Voyage en Ouzbekistan « Uzbekistan Airways » vante sa flotte mais

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Voyage en Ouzbekistan « Uzbekistan Airways » vante sa flotte mais
Voyage en Ouzbekistan
« Uzbekistan Airways » vante sa flotte mais nous transporte en A310 largement amorti : le toit du
cockpit est rouillé, les sièges sont fatigués, les blocs d'aération descellés. Le commandant attend
l'heure, vautré dans un fauteuil de la classe affaires, son bedon déborde de la ceinture ; les hôtesses
arborent des uniformes de l'époque soviétique et la mine renfrognée de la chef de cabine la fait vite
surnommer « sœur sourire » . Mais nous apprendrons par la suite que ce qui différencie les Russes
des Ouzbeks, c'est que les premiers ne sourient jamais : ce serait faire preuve de « faiblesse » .
Malgré notre appréhension, le voyage se passe bien, agrémenté d'un repas tout à fait acceptable ,
accompagné de vins ouzbeks, un goût de résiné pour le rouge, de gros plant pour le blanc...
Trois de nos voisines liquident 75 cl de vodka, elles manifesteront un réveil difficile...
Notre débarquement à Ourguentch sera compliqué : nous nous heurtons à l'inorganisation des
autorités aéroportuaires, face à deux groupes de français : le nôtre (9 personnes plutôt bien
disposées ), et 42 fonctionnaires des impôts, qui n'avaient pas prévu de se « mettre en rang » selon
l'ordre de leur visa collectif . Bref : une heure et demi d'attente, animée par des appels intempestifs,
des coups de tampon sonores, quelques manifestations de mécontentement, dans un local-bocal qui
surchauffe au fur et à mesure de la montée du soleil. Mais à la sortie, nous attend notre guide,
G'YOS, avec son large sourire et sa maîtrise étonnante du français. Nous découvrirons KHIVA
après une petite heure de route et notre magnifique hôtel, installé dans l'ancienne medersa Khan
Moukhammad Amin, tout proche de Kalta Minor, minaret inachevé du 18ème siècle, recouvert de
carreaux de céramique .
Nous partons sans plus attendre à la découverte de Itchan Kala, la ville musée, à l'intérieur des
murailles, de la cité jadis prospère de l'ancien royaume de Khorezm : le mausolée de Said
Allaoudin, l'un des plus anciens monuments de la ville (14ème S.), sa coupole turquoise, entouré de
tombes en briques ; la mosquée Djouma, dite mosquée du vendredi (18ème s.) avec ses 212
colonnes en bois sculpté, faites d'arbres d'essences différentes, en provenance de divers pays ; le
palais du Khan Tachkhaouli ( 19ème s.), deuxième résidence des Khans de Khiva, dont l'architecte
concepteur fut exécuté pour n'avoir pu s'engager sur le délai de livraison exigé par le Khan... ; le
mausolée de Pakhlavan Mahmoud (14ème-20ème s.) ; l'ensemble d'Islam Khodja (début 20ème s.)
De la tour de gué des anciennes murailles, nous assistons à la magie du coucher du soleil sur la
ville intérieure : les ombres et les lumières, en redessinant les reliefs, mettent en valeur les ocres des
murs et les turquoises des coupoles.
Notre premier dîner ouzbek nous est servi dans la résidence d'été des khans, dans la campagne
voisine . Belle demeure, entourée d'un grand parc, salle à manger à décor de stuc peint.
Quelques données économiques :
Le marché de la voiture d'occasion avec la Russie est florissant : une Mercedès achetée 10 000
dollars est revendue ici 30 000 dollars avec 100% de taxes. Daewoo, fournisseur « privilégié »a
transféré sa technologie : les véhicules de la marque sont produits sur place, seuls leur nom et leur
prix changent. Pour l'achat, la limitation des transactions financières oblige à payer la majeure
partie du prix au marché noir (ce qui ne semble pas être prohibé). Beaucoup de voitures roulent au
gaz, moins cher.
Le Tadjikistan, voisin, relance le projet contesté et ajourné du temps de l'URSS, de la construction
d'un barrage de 350 m de hauteur sur l'Amoudaria. Danger potentiel puisqu'en cas de destruction,
la moitié de l'Ouzbekistan et l'entier Turkmenistan disparaîtraient. Par mesure de rétorsion contre
les protestations ouzbeks, le Tadjikistan a bloqué des trains transportant du gaz ouzbek. La Russie
joue double jeu. L'eau est un enjeu considérable pour l'économie locale : pour la culture du coton
(qui représente 37% de la production agricole) la mer d'Aral a été sacrifiée par un système
d'irrigation défaillant, gaspilleur de la ressource.
La terre, depuis le démantèlement de l'URSS et la fin des kolkozes, appartient à l'état ouzbek, qui
l'a distribuée aux ex kolkoziens, par contrat, pour 50 ans. La bonne utilisation de la terre
conditionne le renouvellement du contrat. Les agriculteurs « contractualisés » font appel à des
ouvriers journaliers.
Le salaire moyen s'élève à 75 000 sums, il peut être complété par des activités « périphériques »
pour monter à 200 000 sums. Ainsi, les enseignants, sous payés par l'état, effectuent des heures
supplémentaires en « libéral ».
45% des actifs travaillent dans l'agriculture, 30% dans les services, 25% dans l'industrie.
Après une nuit dans le calme et la fraîcheur de la medersa, nous prenons la route des forteresses :
Arrêt aux abords d'un champ de coton : des femmes, gantées, désherbent à la serpette ou à la main.
La terre est, par endroits, blanche de sel. Nous nous étonnons devant les petits tracteurs à 3 roues,
plus maniables pour effectuer les demi tours en bout de champ et plus efficaces pour écraser les
mottes.
Traversée de l 'Amoudaria sur un pont-barge, longeant le chantier gigantesque de construction d'un
pont définitif, nous sommes à 13km de la frontière afghane.
