Voir le sommaire - Nestlé Nutrition Institute

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Ann Nestlé [Fr] 2009;67:74–86
DOI: 10.1159/000278754
La dénutrition dans les pays en voie de
développement – des aspects évolutifs
Noel W. Solomons Centre d’Étude sur l’Altération sensorielle, le Vieillissement et le Métabolisme, Guatemala City, Guatemala
Mots-clés
Pays en voie de développement ⴢ Dénutrition protéinoénergétique ⴢ Dénutrition en micronutriments ⴢ Transition
nutritionnelle ⴢ Obésité ⴢ Syndrome métabolique
Résumé
La malnutrition est la conséquence des troubles liés à une
suralimentation ou à une dénutrition. Les pays en développement sont caractérisés par une pauvreté généralisée due
à de faibles ressources économiques ou à une distribution
inéquitable des richesses dans la société. Les états de dénutrition de la population (retard pondérale et retard de croissance) et la gestion des cas sévères nécessitant une nutrition
clinique à l’hôpital, ont longtemps été les préoccupations
prioritaires des pays en voie de développement. A présent,
le processus de transition nutritionnelle a modifié cette situation, avec un double fardeau de dénutrition et de suralimentation à prendre en considération au sein de la population et dans les hôpitaux. Alors que la dénutrition est en
déclin, la croissance démographique entraîne une augmentation mécanique du nombre d’enfants sous-alimentés dans
le monde. Ainsi, sans qu’il y ait de nouveaux événements, les
carences en vitamine A, en iode, en fer, en zinc, en vitamine
D et en vitamine B12 sont à nouveau au centre de l’attention
de la santé publique. En outre, les taux de surcharge pondérale et d’obésité sont également en hausse dans certaines
sous-populations des pays en développement, et le syn-
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drome métabolique est en train de s’installer dans les populations à faibles revenus. Il est donc important que les
concepts et les priorités des pays en voie de développement
soient continuellement mis à jour; c’est ce qu’essaie de proposer cet article, afin de ne pas se baser sur les constats des
dernières décennies et créer des mythes qui minimisent
l’évolution contemporaine de la malnutrition dans le monde.
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La malnutrition a pour origines étymologiques malus
(mauvais) et nutrire (nourrir) [1]. Elle définie un statut
nutritionnel défavorable, hors des valeurs de référence,
avec soit une dénutrition (carence d’un ou de plusieurs
nutriments essentiels) soit une suralimentation (consommation excessive d’un ou plusieurs nutriments) [2]. Historiquement, les préoccupations nutritionnelles des sociétés pré-industrialisées à faibles revenus des régions
tropicales et subtropicales sont plutôt du côté de la dénutrition avec des carences en nutriments. Mais des bouleversements dans la nature de ces sociétés en voie de développement et notre meilleure compréhension de la nutrition humaine et clinique ont permis de mettre en exergue
des aspects évolutifs sur le problème de la malnutrition
dans ces pays. La présente revue tente d’exposer les principales nouveautés scientifiques et pédiatriques dans ce
domaine en pleine évolution.
Noel W. Solomons, MD
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Historique et problèmes de définitions
Aujourd’hui, pour de nombreuses raisons incluant la
pauvreté, la dégradation de l’environnement, les maladies
endémiques et pandémiques, les pays en développement
sont le chaudron des problèmes liés à la dénutrition en
médecine clinique et santé publique. Certains problèmes
nutritionnels et carences alimentaires sont connues depuis des siècles. Les famines de l’antiquité ont permis au
monde médical de comprendre que le jeûne cause une
inanition et un épuisement des stocks corporels de
graisses et de muscles. Les premiers explorateurs ont
souvent noté que les habitants autochtones rencontrés
lors des expéditions sur les côtes ou les îles maritimes du
monde sont souvent de plus petite taille que les marins et
les soldats européens. Cependant, il a aussi été récemment documenté que les groupes ethniques européens du
19ème siècle étaient plus petits que ceux d’aujourd’hui [3],
un phénomène attribué à des régimes alimentaires moins
nourrissants.
Les prémices de la nutrition médicale en santé publique sont généralement attribuées à la description du
syndrome de «kwashiorkor» par Williams [4], qui travailla dans la région nommée à l’époque «Côte-de-l’Or»
(Ghana) en Afrique de l’Ouest dans les années 1930. Ce
syndrome était fortement létal, et pouvait être traité et
guéri par l’administration d’une alimentation de haute
qualité [5]. En fait, la dénutrition est reconnue comme un
problème clinique de santé publique que depuis 7 décennies.
Après la description du kwashiorkor, l’attention nutritionnelle du monde s’est focalisée sur la dénutrition sévère. La première échelle diagnostique pour la classification clinique de la dénutrition protéino-énergétique a été
proposée en 1956 par une équipe de pédiatres dirigée par
le Dr. Federico Gomez [6] à l’Hôpital Pédiatrique de
Mexico (Mexico City). Ils ont défini trois degrés de dénutrition, le troisième degré étant caractérisé par un poids
inférieur à 60% du poids de référence rapporté à l’âge,
associé à des signes cliniques de la dénutrition. Alors que
la classification de Gomez était utilisée dans les services
cliniques et médicaux, elle n’était pas satisfaisante pour
répondre à des besoins de santé publique. Dans les années
1970, le Wellcome Trust a proposé un système de classification de la dénutrition basé sur 3 critères [7, 8]. Le premier était une taille trop petite par rapport à l’âge, un
arrêt de croissance indiquant une dénutrition chronique.
Le deuxième était une maigreur excessive par rapport à
la taille, une fente musculaire permettant de diagnostiquer une dénutrition aigüe. Le troisième, dérivé de la clasDénutrition dans les pays en voie de
développement
sification mexicaine, était un faible poids comparé à la
valeur de référence par rapport à l’âge. Le poids étant systématiquement mesuré avec une précision raisonnable,
contrairement à la taille, le poids rapporté à l’âge est devenu un critère universel utilisé par les épidémiologistes
de santé publique et les organismes des Nations Unies.
