa version initiale, applicable au litige, disposait que « dans les secteurs du territoire de la commune où un plan d’aménagement d’ensemble a été approuvé par le conseil municipal, celui-ci peut mettre à la charge des bénéficiaires d’autorisations de construire tout ou partie des dépenses de réalisation des équipements publics correspondant aux besoins des habitants actuels ou futurs du secteur concerné et rendus nécessaires par la mise en œuvre du programme d’aménagement ». Il précisait aussi que le conseil municipal déterminait le secteur d’aménagement, la nature, le coût et le délai prévus pour la réalisation du programme d’équipements publics. Par ailleurs, l’article L. 332-11, également issu de la loi du 18 juillet 1985, prévoit que « lorsque le programme d’aménagement d’ensemble fait l’objet d’une modification substantielle, le conseil municipal peut, pour les autorisations à venir, réviser le régime de la participation dans les conditions prévues à l’article L. 332-9 ». Il prévoit égale1 CE 24 juin 2009, Commune de Saessolsheim c/ Syndicat des copropriétaires de la copropriété, req. n° 305975 : à mentionner aux Tables sur ce point. BULLETIN DE JURISPRUDENCE DE DROIT DE L’URBANISME – 1/2010 ment que « si les équipements publics annoncés n’ont pas été réalisés dans le délai fixé par la délibération instituant ou modifiant la participation, la restitution des sommes éventuellement versées ou de celles qui correspondent au coût des prestations fournies peut être demandée par les bénéficiaires des autorisations de construire ». Le système paraît donc encadré par le code. Il n’y manque qu’une pièce, mais il s’agit d’une pièce maîtresse : le programme d’aménagement d’ensemble (PAE) n’est défini par aucune disposition législative ou réglementaire du code. Définition du PAE L’examen des travaux parlementaires montre que l’objectif de ces dispositions était de mettre en place un outil souple, pour des opérations d’aménagement d’une taille inférieure à celle des zones d’aménagement concerté (ZAC). Alors que la procédure des ZAC était parfois utilisée par les communes dans des conditions irrégulières, la nouvelle participation devait permettre de financer de manière équitable les équipements d’une zone déterminée, pour l’aménagement duquel existe une « conception d’ensemble ». L’inclusion d’une opération dans un plan d’aménagement d’ensemble dispensait du versement de la taxe locale d’équipement. Ce qui est clair, c’est que le plan d’aménagement d’ensemble nécessite une conception d’aménagement d’une zone. Ainsi, si ce mécanisme était utilisé pour financer un seul équipement communal dans une partie de la commune, il y aurait détournement de procédure à ce que son financement soit supporté par les constructeurs, alors qu’il devrait être couvert par les contribuables. C’est par une décision du 25 juin 2003, Commune de Saint-Jean-de-Boiseau 2, que vous avez précisé le contrôle de cassation que vous exercez en la matière. C’est sous l’angle de la qualification juridique que vous vérifiez si les juges du fond ont correctement jugé qu’un programme de travaux constitue un plan d’aménagement d’ensemble au sens de l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme. Dans cette espèce, vous avez jugé qu’un programme de travaux qui n’avait pas été envisagé avant le dépôt d’une demande d’autorisation de lotir et qui se limitait à des équipements directement liés à la réalisation de ce lotissement ne constituait pas un programme d’aménagement d’ensemble. Comment cerner ce qu’est un plan d’aménagement d’ensemble ? Pour y parvenir, il faut s’intéresser aux décisions que vous avez déjà rendues sur le sujet. Les premières remontent à l’époque où vous statuiez encore comme juges d’appel. Par une décision du 8 janvier 1993, Association des riverains du front de Seine Parc 2 Rec., T., p. 961. p. 29 QUESTIONS FINANCIÈRES de Passy 3, vous avez jugé que des dépenses de réalisation d’un espace vert étaient nécessaires pour la mise en œuvre d’un programme d’aménagement d’ensemble, dès lors que ce programme prévoit la réalisation d’un tel équipement public, qui correspond aux besoins des habitants du quartier. Encore faut-il que le programme comporte plusieurs équipements. Ainsi avez-vous jugé, par une décision du 15 avril 1996, Époux Maurice 4, que la délibération d’un conseil municipal qui se borne à décider la création d’une voie publique destinée à relier deux quartiers d’une commune – il s’agissait de la commune de Mende – et l’établissement de réseaux divers le long de cette voie ne comporte aucun plan