Toprak Kala apparaît, château de sable posé sur une colline, forteresse du 2ème au 4ème siècles
après JC, capitale régionale tombée dans l'oubli au 6ème, après moultes attaques des huns, qui
eurent raison de la cité en détruisant les canaux d'irrigation. Nous sommes accueillis sur le site par
des familles ouzbeks en visite touristique et par un groupe d'enfants du village voisin, qui nous font
une démonstration de leur agilité, en courant sur les murets étroits marquant le plan du palais. On
peut repérer les nombreuses salles et les immenses maisons claniques, qui pouvaient héberger une
centaine de membres. …. Nous apercevons de magnifiques oiseaux verts au ventre orange, que
nous pourrons identifier plus tard comme une des nombreuses espèces de guêpiers.
La forteresse Ayaz Kala est plus impressionnante encore : plus ancienne (4ème - 2ème siècles
avant JC) elle se compose de deux citadelles en ruines en plein désert, celle en contre bas servait de
résidence d'été. La citadelle a perdu de son importance à la suite du changement de cours de
l'Amoudaria, mais elle a été occupée jusqu'au 13ème siècle, jusqu'à l'arrivée de Gengis Khan.
La végétation de la steppe attire notre attention, le paysage est grandiose, les couleurs d'ocre sont
barrées du bleu d'un lac salé.
Après le déjeuner dans un campement de yourtes, halte appréciée dans le calme de la steppe , nous
regagnons Khiva . Sur la route, nous croisons un voyage scolaire : 3 minibus encadrés par des
voitures de police.
Nous découvrons Khiva, Dichan Kala, c'est à dire « hors les murs », les « vrais gens » chez eux :
vendeurs de céréales au verre, voyageurs dans un car des années 70 portant encore l'indication de
sa provenance Cahors Brive Souillac !!!, enfants qui jouent au ballon, famille qui « prend le frais »
dans un potager entre deux maisons, un bélier Karakul au piquet dans un recoin....et un groupe de
dames de la vallée du Ferghana, qui nous entraînent dans leurs danses spontanées, accompagnées de
leurs tambourins et de leurs chants traditionnels …Nous terminerons cette journée par une
promenade au clair de lune et nous serons gentiment invités à nous mêler à une fête familiale où une
danseuse professionnelle (?) nous étonnera par sa plastique, son costume et sa performance...
G'yos et notre nouveau chauffeur nous attendent au petit matin, dans le minibus japonais tout neuf :
ce sera notre équipage définitif. La route vers Boukhara traverse le désert Kyzylkoum , elle est en
réfection totale, entièrement « décaissée » et en cours de bétonnage sous la houlette des coréens. Il
va nous falloir 10 heures pour parcourir 450 kms. Nous longerons une réserve naturelle le long de
l'Amoudaria. La halte du déjeuner, à l'ombre de canisses et agrémentée de brochettes, sera très
appréciée.
Les fêtes nationales : le 1er janvier,
le 8 mars : journée de la Femme
le 21 mars : jour de fête de quartier, de village,avec des compétitions
sportives (lutte traditionnelle, bozkatchi, combats de coqs), des concours de cuisine,
le 9 mai : jour de victoire sur le nazisme et de mémoire,
le 31 août : fête des écoles, animée par les élèves, les anciens élèves viennent
en visite, on offre des cadeaux aux maîtres (« le maître est plus grand que le père » dit un proverbe)
le 1er septembre (1991) jour de l'indépendance,
le 1er octobre : jour des enseignants
le 8 décembre (1992) : proclamation de la constitution ouzbek,
et deux fêtes religieuses musulmanes.
L'organisation administrative
La république d'Ouzbekistan se divise en 12 « Willayat » dirigées par le Hakim (chef), nommé par
le président ; chaque Willayat regroupe des « tuman » dont le chef est désigné par le « Hakim »(il
porte d'ailleurs le même nom), eux mêmes divisés en « quartiers » qui élisent leur Aksakal , ce qui
signifie « barbe blanche ». Chaque quartier est équipé d'une école, d'un dispensaire, d'une poste,
d'un comptable public (qui paie les allocations d'aide sociale, d'aide aux handicapés , les retraites),
d'une « maison du bonheur », en fait un service d'état civil. Notons à ce sujet que si les soviétiques
ont encouragé la natalité jusqu'à donner une médaille à la naissance du 10ème enfant, désormais
l'arrivée du 4ème enfant est taxée d'une amende. Le nombre moyen d'enfants est ainsi passé de 5,5
en 1980 à 3,4 en 2009.
Santé Prévention : Au quatrième mois de leur grossesse , les femmes enceintes doivent se faire
enregistrer au dispensaire de leur village, ou auprès de leur médecin, en ville. Elles sont suivies
chaque mois ; en principe, ces consultations sont gratuites mais … La protection vaccinale de la
population est organisée et assurée par le secteur public. La contraception est gratuite. Les
hôpitaux gérés par l'Etat sont concurrencés par des établissements privés, apparemment mieux
organisés, mais réservés aux classes moyennes. Il existe un secteur pharmaceutique privé lucratif,
l'auto médication est largement pratiquée, sauf pour ce qui concerne les troubles liés à la maladie
mentale pour lesquels une ordonnance est nécessaire.
65% de la population a moins de 18 ans. 7% de retraités. La durée moyenne de vie des hommes est
de 54 ans, celle des femmes de 60 ans, elle est en régression depuis les années 90...
La toxicomanie est moins répandue qu'en Russie. Antérieurement, la culture du pavot (pour le miel
de capsules) était autorisée et limitée à 5 plants par famille. Elle est désormais interdite et réservée
à la production pharmaceutique.
Les personnes âgées, handicapées sont prises en charge depuis 1924 par l'Etat, en complément
ou en substitution des familles, à un niveau qualifié de correct par notre guide. Les orphelinats,
même bien gérés, restent « difficiles », toujours selon G'yos.
Education : La scolarisation des enfants est obligatoire de 7 à 18 ans ; à 14 ans l'enfant est orienté
vers la filière professionnelle ou l'enseignement général. L'école est mixte et gratuite. L'admission à
l'université est soumise à un examen : 5000 candidats pour 500 places. Les 100 premiers
bénéficient d'une bourse, dont le versement et le montant seront fonction des notes mensuelles. (250
000 sums/an pour la meilleure note)
En 1994, un programme national a permis le développement des collèges et lycées, l'amélioration
des équipements . D'ailleurs, notre attention est souvent attirée, en pleine campagne, par de jolis
bâtiments pimpants, de 3 à 4 étages, entourés d'un jardin clôturé : notre guide nous précise que ce
sont les collèges.