Néanmoins, il a été reconnu très tôt que ce critère de
poids en fonction de l’âge présentait des limites [9]. Si une
personne était trop petite, elle ne pouvait pas s’attendre à
avoir le poids d’un enfant du même âge mais beaucoup
plus grand. Un petit enfant pouvait donc avoir une composition corporelle normale – voire une obésité – tout en
ayant un faible poids par rapport à la valeur de référence
pour son âge. De même, un enfant très grand pouvait être
extrêmement maigre pour sa taille mais avoir un poids
similaire à la valeur de référence pour son âge. Il était
alors nécessaire de normaliser le poids par la taille, par
un indice tel que celui de masse corporelle de Quetelet
(IMC, kg/m2), pour pouvoir comparer des populations de
taille différente. Il a cependant fallu attendre jusqu’en
2000 pour que des valeurs de référence d’IMC pour les
enfants de la naissance à 20 ans soient publiées et puissent
être utilisées internationalement [10, 11].
La suralimentation, caractérisée par un excès de
graisse corporelle, est restée en marge des préoccupations
de classifications nutritionnelles en nutrition pédiatrique
jusqu’à une époque très récente. Ceci est vrai tant pour
les pays développés que pour ceux en voie de développement. En 1994, Popkin [12] a introduit le concept de
«transition nutritionnelle». C’est un processus stéréotypé
évolutif et généralisé dans le lequel des excès nutritionnels avec des conséquences négatives sur la santé apparaissent et coexistent avec des problèmes traditionnels de
dénutrition et carences nutritionnelles. La transition nutritionnelle est associée à un changement de comportement alimentaire, avec l’augmentation de la consommation de protéines et de graisses d’origine animale, de
graisses et huiles séparées, ainsi que de sucres simples au
détriment de la consommation de sucres complexes [13].
Les excès et déséquilibres de cette alimentation ne sont
pas restreints qu’aux macronutriments. Des limites supérieures de tolérance pour la consommation de vitamines
et minéraux ont été établies par le comité de Nutrition et
d’Alimentation de l’Institut de Médecine des États-Unis
(Food and Nutrition Board of the US Institute of Medicine) [14]. L’introduction croissante de l’enrichissement
des aliments de base et de produits industriels a commencé à devenir une préoccupation légitime concernant
la toxicité des quantités excessives de micronutriments
[15]. Avec le temps, ce double fardeau de la malnutriAnn Nestlé [Fr] 2009;67:74–86
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tion – carences et excès – pose un dilemme pour le développement de la politique de santé et la conception puis
la mise en place de programmes nutritionnels [2].
La nature des pays en voie de développement
Il n’existe pas de définition satisfaisante et consensuelle
des pays ou des sociétés en voie de développement. En fait,
les organismes des Nations Unies n’ont cessé de développer des classifications de plus en plus adaptées pour définir le statut socioéconomique des différents groupes de
pays [16], en vain, en raison de la grande diversité des caractéristiques d’une nation à l’autre. Un lexique original
avait inclus les termes pays sous-développés et moins développés comparés à pays développées et plus développés. Une
alternative contemporaine parlait de pays pré-industrialisés et industrialisés. La confrontation Est-Ouest de la
guerre froide a donné naissance aux termes de Premier
Monde (pour les pays riches en général, en particulier les
pays démocratiques de l’Amérique du Nord, de l’Europe
et de l’Océanie) et de Second Monde (les pays autoritaires,
en particulier les pays partiellement industrialisés du bloc
socialiste de l’Europe et de l’Asie), le reste du monde étant
le Tiers Monde, sur lequel les premiers ont exercé leur influence et leur hégémonie. La nature péjorative des termes
sous et moins liés au développement ou tiers dans un classement à trois niveau a conduit à un rejet endogène par les
régions ainsi nommées.
Les caractéristiques climatiques et géographiques permettent de mieux comprendre la classification. Les termes
tempéré, subtropical et tropical offrent une certaine différenciation, les 2 derniers étant les plus concernés par le
développement socio-économique. En dépit de toutes les
caractéristiques géographiques, ethniques, linguistiques,
politiques et les ressources liées à ces caractéristiques, la
pauvreté et l’attirail de la pauvreté (analphabétisme, mauvaise santé, privation des libertés, instabilité sociale et familiale et aliénation) dans une majorité de pays ou de
régions du monde, ont incité à utiliser le terme suivant
dans le présent article: «les sociétés à faibles revenus».
L’autre terme employé est «les pays en voie de développement», pour sa connotation dynamique et optimiste, et la
volonté de sortir du sous-développement.
Une localisation dans un climat chaud et humide ou
chaud et sec, un manque d’infrastructures et la pauvreté
rendent l’accès difficile aux besoins vitaux de première
nécessité (un régime alimentaire adéquat, l’eau potable,
des soins médicaux corrects, un logement salubre et solide). Les conséquences négatives des déséquilibres ali76
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mentaires et le stress environnemental peuvent prendre
de nombreuses formes chez les habitants les moins favorisés de la planète. Cela conduit à l’hétérogénéité inévitable des conditions qui prévalent chez ceux ayant comme
dénominateur commun de faibles revenus. Les généralisations faites ici sur des caractéristiques communes d’une
nutrition perturbée doivent toujours être considérées
dans un contexte de diversité des conditions imposées à
une société par l’exclusion sociale et les faibles ressources.
Interaction entre nutrition et infection
Un des concepts essentiels et récurrents lié au problème de la dénutrition dans les pays en voie de développement est celui de l’interaction entre nutrition et infection. Il a été décrit pour la première fois par Scrimshaw et
al. [17] dans un article princeps publié en 1959. Il a ensuite
été affiné et étendu dans des séries de monographie
comme les Interactions entre nutrition et infection [18]. La
thèse centrale était qu’il existe simultanément des interactions synergiques et antagonistes entre la dénutrition et
l’infection. Pour la dimension synergique, la plus importante, le stress de l’infection produit une détérioration du
statut nutritionnel, alors que la dénutrition déjà existante
potentialise les effets désastreux des maladies infectieuses
(sensibilité, sévérité et durée). Inversement, concernant la
dimension antagoniste, il y a eu des cas où la dénutrition
renforçait la résistance aux infections, en particulier lors
des carences en fer (voir ci-dessous).
Au cours du dernier demi-siècle, on a beaucoup appris
sur les effets métaboliques indésirables induits par les infections sur la perte des réserves énergétiques, des tissus
corporels et des micronutriments. La phase aiguë de la
réaction en réponse à une inflammation et à une infection est médiée par la libération d’hormones et de cytokines, par les cellules immunitaires circulantes ou in situ,
responsables de la fièvre, d’une série d’activations de mécanismes inflammatoires, et de changements des métabolismes cellulaires. Ceci conduit à la séquestration de
nutriments dans la circulation, ou leur libération à partir
des protéines de liaison, ainsi qu’à la sollicitation des
acides aminés musculaires pour la synthèse de glucose et
la multiplication des lymphocytes [19, 20]. Une grande
quantité d’azote, de zinc et de vitamine A, parmi d’autres
nutriments, est perdue dans l’urine au cours des épisodes
infectieux, conduisant à un perte de poids et des carences
en micronutriments.