d’aménagement d’ensemble du secteur du territoire communal qu’elle concerne. Dans les conclusions qu’il a prononcées sur cette affaire, Christophe Chantepy relève que l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme « énumère précisément les éléments que doit comporter une délibération approuvant un programme d’aménagement d’ensemble […]. Parmi ces éléments figurent la détermination du secteur d’aménagement, la nature, le coût et le délai prévus pour la réalisation du programme d’aménagement d’ensemble ». Et votre commissaire du gouvernement de noter que si, au cas d’espèce, la délibération déterminait le périmètre du secteur et faisait état de la réalisation de la voie et du coût prévisionnel des travaux, elle ne définissait aucunement la nature de l’aménagement, pas davantage que les délais de réalisation. En effet, « compte tenu du périmètre concerné, l’aménagement d’ensemble ne pouvait porter sur la seule réalisation d’une voie, pour une fraction tout à fait marginale des terrains concernés ». Reste donc à préciser ce qu’est la « nature » de l’aménagement dont le plan d’ensemble est arrêté par délibération du conseil municipal. Par une décision du 21 décembre 2007, Commune de Verneuil-l’Étang 5, vous avez jugé qu’une cour ne commet pas d’erreur de droit en se fondant sur un faisceau d’indices, tels que le fait que l’adoption du programme d’aménagement d’ensemble n’avait pas été envisagé avant le dépôt de la demande d’autorisation de lotir, que le plan ne s’appliquait qu’aux terrains du lotissement et que la nature des travaux envisagés ne les rendait pas nécessaires pour les besoins des futurs habitants du lotissement, pour juger, sans erreur de qualification juridique, que le plan de travaux annexé à la délibération du conseil municipal ne constituait pas un programme d’aménagement d’ensemble au sens de l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme. Dans les conclusions qu’il a prononcées sur votre décision Commune de Saint-Jean-de-Boiseau précitée, Didier Chauvaux pointait les risques de détournement de procé3 4 5 Rec., T., p. 1086. Req. n° 145489 : aux Tables sur un autre point. Req. n° 282580. p. 30 dure et soulignait qu’il fallait un « véritable projet d’aménagement d’ensemble », c’est-à-dire un « programme cohérent d’une certaine ampleur » qui s’opposerait, selon lui, à ce qu’une commune informée de l’existence d’un projet immobilier fasse usage des dispositions de l’article L. 3329 pour « mettre à la charge du constructeur des équipements ponctuels, même destinés à faire face à des besoins induits par la réalisation du projet ». Pour autant, il considérait qu’il n’y avait pas lieu d’exclure par principe qu’un programme d’aménagement d’ensemble puisse exceptionnellement ne concerner qu’un seul constructeur, « s’il se livre à une opération immobilière importante, intéressant un secteur significatif du territoire communal ». Si le programme doit être d’une certaine ampleur, c’està-dire porter sur un secteur de la commune, il ne saurait se confondre avec un projet d’urbanisme en bonne et due forme. En effet, vous avez estimé qu’un programme d’aménagement d’ensemble qui a pour but exclusif le financement d’équipements publics ne constitue pas un document d’urbanisme au sens de l’article L. 600-3 du code de l’urbanisme 6. La notion, nous devons le reconnaître, est entourée d’un certain flou, qui tient pour l’essentiel à l’absence de définition légale du programme d’aménagement d’ensemble, à laquelle vous ne pourriez suppléer qu’au prix d’un arrêt de règlement. Il ressort toutefois de votre jurisprudence qu’un tel programme doit concerner un secteur ou plusieurs secteurs de la commune et prévoir la réalisation d’équipements publics correspondants aux besoins actuels ou futurs des habitants de ce secteur. Il faut aussi que ce programme présente une cohérence d’ensemble du point de vue de l’aménagement : les équipements prévus ne sauraient être uniquement liés à une opération de construction donnée. Revenons à présent au pourvoi. Tant le tribunal administratif de Nice que la cour administrative d’appel de Marseille ont jugé que le programme de travaux prévu par la délibération du 29 juin 1990 du conseil municipal de la commune de Carqueiranne ne constituait pas un plan d’aménagement d’ensemble du secteur de La Martine. Le tribunal a relevé que ce programme prévoyait l’aménagement d’un carrefour, l’élargissement, l’aménagement et l’éclairage de voies existantes ainsi que la création d’un collecteur pluvial et d’une canalisation. Il a alors repris la motivation de votre