adamou-n`diaye bat - Revue de Médecine Vétérinaire
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ARTICLE ORIGINAL Cryopréservation de la semence de taureau de race Borgou au Bénin ° M. ADAMOU-N’DIAYE, °° A.B. GBANGBOCHE*, ° A. ADJOVI et °°° R. JONDET ° Centre d’Insémination Artificielle et de Contrôle Sanitaire des Reproducteurs (CIA-CSR), Département des Productions Animales (PA), Faculté des Sciences Agronomiques (FSA), Université d’Abomey-Calavi (UAC), 01 B.P. 526 Cotonou, Bénin ° ° Institut Vétérinaire Tropical, Université de Liège, Boulevard de Colonster 20, Bât 43, B - 4000 Liège, Belgique Centre d’Insémination Artificielle et de Contrôle Sanitaire des Reproducteurs (CIA-CSR), Département des Productions Animales (PA), Faculté des Sciences Agronomiques (FSA), Université d’Abomey-Calavi (UAC), 01 B.P. 526 Cotonou, Bénin °°° Président d’Honneur du Centre d’Elevage et d’Insémination Artificielle de Rennes et de Plounevezel, France Correspondance : Gbangboche Armand Bienvenu, Centre d’Insémination Artificielle et de Contrôle Sanitaire des Reproducteurs (CIA-CSR), Département des Productions Animales (PA), Faculté des Sciences Agronomiques (FSA), Université d’Abomey, Calavi (UAC), 01 B. P. 526 Cotonou, Bénin Tel/fax : 00229 30 30 84. E-mail : [email protected] RÉSUMÉ SUMMARY Deux éjaculats récoltés par taureau sur dix sept taureaux Borgou à l’aide de vagin artificiel en présence d’une femelle «boute en train» ont été dilués avec le dilueur à base de citrate-fructose jaune d’œuf et de glycérol. Les semences mises en paillettes ont été constituées en lots et refroidies au bainmarie (+ 32° C) pendant différents temps : 30, 60 et 120 minutes respectivement pour les lots 1,2 et 3. Elles ont ensuite été soumises à des traitements identiques : congélation à -196° C, décongélation par immersion dans de l’eau à + 38° C pendant 7 minutes, incubation à + 38° C pendant 30 minutes, 1 heure, 2 heures, 3 heures, 4 heures ou 5 heures. La durée de refroidissement de 60 minutes a permis d’obtenir le pourcentage de spermatozoïdes vivants le plus élevé après décongélation et après incubation (respectivement p < 0,05 et p < 0,01). Les effets de la décongélation et de l’incubation ont été marqués sur le pourcentage de spermatozoïdes vivants (p < 0,05). A l’issue de la période d’incubation (+ 38° C) de 30 minutes à 3 heures, toutes les semences présentent moins de 60 % de spermatozoïdes vivants, et à partir de 4 heures d’incubation tous les spermatozoïdes sont morts. Il ressort de cette étude que la méthode de traitement de la semence maîtrisée chez les taureaux de race Européenne, ne peut être appliquée à la semence de race Borgou. Cryopreservation of Borgou bull semen in Benin. Par M. ADAMOUN’DIAYE, A.B. GBANGBOCHE, A. ADJOVI and R. JONDET. MOTS-CLÉS : congélation - éjaculat - spermatozoïdes semence - Borgou - taureau. KEY-WORDS : thawing - freezing - ejaculate - spermatozoa - semen - Borgou - bull. Introduction L’un des premiers temps de la préparation de la semence consiste à abaisser graduellement la température de + 32° C à + 5° C pendant une durée variable de 30 à 120 minutes [27]. Lorsque le sperme est dilué à + 32° C et refroidi jusqu’à + 5° C, la vitalité des spermatozoïdes se maintient plus longtemps [42]. Un maintien de la semence à + 5° C en présence de glycérol est nécessaire avant d’amorcer la descente vers les températures de congélation (- 79° C ou -196° C) [21, 34]. L’ensemble des opérations d’un programme d’insémination artificielle est comparable à une chaîne dont chaque maillon constitue un stade technologique important. Qu’un seul de ces maillons soit défectueux et le résultat final, c’està-dire la fécondation se trouve compromise. Cette