La croissance et les fonctions cellulaires sont aussi directement altérées par les processus inflammatoires. KlaSolomons
sing and Johnstone [21] ont démontré l’implication de cytokines pro-inflammatoires dans l’altération de la croissance des poulets élevés dans des conditions insalubres.
Notre groupe affirmait il y a déjà 2 décennies qu’un retard
de croissance était médié en partie par une immunostimulation chronique [22]. Thurnham and NorthropClewes [23] ont aussi démontré comment l’inflammation
interfère avec l’utilisation de plusieurs micronutriments
impliqués dans l’érythropoïèse, contribuant ainsi à l’altération de la production d’hématies.
Les mécanismes par lesquels la dénutrition influence
la réponse à l’invasion des agents pathogènes comportent
presque tous les niveaux de défense de l’hôte. Tout
d’abord, les barrières physiques telles que la peau et les
muqueuses peuvent ne plus jouer leur rôle; des fissurations ou des ulcérations caractéristiques de certaines carences favorisent le passage des agents pathogènes dans le
corps. Ensuite, il peut y avoir des dysrégulations ou des
dysfonctionnements des réponses cellulaires et humorales à l’invasion d’agents pathogènes. Des manuels entiers ont été consacrés à documenter la manière dont les
carences en presque tous les macro- et micronutriments
peuvent nuire aux mécanismes de défense de l’hôte tant
au niveau cellulaire que moléculaire [24]. Ainsi, une
dysimmunité causée par une mauvaise alimentation et
une altération de la résistance aux maladies ont des conséquences épidémiologiques; Ashworth [24], en 1982, fut
un des premiers à décrire une plus forte mortalité causée
par des maladies infectieuses chez les enfants dénutris.
Au cours des décennies qui ont suivi, une association épidémiologique détaillée entre nutrition et infection a été
décrite, avec environ 53% des décès d’enfants de moins de
5 ans dus à une infection étant associés à un retard pondéral sous-jacent [26].
Une autre conséquence étonnante de la dénutrition sur
l’infection a été décrite dans le travail de Beck [27] au
cours des deux dernières décennies. En utilisant un modèle de rongeurs, elle a montré que la virulence et la pathogénicité d’agents viraux, par ailleurs bénins, peut être
augmentée par leur inoculation chez des animaux carencés en sélénium ou en vitamine E. Notons que seule la
carence en sélénium est pertinente chez l’homme. L’auteur a néanmoins conclu que «l’état nutritionnel de l’hôte
doit être considéré comme une force motrice pour l’émergence de nouvelles souches virales ou de nouvelles souches
pathogènes de virus connus» [27].
L’interaction antagoniste entre dénutrition et infection présente un intérêt pour la santé publique. La plus
représentative est liée au statut ferrique chez l’homme. La
plupart des parasites intracellulaires et tous les parasites
protozoaires et helminthiques se nourrissant de sang ont
des besoins spécifiques en fer et recherchent donc les tissus et cellules riches en fer. Weinberg [28] a décrit un mécanisme protecteur de l’immunité, basé sur les effets
d’une carence en fer, qui réduit la virulence de certaines
infections causées par des agents pathogènes fer-dépendants. Un exemple notoire de cette relation antagoniste a
été mis en évidence dans les îles de Zanzibar en Tanzanie,
une zone holoendémique pour le paludisme à Falciparum, où une complémentation universelle en fer et acide
folique pour traiter une anémie sévère s’est conclue par
des résultats défavorables (excès de décès et d’hospitalisation) pour les patients qui présentaient des statuts ferrique et hématologiques normaux au début de l’étude
[29]. Il est suggéré qu’une carence en divers nutriments
impliqués dans la phase aiguë de la réponse aux infections pourrait se révéler protectrice contre d’autres infections. Certaines maladies ou situations septiques conduisent à la libération massive de cytokines inflammatoires
[30]. La forte mortalité de la grippe pandémique de 1918–
1919 était due à une réponse inflammatoire surdimensionnée, qui pourrait aussi être une caractéristique de la
grippe aviaire contemporaine (H5N1) [31]. Il a été émis
l’hypothèse que le système immunitaire moins réactif des
personnes nutritionnellement carencées pourrait être
responsable d’une moindre réponse cytokinique et ainsi
améliorer la survie lors d’infections.
Dénutrition dans les pays en voie de
développement
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Conséquences pour l’enfant de la dénutrition
maternelle
Dans les sociétés où les enfants deviennent souvent dénutris, le statut nutritionnel maternel doit être compromis dès la grossesse. En d’autres termes, le fœtus doit être
exposé à des carences nutritionnelles in utero. C’est ainsi
que Barker exprime ses idées [32, 33]: une réduction de la
croissance fœtale et un faible poids à la naissance sont
associés plus tard à un risque de maladie cardiovasculaire, de diabète de type 2 et d’intolérance au glucose. Ce
risque doit être associé aux «conséquences de la plasticité
du développement, c’est-à-dire le phénomène par lequel
un génotype peut donner lieu à différents états physiologiques et morphologiques en fonction des conditions environnementales auxquelles il est exposé pendant le développement» [32], autrement appelé la programmation
métabolique.
Ces conséquences ont été décrites par Gluckman et
al. [34, 35] comme les origines développementales de la
santé et des maladies. Ils décrivent un scénario «concor77
dance – discordance» dans lequel les conséquences de la
programmation métabolique sont un environnement nutritionnel in utero en harmonie avec celui de la vie extrautérine pour limiter les risques de développer plus tard
des maladies. Des carences nutritionnelles intra-utérines
suivies de restrictions alimentaires est un scénario de développement harmonieux, de même qu’une alimentation
abondante durant la vie fœtale et pendant la vie plus tard.
En revanche, des carences nutritionnelles intra-utérines
suivies d’excès alimentaires plus tard dans la vie représentent un scenario en décalage avec la programmation
métabolique, modifiant les réponses programmées qui ne
sont alors plus adaptées pour une bonne santé métabolique. Comme l’ont souligné Prentice and Moore [36],
c’est précisément dans les pays pauvres, là où la nutrition
maternelle est précaire, que les conséquences pratiques de
l’origine du développement sont les plus préoccupantes.