décision Époux Maurice du 15 avril 1996, en jugeant qu’un programme d’aménagement d’ensemble ne peut se borner à décider l’aménagement de voies publiques et l’établissement de réseaux divers le long de ces voies. La cour a abouti à la même conclusion au prix d’une motivation sensiblement différente, en jugeant que le conseil municipal de la commune s’était 6 CE Avis 17 janvier 1997, Association de défense du site de l’environnement de Galluis : Rec., p. 22. BULLETIN DE JURISPRUDENCE DE DROIT DE L’URBANISME – 1/2010 QUESTIONS FINANCIÈRES borné, dans sa délibération, à dresser une liste de travaux dans la zone concernée « sans justifier d’un parti d’aménagement de l’ensemble du secteur ». Cette référence à un parti d’aménagement est compréhensible, mais elle est maladroite. Compréhensible, parce qu’en l’absence de définition précise de ce qu’est un programme d’aménagement d’ensemble, les juges du fond tentent de se raccrocher à ce qu’ils connaissent. Ainsi, la notion de parti d’aménagement est-elle présente dans le code de l’urbanisme. Mais – et c’est là que réside la maladresse de la cour – elle est utilisée dans le cadre du contentieux des documents d’urbanisme, alors que le plan d’aménagement d’ensemble ne présente pas ce caractère. C’est ainsi que l’article R. 122-25 du code de l’urbanisme dispose qu’un « schéma directeur se compose d’un rapport et de documents graphiques », et que le rapport présente, notamment « le parti d’aménagement adopté et sa justification ». De même, dans les décisions que vous avez rendues au sujet des plans d’occupation des sols (POS), vous vérifiez que le conseil municipal a, ou non, adopté un parti d’aménagement. Dans votre décision du 4 novembre 1982, Mlle Bonnaire et autres 7, vous avez ainsi jugé qu’il « appartient aux auteurs d’un plan d’occupation des sols de déterminer le parti d’aménagement à retenir, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d’avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ». Vous avez également utilisé cette notion pour une zone d’aménagement concerté 8. Suivre la cour conduirait à appliquer aux programmes d’aménagement d’ensemble une notion adaptée aux documents d’urbanisme, ce qui pose problème. Le texte de l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme, dans son laconisme, invite seulement à vérifier que la nature du programme est précisée et qu’il s’agit à la fois d’un programme d’aménagement et d’un programme d’ensemble. C’est ce qui donne toute sa force à l’argumentation de la commune, qui reproche à la cour administrative d’appel de Marseille d’avoir commis une erreur de qualification juridique en jugeant que le conseil municipal de la commune de Carqueiranne n’avait pas adopté un programme d’aménagement d’ensemble. de la réalisation des équipements dans ce secteur serait réglé par la procédure du programme d’aménagement d’ensemble, dès lors que le seul produit de la taxe locale d’équipement n’apparaissait pas en mesure de régler le coût des équipements à réaliser. Confirmant une première délibération de principe, qui avait été prise le 27 mars 1990, le conseil municipal avait donc décidé la mise en œuvre d’un programme d’aménagement d’ensemble sur ce quartier, d’une superficie un peu supérieure à 10 ha. Suivait la liste des équipements qui seraient mis en totalité à la charge des constructeurs et la précision que le programme devait être achevé au 31 décembre 1997. Qu’exiger de plus de la commune ? Elle fait référence, dans sa délibération, à la modification du plan d’occupation des sols survenue neuf mois plus tôt, qui a classé le secteur en zone UC, c’est-à-dire en secteur à urbaniser. L’objectif de l’aménagement est donc cette urbanisation. La zone est définie : il s’agit du quartier de La Martine. Elle n’est pas ponctuelle. Enfin, les équipements sont prévus pour les besoins des habitants actuels et futurs du secteur. Vous ne vous trouvez donc pas dans la même configuration que celle de l’affaire Époux Maurice de 1996, dans laquelle il s’agissait de relier deux quartiers existants par une voie, avec les réseaux qui la longeaient, sans qu’aucune opération ne soit définie autour de cette voie. Nous n’êtes pas non plus dans le cas de figure de votre décision Commune de Saint-Jean-de-Boiseau de 2003, dans laquelle vous avez jugé qu’il n’y avait pas de programme d’aménagement d’ensemble parce que les équipements n’étaient que ceux d’un lotissement. Ici, il s’agit d’équipements importants, d’un coût estimé à plus de 8 MF, qui concernent un large secteur de la commune. Par conséquent, nous vous