chaîne est chronologiquement découpée comme suit : récolte de sperme ; dilution de sperme ; refroidissement jusqu’à + 5° C du sperme dilué ; conditionnement en des doses individuelles ; congélation et conservation à - 196° C ; décongélation et insémination artificielle [27]. Revue Méd. Vét., 2003, 154, 1, 3-8 Semen ejaculates were collected from seventeen Borgou bulls via sexual stimulation by immobilized females and collection into an artificial vagina. The ejaculates (two per bull) were subsequently diluted with citrate-fructose, egg yolk and glycerol. Semen packaged in straws were divided into three groups of cooling times : group 1, 30 minutes ; group 2, 60 minutes and group 3, 120 minutes. They were submitted to a typical processing consisting of freezing at -196° C, thawing by immersion in a + 38° C water bath for 7 minutes and incubation at + 38° C for 30 minutes, 1 hour, 2 hours, 3 hours, 4 hours and 5 hours. Cooling of semen for 60 minutes resulted in the highest percentage of live spermatozoa after both thawing and incubation (p < 0.05 and p < 0.01, respectively). Thawing and incubation effects have been observed on the percentage of live spermatozoa (p < 0.05). At the end of the incubation period (at + 38° C from 30 minutes to 3 hours), all semen presented less than 60 % live spermatozoa, and at 4 hours of incubation all the spermatozoa died. In conclusion, this study suggests that, the method of semen treatment commonly used for European bulls is not suitable for the semen from Borgu bulls. Les modalités de congélation et de décongélation de la semence revêtent une importance capitale, le but à atteindre est de réanimer le nombre le plus élevé possible de spermatozoïdes devant conserver leur intégrité afin de préserver leur 4 pouvoir fécondant [27]. Plusieurs méthodes on été préconisées ; la décongélation dans un bain d’eau à +4° C ou entre +10° C et +18° C, ou à +35° C dans l’air ambiant, dans la main ou dans la poche de l’inséminateur, dans le pistolet d’insémination (c’est-à-dire une partie dans l’air ambiant, une partie dans les voies génitales femelles ou décongélation «in vivo»). L’épreuve de la thermorésistance ou l’incubation des paillettes dans un bain d’eau à +38° C fournit les indications sur la vitalité des spermatozoïdes [5, 15]. Les méthodes couramment utilisées sont : la méthode lente et classique (incubation à + 38° C pendant 5 heures) et la méthode rapide (incubation à + 46° C pendant 30 minutes). La méthode lente se rapproche davantage des conditions auxquelles sont soumis les spermatozoïdes après insémination [27] ; la température de + 38° C est celle du corps de la vache et le transport des spermatozoïdes depuis le lieu de dépôt jusqu’au lieu de la fécondation (les trompes utérines) est de l’ordre de 5 heures [44]. La République du Bénin possède 1,2 millions de bovins en 1994 et la race Borgou représente à elle seule 34 % des bovins [32]. Cette race provient d’un croisement stabilisé entre le taurin à courtes cornes d’Afrique Occidentale (Somba ou lagunaire) et le Zébu White Fulani. Elle constitue une race rustique dotée d’une assez bonne résistance à la trypanosomose qui sévit à l’état endémique au Bénin. Son aire de répartition s’étend du Bénin, au Togo, au Burkina - Faso, au Nigéria où elle est connue sous le nom de Keteku [20]. La race Borgou est exploitée pour le lait, la viande et le travail (culture attelée). Plus de la moitié de la viande consommée au Bénin est fournie par la race Borgou [32]. Sur les races bovines Européennes, de nombreuses études ont été réalisées tout au long du siècle écoulé pour améliorer les techniques de cryoconservation de la semence dans le but de maintenir le pouvoir fécondant