L`histoire des indultos en France

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L`histoire des indultos en France
L'histoire des indultos en France
Avec l’aimable autorisation de Florent http://al-toro-rey.blogspot.fr/
Cela doit faire des années que cet article traîne au fond de mes cartons. Jusqu'alors, je n'avais
jamais eu l'occasion de le compléter et de le boucler.
L'histoire des indultos en France : un grand désordre ! Difficile de mettre de la cohérence
autour de ce thème.
Lorsque l'on se remémore les grands toros combattus dans notre pays, on ne pense
pratiquement jamais à ceux qui ont été graciés. Les toros de bandera dans notre esprit, ils ont
au maximum été ovationnés à l'arrastre voire honorés d'un tour de piste.
C'est un paradoxe de la corrida à l'heure actuelle : les toros graciés ne sont pas les meilleurs
que l'on voit dans l'arène.
En France, l'indulto est une chose récente, puisque le premier "véritable" a été accordé en
1986.
Il faut dire que les évènements se sont accélérés dans les années 90, puisque de nombreuses
grâces se sont produites en Espagne. Par ailleurs, les changements dans les règlements
taurins y sont pour beaucoup. Auparavant, on ne pouvait gracier des toros qu'en corridasconcours.
En théorie, lorsqu'un toro est gracié, c'est parce que sa présentation a été respectable, et que
sa combativité du début à la fin du combat a été exceptionnelle.
La réalité est bien différente, puisque cet acte de l'indulto est fortement dévalorisé.
L'épreuve de la pique est généralement négligée, car on prime avant tout le prototype du
toro moderne, d'une grande noblesse propice au troisième tiers. Or, s'il devrait être le
summum pour un toro de combat, l'indulto à l'heure actuelle est un bémol au sérieux de la
corrida, puisqu'il est généralement une recherche de publicité pour ganadero, torero et
organisateur. On pense davantage aux conséquences de l'indulto sur un CV, plutôt qu'à la
réalité pratique des toros reproducteurs.
En France, si le premier indulto eut lieu en 1986, l'histoire aurait très bien pu commencer le
21 septembre 1952 dans les arènes de Perpignan. C'est ainsi que le relate notamment Claude
Sabathié dans son ouvrage "Toros en Perpignan", tout comme d'autres reseñas de l'époque.
Ce jour-là, dans le chef-lieu des Pyrénées-Orientales, le vénézuélien César Girón affronta un
novillo d'Alicio Cobaleda, qui lui lécha le visage alors que le torero lui caressait le frontal. La
présidence décida de pardonner la vie du novillo, mais ce dernier ne pouvant être ramené au
toril, il fut puntillé en piste. Hurlements de la foule et intervention des forces de l'ordre... Une
anecdote historique.
De nos jours, les indultos sont incontestablement un synonyme de manque de sérieux dans
les arènes. On néglige l'aspect fondamental de sa précieuse rareté théorique.
A l'instar des indultos, les tours de piste posthumes étaient également moins légions en
d'autres temps.
Comme une mode, on gracie aujourd'hui des toros en nombre conséquent, notamment à
l'occasion de corridas "évènements", comme c'est par exemple le cas lorsque des toreros
affrontent seuls six toros.
La liste qui va suivre est la plus exhaustive possible. Aussi, il est bien d'avoir sous la main des
statistiques, encore faut-il les exploiter !
En me plongeant dans les archives à la recherche de ces cornus graciés, j'ai remarqué qu'un
bon nombre d'entre eux étaient totalement tombés dans l'oubli. C'est ainsi. Il faut également
préciser que les indultos dépendent des arènes et de la catégorie des spectacles, parfois très
divers.
En France, donc, depuis 1986, j'ai comptabilisé 56 indultos. 23 en corridas, 10 en novilladas
avec picadors, 1 en rejon, 11 en novilladas sans picadors, et 11 en festivals et fiestas
camperas. Et depuis 2001, toutes les temporadas ont vu au minimum un indulto. L'année
2016 confirmera-t-elle une fois de plus cette nouvelle "règle" ?
Cette liste est établie de manière chronologique et comprend bien entendu uniquement des
courses ayant eu lieu en public.