invitons à juger que la cour a bien commis une erreur de qualification juridique en jugeant que la commune n’avait pas institué un programme d’aménagement d’ensemble et à censurer l’arrêt sur ce terrain. Réglant l’affaire au fond, vous serez saisis, à la fois, de l’appel de la commune et de l’appel incident de la société formés contre le jugement du tribunal administratif. Jeu de la prescription quadriennale Existence d’un véritable PAE La délibération du 29 juin 1990 est motivée de la façon suivante. Elle rappelle qu’à l’occasion de la révision du plan d’occupation des sols, au mois de septembre 1989, la commune a décidé de classer en zone UC le quartier de La Martine. Toutefois, dans le rapport de présentation du plan d’occupation des sols, il était indiqué que le problème Req. nos 30396, 30419 et 30459 : Rec., p. 363. CE 6 décembre 1985, SA de promotion immobilière Jean Ache et autres, req. n° 49088 : aux Tables sur un autre point. Vous devrez tout d’abord vous pencher sur la prescription quadriennale que la commune opposait en appel. C’est bien la prescription quadriennale qui s’applique ici, et non la prescription spéciale de l’article L. 332-6 du code de l’urbanisme, ainsi que vous l’avez jugé par une décision du 13 juillet 2006, Société des établissements Laget 9. Vous ne pourrez qu’écarter l’exception de prescription opposée par la commune. En effet, l’article 7 de la loi 7 8 BULLETIN DE JURISPRUDENCE DE DROIT DE L’URBANISME – 1/2010 9 Rec., T., p. 1102. p. 31 QUESTIONS FINANCIÈRES n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l’État, les départements, les communes et les établissements publics dispose que « l’administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d’une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l’invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond ». Or, dans notre affaire, la commune a soulevé la prescription pour la première fois en appel. Au surplus, ainsi que l’avait relevé la cour, la prescription avait été opposée dans un mémoire portant la seule signature de l’avocat de la commune, alors que seul le maire, ou l’adjoint délégué à cet effet, a qualité pour opposer cette prescription 10. Vous serez ensuite saisis du moyen de la commune selon lequel, contrairement à ce qu’a jugé le tribunal, la délibération du 29 juin 1990 avait bien institué un programme d’aménagement d’ensemble. Si vous nous avez suivi au stade de la cassation, ce motif ne tient plus. Vous vous trouverez alors saisis, par l’effet dévolutif de l’appel, des autres moyens développés par la SCI Les terrasses de Carqueiranne devant les juges du fond. Caractère impératif du délai de réalisation des équipements L’un d’entre eux nous semble justifier qu’il soit fait droit à la demande de restitution de la société. Il est tiré de ce que les dispositions de l’article L. 332-11 du code de l’urbanisme prévoient que si les équipements publics n’ont pas été réalisés dans le délai fixé par la délibération instituant ou modifiant la participation, la restitution des sommes éventuellement versées ou de celles qui correspondant au coût des prestations fournies peut être demandée par les bénéficiaires des autorisations de construire. Or, la société faisait valoir qu’à la date du 31 décembre 1997, fixée par la délibération du 29 juin 1990 pour l’achèvement des travaux, aucun des travaux mentionnés n’avait été réalisé. Elle produisait à cette fin un constat d’huissier. Il est vrai que le conseil municipal de la commune, s’apercevant à l’approche du 31 décembre 1997 qu’aucun équipement n’avait été réalisé, avait, par une délibération du 18 décembre 1997, prolongé le terme des travaux jusqu’au 31 décembre 2001. Cette délibération indique d’ailleurs expressément que, sur les 8,30 MF de travaux projetés, seuls 269 538 F avaient été menés à bien à la date du 18 décembre 1997, ce qui montre à quel point les choses étaient demeurées en suspens depuis 1990. Or, l’article L. 332-11 du code impose, nous venons de le dire, que les travaux aient été réalisés dans le délai fixé par la délibération instituant ou modifiant la participation, ce qui pourrait laisser penser qu’une prolongation du délai est 10 CE S. 29 juillet 1983, Ville de Toulouse : Rec., p. 312. p. 32 possible. Il n’en est rien. Le premier alinéa de l’article L. 332-11 précise en effet en quoi le régime de la participation peut être révisé, en disposant que lorsque le programme d’aménagement d’ensemble fait l’objet d’une modification substantielle, le conseil municipal peut, pour les autorisations à venir, procéder à cette