des spermatozoïdes, d’augmenter la quantité de doses de semences préparées à partir d’un même éjaculat. Les travaux effectués dans ce domaine sont éminemment rares en Afrique et se rapportent le plus souvent aux caractéristiques descriptives du sperme [2, 4, 10, 22, 24, 26, 28, 43]. Dans le cadre de l’étude de la semence de race Borgou, la durée de refroidissement à + 5° C avant congélation est testée dans le but d’améliorer la technique de cryopréservation. La période d’incubation à +38° C après décongélation (de 30 minutes à 5 heures, c’est-à-dire bien au-delà de ce qui est préconisé avant une insémination), permet d’estimer si la durée de vie des spermatozoïdes après décongélation est susceptible de permettre la fécondation. Matériel et méthodes ADAMOU-N’DIAYE (M.) ET COLLABORATEURS Sciences Agronomiques de l’Université d’Abomey Calavi ont été utilisés. Les animaux sont âgés de 48 ± 7 mois (moyenne ± écart type) et pèsent 235 ± 18 kg (moyenne ± écart type). 6 % et 94 % des animaux ont respectivement entre [30-45 mois] et [45-60 mois]. 82 % et 18 % des animaux pèsent respectivement entre [200-250 kg] et [250-270 kg]. Les animaux sont alimentés avec les fourrages locaux essentiellement à base de graminées qu’ils broutent dans les pâturages naturels. Ils n’ont reçu aucune complémentation alimentaire, autre que les minéraux apportés par les pierres à lécher (phosphate bi-calcique, chlorure de sodium et de potassium, carbonate de zinc, sulfate de cuivre, soufre). En dehors du temps passé au pâturage, 3 h le matin et 2 h 30 l’après midi, ils sont maintenus aux piquets dans un parc collectif pourvu d’un espace couvert. Les taureaux de l’étude ont été entraînés préalablement à la récolte de sperme et régulièrement collectés. B) MÉTHODES Les animaux ont été récoltés le même jour (le matin entre 7 et 10 h) avant le pâturage, pendant que la température ambiante était comprise entre 24-30° C. Deux récoltes espacées de 4 jours ont été effectuées par animal, en présence de femelle «boute en train» à l’aide d’un vagin artificiel. Le temps de préparation a duré environ 10 min et comprend une ou deux fausses montes pour la mise en condition physique. Chaque éjaculat a été aussitôt examiné, pour enregistrer le volume, la couleur et la consistance. Une goutte de sperme a été examinée au microscope (grossissement 40 à 100) sur platine chauffante à +37/38° C, pour apprécier la motilité notée subjectivement de 0 à 5. La concentration a été déterminée à l’aide d’un hématimètre, par comptage des spermatozoïdes dans une goutte de sperme dilué au 1/100 avec une solution de chlorure de sodium à 3 p.100. Le pourcentage de spermatozoïdes vivants a été évalué sous microscope après coloration à l’éosine-nigrosine. C) DILUTION ET REFROIDISSEMENT DE SPERME Après les premiers examens (couleur, volume, concentration…), les éjaculats ont été immédiatement placés dans un bain-marie (+32° C) pour être rapidement dilués. Les éjaculats conservés (ADAMOU - N’DIAYE et al., [4]) présentent les caractéristiques suivantes: volume supérieur à 3ml ; concentration supérieure à 0,6 x 109 spermatozoïdes/ml. Le taux de dilution a été calculé de sorte que chaque paillette de 0,25 ml renferme avant congélation, au moins 20 millions de spermatozoïdes mobiles. La dilution des éjaculats a été faite en deux phases successives avec une quantité égale de deux types de dilueurs I et II de composition suivante (Jondet, [27]) : A) ANIMAUX Dilueur (I) : Citrate de sodium (2H20) 14,7 g; jaune d’úuf 250 ml ; pénicilline 1 MU ; streptomycine, 2g ; eau bidistillée 750 ml. Dix-sept taureaux reproducteurs de race Borgou en service au Centre d’Elevage et d’Insémination Artificielle et de Contrôle Sanitaire