Visite médicale : Les prestataires s`adaptent
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Visite médicale : Les prestataires s`adaptent
Spécial Métiers Visite médicale Les prestataires s’adaptent A vec la réduction drastique des effectifs de délégués médicaux, la prestation souffre, mais elle avait anticipé le mouvement en faisant le pari de la qualité. Tous certifiés selon le même référentiel HAS que celui s’appliquant aux entreprises du médicament, les prestataires ont réalisé de longue date les démarches qualité aux normes ISO. « C’est un fait qu’il y aura moins de visite médicale demain, note Claude Louis, responsable du recrutement pour CL Innovation. Ceux qui vont rester sont des gens super formés, qui vont avoir affaire à de nouveaux acteurs, comme les Agences régionales de santé (ARS) par exemple. Les interlocuteurs changent, le nombre de délégués médicaux baisse, mais ils sont plus performants et bénéficient d’une formation plus complète et plus pointue. Ils devront gérer leur secteur en termes de business, mais aussi de communication, au plan financier, etc. » Niveau en hausse Alors que les dix ou quinze premiers laboratoires s’orientent vers des activités plus spécialisées et s’organisent en unités plus réduites, « c’est moins vrai dans les petites et moyennes structures », relève Claude Louis, qui ajoute : « Les médicaments de spécialité sup- 20 PHARMACEUTIQUES - SEPTEMBRE 2009 posent une meilleure connaissance des pathologies et de l’environnement. Le niveau d’exigence est plus élevé et les délégués sont recrutés à bac + 4 dans de nombreux pays. Le contenu des formations en école a été réévalué en permanence et l’exigence de qualité s’est aussi traduite par la certification. On demande de plus en plus de professionnalisme, mais on ne recherche pas forcément des gens très expérimentés car ils sont plus chers… L’intérêt se porte davantage sur des personnes à potentiel. » Temps partiel choisi Les prestataires ont également anticipé l’évolution du secteur en élargissant leur palette de services, à l’image de la société Arvem. Elle propose aussi bien le recrutement pour le compte des laboratoires, des réseaux de délégués auprès des généralistes, spécialistes ou à l’hôpital, sous la tutelle d’un établissement pharmaceutique (Bioethic) certifié aux normes HAS, la vente en pharmacie, ou encore le développement de produit avec ou sans AMM, toujours sous l’égide de Bioethic. Du côté de SDIT, le choix a été fait de privilégier la visite médicale multiproduits à temps partiel choisi. Les profils sont des femmes DR En faisant très tôt le pari de la qualité, les prestataires de services en visite médicale ont préservé leurs chances de traverser les mutations en cours sans trop de dommages. Pour le VM de demain, professionnalisme et potentiel sont les deux mots clés. « LES DÉLÉGUÉS MÉDICAUX SONT PLUS PERFORMANTS. (…) ILS BÉNÉFICIENT D’UNE FORMATION PLUS COMPLÈTE ET PLUS POINTUE », EXPLIQUE CLAUDE LOUIS, RESPONSABLE DU RECRUTEMENT POUR CL INNOVATION. qui ont plus de dix ans d’expérience et une parfaite connaissance du secteur, des médecins et du métier. « Le temps partiel choisi permet de concilier la vie professionnelle et la vie personnelle, après une expérience dans l’industrie, souligne Jean-François Guigout, pdg de SDIT. Nos collaboratrices ont fait le choix de la prestation et leur niveau leur permet de s’adapter aux nouvelles situations. Les laboratoires veulent une prestation de qualité et rentable. DR Claude Louis. Le niveau d’un délégué étant équivalent en prestation de services ou en poste dans les entreprises, celles-ci peuvent faire appel à la prestation pour des lancements de produits ou des opérations spécifiques sur des périodes allant de six mois à deux ans. A terme, même les formations dites produit pourront être assumées par les prestataires eux-mêmes. La transformation actuelle de l’industrie, qui affecte tout son business model, impacte toutes les activités du secteur mais plus particulièrement les fonctions marketing/ventes qui sont les plus « visibles ». Il s’agit donc d’une phase de transition qui appelle « une réorganisation avant un redéploiement », selon Claude Louis. Un autre aspect souligné par sa collègue