révision. Or, d’une part, la commune de Carqueiranne ne soutient à aucun moment que le programme d’aménagement d’ensemble aurait fait l’objet d’une modification substantielle en décembre 1997, et cela ne ressort pas des pièces du dossier, et, d’autre part, l’article L. 332-11 ne parle de révision de la participation que pour les autorisations à venir : la SCI Les terrasses de Carqueiranne n’est donc pas concernée par ces dispositions. La société pouvait donc, pour cette raison, demander la restitution des sommes déjà versées par elle. Faut-il pour autant, comme l’avait jugé la cour, restituer à la société la totalité de ces sommes ? Il le fallait certainement dans la logique du raisonnement suivi par les juges d’appel, qui avaient jugé, comme le tribunal, qu’il n’y avait pas du tout de plan d’aménagement d’ensemble dans notre affaire. Mais, dès lors que vous aurez jugé le contraire, puis considéré que les travaux projetés n’ont pas été réalisés dans les délais, vous entrerez dans le champ des dispositions de l’article L. 332-11 du code de l’urbanisme, qui fixent la marche à suivre dans cette hypothèse. Rétablissement de la TLE et compensation Cet article prévoit en effet que dans les communes où la taxe locale d’équipement (TLE) est instituée, la taxe est rétablie de plein droit dans le secteur concerné par le programme d’aménagement et la restitution des sommes est limitée à la part excédant le montant de la taxe locale d’équipement qui aurait été exigible en l’absence de la délibération créant le programme d’aménagement d’ensemble. Or, il ressort des pièces du dossier que la taxe locale d’équipement a bien été instituée dans la commune de Carqueiranne : la délibération du 29 juin 1990 en parle, et c’est d’ailleurs parce que cette taxe procure des ressources insuffisantes pour couvrir le coût des aménagements projetés que le conseil municipal a, par cette délibération, créé un programme d’aménagement d’ensemble. Dans votre office de juge du plein contentieux, vous devrez donc limiter la restitution des sommes à la différence entre ce que la société a versé au titre de la participation et ce qu’elle aurait dû verser au titre de la taxe locale d’équipement. Comme le dossier ne vous renseigne aucunement sur ce point, il vous faudra rouvrir l’instruction. C’est sur la base des éléments qui vous seront fournis que vous pourrez déterminer, ensuite, s’il y avait lieu de restituer à la société une somme supérieure ou inférieure à celle dont le tribunal avait ordonné qu’elle lui soit rendue. BULLETIN DE JURISPRUDENCE DE DROIT DE L’URBANISME – 1/2010 QUESTIONS FINANCIÈRES Vous vous souvenez en effet que, par son appel incident, la société avait contesté le jugement de première instance en affirmant qu’elle s’était acquittée d’une participation supérieure à celle que le tribunal avait retenue. Elle avait raison. En effet, la société avait payé la participation en deux fois, par un chèque de 141 750 F le 15 décembre 1992 et par un second de 410 922,37 F le 30 juin 1993. Par erreur, le tribunal n’avait retenu que le second chèque. La société avait donc bien payé 552 074,37 F, soit 84 163,20 €. Et par ces motifs, nous concluons : – à l’annulation de l’arrêt du 31 mai 2006 de la cour administrative d’appel de Marseille ; – à ce que vous sursoyez à statuer en attendant que les parties vous indiquent le montant de la taxe locale d’équipement que la SCI Les terrasses de Carqueiranne aurait supporté si le quartier de La Martine n’avait pas fait l’objet d’un programme d’aménagement d’ensemble. Décision Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 17 août et 13 novembre 2007 au secrétariat du contentieux du Conseil d’État présentés pour la commune de Carqueiranne, représentée par son maire ; la commune de Carqueiranne demande au Conseil d’État : 1°) d’annuler l’arrêt du 31 mai 2007 par lequel la cour administrative d’appel de Marseille, statuant sur sa requête tendant à l’annulation du jugement du 2 septembre 2004 par lequel le tribunal administratif de Nice, d’une part, a déchargé la SCI Les Terrasses de Carqueiranne de la participation financière de 410 922,37 F (62 644,71 €) qu’elle lui avait versée au titre du plan d’aménagement d’ensemble (PAE) prévu sur le secteur de La Martine ainsi que du surplus de la participation au titre du même PAE et, d’autre part, l’a condamnée à verser à cette SCI des intérêts au taux légal à compter du 12 février 1998, et réformant ce jugement, a, en premier lieu, décidé que la restitution serait portée à la somme de 84 163,20 € (552 074,37 F) et, en second lieu, que