Le 11 novembre 1986 à Saint-Sever, un novillo de l'élevage landais de Marcel Linès est gracié
par Juan Villanueva lors d'une fiesta campera sans picadors. Le torero franco-espagnol
prendra l'alternative quelques années plus tard à Benicarló (Castellón).
Le 8 novembre 1987 à Pouillon (Landes), "Campesino", un eral de Jean-Charles Pussacq est
gracié lors d'une novillada sans picadors par Christophe Aizpurua, qui reçoit à l'occasion des
trophées symboliques, et deviendra par la suite banderillero.
Le 30 juillet 1988 à Garlin, "Gonzalo", n°42, novillo de Roland Durand par le novillero Sergio
Sánchez (une oreille symbolique). Ce novillo fut le premier à être gracié en France au cours
d'une novillada piquée. Face au cheval, "Gonzalo" reçut une pique. L'indulto fut demandé par
l'éleveur.
Le 19 février 1989 à Samadet, "Jaquerito", n°60, novillo de Sepúlveda par José María
Manzanares lors d'un festival (deux oreilles symboliques). Exemplaire gracié à la demande du
torero.
Le 2 avril 1989 à Méjanes, "Jabonero", n°86, novillo de François André par le novillero Angel
Leria (deux oreilles symboliques).
Le 20 mai 1991 à Nîmes, "Peleón", n°16, novillo des héritiers de Salvador Guardiola
Domínguez par Manuel Montoya. Cet indulto sema le désordre dans le public, puisque
malgré sa grande noblesse, ce novillo manqua de forces. La grâce fut en partie plébiscitée par
le directeur des arènes, Simon Casas.
Le 18 juillet 1992 à Arles, un eral d'Alain Tardieu par Yann Arias "Yanito", qui s'habillait pour
la première fois en costume de lumières.
Le 22 novembre 1992 à Nîmes, "Afligido", novillo de Jandilla, par Dámaso González lors d'un
festival.
Le 28 février 1999 à Nîmes, "Tanguisto", novillo de Yerbabuena par Juan Bautista. Ce novillo
d'encaste Pedrajas reçut trois piques et s'avéra brave.
Le 21 août 1999 à Saint-Laurent-d'Aigouze, toro n°516 de François André par Lima de
Estepona. Il s'agit du premier indulto lors d'une corrida en France, obtenu par le modeste
torero espagnol Lima de Estepona. Ce toro n'était pas baptisé, et cette course des fêtes
votives du village gardois n'est pas restée dans les annales.
Le 1er juin 2001 à Nîmes, "Descarado", n°9, toro de Victoriano del Río par Enrique Ponce. Un
toro de pelage burraco, noble, qui permit une grande faena à Ponce, mais n'avait rien
"d'exceptionnel" selon les revisteros.
Le 8 septembre 2001 à Arles, "Invincible", n°15, toro de Zalduendo par El Juli. Peu piqué, il fut
banderillé par El Juli lui-même, puis gracié du fait de sa noblesse. Le premier de la série d'El
Juli à Arles.
Le 21 juillet 2002 à Lunel, "Pescaluno", n°964, novillo d'Hubert Yonnet par Emilio Laserna.
Allant quatre fois à la pique, combattant jusqu'au bout avec caste et bravoure, Pescaluno fut
un très grand novillo, qui marquera l'histoire de son élevage et celle des arènes de Lunel.
Le 22 juin 2003 à Istres, "Castillerito", n°137, toro de Cebada Gago par Pepín Liría.
Le 23 novembre 2003 à Rion-des-Landes, un novillo des Frères Jalabert par Fernando Cruz
lors d'une fiesta campera. Le novillo fut gracié à la demande de l'éleveur, et ensuite
baptisé "Rionero".
Le 25 avril 2004 à Garlin, "Idealista", n°128, novillo de Fuente Ymbro par Fernando Cruz.
Premier indulto en France d'un pensionnaire de l'élevage de Ricardo Gallardo. Et pas le
dernier...
Le 30 mai 2004 à Nîmes, "Anheloso", n°61, toro de Juan Pedro Domecq par Enrique Ponce.
Indulto généreux, pour un toro qui manqua de forces. Curiosité : Ponce n'estoqua aucun
adversaire lors de cette corrida matinale, puisque le quatrième se coucha durant la faena et
dut être puntillé en piste.