des Reproducteurs de la Faculté des Dilueur (II) : Citrate de sodium (H20) 25,3 g ; jaune d’úuf 250 ml ; pénicilline 1 MU ; streptomycine, 2g ; eau bidistillée 750 ml ; fructose, 20 g ; glycérol 140ml. Revue Méd. Vét., 2003, 154, 1, 3-8 CRYOPRÉSERVATION DE LA SEMENCE DE TAUREAU DE RACE BORGOU AU BÉNIN D) PREMIÈRE PHASE : ADJONCTION DU DILUEUR I ET REFROIDISSEMENT DE LA SEMENCE Les éjaculats ont été dilués avec le dilueur I maintenu à la température de +32° C. Les semences ont été réparties en trois lots selon le temps de refroidissement de +32° C à +5° C : 30, 60 et 120 minutes respectivement pour les lots 1, 2 et 3. E) DEUXIÈME PHASE : ADDITION DES DILUEURS I ET II, ÉQUILIBRATION ET MISE EN PAILLETTES DE LA SEMENCE. Après un temps de 30, 60 ou de 120 minutes de refroidissement, la deuxième moitié du volume de dilueur I a été ajoutée à la semence (maintenu à +5° C). Deux heures après, le dilueur II a été additionné en cinq fois à intervalle de 10 min au volume de la semence (maintenu à +5° C). La semence a été ensuite mise en paillettes de 0,25 ml et conservées à +5° C pendant 3 heures (période d’équilibration). F) CONGÉLATION, DÉCONGÉLATION ET INCUBATION. Trois portoirs de capacité de 250 paillettes de 0,25 ml, sont placés au centre d’une corbeille métallique à fond multiperforé de 33 cm de diamètre. La corbeille introduite dans le conteneur d’azote liquide repose sur le socle. Le couvercle est ensuite posé sur le conteneur. Le fond de la corbeille est en contact avec l’azote liquide sur une profondeur d’environ 1 cm. Un thermocouple enregistreur a permis d’avoir les températures de l’azote liquide de -89,4° C, -116° C et -163° C [0-30] respectivement à la 10e min, 15e et 35e min. Au retrait du canister au bout de la 35e min, 34 paillettes (17 taureaux, 2 éjaculats, 1 paillette par éjaculat) de chaque lot ont été immergées dans de l’eau à +35° C pendant 7 min pour être décongelées ; ensuite 204 paillettes (correspondant à 17 taureaux, 2 éjaculats par taureau, 6 paillettes par éjaculat) ont été réparties en 6 groupes de 34 pour être incubées à +38° C respectivement pendant 30 minutes, 1 heure, 2 heures, 3 heures, 4 heures et 5 heures. L’examen des semences sur microscope à platine chauffante a permis de déterminer le pourcentage de spermatozoïdes avant congélation, après décongélation et incubation. L’effet du refroidissement, de la congélation et de l’incubation sur le pourcentage de spermatozoïdes vivants a été testé par l’analyse de variance (logiciel Statistica 5.1, Edition 98, StatSoft France - 31, cours des Juilliottes - 94700 Maisons-Alfort). Les résultats sont exprimés sous forme de moyenne ± écart type. Résultats A) SEMENCES CONGELÉES ET APRÈS DÉCONGÉLATION Le pourcentage de spermatozoïdes vivants immédiatement après décongélation a diminué fortement, ce qui montre l’effet de la congélation sur la teneur en spermatozoïdes vivants des semences (64 % ± 7 %, rang 35-75 % de spermatozoïdes vivants avant congélation vs 39 % ± 17 % après décongélation, rang 0-65 %, p < 0,05 Figure 1). Le pourcentage de semences contenant plus de 60% de spermatozoïdes vivants [30-60] FIGURE 1. — Répartition des 34 paillettes de semences (1 paillette/éjaculat, 2 éjaculats et 17 taureaux) en fonction de spermatozoïdes vivants avant congélation (histogramme noir) ou avant décongélation (histogramme gris). Revue Méd. Vét., 2003, 154, 1, 3-8 5 6 ADAMOU-N’DIAYE (M.) ET COLLABORATEURS d’incubation de 30 minutes, 1, 2 et 3. heures, p < 0,01 Figure 3). Aucun spermatozoïde n’a survécu pour des durées d’incubation de 4 heures à 5 heures. Le pourcentage de spermatozoïdes vivants après congélation, décongélation et incubation à + 38° C, est plus élevé pour le temps