les intérêts au taux légal courraient à compter du 16 février 1998 ; 2°) réglant l’affaire au fond, de rejeter la demande de la SCI Les Terrasses de Carqueiranne ; 3°) de mettre à la charge de la SCI Les Terrasses de Carqueiranne la somme de 3 000 € au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ; […] Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une délibération en date du 29 juin 1990, le conseil municipal de la commune de Carqueiranne a approuvé un programme d’aménagement d’ensemble pour le quartier de La Martine, devant être réalisé avant le 31 décembre 1997 et comprenant un programme d’équipements publics, et décidé que le coût total de ce programme serait pris en charge par les constructeurs ; que, par une délibération en date du 18 décembre 1997, le conseil municipal a modifié le programme et l’échéancier des travaux, revu le régime des participations imposées aux constructeurs et décidé de leur rembourser les participations perçues au titre des équipements prévus par le programme initial et non réalisés ; que le tribunal administratif de Nice, sur demande de la SCI Les Terrasses de Carqueiranne, a déchargé celle-ci de la participation, d’un montant de 62 644,71 € qu’elle avait déjà versée à la commune de Carqueiranne au titre du programme BULLETIN DE JURISPRUDENCE DE DROIT DE L’URBANISME – 1/2010 d’équipements ainsi que de l’obligation de verser le surplus de sa participation ; que, saisie d’un appel de la commune, la cour administrative d’appel de Marseille a, par un arrêt en date du 31 mai 2006, confirmé le droit de la SCI à restitution, porté le montant de celle-ci à la somme de 84 163,20 € et modifié la date à compter de laquelle courent les intérêts au taux légal ; que la commune de Carqueiranne se pourvoit en cassation contre cet arrêt ; Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi ; Considérant qu’aux termes de l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : « Dans les secteurs du territoire de la commune où un programme d’aménagement d’ensemble a été approuvé par le conseil municipal, celui-ci peut mettre à la charge des bénéficiaires d’autorisations de construire tout ou partie des dépenses de réalisation des équipements publics correspondant aux besoins des habitants actuels ou futurs du secteur concerné et rendus nécessaires par la mise en œuvre du programme d’aménagement. / Dans les communes où la taxe locale d’équipement est instituée, les constructions édifiées dans ces secteurs sont exclues du champ d’application de la taxe. / Le conseil municipal détermine le secteur d’aménagement, la nature, le coût et le délai prévus pour la réalisation du programme d’équipements publics. Il fixe, en outre, la part des dépenses de réalisation de ce programme qui est à la charge des constructeurs, ainsi que les critères de répartition de celle-ci entre les différentes catégories de constructions. […] » ; Considérant qu’il résulte de ces dispositions que l’adoption d’un programme d’aménagement d’ensemble doit permettre de conduire, à l’occasion d’un projet d’urbanisme, dans un ou plusieurs secteurs du territoire communal, la réalisation, dans un délai et pour un coût déterminés, d’un ensemble d’équipements publics, dont tout ou partie des dépenses peut être mis à la charge des constructeurs, correspondant aux besoins actuels des habitants du secteur et à ceux qui résulteront d’une ou plusieurs opérations de construction, sans que ces équipements soient uniquement liés à une opération de construction isolée ; que, par suite, en jugeant que le conseil municipal de Carqueiranne ne pouvait être regardé comme ayant adopté, par sa délibération en date du 30 juin 1990, un programme d’aménagement d’ensemble, faute d’avoir justifié p. 33 QUESTIONS FINANCIÈRES d’un parti d’aménagement du secteur, et alors que la délibération prévoyait de conduire dans le quartier de La Martine un programme de viabilisation et de construction d’équipements publics comportant des travaux de voirie et d’éclairage public sur plusieurs voies communales, ainsi que des travaux d’assainissement et d’adduction d’eau potable, la cour administrative de Marseille a entaché d’une erreur de qualification juridique son arrêt, qui doit, pour ce motif, être annulé ; Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de régler l’affaire au fond en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative ; Sur l’exception de prescription quadriennale : Considérant que, en tout état de cause, en vertu des dispositions du premier alinéa de l’article 7 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée, la