La dénutrition dans le monde
L’évolution de l’épidémiologie de la dénutrition dans
le monde
Les statistiques de l’UNICEF montrent que dans les
années 1990, le nombre d’enfants atteints de retard pondéral dans les pays en voie de développement a diminué
de 177 à 149 millions. Les prédictions de l’OMS sont les
suivantes: «Dans le monde, le nombre d’enfants dénutris
devrait diminuer de 163,8 millions en 1990 à 113,4 millions en 2015, soit une baisse de 31% (IC 95%: –40 à –20%).
Cette décroissance devrait avoir lieu partout, excepté
dans les régions subsaharienne, orientale, occidentale et
moyen-orientale de l’Afrique, qui devraient au contraire
voir une hausse substantielle des enfants en retard pondéral» [37]. De même, la prévalence du retard de croissance dans les pays en développement est passée de 47 à
33% de 1980 à 2000 [38], avec, en 2004, une prévalence
d’enfants présentant un retard de croissance estimée à
164 millions, soit un enfant sur 3 parmi les moins de 5 ans
[39]. Il est quasiment inutile d’estimer une prévalence statistique pour la dénutrition aiguë, définie comme une
perte de poids, un déficit pondéral par rapport à la taille.
C’est en effet une situation amenée à évoluer en fonction
de chaque individu, de sorte que chaque enfant affecté est
sujet à une amélioration imminente (correction) ou à une
mort éventuelle. A l’échelle de la population, on pourrait
s’attendre à ce que la dénutrition aiguë soit localisée dans
les régions subissant certains facteurs environnementaux
ou circonstanciels, comme de mauvaises récoltes ou le
déplacement des réfugiés.
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Pour les enfants de moins de 5 ans, il y a eu une discontinuité dans les estimations mondiales du retard pondéral au cours des 3 dernières années, c’est à dire depuis
que les nouvelles courbes de croissance de l’OMS [40] ont
été adoptées par les organismes des Nations Unies. En
général, les poids de référence pour un âge donné sont
plus faibles que ceux du NCHS (National Center for
Health Statistics) [41], de sorte que la prévalence du retard pondéral chez ces enfants serait réduite. En revanche, les conséquences de l’adoption de ces nouvelles
courbes de croissance de l’OMS [40] est moindre sur les
estimations des enfants de petite taille et ceux présentant
un retard de croissance, dans la mesure où ces nouvelles
courbes de croissance sont similaires aux précédentes
[42].
Depuis 2006, l’International Food Policy Research
Institute (l’Institut International de Recherche sur les politiques Alimentaires) a proposé un nouvel indicateur,
l’indice de la faim dans le monde, comme une estimation
des capacités nationales à nourrir durablement leur population. Trente trois pays sont en déficit grave au regard
de l’indice de la faim dans le monde en 2008 [43]. Les régions à forte densité endémique pour le sida, qui continue
à se propager de manière pandémique, doivent s’attendre
à une augmentation de l’incidence de toutes les formes de
dénutrition à moyen terme [44].
Prise en charge clinique de la dénutrition
protéino-énergétique sévère aiguë
Un faible poids par rapport à la taille ne doit pas être
ignoré et doit être traité avant qu’il évolue en dénutrition
protéino-énergétique (DPE) sévère, ou en troisième degré
de retard pondéral initialement décrit par Gomez et al.
[6], nécessitant une prise en charge clinique. En plus des
maladies, les causes de ces états de dénutrition extrême
sont la pauvreté, la famine, la situation des réfugiés, la
maltraitance et la privation de nourriture, et les causes
iatrogènes, y compris les mauvaises prises en charge cliniques. En ce qui concerne les maladies, au cours du dernier quart de siècle, de graves DPE sont de plus en plus
observées au cours d’infections chroniques, telles que le
sida et son compagnon, la tuberculose [44].
Les altérations physiologiques observées lors d’un
kwashiorkor ou d’un marasme chez l’enfant peuvent
conduire à la mort si l’enfant n’est pas traité, et augmenter
la mortalité lors d’une prise en charge nutritionnelle et
médicale [45]. Une surinfection aiguë est une menace
toujours présente pour un enfant dénutri. Elle doit donc
être diagnostiquée et traitée. Ces enfants doivent aussi
être protégés contre les risques iatrogènes et les risques
Solomons
d’un «syndrome de renutrition», à savoir les conséquences
d’une réalimentation excessive.
Il y a environ 20 ans, des experts internationaux ont
pris conscience d’un taux inacceptable de mortalité hospitalière chez les enfants présentant une DPE. La recherche formative a alors montré que la formation des
médecins qui soignent les enfants souffrant de dénutrition sévère s’était éloignée des pratiques ayant fait leurs
preuves lors des décennies précédentes. Sous l’initiative
de la Fondation Nestlé pour l’Étude des Problèmes d’Alimentation dans le Monde et de l’Organisation Mondiale
de la Santé, un conseil a été convoqué pour concevoir et
diffuser un algorithme décisionnel pour la prise en charge
des DPE sévères à l’hôpital. Ce travail a porté ses fruits au
tournant du millénaire avec les publications de l’OMS
suivantes: Management of Severe Malnutrition: a Manual
for Physicians and Other Senior Health Workers [46]
(Prise en charge des dénutritions sévères: un guide pour
les médecins et les autres professionnels de santé) et Management of the Child with a Serious Infection or Severe
Malnutrition. Guidelines for Care at the First-Referral Level in Developing Countries [47] (Prise en charge de l’enfant atteint d’une infection grave ou de dénutrition sévère. Recommandations pour les premiers soins dans les
pays en voie de développement). Le premier de ces manuels est un guide destiné aux cliniciens pour le diagnostic et le traitement des dénutritions sévères, le deuxième
est utilisé comme «check-list» pour estimer l’aptitude des
institutions hospitalières à prendre en charge efficacement les DPE sévères. Bhan et al. [48], en Inde, ont diffusé et résumé les éléments essentiels de ces directives
(tableau 1). Une étude prospective en Afrique du Sud a
montré un déclin de 7% de la mortalité hospitalière due
à une DPE sévère après 3 ans de mise en pratique de ces
recommandations [45].