Niveau de vie: les gens peuvent parfois regretter « l'ère soviétique », car aujourd'hui le marché est
libre et prospère, mais tous n' y ont pas un accès égal. Les denrées alimentaires restent accessibles,
les produits manufacturés sont chers, relativement. Un téléphone portable coûte 80 000 sums , de
200 à 300 000 sums pour les plus performants. Un I-Pod vaut 1 million de sums, les chinois en
proposent à 150 000 sums dont la durée de vie est... courte.
Croyance -religion : l'islam s'est adapté aux religions et croyances antérieurement installées et
s'est progressivement syncrétisée aux valeurs traditionnelles véhiculées par les récits, les histoires
souvent liées au commerce- autres légendes et contes des 1000 et une nuits !!!
Nous arrivons à Boukhara en fin d'après midi : la place centrale, piétonne, est très animée par les
touristes autochtones, familles et groupes de dames en promenade. Nous découvrons, à deux pas de
ce bel endroit, notre hôtel, installé dans des demeures ayant appartenu à des juifs, reliées par des
cours intérieures où poussent bougainvillées et rosiers. Hôtel de charme, décoration intérieure
élégante, discrète et chaleureuse, en bois et stuc blanc.
Nous dînons chez un artiste local qui expose ses tableaux régulièrement en France. Le restaurant
est installé en terrasse de toit, la nuit est douce.
G'yos évoque sa seconde vie professionnelle : il est agriculteur, en famille, dans la région de
Samarkande. Avec son père et ses 2 frères, il exploite 70 ares qui produisent 15 tonnes de pommes
de terre en 2 récoltes annuelles. Ils élèvent 4 vaches pour le lait et le beurre, qu'ils barattent dans 2
machines à laver de l'époque soviétique (sic). Nous n'avons pas bien compris le processus de
fabrication, mais nous retenons que les femmes lavent encore le linge à la main …
Mardi matin, nous partons à pied à la découverte du centre historique, classé patrimoine mondial
de l'humanité par l'UNESCO. Les coupoles des changeurs juifs et des bijoutiers (où l'on peut
acheter des tapis fabriqués en Chine par les ouïgours) datent toutes deux du 16ème siècle, elles
constituent désormais des lieux de passage entre l' ancienne cité et la ville moderne, agréables rues
couvertes en croisement. Près des ruines d'un caravansérail et d'un hammam, la mosquée Magoki
Attari, du 11ème siècle, excavée d'une dizaine de mètres lors des travaux de restauration de la ville,
bâtie sur un temple zoroastrien au 8ème s. avant JC, nous étonne par ses demies colonnes torsadées
et sa décoration de briques.
Le style « classique » de Boukhara se dévoile avec le « koch », ensemble de deux medersas se
faisant face : la medersa d'Oulougbek (1417) et la medersa du khan Abdoulaziz, avec sa salle de
prière très décorée.
Nous aurons la chance d'admirer l 'ensemble Poï Kalon, des 12ème et 15ème s., sous deux
lumières différentes. Nous resterons longtemps au pied du plus haut minaret d'Ouzbekistan, 48m.,
érigé au 12ème s. Il était auparavant en bois, détruit lors d'un tremblement de terre, il fut reconstruit
en briques et épargné par Gengis Khan lors de la conquête de la ville. Il était à la fois tour de guet et
d'observation, phare, lieu d'appel à la prière et d 'exécution des condamnés à mort. G'yos nous
précise que pour la fabrication des briques on utilisait du jaune d'oeuf, du lait de chamelle, du sang
de taureau et du poil de chameau. A gauche du minaret, la medersa de Miri Arab qui accueille à ce
jour 120 étudiants et qui emploie plusieurs professeures En face, la mosquée Kalon, de style
iranien, elle pouvait accueillir 12000 fidèles. Aujourd'hui, hors des grandes fêtes musulmanes, seule
une partie est utilisée. La grande cour intérieure, rectangulaire, est entourée d'une galerie ; des
hommes âgés prient assis sur des marches, d'autres vont et viennent autour du puits et du mémorial
octogonal construit au 20ème s. La grande salle de prières compte 288 colonnes qui soutiennent 208
coupoles : l'acoustique est, paraît il, excellente.
Près d'une jolie placette ombragée, nous découvrons Tchor minor, édifice construit au 18ème s.
par un riche marchand ; les quatre minarets, tous différents, représenteraient ses 4 filles (moches
selon la légende). G'yos nous explique le fonctionnement astucieux des heurtoirs de la porte d'entrée
et les codes en vigueur pour annoncer sa visite selon qu'on est un homme, une femme et en fonction
de la présence ou non du maître de maison …
Après le déjeuner dans une maison d'hôtes où toute la famille est mobilisée pour nous servir, notre
guide nous conduits à travers un beau parc, fleuri et très fréquenté. En chemin, nous faisons une
belle rencontre : une gamine de 10 ans, qui tient l'échoppe de sa mère pendant son absence, nous
interpelle en français et se débrouille pas mal du tout. Elle dit avoir appris notre langue avec les
touristes. Nous promettons à Taxmina de lui envoyer les photos que nous avons prises avec elle.
Construit par Ismail Samani pour son père Akhmad, le mausolée des Samanides (9ème s.) est le
tombeau dynastique musulman le plus ancien d'Asie Centrale. Le décor de briques est symbolique,
on peut distinguer le lotus de Boudha, les colonnes torsadées zoroastriennes, le triangle de la
fertilité, les ronds solaires … Les acharnés de photos insolites rivalisent de souplesse pour capter
sur image la coupole semi sphérique et les angles coupés ..
Un peu plus loin, le mausolée de Tchachma Ayoub (la source de Job) date des 14 et 15 èmes s., il
dresse une curieuse coupole conique, œuvre d'artisans du Khorezm ( que Tamerlan sut mobiliser
pour mettre à profit leurs talents) ; la source est réputée pour ses vertus curatives. A l'intérieur, le
tombeau est surmonté d'un mât auquel sont attachés des crins de chevaux, symbole mongol. Une
exposition photographique présente les différentes méthodes de captage et de distribution de l'eau à
Boukhara, depuis le 19ème .