prescription quadriennale, qui n’a pas été opposée par l’administration en première instance, ne peut être invoquée pour la première fois en appel ; que, dès lors, l’exception tirée de la prescription quadriennale ne peut qu’être écartée ; Sur la restitution demandée : Considérant qu’ainsi qu’il a été dit, la délibération en date du 30 juin 1990 par laquelle le conseil municipal de la commune de Carqueiranne a prévu de conduire dans le quartier de La Martine un programme de viabilisation et de construction d’équipements publics comportant des travaux de voirie et d’éclairage public sur plusieurs voies communales, ainsi que des travaux d’assainissement et d’adduction d’eau potable, a approuvé un programme d’aménagement d’ensemble de ce secteur du territoire communal, au sens des dispositions de l’article L. 332-9 du code de l’urbanisme ; que, dès lors, la commune de Carqueiranne est fondée à soutenir que c’est à tort que, par son jugement du 2 septembre 2004, le tribunal administratif de Nice a déchargé la SCI Les Terrasses de Carqueiranne du montant de la participation qu’elle lui avait versée au motif que le conseil municipal de la commune n’avait pas approuvé un plan d’aménagement d’ensemble ; Considérant, toutefois, qu’il y a lieu pour le Conseil d’État saisi par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par la SCI Les Terrasses de Carqueiranne à l’appui de sa demande de restitution ; Considérant qu’aux termes de l’article L. 332-11 du code de l’urbanisme : « […] Si les équipements publics annoncés n’ont pas été réalisés dans le délai fixé par la délibération instituant ou modifiant la participation, la restitution des sommes éventuellement versées ou de celles qui correspondent au coût des prestations fournies peut être demandée par les bénéfi- ciaires des autorisations de construire. Dans les communes où la taxe locale d’équipement est instituée, la taxe est alors rétablie de plein droit dans le secteur concerné et la restitution de ces sommes peut être demandée par les bénéficiaires des autorisations de construire pour la part excédant le montant de la taxe locale d’équipement qui aurait été exigible en l’absence de la délibération prévue à l’article L. 332-9. Les sommes à rembourser portent intérêt au taux légal » ; Considérant que la délibération du 29 juin 1990 du conseil municipal de la commune de Carqueiranne, approuvant un programme d’aménagement d’ensemble pour le quartier de La Martine, prévoyait que le programme des équipements publics devait être achevé au plus tard le 31 décembre 1997 ; qu’il ressort des pièces du dossier que la réalisation de ce programme de travaux avait à peine commencé à cette date, comme le révèle la délibération du conseil municipal en date du 18 décembre 1997 qui approuve un nouveau programme portant pour une large part sur les mêmes équipements publics ; que, par suite, la restitution des sommes versées peut être demandée par la SCI Les Terrasses de Carqueiranne, bénéficiaire d’une autorisation de construire ; que, toutefois, cette restitution n’est due, en vertu des dispositions précitées de l’article L. 332-11 du code de l’urbanisme, que pour la part excédant le montant de la taxe locale d’équipement qui aurait été exigible en l’absence de la délibération approuvant le programme d’aménagement d’ensemble dans le cas où la taxe locale d’équipement aurait été instituée dans cette commune ; que l’état du dossier ne permet pas de déterminer si la taxe locale d’équipement a été instituée dans la commune de Carqueiranne et, si elle l’a été, quel aurait été son montant exigible en l’absence de la délibération du 29 juin 1990 ; qu’il y a lieu, dès lors, d’ordonner un supplément d’instruction contradictoire pour le déterminer ; DÉCIDE : Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Marseille en date du 31 mai 2007 est annulé. Article 2 : Il sera, avant de statuer sur les conclusions d’appel de la SCI Les Terrasses de Carqueiranne, procédé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision à un supplément d’instruction aux fins, par la commune de Carqueiranne, de produire les éléments de nature à justifier de l’établissement de la taxe locale d’équipement et, en cas de réponse affirmative, du montant de la taxe qui aurait été exigible de la SCI Les Terrasses de Carqueiranne. […] Observations 1. L’article L. 332-9 du code de l’urbanisme permet, dans les secteurs où un programme d’aménagement d’ensemble (PAE) a été approuvé par le conseil municipal, de mettre à la charge des p. 34 bénéficiaires d’autorisations de