Utilisation d’aliments prêts à l’emploi
Des inquiétudes renouvelées concernant la prise en
charge de le DPE ont conduit à une autre forme d’intervention nutritionnelle avec de multiples répercussions:
l’utilisation d’aliments prêts à l’emploi (APE) [49]. En effet, les aliments de première nécessité tels que les laits
maternisés et les bouillies de céréales, utilisés dans la réalimentation des nourrissons et jeunes enfants dénutris,
posent des problèmes de conservation (durée et qualité).
Conditionnés en poudre, ces aliments sont sujets à des
infestations par des insectes ou des parasites. Pire, leur
reconstitution avec de l’eau présente un double risque: la
contamination bactérienne de l’eau utilisée ou la prolifération rapide d’agents pathogènes dans ces liquides ou
Dénutrition dans les pays en voie de
développement
Tableau 1. Résumé des recommandations de l’OMS pour la prise
en charge des enfants sévèrement dénutris
Le taux de mortalité élevé chez les enfants atteints de dénutrition
sévère peut être sensiblement réduit par l’adoption de protocoles
thérapeutiques standardisés
Les enfants avec un poids rapporté à la taille <70% de la médiane
du National Center for Health Statistics (Centre national des statistiques de santé des États-Unis), des œdèmes des membres inférieurs, ou une perte de poids sévère visible devraient être hospitalisés pour être dans un premier temps stabilisés et, de manière optimale, jusqu’à complète guérison
Chez les enfants sévèrement dénutris avec des diarrhées, les liquides apportés par la voie intraveineuse devraient être limités aux
patients montrant des signes de choc; les autres enfants sévèrement dénutris devraient recevoir des solutions salines de réhydratation orales avec une plus faible concentration en sodium et une
plus forte concentration en potassium que les normes recommandées par l’OMS pour ces solutions salines de réhydratation
La prévention et le traitement précoce de l’hypoglycémie et de l’hyperthermie réduisent la mortalité
Les enfants sévèrement dénutris ont besoin de compléments
(jusqu’à deux fois les doses journalières recommandées) en vitamines, potassium, magnésium, zinc, cuivre, sélénium, et iode. Le
fer devrait être administré une fois que l’enfant a retrouvé l’appétit
Pendant la première semaine de traitement, seulement 330 à 420
kJ/kg et 1 à 1,5 g de protéines/kg devraient être administrées pour
éviter un stress métabolique
Au cours de la renutrition, les apports en énergie et en protéines
doivent progressivement atteindre respectivement 630 à 920 kJ/
kg/jour et 4 à 5 g/kg/jour, pour atteindre un gain de poids >10
g/kg/jour jusqu’à complète récupération
Modifié d’après Bhan et al. [48]. Reproduit avec permission.
semi-solides mal manipulés et soumis à la température
ambiante élevée des tropiques.
Le risque de surexposition à des toxi-infections alimentaires dues à l’utilisation d’une eau insalubre a
conduit à l’idée d’utiliser des APE. Le premier argument
est qu’ils sont hermétiquement conditionnés dans des sachets en aluminium et ne demandent pas de manipulation préalablement à leur administration. Le deuxième,
c’est leur nature chimique. Les APE sont d’appétissantes
pâtes à tartiner, similaire au beurre de cacahuètes ou de
noix de cajou, composées exclusivement de protéines et
de lipides, sans glucides [49]. En excluant l’eau et les glucides, le milieu propice à la prolifération bactérienne ou
fongique est pratiquement éliminé, ces microbes ne poussant pas dans un environnement lipidique. Ces APE ont
une longue durée de vie dans les climats les plus chauds
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Tableau 2. Principales solutions économiquement efficaces proposées par le Consensus de Copenhague en 2008
Solution
Domaine
Complémentation en micronutriments chez
les enfants (vitamine A et zinc)
Programme de Doha pour le développement
Enrichissement en micronutriments
(fer et sel iodé)
Renforcement de la couverture vaccinale
pour les enfants
Enrichissement des aliments
Déparasitage et autres programmes
nutritionnels à l’école
Faire baisser le prix de la scolarité
Accroître et améliorer la scolarisation des filles
Promouvoir la nutrition dans les villages
Apporter un soutien aux femmes en matière
de reproduction
Dénutrition1
1
Commerce
Dénutrition1
Maladie
Dénutrition1
Dénutrition1
et formation
Formation
Femmes
Dénutrition1
Femmes
Solutions liées à une intervention nutritionnelle.
et ne se dégradent pas rapidement même lorsque l’emballage est ouvert. Ils ont été utilisés pour des enfants hospitalisés avec de graves DPE, et aussi dans des camps de
réfugiés au Sahara occidental [50].
La dénutrition en micronutriments
Lutter contre la faim cachée: une action de santé
publique
D’une part, comme mentionné ci-dessus, les syndromes de DPE sévères impliquent généralement des carences en micronutriments. D’autre part, des comportements alimentaires inadaptés et des conditions environnementales hostiles peuvent provoquer des carences ou
des excès en micronutriments sans signes cliniques apparents de dénutrition. Le concept de la faim cachée vient
des connaissances acquises sur la carence marginale en
vitamine A dans les années 1980 et a été institutionnalisé
au moment où on s’intéressait également aux carences en
iode et en fer [51]. Le consensus de Copenhague a analysé
les interventions les plus efficaces et les moins onéreuses
pour améliorer la santé publique mondiale [52]. Parmi les
10 premières solutions, les interventions nutritionnelles
étaient représentées 5 fois (tableau 2).
80
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Hypovitaminose A
Sommer et al. [53] ont ajouté une nouvelle dimension
à la vitamine A (1) quand ils ont observé, dans une grande
enquête effectuée en Indonésie, une mortalité supérieure
à court terme chez les enfants présentant de légers signes
oculaires d’hypovitaminose A, et (2) quand ils ont décrit,
dans une étude interventionnelle prospective, une réduction de 34% de la mortalité due à des maladies infantiles
lors d’une complémentation systématique et périodique
en vitamine A [54]. Une série d’essais interventionnels
réalisés en Asie et en Afrique confirme les effets d’une
complémentation en vitamine A sur la réduction de la
mortalité chez les enfants en âge préscolaire [55]. Il a alors
été recommandé de mettre en place une complémentation systématique en vitamine A dans les pays endémiques pour l’hypovitaminose A [56]. Cette mesure a été
classée première, avec la complémentation en zinc, dans
le classement des investissements avec le meilleur rapport
coût-efficacité par le Consensus de Copenhague [52].