de refroidissement de 60 minutes par rapport à celui observé pour les temps de refroidissement de 30 minutes et 120 minutes : 16% ± 14 % de spermatozoïdes vivants vs 12 % ± 15 % et 10 % ± 10 % pour des temps de refroidissement de la semence, respectivement de 60, 30 et 120 minutes, p < 0,05 et p < 0,01 (Figure 2). Discussion Classiquement, les facteurs de variation de la viabilité des spermatozoïdes sont multiples, notamment les caractéristiques individuelles de chaque animal, la concentration des semences, le dilueur, le temps de refroidissement, le mode de congélation, de décongélation et d’incubation de la semence. FIGURE 2. — Pourcentage de spermatozoïdes vivants après incubation de 3 heures à +38° C en fonction de la durée de refroidissement de la semence dans 204 paillettes correspondant à 17 taureaux (2 éjaculats par taureau et 6 paillettes/éjaculat). avant congélation est passé de 72 % à 12 % après congélation-décongélation. Le pourcentage de spermatozoïdes vivants avant congélation n’a pas été différent pour les trois temps de refroidissement avant congélation (63 % ± 8 %, 64 % ± 8 %, 65 % ± 32 %, respectivement pour une durée de refroidissement de 30, 60, et 120 minutes, p > 0,05 Figure 2). Après décongélation, le refroidissement le plus lent (120 minutes) correspond au pourcentage de spermatozoïdes vivants le moins élevé (32 % ± 14% de spermatozoïdes vivants après 120 minutes de refroidissement vs 44% ± 15% après 60 minutes et 41 % ± 19 % après 30 minutes de refroidissement, p < 0,05 Figure 2) B) SEMENCES INCUBÉES La concentration en spermatozoïdes vivants des semences varie en sens inverse par rapport à la durée de l’incubation à +38 C après décongélation (Figure 3). Plus la durée de l’incubation est élevée et plus le nombre de semence ne contenant pas spermatozoïdes vivants augmente: 2 %, 10 %, 35 % et 65 % respectivement pour les incubations de 30 minutes, 1 heure, 2 heures et 3 heures (Figure 3). L’effet de la durée d’incubation sur la viabilité des spermatozoïdes est significatif (27 % ± 14 % de spermatozoïdes vivants, rang 0-50 %, 16 % ± 10 %, rang 0-45 %, 6 % ± 6 %, rang 0-30 %, 2 % ± 3 %, rang 0-15 %, respectivement pour une durée La diminution importante de 25 % de la vitalité des spermatozoïdes après congélation-décongélation témoigne de la fragilité certaine des spermatozoïdes de la race bovine Borgou [3], observée également chez les zébus au Brésil [17]. Cette perte de vitalité est supérieure à celle que rapporte JONDET [27] chez la race Normande : 1 % après décongélation à +35° C pendant quelques secondes. L’intérêt des températures de décongélation élevées est controversé. En effet, la quasi-totalité des spermatozoïdes meurt à partir de 4 heures d’incubation à la température de +38° C en race Borgou, alors que JONDET [27] a récupéré 22 % à 57 % de spermatozoïdes vivants en race normande après 5 heures d’incubation à +38° C et 6 % de spermatozoïdes vivants après une incubation rapide de 30 minutes à +46° C [19]. Les températures élevées de décongélation des paillettes (+75° C, +95° C, +115° C et +135° C) pendant un laps de temps ont montré que l’effet bénéfique maximal a été obtenu dès que l’on atteint +75° C [2, 7, 8, 10, 18, 37, 38 , 40]. Le pourcentage de spermatozoïdes vivants après décongélation à +35° C ne diffère guère de celui de +75° C [10, 27]. Au nombre des facteurs d’influences susceptibles de modifier la résistance des spermatozoïdes à la congélation, d’autres auteurs ont montré l’effet de l’acrosome [31, 40], du système hypothalamo-hypophysaire [6, 33, 41], de l’épididyme [11, 29] et de la teneur en cholestérol des éjaculats sur la qualité de la semence [45]. Le type de dilueur peut influencer également