Nous traversons le marché couvert de Boukhara où producteurs et revendeurs proposent épices,
pain, légumes, fruits frais et secs. Nous sommes raisonnables et renonçons aux fraises, pourtant bien
tentantes. Devant la mosquée Bolo Khaouz, nous sommes accueillis à une terrasse de café par un
groupe de dames de la vallée du Ferghana Elles se connaissent depuis l'école, se sont mariées à 17
ans, ont élevé leurs enfants et maintenant... organisées en association, elles voyagent ensemble, les
maris gardant la maison !! On prend des photos, on se serre dans les bras, elles rient .
La mosquée Bolo Khaouz, dite du vendredi, est précédée d'un iwan de 12 m de haut, soutenu par
40 piliers de bois. Le plafond en bois, travaillé en nids d'abeille, est peint. G'yos nous explique que
les minarets étaient relativement bas afin que les muezzins ne puissent voir les femmes dans les
harems. Dans l'unique minaret haut de chaque ville était affecté un muezzin aveugle !!!
Sur une colline artificielle, maintenue par des murs de soutènement, s'élève la citadelle de
Boukhara. Résidence fortifiée des émirs, elle date du 5ème s. Sur 9ha, elle abritait 3000 habitants.
Le portail actuel date du 18ème s.. La citadelle fut détruite à 80% en 1920, mais on peut encore y
voir la mosquée du 9ème s., la salle du trône et une partie des habitations de la famille du Khan.
En fin de journée, le spectacle de danses traditionnelles (costumes et musiques de toutes les régions
d'Ouzbekistan) et le défilé de mode, bien que concoctés pour les touristes, ne manquent cependant
pas de tenue, servis par le magnifique cadre de la medersa Nadir Dvan Beghi. Nous dînons ensuite
dans une … pizzeria ouzbek (si, si, et c'était plutôt bon quoique un peu rapide, le service!!!)
Notre dernière journée à Boukhara commence par la visite du complexe mémorial de Nackbandi .
La partie ancienne date du 18ème s.; restauré en 2003, l'ensemble est grandiose. Siège d'une
confrérie souffie, c'est un lieu de pélerinage très fréquenté, organisé autour de massifs de fleurs et
de bassins, qui contribuent à le rendre paisible. On dit qu'il est équivalent à La Mecque pour les
ouzbeks.
Le cimetière attenant rassemble des mausolées des dynasties chibanites, des 16 et 18 èmes s. Les
tombeaux sont posés sur des socles de bois et construits en briques.
Le mot « derviche », d'origine perse, signifie « ceux qui frappent à la porte », c'est le nom donné
aux messagers et aux mendiants. On a pu dénombrer une trentaine de confréries : leur refus du
mariage, leur prosélytisme, leur pratique de la mendicité, ont été parfois pour eux, sources de
problèmes .. .
Sitora-i-mokhi khossa, Palais de la lune et des étoiles, ou la résidence d'été des émirs de
Boukhara, a été construite au 19ème dans un endroit choisi en fonction de la conservation de la
viande. Méthode empirique pour s'assurer de la relative fraîcheur du lieu. Décoration de stuc,
miroirs et bois ouvragé des salles de réception (blanche), de banquets (rouge), du salon de jeux.
Une grande véranda (dite salon de thé) rassemble une très belle collection de vases chinois et
japonais.
Le bâtiment des invités est transformé en musée des costumes : les connaisseurs-euses- ont pu
admirer les soieries et autres beaux tissus . Au milieu de la roseraie, le harem abrite désormais le
musée des broderies, il se reflète joliment dans un bassin -réservoir .
Un vieux monsieur (médecin ? Chamane ?) soigne, par imposition des mains, deux enfants
souffrant d'angine. Les parents nous expliquent, en anglais, qu'ils viennent de loin pour bénéficier
du savoir de cet homme ...
Nous déjeunons chez une famille boukhariote, où nous assistons, dans la cour, à la préparation du
riz plov, plat traditionnel d'Asie Centrale. Nous sommes installés dans la pièce à vivre de l'ancienne
maison juive : décor de stuc et de belle vaisselle, collection de postes de radio à galène.
La découverte de Boukhara se termine par la visite de la demeure de Faïzoulla Khodjaïev,
transformée en maison-musée . Elle date de la fin du 19ème. Protégée par un bel iwan peint, elle se
compose de trois parties: celle consacrée au travail de ce marchand prospère, celle des hommes, et
le harem. Faïzoulla Khodjaïev fut le chef de l'Ouzbekistan, sous l'ère soviétique. Son projet de
créerun pays autonome, allant de la Turquie à la Chine, déplut fortement à Staline. Arrêté en 1937
avec 60 000 autres « révolutionnaires » (enseignants, journalistes, intellectuels... partageant son
idéal d'indépendance) il mourut en déportation. Il fut réhabilité en 1956. Sa fille revint en
Ouzbekistan en 1946, avec son mari allemand. Elle est décédée en 1986, sans descendance . Le
musée rassemble meubles, tapis,vaisselle, objets usuels et de décoration de la fin du 19 ème, début
20ème siècles.
Nous sommes invités à essayer les vêtements en soie et même la fine mais lourde « grille » en crin
de cheval, destinée à cacher le visage de la femme mariée, lors des sorties en public. La présentation
du berceau et surtout des « pipettes » en bois, sensées s'adapter à la morphologie des bébés pour
recueillir l'urine pendant leur sommeil, toujours utilisées à ce jour, nous laisse perplexes . De même,
la façon d'« emmailloter» le nourrisson et de l'attacher dans son berceau nous semblent par trop
contraignante(!!). G'yos nous confirme que cette tradition perdure, sauf si l'enfant proteste trop
fortement....
Lors de notre dernier dîner à Boukhara, nous assistons à un concert de musique « classique », dans
le très beau cadre de la medersa Modarikhan. Nous aurions aimé que les musiciennes soient plus
souriantes, mais G'yos nous explique que ce sont des russes, elles ne peuvent donc pas sourire, car
ce serait faire preuve de « faiblesse »...