Une complémentation avec 200 000 UI de vitamine A
est également recommandée par l’OMS comme un important traitement adjuvant pour réduire la mortalité lors
d’une rougeole avec des complications respiratoires. Les
analyses systématiques d’efficacité Cochrane mettent en
évidence une telle efficacité lorsque 2 doses sont administrées [57].
Carence en Iode
La carence en l’oligo-élément qu’est l’iode est connue
comme la cause du goitre endémique. Ce n’est cependant
que récemment qu’il a été compris qu’une réserve corporelle inadaptée en ce micronutriment pouvait avoir une
multitude de conséquences fonctionnelles et sur la santé
[58, 59] conduisant au trouble de la carence en iode [58].
Cette carence est l’une des carences dont la prévalence
dans le monde a été sensiblement réduite au cours du dernier quart de siècle grâce à la mise en œuvre des programmes d’enrichissement du sel. Les données d’une enquête de suivi chez des écoliers permettent d’estimer que
dans 54 pays, la carence en iode est endémique, avec 285
millions d’écoliers, soit, par extrapolation, 2 milliards de
personnes dans le monde seraient carencées en iode [60].
L’importance de l’intervention visant à réduire la carence
en iode a été classée troisième par le Consensus de Copenhague [52].
L’anémie nutritionnelle
L’anémie nutritionnelle est probablement le plus répandu, ainsi que le plus résistant, de tous les problèmes
nutritionnels de l’humanité. Les femmes en âge de proSolomons
créer et les enfants de moins de 6 ans sont les populations
les plus vulnérables [61]. La plupart des anémies nutritionnelles sont dues à une carence en fer. Là où l’anémie
est considérée comme un problème sérieux de santé publique, c’est-à-dire où plus de 40% d’une tranche d’âge est
touchée, il est recommandé une complémentation universelle. Pour les nourrissons et les tout petits, la posologie est de 12,5 mg de fer et 50 mg d’acide folique par jour
[62]. La résistance de l’anémie au traitement vient de
l’inefficacité relative de la complémentation et d’un enrichissement alimentaire par des formes et des doses inappropriées en fer. Comme mentionné ci-dessus, une complémentation alimentaire apportant plusieurs nutriments
améliore le statut en hémoglobine [63]. L’enrichissement
d’aliments à domicile est une nouvelle piste prometteuse
qui pourrait apporter les bénéfices attendus là où d’autres
mesures ont échoué [64]. L’importance de l’intervention
visant à réduire l’anémie nutritionnelle a été classée troisième par le Consensus de Copenhague, comme celle visant à réduire la carence en iode [52].
Carence en zinc
La majorité de l’alimentation traditionnelle étant à
base de produits céréaliers non raffinés, la carence marginale en zinc est très répandue. Un récent compendium
du Groupe Consultatif International sur le Zinc (International Zinc Consultative Group) [65] a suggéré qu’une
complémentation prophylactique en zinc a des effets bénéfiques sur la prévention des infections respiratoires et
sur la réduction de la mortalité: ces effets sont plus importants au cours de la première année de vie. Une controverse est en revanche apparue sur l’efficacité d’une complémentation en zinc pour favoriser une croissance régulière, une complémentation quotidienne en nutriments
étant difficilement réalisable, et l’efficacité d’un enrichissement des aliments en zinc n’étant pas encore connue.
Néanmoins, la complémentation en zinc est une mesure
classée première par le Consensus de Copenhague,
comme la complémentation systématique en vitamine A,
dans le classement des investissements avec le meilleur
rapport coût-efficacité [52].
Les troubles dus à une carence en vitamine D
La vitamine D provient soit de l’alimentation, soit de
la production cutanée sous l’action des rayons solaires
(exposition aux UV). Étant donné que les aliments riches
en cette vitamine sont limités aux abats, aux huiles de
poisson, aux œufs et aux produits laitiers enrichis, il est
généralement admis que l’exposition au soleil est la source
la plus importante en vitamine D. Plus on vit près de
Dénutrition dans les pays en voie de
développement
l’équateur, plus le rayonnement solaire atteignant la peau
est constant et direct. Pourtant, le rachitisme par carence
en vitamine D est largement observé dans les pays tropicaux en voie de développement [66, 67]. Ceci s’explique
par le port d’habits traditionnels laissant peu de surface
cutanée sans protection contre le rayonnement solaire.
Lorsque les mères allaitantes portent des vêtements couvrant intégralement, comme dans les cultures islamiques,
les niveaux de vitamine D dans le lait maternel ne suffisent pas à répondre aux besoins de leur progéniture [66].
De plus, l’enveloppement des bébés diminue concomitamment la synthèse de vitamine D chez ces nourrissons.
Ces pratiques ont pour conséquence le rachitisme, même
dans les pays ensoleillés du sud. Par ailleurs, des résultats
récents chez l’adulte suggèrent que la vitamine D a des
effets jusque-là méconnus au niveau de plusieurs systèmes métaboliques [68] et contribue à réduire le risque
d’un certain nombre de maladies chroniques [69].
Vitamine B12
L’intérêt de l’acide folique pour la santé des enfants est
avant tout lié à la prévention des malformations du tube
neural chez les nouveau-nés, bien que la carence en vitamine B12 semble être la plus sous-estimée des carences
dans les pays en développement. En effet, il a été récemment décrit qu’au moins au Mexique et au Guatemala, la
carence en vitamine B12 est endémique [70–72]. Elle
semble être associée à un statut déficient en acide folique
de la mère lors de l’allaitement ainsi qu’à des problèmes
de biodisponibilité intestinale restant encore mal compris. Au Kenya, la faible consommation d’aliments d’origine animale est associée à un mauvais statut en vitamine
B12 [73]. Sur le plan mondial, l’ampleur de cette carence
est difficilement estimable à cause d’une trop grande variété de méthodes diagnostiques et d’une hétérogénéité
des valeurs seuils appliquées dans les études de suivi [74].
Utilisation des aliments prêts à l’emploi
Au regard de ce panorama des problèmes nutritionnels, un consensus a suggéré qu’une complémentation apportant plusieurs micronutriments à la fois serait plus efficace qu’une approche par micronutriment individuel.
Les APE initialement utilisés pour traiter la DPE ont alors
été utilisés comme pâte à haute densité nutritionnelle vecteur de plusieurs micronutriments [76]. Il a ainsi été montré que l’addition de fer à ces pâtes traitait efficacement
l’anémie chez les réfugiés précités [50]. Un essai interventionnel au Ghana a comparé une de ces pâtes à haute densité nutritionnelle à deux autres produits vecteurs de plusieurs micronutriments chez de jeunes enfants. La pâte
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81
présentait une meilleure efficacité que les deux autres
produits sur la croissance et le développement moteur, et
permettait de contrôler la carence en fer et de traiter l’anémie [64, 77].