Le 4 juillet 2004 au Grau-du-Roi, "Botinero", n°7, eral de Guadalest, par Raúl Martí lors d'une
novillada sans picadors.
Le 11 juillet 2004 à Fréjus, "Coxico II", n°56, toro de Palha par Stéphane Fernández Meca. Cet
indulto fut protesté, "Coxico II" n'étant d'ailleurs pas le meilleur toro d'une brave et encastée
corrida de Palha.
Le 22 août 2004 à Saint-Gilles, "Escandalito III", n°14, toro de Robert Margé par Julien
Miletto. Indulto à la demande de l'éleveur de ce toro d'origine Cebada Gago. Grande
polémique et bronca sonore pour la présidence.
Le 2 octobre 2004 à Générac, un eral de Fare et Venant par le becerrista Jean-Loup Aillet au
cours d'une fiesta campera, à la demande des ganaderos.
Le 3 juillet 2005 à Eauze, "Gironcillo", n°34, toro de Javier Pérez-Tabernero par Julien
Lescarret. Brave, mobile et encasté, ce toro avait reçu trois piques. Il ne survécut pas à ses
blessures et mourut deux jours plus tard à son retour au campo.
Le 4 septembre 2005 à Bayonne, "Buen Oro", n°32, eral de Santafé Martón par Pepe Moral
lors d'une novillada sans picadors. Cet eral fut récupéré par l'éleveur gersois Jean-Louis Darré
qui l'utilisa comme reproducteur pour son fer de Camino de Santiago.
Le 13 août 2006 à Fréjus, "Condor", n°5, toro de Cortés (second fer de Victoriano del Río) par
Juan Bautista. Dernière corrida dans l'histoire des arènes de Fréjus.
Le 15 août 2006 à Béziers, "Cara alegre", n°6, toro de Valdefresno par Iván García. Toro brave
et noble, qui poussa longuement durant sa première rencontre à la pique. Ce toro mourut à
son retour au campo quelques jours plus tard.
Le 14 octobre 2006 à Saint-Gilles, "Renegado", n°74, novillo de Miranda de Pericalvo par
Richard Milian lors d'un festival.
14 octobre 2006 à Saint-Gilles, "Estampa", n°59, novillo de Miranda de Pericalvo par
Sébastien Castella lors d'un festival. Deux indultos le même jour...
Le 14 août 2007 à Béziers, un eral de Robert Margé par Carlos Ruiz, novillero sans picadors de
Chiclana de la Frontera. D'après les rumeurs, cet eral aurait été abattu dès la fin de la course
dans les corrales. Comme toutes les rumeurs, ceci reste à confirmer et à vérifier. Même sept
ans après...
Le 20 juillet 2008 à Châteaurenard, "Cantino", n°45, toro de Los Bayones par Antonio
Ferrera.
Le 7 septembre 2008 à Dax, "Desgarbado", n°67, toro de Victoriano del Río par Miguel Angel
Perera. Probablement le plus controversé des indultos de ces dernières années en France,
avec un toro à peine âgé de quatre ans, peu piqué et très noble. Il faut dire qu'il s'agissait du
sixième toro d'une médiocre corrida de Victoriano del Río.
Le 29 mai 2009 à Nîmes, "Llanero", n°83, toro de Garcigrande par Javier Conde. Indulto
protesté.
Le 24 avril 2010 à Saint-Martin-de-Crau, "Sabanero", n°37, novillo d'Alain Tardieu par Esaú
Fernández. Novillo tout juste âgé de trois ans.
Le 24 octobre 2010 à Rodilhan, "Deheso", n°80, novillo d'Olivier Fernay, par Marc Serrano
lors d'un festival.
Le 22 avril 2011 à Arles, "Pasión", n°73, toro de Domingo Hernández par El Juli. Brave en deux
piques et noble, il n'était cependant pas un toro exceptionnel. En outre, le toro précédent (le
premier de la corrida) avait démontré davantage de bravoure.
Le 8 avril 2012 à Aignan, un eral du Lartet par le novillero sans picadors Tiago Santos.