au sein du département recrutement de CL Innovation, Dominique Jourdan, est l’indispensable maîtrise que doit aujourd’hui avoir le délégué médical dans le domaine des nouvelles technologies. « On pense bien sûr à l’informatique et en particulier Internet, précise-t-elle. L’exigence des laboratoires est d’avoir cette maîtrise dès l’embauche, afin d’être plus performant dans la gestion et l’analyse du secteur. La demande est croissante pour un délégué qui « NOUS AVONS CHOISI DE PRIVILÉGIER LA VISITE MÉDICALE MULTIPRODUITS À TEMPS PARTIEL CHOISI », SOULIGNE JEAN-FRANÇOIS GUIGOUT, PDG DE SDIT. Les audits montrent que l’impact de nos réseaux est équivalent aux VM en interne. » Plus de pertinence La prestation de services, variable d’ajustement pour les laboratoires ? « Il y a toujours des recrutements de délégués médicaux, mais davantage pour du vacancy management, c’està-dire pour des missions ponctuelles de six mois ou un an », confirme s’implique dans cette analyse, qui sache regarder au-delà des catégories clients et gérer différents groupes de médecins qui ont des tendances de prescription différentes. En bref, on leur demande plus de pertinence. » Mobiles et évolutifs Bien qu’une meilleure connaissance des produits, des pathologies et de l’environnement de la santé en général soit requise par les entreprises, les profils issus des écoles de commerce restent recherchés. D’après Claude Louis, ce sont de bons gestionnaires, de bons communicants, qui parlent couramment anglais et peuvent évoluer à l’international. « Les grands laboratoires cherchent des collaborateurs à fort potentiel, à la fois mobiles et capables d’évoluer dans les fonctions », admet-t-il. C’est encore plus vrai de l’encadrement. Les managers vont notamment avoir à gérer de nouveaux interlocuteurs, comme les ARS, et les entreprises vont elles aussi s’organiser à l’échelon régional. Les cadres disposant d’une expérience à l’international auront un avantage car ils sont habitués à la gestion de différents niveaux de décision. ■ Jocelin Morisson Marie-Noëlle Nayel, présidente de l’AQIM1 : « Informer au-delà de l’AMM à l’hôpital » DR « On envoie des délégués à l’hôpital simplement pour montrer une fiche posologique à des médecins qui demandent une information qualitative, mais le Code de la santé publique interdit de parler hors du Résumé des caractéristiques du produit (RCP). C’est un véritable problème et la charte de la visite médicale à l’hôpital ne change rien, car elle est un copier-coller de celle en ville. Comment peut-on parler à un hospitalier d’un médicament lors d’une étude si le propos est limité à l’AMM ? La solution est réglementaire : il faut convaincre les députés de pouvoir informer les médecins au-delà du strict cadre de l’AMM, sans quoi les hospitaliers ne recevront plus la VM. Questions éthiques Un autre problème, en ville cette fois, est le fait de travailler toujours sur la même cible de prescripteurs. De nombreux médecins ne voient jamais la VM, car ils ne font pas partie du ciblage initial. Cela pose des questions éthiques. Peut-être que les formes de VM à distance peuvent intervenir ici. J’ajoute que la visite médicale à distance participe aussi à l’effort de développement durable. Par ailleurs, le délégué informe uniquement sur le produit et son environnement, mais il y a aujourd’hui de plus en plus de malades complexes, avec plusieurs pathologies, et le discours mono-produit n’est plus adapté. On constate une évolution pour donner au VM une information sur l’environnement global, les systèmes de soins, la loi HPST... Il y a une prise de conscience que le VM doit avoir un relationnel très fort basé sur une bonne connaissance de son environnement. L’AQIM a poussé dans ce sens et c’est passé dans le référentiel de formation. Un dernier point est la façon dont le VM s’intègre dans la communication au sein du réseau de soins. Le pharmacien prend un rôle plus important, notamment avec la fonction de pharmacien correspondant, et il réclame une véritable visite médicale, en particulier sur les médicaments prescrits à l’hôpital et renouvelés en officine. » (1) Association pour la qualité de l’information médicale – AQIM. 21 SEPTEMBRE 2009 - PHARMACEUTIQUES