Surpoids et obésité: les changements d’un
paradigme
Surcharge pondérale dans les pays en voie de
développement
Traditionnellement, dans les pays développés, des repas structurés et la participation à des activités ménagères, scolaires, sportives et aux loisirs des quartiers sont
autant de remparts contre une accumulation excessive de
graisse. Ces mêmes facteurs, avec peut-être des sports
pratiqués sur des terrains plus vastes et sablonneux, et
beaucoup plus de tâches manuelles, sont également généralement existants dans les populations pauvres à faibles
revenus. Comme discuté ci-dessus, ce n’est que récemment que sont apparus l’intérêt et les outils diagnostiques
adéquats pour estimer l’excès de surcharge pondérale des
populations jeunes et des patients pédiatriques. Il y a une
douzaine d’années, la communauté de santé publique a
été obligée d’admettre que le problème de l’obésité était
devenu pandémique, impliquant également des pays en
voie de développement [78]. Les données déjà existantes
des enquêtes de suivi nationales commencèrent alors à
être analysées, avec une attention particulière pour les
populations juvéniles [79].
Côté diagnostic, le seul paramètre d’évaluation de la
composition corporelle était le poids en fonction de l’âge
[44]. Pourtant, le poids ajusté par la taille, c’est-à-dire
l’IMC, est un critère plus approprié pour évaluer l’excès
pondéral. En 2000, 2 courbes de croissance de référence
analysant l’IMC des populations juvéniles ont été publiées, une par les États-Unis [10] et l’autre dans un cadre
international [11]. Dans la première, se situer entre le
85ème et 95ème percentile a été défini comme être à «risque
de surpoids» (correspondant à la surcharge pondérale
dans la classification des adultes), tandis qu’être au-delà
du 95ème percentile a été défini comme être en «surpoids»
(correspondant à l’obésité des adultes). Lorsque des mesures précises de la taille sont disponibles, les anciennes
et les nouvelles données d’enquêtes de suivi peuvent fournir un nouveau regard sur l’excès de poids.
Sur la base d’un écart de 2 déviations standards audelà de la valeur de référence (score Z supérieur à 2), de
Onis and Blössner [79] ont estimé les taux de surpoids des
enfants en âge préscolaire de 94 pays à moyens et faibles
82
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revenus. Le taux global de surpoids était de 3,3%. Ce taux
pouvait cependant aller jusqu’à 6,6% (soit 2 fois la
moyenne) dans les pays comme la Bolivie, la Jamaïque, le
Maroc, l’Egypte, l’Algérie, l’Afrique du Sud, avec à l’extrémité supérieure de cette distribution, principalement
les pays de l’Amérique latine, du Moyen Orient et l’Afrique
du nord. Ce faible taux de prévalence a été corroboré par
un autre recueil international de données d’enquêtes de
suivis d’enfants en âge préscolaire dans 50 pays en voie de
développement, en utilisant le même critère de surpoids
[80]. Quarante-six pour cent de ces pays ont enregistré
des taux de prévalence dépassant les 2,3% de la prévalence
de référence, et ceux-ci correspondaient aux pays précités. En considérant comme critère de surpoids la zone
correspondant à un score Z supérieur à 1, qui englobe
17% de la distribution, Martorell et al. [81] ont montré
chez des enfants de 1 à 5 ans en Amérique latine et dans
la Caraïbe, des taux de prévalence de surpoids allant de
6% en Haïti à 24% au Pérou. Cependant, les enfants étant
souvent de petite taille, ce critère de poids en fonction de
l’âge sous-estime l’excès de poids qui pourrait être mis en
évidence par l’IMC.
Les enquêtes de suivi gouvernementales n’étant réalisées que chez des enfants de moins de 5 ans, les données
de prévalence nationale de surpoids et d’obésité avec,
comme critère, l’IMC en fonction de l’âge [10, 11], n’existent pas. Au cours de notre propre expérience au Guatemala, nous nous sommes intéressés aux enfants en âge
d’être scolarisés mais l’échantillon n’était pas représentatif. Des collaborateurs de notre institution ont suivi des
enfants scolarisés de 8 à 11 ans dans les 2 plus grandes
villes du pays: Guatemala City et Quetzaltenango [82, 83].
A ces 2 endroits, le nombre d’enfants situés au-delà du
85ème et du 100ème percentile, caractérisés comme en
surpoids ou obèses selon les références du CDC, était le
double de celui auquel on s’attendait chez les enfants issus
de familles privilégiées. Les enfants pauvres des écoles
publiques de cette dernière étude ne présentaient pas
d’excès de poids [83], ces résultats étant similaires à ceux
documentés dans une autre étude urbaine basée à New
Dehli où une distinction par classes sociales était également réalisée [84]. Ceci est en accord avec le phénomène
exposé par Monteiro et al. [85] au Brésil, dans lequel les
personnes ayant les revenus les plus élevés sont affectées
par un excès pondéral dans la phase précoce de l’obésité
endémique d’un pays en développement, avec une transition vers une plus grande vulnérabilité des pauvres. Ceci
est du à un changement du comportement alimentaire
des plus riches et à une dépendance accrue des plus
pauvres à des aliments prêts à consommer riches en caloSolomons
ries. D’autre part, les données longitudinales d’une étude
transgénérationnelle réalisée dans une province orientale
du Guatemala sur une durée de 40 ans, montrent que la
taille rapportée à l’âge a augmenté de génération en génération, alors que l’IMC n’a pas évolué [86].
Le syndrome métabolique chez les enfants des pays en
voie de développement
Le syndrome métabolique (SM) est un ensemble
d’anomalies comprenant une altération des métabolismes du glucose et de l’insuline, une hypertension artérielle, une obésité centrale et des troubles du métabolisme
lipidique. Il pourrait avoir une origine commune avec la
résistance à l’insuline. Sa prévalence grandissante a été
attribuée aux taux croissants d’obésité et ses conséquences
sont une mauvaise santé et une mortalité prématurée.
L’occurrence de ce syndrome chez l’enfant, et notamment
dans les pays en développement, présente un intérêt grandissant. Les taux d’obésité des enfants de New Delhi sont
passés de 16% en 2002 à 24% en 2006–2007, et ceci a été
associé à une augmentation des taux de résistance à l’insuline et du SM dans cette région [84].