Le 15 avril 2012 à Nîmes, "Becario", n°114, eral de Salvador Domecq par le novillero sans
picadors Filiberto Martínez.
Le 15 juillet 2012 à Châteaurenard, "Madrugador", n°75, toro de Santiago Domecq par
Sébastien Castella.
Le 20 juillet 2012 à Mont-de-Marsan, "Jazmín", n°193, toro de Fuente Ymbro par Matías
Tejela. Même Mont-de-Marsan n'a pas résisté à la mode...
Le 12 août 2012 à Béziers, "Calabrés", n°57, toro de Daniel Ruiz par Miguel Angel Perera. Un
toro anodin.
Le 16 septembre 2012 à Nîmes, "Ingrato" , n°31, toro de Parladé combattu par José Tomás.
Autre toro anodin, qui sauta dans le callejón en début de combat. Seul contre six de José
Tomás.
Le 3 novembre 2012 à Gimeaux, un eral du Curé de Valverde par le novillero sans picadors
Andy Younes lors d'une fiesta campera.
Le 17 mars 2013 à Samadet, "Jalado", n°224, novillo de Fuente Ymbro par Juan Leal. Seul
contre six de Juan Leal. Troisième indulto d'un pensionnaire de Ricardo Gallardo en France.
Le 15 juin 2013 à Istres, "Golosino", n°45, toro de La Quinta par Juan Bautista. Seul contre six
de Juan Bautista.
Le 7 septembre 2013 à Arles, "Velero", n°103, toro de Domingo Hernández par El Juli.
Troisième indulto obtenu par El Juli dans les arènes d'Arles.
Le 29 septembre 2013 à Arles (arènes du Sonnailler), "Plumero", n°5, eral de Sainte-Cécile
par le novillero sans picadors Maxime Solera.
Le 20 octobre 2013 à Manduel (Gard), "Presumido", eral de Gallon par l'ancien matador
Frédéric Leal lors d'un festival. *
Le 04 mai 2014 à Palavas les Flots, " Fiscal" n° 52 toro de Robert Marge par Manuel Escribano
Certains autres toros étaient plus encastés, Ce sixième fut très peu piqué.
Le 01 juin 2014 à Ales, "Badon" n° 74 novillo de Philippe Cuille par le novillero Fernando
Flores, la grâce fut accordée à la demande du ganadero.
Le 12 juillet 2014 à Saint Paul les Dax, "Burebano" n° 22 Eral, d’Antonio Banuelos par le
novillero sans picador Yannis Djeniba "El Adoureno".
Le 24 aout 2014 à Saint Gilles, " Pirata" n° 60 Eral, de la Paluna par le novillero sans picador
Andy Younes.
Le 21 juin 2015 à Istres, "Zarando" n° 93 toro de Zalduendo par Alberto Lopez Simon
Le dernier peu piqué fut d’une noblesse inlassable.
Le 20 Septembre 2015 à Nîmes, " Noblecito " n° 81 toro de Fermin Bohorquez par Pablo
Hermoso de Mendoza. C’est la première fois en Europe qu’un toro est gracié lors d’une
corrida de rejon . Pablo hermoso de Mendoza avait déjà gracié cinq toros en Amérique
( trois au Mexique, deux en Colombie )
Le 08 Mai 2016 à Ales, "Tibialuz" n° 29, Castano Liston 04/13. Novillo de Philippe Cuille par le
novillero Juan Carlos Carballo, Trois piques, pétition unanime.
Le 28 Mai 2016 à Arles (arènes du Sonnailler), "Ayudantes", n°01, eral de François André par
le novillero sans picadors Tristan Espigue lors d'une fiesta campera.
Le 19 juin 2016 à Istres, " Esparraguero " n° 20 de 01/2011, toro de Nunez del Cuvillo par
Enrique Ponce, Unique pique, mais soutenu, fut d’une noblesse inlassable.
Le 19 aout 2016 à Saint Gilles, " Hablador " n° 120 Eral, des Frères Jalabert par le novillero
sans picador Christian Perez de l’Ecole Taurine d’Albacete .
Philip.
Preuve en est qu'en France (et c'est également le cas en Espagne), les plus grands toros de
l'histoire ne sont pas ceux qui ont eu les honneurs du mouchoir orange...
25.08.2016

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