Contrôles de vitesse Curiosité ouzbek: les policiers peuvent louer des radars (japonais), afin de
contrôler la vitesse des véhicules . Il y a forte concurrence chez le loueur car le produit des
amendes est reversé à hauteur de 30% à l'Etat, le reste est partagé entre le chef et ses
collaborateurs.
1% des recettes provenant des ventes de carburants est destiné à la réfection des
routes.
Beaucoup de véhicules roulent au gaz, 4 fois moins cher que l'essence.
Mariage : L'homosexualité est punie d'amendes. Le concubinage n'est pas toléré, tradition oblige.
Le mariage est autorisé après 18 ans révolus, mais des messages publicitaires télévisuels incitent
les jeunes à se marier plus tard (22 /25 ans). Les mariages forcés sont en voie de disparition. Alors,
mariages d'amour ? Certes, mais aussi mariages « arrangés », compte tenu de l'importance de
l'autorisation parentale traditionnelle.
Ainsi, les parents du jeune homme mandatent des « médiateurs » pour entrer en contact avec la
famille de la jeune fille, ils « démarchent » les parents selon un protocole bien établi; la réponse
n'est pas immédiate, elle ne sera définitive qu'après la troisième visite. Elle sera prononcée en
présence de l'oncle maternel et du chef de quartier. On rompt le pain ensemble et on organise un
repas de fiançailles, avec les produits de base envoyés par le jeune homme. Le mariage sera
célébré au minimum 27 jours plus tard. Les garçons viennent chercher la jeune fille chez elle dans
un cortège de voitures louées et décorées. Le repas de mariage rassemble les familles et le quartier,
il comporte 9 plats. L'imam procède au mariage religieux , en la seule présence des mariés et de
leurs témoins. Le mariage civil se fait devant notaire, en présence du groupe des filles et des
garçons qui accompagnent les mariés. La famille du jeune homme prépare le banquet, le père de la
fille envoie tapis, meubles rideaux, suzanis, pour préparer la chambre des mariés, 40 robes (ou du
tissu). La fête bat son plein. La mariée « paradera » ensuite pendant les 40 prochains jours, dans de
beaux atours.
En cas de divorce, la loi civile s'impose à la loi islamique: chacun reprend ses biens.
Le mariage de G'yos : ses parents s'inquiétant, pour leurs vieux jours, de son célibat prolongé
(24 ans, et non marié!!), ont mobilisé famille et relations pour lui trouver une épouse. Trois
dossiers de jeunes filles à marier lui ont été remis (genre CV pour mariage !!!) Il a rencontré la
première, dans un lieu public, bien sur, mais sans résultat... il n'a pas rencontré la troisième car
au second rendez vous, ce fut le coup de foudre réciproque ... d'aucuns parmi nous envisagent de
recourir à cette stratégie pour caser leur Tanguy, pas sûr que ça marche ...
Le traitement des déchets demeure une préoccupation , même si des progrès sont notés:le
ramassage de l'aluminium est rémunéré, on commence à recycler le plastique. Lors de leur
séminaire annuel avec l'administration et les représentants de la police, les guides font état
régulièrement de ces problèmes.
Le bozkatchi : sport « national », interdit par les soviétiques mais toujours pratiqué . Les cavaliers
se disputent par équipe la dépouille d'un bélier remplie de foin. Les tournois sont organisés pour les
mariages, circoncisions , l'hiver ... assez dangereux. Les cavaliers sont rémunérés par les
propriétaires des chevaux. Les chevaux vainqueurs rapportent un cadeau à leur propriétaire et une
prime à leur cavalier. L'apprentissage du cheval nécessite plusieurs mois d'entraînement.
Exercice oral de français pour collégien ouzbek : la pie niche haut
l'oie niche bas
le hibou ni haut ni bas
En route vers la steppe, ce jeudi matin, nous nous arrêtons dans un atelier de céramique à
Guijdouvan, entreprise familiale reconnue et renommée (aux murs, les photos de célèbres visiteurs
en témoignent), beaucoup de touristes... Notre regard est attiré par un beau vieillard, qui arbore un
nombre impressionnant de décorations. Nous apprenons qu'il s'est battu à Berlin en 1945, puis au
Japon et en Corée ... Il a 91 ans
Nous entrons dans la région de Navoiy, appelée le « désert vert » qui était auparavant une steppe.
Exploitée depuis 1956 pour ses richesses en cuivre, zinc, or, marbre et gaz, elle est devenue une
grande région riche, industrielle et agricole (élevage du mouton karakul). L'aéroport de Navoiy est
une zone franche, exploitée par les coréens. Les relations avec la Corée remontent au 7ème siècle,
avec le commerce de la soie. Les échanges se sont intensifiés au cours du 20 ème siècle autour de
l'uranium, de la production du gaz et de l'électricité.
Plusieurs haltes au programme. D'abord pour visiter les ruines d'un caravansérail du 11ème s. et un
puits construit en voûte du 14ème ; plus loin, les pétroglyphes rupestres de Sarmich, du second
millénaire avant JC. Du haut de ces rochers de schiste noir, la vue sur la steppe est impressionnante.
Enfin, Nourata, belle oasis, dominée par le fort d'Alexandre le Grand (329 avant JC): les vestiges
non protégés des murailles nous paraissent bien fragiles sous les assauts des touristes et le vent de la
steppe. A ses pieds, Tchachma, la source miraculeuse, déjà vénérée à l'époque sogdienne, dont le
bassin abrite une population importante de poissons sacrés. Dans un joli cadre de verdure et de
fleurs, le site de pèlerinage comprend deux mosquées des 15 et 16 èmes, l'ensemble est bien
restauré.
Nous déjeunons chez l'habitant, sous une gloriette ombragée, avant d'aborder la dernière étape de la
journée jusqu'au campement des yourtes, à travers un paysage vert et ocre. Avant le dîner, nous
avons le temps de nous hasarder dans ce « désert » habité: troupeaux de moutons karakul, quelques
vaches mais aussi une faune sauvage : chiens de prairie, adorables familles de gerboises, lièvres,
lézards et même un varan doré dans le soleil rasant, trop rapide pour le photographe. La veillée
auprès du feu de camp est agrémentée par les chanteurs kazakhs, venus en voisins , qui
s'accompagnent à la doumbra, sorte de mandoline. G'yos traduit le thème de ces chansons
populaires traditionnelles de la terre...