construire, tout ou partie des dépenses de réalisation des équipements publics correspondant aux besoins des habitants actuels ou futurs du secteur concerné BULLETIN DE JURISPRUDENCE DE DROIT DE L’URBANISME – 1/2010 QUESTIONS FINANCIÈRES et rendus nécessaires par la mise en œuvre du programme d’aménagement. Reste que la notion de PAE n’est pas définie par le code de l’urbanisme, comme c’est d’ailleurs le cas pour beaucoup de concepts utilisés par le législateur. Il est vrai que, contrairement à la tradition anglosaxonne, il n’est pas d’usage d’accompagner la loi d’un glossaire, ce qui amène du coup le juge à faire œuvre de linguiste 11. Il est vrai, cependant, que l’article L. 332-9 est particulièrement succinct, puisqu’il ne fixe pas précisément le contenu d’un tel programme, se contentant d’évoquer le financement d’équipements publics. 2. L’enjeu du débat contentieux était de déterminer si une délibération fixant une liste de travaux à réaliser au sein d’un quartier déterminé, en l’espèce de réalisation d’ouvrages de voirie et d’éclairage public sur plusieurs voies communales, ainsi que des travaux d’assainissement et d’adduction d’eau potable, pouvait être qualifiée de PAE. L’arrêt frappé de pourvoi reprochait à cet acte de ne pas avoir justifié d’un parti d’aménagement du secteur concerné. Il s’inscrivait dans une jurisprudence tendant à considérer que de simples travaux de voirie et de réseaux ne pouvaient relever d’un PAE 12. Le Conseil d’État était donc conduit à opérer un contrôle de la qualification juridique, conformément à sa jurisprudence précédente 13. Il s’ensuivait la nécessité de définir le concept d’aménagement. Visiblement, pour ce faire, comme le remarquait très justement le rapporteur public, la cour avait entendu s’inspirer de la notion de « parti d’aménagement », propre aux documents d’urbanisme, et aujourd’hui remplacée par celle de « projet d’aménagement et de développement durable ». C’est à travers ces 11 Cf. C. Vigouroux, « L’expression « au sens de » ou le juge linguiste sans être encyclopédiste », in Juger l’administration et administrer la justice, Mélanges en l’honneur du président Labetoulle, Dalloz, 2007, p. 847. 12 TA Melun 4 décembre 1997, EURL Modap : BJDU 1/1998, p. 77, chron. B. Phémolant ; T32A Versailles 23 octobre 2001, SCI Jeancel c/ Département des Yvelines : BJDU 1/2020, p. 67, chron. B. Phémolant et M. Raunet ; CAA Lyon 12 novembre 2002, Y. Romestin c/ Commune de Montbrison : BJDU 1/2003, p. 69, chron. B. Phémolant et M. Raunet. 13 CE 25 juin 2003, Commune de Saint-Jean-de-Boiseau : BJDU 6/2003, p. 435, concl. D. Chauvaux. BULLETIN DE JURISPRUDENCE DE DROIT DE L’URBANISME – 1/2010 notions que l’administration se doit de préciser les principes d’urbanisation du territoire concerné, sous forme de choix politiques. Utilisé à de nombreuses reprises par le code de l’urbanisme, le terme d’« aménagement » nécessite souvent des précisions 14. Il n’est pas certain, cependant, qu’il doive recevoir une définition univoque. En tout cas, le Conseil d’État considère que le PAE ne peut être confondu avec un document d’urbanisme, s’agissant seulement d’une technique de financement des équipements publics, et il censure donc de ce chef l’arrêt de la cour administrative d’appel. Le parti d’aménagement ne constitue donc pas un élément nécessaire de la définition du PAE. Toutefois, la qualification de PAE nécessite une perspective d’ensemble qui se doit d’être cohérente et non une instauration suscitée par l’opportunité de faire financer par un constructeur ou un aménageur, à l’occasion d’une demande d’autorisation déterminée, des équipements publics 15. C’est la raison pour laquelle le Conseil d’État précise que les équipements financés par le PAE ne peuvent être uniquement liés à une opération de construction isolée. 3. La qualification de PAE une fois acquise, c’est le régime de cette participation qui s’applique. En particulier, l’article L. 332-11, qui prévoit la décharge en cas de non-respect du délai de réalisation des équipements, est susceptible de produire tous ses effets. Mais alors, la taxe locale d’équipement est rétablie, dans les communes où elle a été instituée, ce qui autorise la compensation 16. J.T. Cf., dernièrement, en matière de lotissement, réponse ministérielle à Jean-Pierre Giran n° 16281, JO AN 9 février 2010, p. 1367. 15 CE 25 juin 2003, Commune de Saint-Jean-de-Boiseau, préc. ; CE 21 décembre 2007, Commune de Verneuil-l’Étang, req. n° 282580. 16 CE 31 juillet 2009, Fillatre : BJDU 5/2009, p. 381, concl. C. Legras, obs. J.-C. B. 14 p. 35