Alexandrina 4 - Académie des Inscriptions et Belles

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Alexandrina 4 - Académie des Inscriptions et Belles
Sélection d’ouvrages présentés en hommage
lors des séances 2015 de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.
J’ai l’honneur de déposer sur le bureau de l’Académie
le recueil d’études Alexandrina IV, à la demande de son
éditeur, J.-Y Empereur, directeur du Centre d’Études
Alexandrines. Il est doublement l’éditeur de ce volume de
400 pages format A4, puisqu’il en a rédigé une partie, qu’il a
réuni les quatorze études et que le Centre est désormais son
propre éditeur.
Ce volume est dédié à Mervat Seif el-Din, longtemps
directrice du Musée gréco-romain d’Alexandrie et active
collaboratrice du Centre depuis ses débuts, comme le montre
éloquemment ce livre. Celui-ci présente d’abord les
recherches du Centre. Les objets découverts dans ses fouilles
sont au point de départ d’études menées dans les collections
très riches mais trop méconnues du Musée gréco-romain d’Alexandrie, ou d’autres
musées. Ces corpus, leurs analyses dégagent peu à peu les contacts, les échanges
d’influence qui ont façonné l’art et l’artisanat d’Alexandrie. L’alexandrinisme, notion un
peu vague sous laquelle on a trop longtemps rangé toutes les nouveautés de l’époque
hellénistique, y retrouve sa véritable originalité. Cinq thèmes sont abordés dans le
volume : la sculpture, l’artisanat du bronze, la faïence, la céramique d’époque impériale
et la monnaie.
Trois pièces, trouvées dans des fouilles récentes, la statue (sans tête) d’un jeune
homme vêtu d’un himation, un buste de jeune femme et une tête de garçonnet,
permettent à M. Seif el-Din et A. Abd el-Fattah, directeurs du musée gréco-romain, ainsi
qu’à Fr. Queyrel, directeur d’études à l’EPHE, de mettre en valeur les particularités de la
plastique alexandrine. Les œuvres étudiées sont vraisemblablement des statues
funéraires, taillées, la première, dans le couvercle d’un sarcophage en granit rose, les
deux autres dans un calcaire local, de qualité médiocre, qui était recouvert d’une couche
de stuc peint. C’est aussi en granit rose qu’était, comme il convenait, le groupe de deux
souverains portant une couronne divine (Cléopâtre et Marc-Antoine ?), trouvé à l’est
d’Alexandrie, dont M-C Bruwier réunit les fragments dispersés entre Mariemont et
Alexandrie. Le marbre était en Égypte une pierre coûteuse qu’il fallait importer et le
matériau distingue d’emblée les sculpteurs d’Alexandrie de ceux du reste du monde
grec. Comme le note Fr. Queyrel, la tête qu’il étudie n’entre pas dans « l’abondante série
des gros garçons joufflus » connus à Athènes et « ne copie aucun modèle célèbre ».
Certes les modèles suivis sont d’inspiration grecque, mais ils s’inscrivent surtout dans
une tradition locale, particulièrement nette dans le cas du buste de la jeune femme, qui
est prolongé jusqu’aux hanches : les parallèles sont connus dans une large zone sous
influence lagide, allant de Rhodes à Cyrène.
Sur le site antique de Philoxénité à l’est d’Alexandrie, une maison a donné dans
un niveau du IIe siècle un porte-cassolette en bronze qui est publié par le fouilleuse, V.
Pichot, et par M.-Fr. Boussac. L’œuvre juxtapose « de façon expérimentale », notent les
auteurs, traditions égyptienne et grecque. La tige est une colonne papyriforme,
surmonté d’un chapiteau campaniforme, de tradition égyptienne, mais le pied est fait de
trois pattes de bouc, purement grecs. L’étude est prolongée par le catalogue, établi par
M.-Fr. Boussac et M. Seif el-Din, des fragments de 17 supports de lampe comparables du
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Sélection d’ouvrages présentés en hommage
lors des séances 2015 de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.
Musée gréco-romain. Ceux-ci montrent la diffusion de cette pièce d’ameublement et
l’évolution de la forme vers des représentations végétales, que l’on retrouvera par
exemple à Pompéi.
Une des techniques les plus originales de l’Égypte pré-alexandrine était, avec le
verre, la faïence, même si le nom d’origine italienne que nous lui donnons oblitère cette
origine. M.-D. Nenna publie le résultat des analyses faites au Louvre, donne une
« bibliographie commentée des contributions sur 200-02013 » et établit la typologie de
cette production, en collaboration avec M. Seif el-Din, qui avait déjà cosigné avec elle le
tome 4 de la collection Alexandrina, La vaisselle en faïence d’époque gréco-romaine du
Musée. On suit ainsi les développements de cette technique qui exige une double cuisson
des vases. La période achéménide voit la faïence s’inspirer de la vaisselle métallique.
Après l’arrivée des Grecs, le centre de production reste Memphis, mais des différences
dans la composition de la glaçure indiquent la recherche de nouvelles techniques et la
création d’autres ateliers, dont un probablement à Alexandrie.
La céramique d’époque impériale, trouvée dans la fouille à l’est d’Alexandrie d’où
provenait le groupe de souverains évoqué ci-dessus, est étudiée par J. Monchamp, qui
met en évidence la variété des productions de la vallée du Nil jusqu’à Assouan et
l’importance des importations venues de toute la Méditerranée qui convergent dans le
grand port.
Étudiant les archives du Musée gréco-romain d’Alexandrie, E. Gaty apporte un
éclairage curieux sur les relations entre affaires et intérêt pour les antiquités dans le
milieu européen installé au Caire ou à Alexandrie à la fin du XIXe siècle. Ici, l’histoire
passe par un drame. Le descendant de huguenots installés à Smyrne qui vient en Égypte,
y fait faillite. C’est alors qu’il trouve à employer son intérêt pour la numismatique
antique au service de ce qui deviendra le Cabinet numismatique du Musée Grécoromain. Démêler ces histoires s’avère indispensable pour découvrir l’origine des
premières chouettes entrées dans la collection.
Ce volume est le 32e tome des Études Alexandrines, qui, depuis leur création en
1998, alternent ainsi volumes de mélange et monographies. Une des facteurs du succès
tient à la collaboration avec les archéologues égyptiens et à l’appel à de nombreux
spécialistes de tous pays dont le nombre va croissant. J.-Y. Empereur annonce qu’après
un premier temps où la priorité était aux fouilles, sur le terrain desquelles immeubles et
villas ont désormais poussé à une allure effrénée, le Centre compte développer sa
production éditoriale et annonce la parution de quatre à six volumes par an. La
collection confirme son premier rang dans la recherche sur l’Alexandrie de ses origines à
nos jours.
Olivier PICARD
Le 20 mars 2015
Alexandrina IV
Sur le site du CEALEX
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