Après la nuit sous la yourte et une toilette de chat (le camp est équipé de sanitaires, mais l'eau ici
doit être parcimonieusement utilisée), nous sommes prêts pour une méharée à travers les dunes.
G'yos n'a pas résisté à l'invitation de Liliane de prendre sa place et il nous accompagne fièrement ,
en caracolant à côté de nous. Nos montures à deux bosses sont bien plus confortables que leurs
cousins à une seule bosse et ils ont fière allure sous leur tonsure estivale ...Nous pique - niquons au
bord du lac Aidarkoul, étendue d'eau douce en plein désert, qui s'agrandit, peut être pour essayer de
compenser la perte de la mer d'Aral? Quelques courageux tentent la baignade et seront ravis de
cette expérience. D'autres se promèneront dans les dunes, à la découverte d'une flore particulière.
La route vers Samarcand suit des vallées fertiles, plantées de pois chiches, d 'abricotiers, de blé...de
vignes curieusement inclinées car on les recouvre de terre l'hiver, pour éviter le gel . Des vaches
attachées paissent le long des routes, certaines sont lavées et brossées dans les ruisseaux canalisés.
Nous apercevons au loin les montagnes du Pamir, au Tadjikistan. (7000m.)
Samarcand, ville riche, produit des cars de transport Suzuki, des camions, des engrais chimiques,
des ascenseurs ... elle va aussi nous révéler ses trois célébrités: ses monuments, son pain et .... ses
rues défoncées.
En effet, après un savant slalom entre les trous impressionnants de la chaussée : notre hôtel,
confortable et entièrement restauré - le bois verni des huisseries et des plafonds lui donne beaucoup
de charme - se situe dans un quartier périphérique la ville. Environnement verdoyant, presque
champêtre : on aperçoit des moutons traversant en hâte la rue et des vaches encordées qui broutent
l'herbe des bas côtés.
Avant toute chose, ce samedi matin, G'yos fait procéder à la réparation des lunettes de notre
« cheffe »: il faut dire que, depuis le début du voyage, Liliane se protège le nez avec des
pansements, kleenex et autre textile...et elle a supporté ça sans (trop) se plaindre. Quelle abnégation
!!!
Chakhi Zinda nécropole des 11-12 ème et jusqu'au 20ème S., provoque l'émotion esthétique
annoncée.
Nous sommes au pied de la colline d'Afrosyab, la forteresse fondée par les perses au 7ème s. avant
JC, prise par Alexandre le Grand au 4ème avant JC, baptisée Maracanda par les grecs. Site originel
de la ville, probablement habité depuis plus de 20 000 ans, elle fut la capitale de la Sogdiane. Cité
prospère et multi-culturelle, dans une oasis riche, Samarcand sera prise d'assaut par les conquérants
arabes au 7ème s., elle devient musulmane tout en bénéficiant de l'âge d'or des Samanides. En 1220,
Gengis Khan s'empare de la citadelle d'Afrosyab en détruisant les canaux d'irrigation. Il faudra un
siècle pour que la prospérité revienne, mais l'épidémie de peste la frappe alors (1347)
Tamerlan entre en scène (1360) et fait de Samarcand une ville quasi mythique, carrefour obligé du
commerce entre l'est et l'ouest, de la Chine à la Méditerranée et du nord au sud, entre l'ancienne
Bactriane et l'Inde. Tamerlan veut aussi faire de Samarcand la plus belle ville du monde musulman
et fait procéder à la construction des plus majestueux édifices de l'Asie Centrale. Ainsi naîtra l'une
des plus riches civilisations du Moyen Age, héritière de cultures a priori très éloignées : mongole,
turque, persane, indienne et chinoise.
La montée vers Chakhi Zinda est assez rude mais quelle récompense !!! . La vingtaine de
mausolées révèle les plus belles mosaïques de céramique samarcandaises, de facture différente(terra
cotta, majoliques ...) . Les coupoles bleu turquoise se détachent sur l'azur du ciel, un enchantement.
Les deux plus beaux, à nos yeux, sont ceux de la nièce préférée et de la soeur de Tamerlan., qui
présentent à l'intérieur de belles harmonies de blanc, bleu et or. Au bout de la rue, nous découvrons
le cimetière « moderne », ombragé ; certaines tombes arborent de grands portraits des défunts,
gravés sur pierre.
La visite d'une fabrique de tapis de soie suscite bien des tentations. Nous resterons cependant
raisonnables dans nos achats, les merveilles qu'on nous présente alourdiraient fortement le budget
du voyage. L'entreprise est privée et emploie 450 salariées, beaucoup travaillent à domicile. Les
salaires de base sont payés par l'Etat, l'entreprise verse un complément en fonction de la production.
Certaine d'entre nous s'essaie au tissage ...
Le menu du jour diffère des précédents, puisque, dans ce restaurant fréquenté par la classe
« moyenne haute » ouzbek, nous aurons des « coustillous » grillés (l'islam d'Ouzbekistan n'interdit
pas le porc!!) et du gâteau aux noix...
La place du Sable ou le Reghistan, vaste espace carré dont trois côtés sont délimités par une
medersa, dégage un charme quasi magique, par l'élégance des proportions, l'éclat des céramiques et
majoliques ...
Sur le côté gauche de la place, la medersa d'Ulug Beg , achevée en 1420 est la plus ancienne et la
plus sobre des trois. Avec ses 4 minarets d'angle, sa cour intérieure en camaïeu de bleu et ses deux
étages de cellules d'étudiants, elle fut le plus grand établissement d'enseignement supérieur. Après la
mort d'Ulug Beg, elle perd de son prestige. Restaurée en 1994, elle fête le 600 ème anniversaire du
début de sa construction.
Des jeunes mariés se promènent avec leurs invités. Pour nous saluer, la jeune femme abaisse son
voile devant son visage, s'incline trois fois et redécouvre son visage. Applaudissements.