la capacité des spermatozoïdes à résister au choc de température [12, 29]. L’effet de la durée de l’incubation sur la viabilité des spermatozoïdes est d’autant plus marqué que la dilution de la semence est élevée [27]. Le contact des spermatozoïdes avec le liquide séminal, produit des effets divers qui selon l’espèce en cause, se révèlent favorable, nuls ou défavorables sur la qualité de la semence : ENNEN et al., [23], LENZ et al., [41] chez le taureau ; DARIN-BENNET et al., [16] QUINN et al., [36] chez le bélier ; ROMENY et al., [39] ; PURSEL et al., [35] ; GRAHAM et PAGE [25] chez le verrat; CORTEEL [13, 14] chez le caprin. Revue Méd. Vét., 2003, 154, 1, 3-8 CRYOPRÉSERVATION DE LA SEMENCE DE TAUREAU DE RACE BORGOU AU BÉNIN 7 FIGURE 3. — Influence de la durée d’incubation de la semence à +38°C sur le pourcentage de spermatozoïdes vivants dans 612 paillettes correspondant à 17 taureaux (6 paillettes/par taureau et 3 paillettes par éjaculat). Certains laboratoires d’Europe éliminent tout lot de semence congelée qui à l’issue de cinq heures d’incubation, contient moins de 20 % de spermatozoïdes vivants. La race normande a présenté un taux de survie proche de 60 %, après cinq heures d’incubation [27], alors que plus de la moitié des semences de la race Borgou dans la présente étude ne contient que des spermatozoïdes morts après 4 heures d’incubation. Il est évident que les spermatozoïdes sont de moindre résistance en milieu tropical [17] et ne peuvent être soumis à cette épreuve, au risque de tuer tous les spermatozoïdes. Ces différences procèderaient de plusieurs origines : (1) en France, les taureaux font l’objet d’une sélection poussée (testage sur descendance), (2) la spermatogenèse et la qualité du sperme sont dépendantes de la température ; la température dans l’Ouest de la France excède rarement 25° C en été alors que les conditions climatiques sont beaucoup plus difficiles en milieu tropical [24, 26, 43]. Conclusion L’amélioration de la technologie de la semence des taureaux de race Borgou constitue un enjeux technique, génétique et économique majeur au Bénin. Le traitement de la semence maîtrisée pour les taureaux de race européenne ne peut être appliqué à la semence de race Borgou, si l’on doit tenir compte du temps de remontée des spermatozoïdes jusRevue Méd. Vét., 2003, 154, 1, 3-8 qu’au lieu de fécondation, et d’un éventuel décalage entre le moment de l’ovulation et de l’insémination. Il est évident qu’un spermatozoïde vivant, même s’il présente une bonne motilité progressive n’est pas obligatoirement un spermatozoïde fécondant. Les résultats de la fertilité à l’insémination artificielle permettraient de connaître définitivement la qualité des semences ainsi préparées et sélectionnées. Remerciements Nous présentons nos vifs remerciements aux spécialistes anonymes qui ont relu ce travail. Nos remerciements s’adressent également à tout le personnel du Centre d’Elevage et d’Insémination Artificielle de la Faculté des Sciences Agronomiques de l’Université d’Abomey Calavi et à Mlle SOGBOHOSSOU Etotépé pour la contribution importante apportée à ce travail. Bibliographie 1. — AAMDAL J. et ANDERSEN K. : Fast thawing of bull semen frozen in straws. VIe Cong. Reprod. Anim. Insem. Artif., 1968, Paris - vol. II973-976. 2. — ADAMOU-N’DIAYE M., JONDET R. et ADJOVI A. : Caractéristiques du sperme et potentiel d’utilisation par insémination artificielle des taureaux de race Borgou. Revue Elev. Méd. Vét. Pays trop., 1996, 49, 174-177. 3. — ADAMOU-N’DIAYE M. : Technologie du sperme de taureau de race Borgou. Thèse de Doctorat Es-Sciences en Reproduction Animale. Faculté des Sciences et Techniques. 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