Dans une perspective comparative, les taux de SM varient considérablement selon les régions étudiées. Une
enquête réalisée chez des adolescents à Beijing, en Chine,
a montré une prévalence globale du SM de 3,3%, prévalence qui pouvait atteindre jusqu’à 28% quand seuls les
adolescents obèses étaient considérés [87]. Parmi des adolescents brésiliens de plusieurs races à Salvador, Bahia et
Brazil, le taux global de SM était de 22,6%, et de 59,3%
chez les sujets obèses [88]. Plus au sud, à São Paulo et chez
des enfants en âge préscolaire, un taux global de SM de
9,3%, et de 25,0% chez les enfants obèses, a été documenté [89]. Toutefois, dans certains habitats et certains types
de corps, le SM peut survenir chez des enfants sans antécédent d’obésité. Parmi des adolescents aborigènes suivis
près de Darwin au nord de l’Australie, 14% présentaient
un SM et ceci était associé à une forte prévalence d’un
tour de taille élevé (26,3%), plus de la moitié de ces adolescents n’étant ni obèses, ni en surpoids [90].
Dans une revue systématique du département de Cardiologie Pédiatrique Préventive du centre de Recherche
Cardiovasculaire Isfahan en Iran (Department of Preventive Pediatric Cardiology of the Isfahan Cardiovascular Research Center in Iran), s’intéressant aux pays en développement, le Moyen Orient et l’Asie du Sud présentaient respectivement les taux de surpoids pédiatriques
les plus hauts et les plus bas [91]. Dans la littérature où les
taux de SM chez les enfants dans les pays en développement sont présentés, ces taux augmentent plus rapideDénutrition dans les pays en voie de
développement
ment dans les pays à faibles revenus que dans les pays
industrialisés.
Vers une réduction du surpoids et de l’obésité juvénile
dans les pays en voie de développement
Le rapport technique de l’OMS [92] propose une analyse et des solutions pour tous les âges, enfants compris.
Comme c’est le cas pour les adultes, le rôle de l’alimentation et de l’activité physique dans le déclenchement et le
maintien du surpoids chez l’enfant a été discuté. La
consommation de boissons sucrées pourrait favoriser
l’obésité tant dans les pays industrialisés [93] qu’en voie
de développement [94]. En effet, le pourcentage des calories apportées par les boissons a doublé en 10 ans au
Mexique. Au Guatemala, chez des enfants scolarisés et en
zone urbaine, la consommation de fruits et de légumes
est en deçà des 5 portions quotidiennes recommandées
[95]. Une logique politique de lutte contre l’obésité et
le surpoids des enfants vivant dans les pays en voie de
développement serait de valoriser les activités agricoles
extérieures. Cependant, l’évaluation de la prévalence du
surpoids reste difficile car seulement 23% des pays relèvent les mesures de poids et de taille dans leurs enquêtes
nationales [96]. Le monde change rapidement, avec une
population de plus en plus urbanisée, et l’insécurité, le
manque d’infrastructures de loisirs, un temps excessif
passé à regarder la télévision ou devant un ordinateur encouragent un mode de vie sédentaire dans les villes des
pays en développement.
Conclusions
Il fut un temps où l’on pouvait accepter l’idée qu’un
individu était à risque d’être soit sous-alimenté, soit trop
gras. On ne pouvait pas alors imaginer la possibilité de
voir ces 2 situations au sein d’une même famille ou bien
chez un même individu durant sa vie. Le miroir reflétant
cette dualité innocente est à présent brisé peut-être pour
toujours, pour les populations des pays en voie de développement. Le principal message de cette revue est la sensibilisation et la prise de conscience au fait que la malnutrition dans les sociétés à faibles revenus n’est pas le
stéréotype décrit et transmis de manuels scolaires en manuels scolaires. La dénutrition reste encore largement répandue et commune, mais elle a de nouveaux contextes,
tel que l’épidémie du sida [42], pour se montrer en Afrique,
en Asie et en Amérique latine. La malnutrition dans les
sociétés à faibles revenus, qui doit être perçue comme un
problème nutritionnel, évolue rapidement. Ainsi, tel JaAnn Nestlé [Fr] 2009;67:74–86
83
nus, la nutrition présente deux visages antinomiques: la
dénutrition classique et ses carences associées et un axe
émergent lié à la suralimentation et à l’excès. Une deuxième priorité mise en avant dans cette revue est d’assimiler et comprendre l’implication de la transition nutritionnelle [12] et ce double fardeau qui en découle [2] dans
les pays en développement. Les cliniciens doivent être
prêts à répondre dans leur pratique quotidienne aussi
bien aux problèmes engendrés par des carences qu’à ceux
causés par des excès. Les politiques de santé publique et
les programmes communautaires devraient également
être prêts à traiter ces deux sujets simultanément.
L’ennemi majeur au service des patients dans les sociétés à faibles revenus pourrait bien être l’héritage d’une
vue simple et simpliste de la malnutrition (stéréotypes),
soit comme exclusivement une dénutrition, soit comme
une dénutrition due à un problème alimentaire. Une sensibilisation clinique à la malnutrition et aux nouvelles
subtilités des stratégies de diagnostics doit par conséquent avoir lieu. La mesure et l’enregistrement de la taille
devient une routine nécessaire [40] dans la nutrition mo-
derne. De plus, le diagnostic d’un problème alimentaire
chez un enfant mince ou sous-alimenté doit faire rechercher une dénutrition secondaire liée à une infection commune dans la région considérée. L’interaction entre nutrition et infection [17, 18] est tellement omniprésente que
les solutions au retard pondérale doivent autant impliquer un traitement contre un agent pathogène que la
restauration d’une alimentation adaptée apportant les
nutriments nécessaires. Concernant la prise en charge
nutritionnelle, de nouveaux principes et de nouvelles formulations pourraient améliorer sa rapidité et son efficacité à restaurer une bonne santé nutritionnelle. Enfin, il
est important de prendre conscience que l’occidentalisation des modes de vie a déjà solidement planté les graines
du surpoids et de l’obésité dans les sociétés à faibles revenus. La nutrition fœtale est liée à l’état nutritionnel de la
mère et le SM associé à un excès pondéral pourrait préparer le terrain pour l’émergence de maladies chroniques,
un bel exemple étant l’apparition du diabète de type 2
chez les adolescents d’Asie du Sud.
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