En face, la medersa Chir Dor, construite en 1636, surprend par la représentation fort peu
islamique et originale, sur son tympan, de deux tigres dorés, poursuivant une gazelle sous un soleil
souriant (symbole zoroastrien). La figuration humaine et animale a été admise par les chiites au 17
ème s. et limitée à cette seule période. Remarquables également, les coupoles cannelées en carreaux
de majolique.
La medersa Tillya Kori du 17 ème, ou « mosquée d'or », a nécessité 7kg d'or pour sa restauration
: la coupole du plafond est en fait une décoration en trompe l'oeil. Dans les galeries latérales, sont
présentées des photographies de Samarcand, avant les restaurations entreprises par les soviétiques,
dès Lénine.
Il fait très chaud et G'yos a pitié de nous, il nous entraîne dans un bistrot aux abords du site, installé
dans un ancien caravanserail : où l'eau fraîche, gazeuse ou non et la bière nous requinquent .. Nous
revenons à la medersa Ulug Beg, dont les cellules d'étudiants de la cour intérieure ont laissé place
aux échoppes d'artisans. Un musicien- luthier nous présente divers instruments traditionnels, à
cordes comme la doumbra à 2 cordes, le thor à 9 cordes en mûrier, nacre et péricarde de boeuf ; à
bouche comme la flûte ou la guimbarde .
Avec sa superbe coupole bleu turquoise à nervures cannelées, le mausolée Gour Emir, du 15ème,
abrite les tombeaux de Tamerlan et de ses descendants. Auparavant, s'élevaient de part et d'autre du
mausolée une medersa et l 'Anaka, qui hébergeait les derviches. Nous retrouvons à l'intérieur le
symbole mongol du mât de bois auquel sont attachés de longs crins de cheval, divers objets
provenant du site du palais d'été (dont une stèle du trône de Gengis Khan rapportée de Russie) et les
cénotaphes, dont un bloc de jade bleu foncé, rapporté de Mongolie par Ulug Beg en 1425. Le
pavement du sol est en onyx. Une légende récente sur Tamerlan veut que lorsque sa dépouille fut
exhumée du sarcophage de la crypte pour être analysée, en 1941, la guerre germano-soviétique
éclata. Lorsqu'il fut remis dans sa tombe, en 1942, la bataille de Stalingrad s'est achevée. ..
Nous reviendrons, à la nuit tombée pour apprécier autrement l'architecture d' ombres et de
lumières, l'atmosphère toute particulière de ce lieu, où on se donne rendez vous, pour bavarder, se
recueillir ...
Mais auparavant, ce soir, nous dînons en ville dans un restaurant plutôt chic et bourgeois. A une
table voisine, une équipe d'universitaires fête des « thésardes ». Après les nombreux toasts, les
récipiendaires ont du mal à conserver leur dignité ...Sur la suggestion de G'yos, nous portons un
toast à la pleine réussite de notre voyage, avec... nos tasses de thé !!! ça interpelle l'assistance
davantage que le comportement bruyant de nos voisines !!!
Nous commençons cette dernière journée à Samarcand par la visite de l'observatoire restauré
d'Ulug Beg, qui permet d'imaginer l'immense astrolabe construit par le roi-savant. Le musée sur la
place nous en dit davantage sur l'état comparé des connaissances à cette même époque. Le musée
consacré à la fondation de la ville rapporte l'histoire tourmentée et souvent violente de l'ancienne
Afrosyab. Lors de travaux routiers, en 1975, des peintures murales furent découvertes, elles ont été
réinstallées dans une salle. Datant du 7ème s. elles témoignent de la richesse multi-culturelle de la
ville. Le mur-est représente une pricesse chinoise en bateau, escortée de cavaliers; le mur -ouest
nous montre le roi sogdien, conduit en procession au mausolée situé au sud, vers le paradis...au
centre, nous sommes dans la salle de réception du roi avec des personnages visiblement turcs, mais
aussi coréens : le roi reçoit des ambassadeurs.
La mosquée Bibi Khanym porte le nom d'une épouse de Tamerlan, grande dame qui administrait
le pays quand son mari était en campagne. Elle fut construite avec l'aide d'éléphants indiens et
pouvait accueillir 15 000 fidèles. Les minarets culminaient autrefois à 50 m. et une grande galerie
couverte agrémentait la cour intérieure. La restauration a nécessité plusieurs décennies de travaux.
Dans la cour, un immense lutrin en marbre : on dit que le coran qui y était posé, pouvait être lu du
haut du minaret...
Le marché qui jouxte la mosquée est coloré, bien achalandé; dans la foule « bon enfant » nous ne
passons pas inaperçus, mais les regards sont bienveillants et amusés. Chapeaux, traditionnels, fruits
secs, pain de Samarcand (qui se conserve plusieurs mois dans la steppe) T shirts turcs : les touristes
rassemblent des souvenirs.
Après un déjeuner correct et sans surprise à l'Hôtel Orient Star, (propriété de l'agence qui emploie
G'yos) et une promenade dans les allées très ombragées pour les uns, une course effrénée dans les
échoppes pour les autres, nous nous retrouvons pour une pause fraîcheur dans la verdure. L'endroit
est fréquenté par les « gens d'ici », les enfants aiment autant le coca et les glaces que partout
ailleurs!!!
En cette fin d'après midi, dans un atelier de couture, ambiance « cosy »pour un défilé de mode : les
hommes s'intéressent davantage à la plastique et au charme multi-ethnique des mannequins qu'aux
tissus, mais ils apprécient aussi l'originalité des créations, la superposition des formes et des
matières, le mélange du folklorique et de l'actuel. Belle collection : quelques dames vont se laisser
tenter par des vêtements confortables mais chics, qui sortent, pour le moins, de l'ordinaire .
Notre dîner est prévu chez la veuve d'un collègue de G'yos, disparu prématurément . Nous sommes
reçus par cette dame (médecin) et ses trois filles, dans un très beau salon blanc. Nous apprécions les
raviolis à la viande faits « maison », l'ambiance simple et chaleureuse. La fille aînée apprend le
français pour être guide, comme son père ...
Avant de quitter Samarcand, petit détour par la gare, belle bâtisse moderne et fonctionnelle. On ne
comprend pas très bien pourquoi il est interdit de photographier ...
En route, notre chauffeur sera arrêté pour excès de vitesse et devra acquitter une amende . Comme
c'est la seconde infraction en moins d'une année, le cumul est élevé. Nous atténuerons la sanction,
ce qui nous vaudra des paroles très aimables lors des prochains adieux...
Traversée de la ville de Djizzak, ville universitaire de 150 000 habitants, tatars, ouzbeks et coréens.
De grandes avenues sont bordées d'imposants immeubles: préfecture, collège-lycée, poste.
Nous abordons ce qui fut dénommé la « steppe de la faim »: dans cette vallée du Sir Daria, les
120 000 kms de canaux d'irrigation construits par les soviétiques ont façonné une nouvelle région,
productrice de coton, melons, pastèques. L'arrêt technique était indispensable, mais le vent de la
steppe (+ de 40°) nous a « desséchés ».
Le Kazakhstan est en vue, à moins de 2 kms, et voici Tachkent, la plus grande ville d'Asie
Centrale, qui compte plus de 3 millions d'habitants. Tachkent, qui signifie « citadelle de pierre » , se
situe à l'est du pays, à quelques kms de la frontière kazakh. Elle est la seule ville d'Asie Centrale
dotée d'un métro, inauguré en 1977. Pendant la seconde guerre mondiale, la ville a accueilli
plusieurs centaines de milliers de familles soviétiques, fuyant l'invasion hitlérienne, beaucoup
d'orphelins de guerre , ce qui accentuera sa « russification ». Une partie des industries lourdes de la
partie européenne de l'URSS a été évacuée à Tachkent. Elles resteront sur place à la fin des
hostilités.
Depuis les années 2000, le président Karimov a initié un programme de reconstruction urbaine
pour donner à la ville un aspect plus fonctionnel et moins soviétique, en alliant architecture
islamique, classicisme monumental et modernisme. Les bâtiments des organes du pouvoir
concentrent bien des efforts en ce sens. Le tour panoramique que nous effectuons en arrivant nous
donne un aperçu de cette grande ville, verdoyante et aérée : la place de l'indépendance et les
bâtiments officiels, sans oublier le joli palais du prince Ramov (cousin du Tsar banni à Tachkent à la
fin du 19ème s.), le square Amir Timour (Tamerlan), le théâtre d'opéra et de ballet Navoï. Notre
hôtel se situe en face d'un petit théâtre élégant, de facture plus classique,.
La visite du musée des arts appliqués, installé dans une jolie résidence de style centre asiatique,
nous permet de « réviser » nos connaissances sur toutes les formes d'artisanat rencontrées pendant
le voyage : collection de céramiques, de bois travaillé, de textiles brodés, de tapis, et de travail des
métaux.
Sur la place de l'indépendance, où avant le dîner, nous nous risquons à revenir à pied, les jeunes
promeneurs ouzbeks batifolent dans le grand bassin et s'éclaboussent joyeusement. La menace d'une
tempête de sable nous fait bien vite regagner l'abri du grand magasin Tsum, certains en profitent
pour compléter leurs emplettes.
Bien sur, nous ne dérogeons pas à la tradition : nous avons droit, au moment du dernier apéro
vespéral et en présence de G'yos, à notre bêtisier du voyage. Le discours est bien tourné,
impertinent mais très pertinent. Chacun en prend, avec amitié et gentillesse, pour « son grade »
Nous « décodons », si besoin, pour G'yos ...il n'est pas épargné mais il rit beaucoup...
Nous avons opté pour un repas d' au revoir chez l'habitant. Le guide et le chauffeur partagent notre
table. Nous remarquons que les hommes de cette maison assurent la cuisine et le service.
Les dernières heures de notre séjour sont dédiées au centre religieux Khazrat Imam, qui
comprend les madrasas de Barak Khan et Koukeldach, et une mosquée dont la construction débuta
au 10ème s. Cette dernière présente une belle collection de corans, dont celui du calife Uthman, le
plus ancien du monde, en peau de gazelle. Ce livre a été conservé dans les trésors des califes
d'Arabie ( à Medine, Damas, Bagdad). Tamerlan le rapporta au retour de sa conquête de la
Mésopotamie. La Russie tsariste s'appropria l'ouvrage jusqu'à la révolution de 1917. Il fut alors
transporté dans la ville Oufa puis à Tachkent, par les musulmans.
Dans la même enceinte, se trouve également le mausolée d' Abou Kaffal Chachi, bâti en 1541 au
dessus de la tombe de l'un des premiers prophètes islamiques locaux.
Ces édifices du 16ème s. sont fort bien restaurés.
Après un repas rapide à l'hôtel, direction l'aéroport : les formalités pour le retour sont moins
problématiques qu'à l'arrivée. G'yos doit nous « abandonner » très vite et nous continuons les
contrôles seuls mais sans problème particulier ...attente juste un peu trop longue, dans un confort
tout relatif, la climatisation est défaillante et l'aérogare surchargée ...
L'arrivée tardive à Roissy ne permet pas aux toulousains d'attraper le dernier vol pour la ville rose.
Alors que les parisiens regagnent leur logis sans difficultés, commence pour les provinciaux,
trainant leur valise et leur fatigue, une longue errance à la recherche d'indications pour trouver leur
hôtel. D'escalator en ascenseur, de bus en val, de coups de fil en SMS, c'est une véritable épreuve
d'endurance et d'orientation. Car dans lequel des 3 Ibis la « cheffe » a- t elle réservé? Nous finirons
par trouver et jamais lits d'Ibis ne furent autant appréciés...
Ce fut un voyage exceptionnel par la découverte d'une civilisation complexe et lointaine, bien peu
évoquée dans nos manuels scolaires, la beauté époustouflante des sites visités, leur intérêt
architectural et historique, les surprenants paysages de steppe ; par l'appréhension d'une société
« post-soviétique », population à 90% musulmane, ouverte sur l' « autre», colorée, chaleureuse, des
femmes visibles et gaies … bref, « nous avons même rencontré des musulmans heureux »,
« pauvres, disent ils d'eux mêmes, mais propres et pas misérables ».

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